Etude de la qualité du jus d’ananas béninois dans le contexte de marché régional : cas des pays de l’hinterland (Burkina Faso, Niger) et de Nigeria, et Sénégal
La présente étude initiée par le programme ABC (Agro Business Center) a été menée par le bureau d’étude COSINUS
Auteur :
COSINUS, Bureau d’Etudes, de Recherches et de Conseils
Introduction
L’ananas, de son nom scientifique Ananas comosus, est une plante herbacée pérenne de la famille des broméliacées, introduite au Bénin vers le 17ième siècle. Depuis les années 1990, la culture de l’ananas s’est imposée comme un créneau porteur et a fait l’objet d’un projet de promotion et de développement de la filière initié par le Centre Régional de Promotion Agricole (CeRPA) dans le département de l’Atlantique, zone pédologique et agro écologique la plus propice à cette culture. Mais c’est en 1995, que le nombre de producteurs, d’entreprises de transformation, d’exportateurs, qui s’investissent dans cette filière s’est considérablement accru. Ce qui a donné une bonne impulsion à la promotion de la culture d’ananas et au développement d’une véritable filière d’exportation vers les marchés de la sous-région dont celui du Nigéria, du Sénégal, et des pays de l’hinterland (Burkina Faso, Niger. Mali). L’ananas est commercialisé sur ces marchés à l’état frais ou transformé notamment le jus.
Actuellement, le constat est que le Bénin déverse sur le marché national et sous régional plusieurs marques commerciales de jus d’ananas avec des taux de pénétration assez variables et inconstants. Des marques apparaissent et disparaissent faute de qualité ou de politique de ciblage de marchés de consommateur à travers leurs préférences. D’autres marques de jus d’ananas sont simplement parfois éjectées du circuit de commercialisation pour des problèmes de concurrence et de maîtrise des coûts de production.
Il est particulièrement noté que les questions de qualité et de leur certification ainsi que les démarches d’agrément auprès des institutions sous régionales (CEDEAO, UEMOA) constituent aussi des facteurs limitant la pénétration du marché des jus de fruit au niveau des pays de l’inter land. Ces derniers sont de grands consommateurs de jus de fruit et le Bénin détient un avantage comparatif à produire du jus d’ananas spécifiquement pour ces destinations. Les opérateurs de transformations de jus au Bénin se doivent dans ce contexte de relever de nombreux défis en termes des conditions qui optimisent les chances d’accroitre sa force de vente sur ce marché fortement sollicité aussi par des producteurs de jus provenant du Maghreb et de la méditerranée, du Ghana et de la Côte d’Ivoire.
Importance de la filière
L’ananas est une filière agricole très importante au Bénin. Il est classé 3ème filière parmi les filières prioritaire retenues dans le PSRSA, après le coton et l’anacarde.
Aujourd’hui, la filière ananas occupant une place de choix parmi les treize (13) filières agricole porteuses à promouvoir au bénin, l’Etat béninois a prévu dans son Programme de Relance du Secteur Agricole (PSRSA des mesures incitatives afin d’accroître la production d’ananas de 150 000 tonnes en 2007 à 600 000 tonnes en 2015. Il se propose également de promouvoir la transformation locale de l’ananas et de faciliter l’accès de l’ananas béninois et de ses dérivés aux marchés régionaux et internationaux (MAEP, 2010). A terme, il est aussi envisagé l’exportation de l’ananas par voie maritime en vue d’améliorer la balance commerciale du Bénin (MAEP, 2010).
Evolution production
Superficie emblavées, quantité d’ananas frais produit et rendement
La production de l’ananas a connu une augmentation fulgurante ces dix dernières années. Cette production est passée de 51151 tonnes en 2000 à 358887 tonnes en 2013 soit un accroissement de 86%. Le pic de production est observé en 2012 avec un tonnage annuel de 375637 tonnes.
La production de l’ananas a connu une augmentation fulgurante ces dix dernières années. Cette production est passée de 51151 tonnes en 2000 à 358887 tonnes en 2013 soit un accroissement de 86%. Le pic de production est observé en 2012 avec un tonnage annuel de 375637 tonnes.
Les superficies cultivées et les rendements obtenus entre 2000 et 2013 sont présentés sur la figure ci-dessous. L’analyse de cette figure révèle que tout comme la production, les superficies d’ananas emblavées ont connu une augmentation pendant cette période avec un taux d’accroissement de 83% environ. Il en est de même du rendement au niveau duquel on note également une tendance à la hausse mais avec des rechutes pour certaines années.
La figure 4 ci-dessus illustre le niveau d’évolution de la superficie qui s’est multiplié par 6 en 13ans et dans le même temps le rendement s’est amélioré de 120% entre les années 2000 et 2013.
L’accroissement de la production nationale de l’ananas, observé ces dernières années révèle néanmoins quelques disparités au niveau des départements et des communes. En effet, d’après les statistiques du MAEP, 2013, le département de l’Atlantique totalise à lui seul plus de 90% de la production nationale d’ananas pour les 2 variétés cultivées : le pain de sucre et la cayenne lisse. les communes de Abomey-Calavi, Zê, Torri-Bossito et d’ Allada sont dans ce département les principales communes productrice d’ananas avec respectivement 17%, 36%, 18% et 14% de la production nationale au cours de la campagne agricole 2012-2013 (MAEP, 2013). Les productions des autres communes du Bénin sont relativement faibles.
Situation de la transformation de l’ananas au Bénin
L’étude sur l’analyse de la rentabilité économique des Chaines de Valeur Ajoutée de l’ananas réalisée par SOHINTO David et al en 2008, a révélé que la grande partie (77%) de l’ananas produit au Bénin est consommée ou exporté à l’état frais dans la sous-région et au niveau national. Le reste est valorisé par les unités locales de transformation de jus d’ananas (15%) en pleine expansion et l’ananas séché vers l’UE (8%) environ) qui sont les deux principaux produits dévirés de l’ananas fabriqués au bénin en dehors du sirop et de la confiture d’ananas.
Les unités de transformation de l’ananas excepté quelques-unes sont pour la plupart artisanales et opèrent presque toutes dans le domaine de l’informel.
Les données d’enquêtes relatives à la production de jus d’ananas au bénin révèlent une capacité annuelle de production de jus estimée à environ 600.000 litres de jus d’ananas par an (IFDC, 2011). Au regard de l’évolution du coefficient de transformation de la production brute actuellement cette quantité a déjà connu un taux d’accroissement de plus de 25% ces cinq dernières années. Ces jus sont essentiellement offerts en canettes en sachets et dans les bouteilles de 25cl (contenance dominante) ou de 33cl aux restaurants et aux supermarchés. Il faut également souligner par rapport à ces produits que la couverture du territoire national est déséquilibrée. En effet, l’offre est principalement orientée vers la sous régions et les centres urbains nationaux tels que Porto-Novo ; Cotonou ; Parakou ; Abomey – Calavi…, au détriment des zones rurales.
Il est à noter que le système de production de l’ananas a un réel impact sur la qualité du jus d’ananas. L’ananas au Bénin est cultivé sur les terres dégradées où les pressions foncières et démographiques sont élevées. Les systèmes de production sont fortement dépendants d’engrais chimiques et des produits de traitement. La qualité du jus n’est donc pas seulement du ressort des transformateurs mais aussi des producteurs qui doivent pratiquer une démarche d’agriculture intelligente orientée sur les exigences en termes de qualité du jus. Elle dépend aussi de l’encadrement technique qui doit assurer le système de traçabilité.
Mieux, les transporteurs sont aussi concernés car ils doivent assurer de bonnes pratiques de transport de l’ananas fruit. Ainsi, pour obtenir du jus d’ananas de qualité, la qualité de la matière première destinée à la transformation est de mise. Le degré de maturité ainsi que l’état des fruits déterminent très fortement la qualité du jus d’ananas. C’est dire donc que pour obtenir un jus d’ananas de qualité, avoir une bonne technologie de transformation ne suffit donc pas.
Potentiel exportable de l’ananas et de ces dérivés dans la sous-région et au niveau international
L’analyse des données statistiques révèle que les exportations béninoises d’ananas sont encore très faibles bien que le fruit soit très apprécié sur le marché européen pour sa couleur (jaune or) et son goût. En effet, Avec une production annuelle de 358 886 tonnes en 2013, le bénin n’apparaît pratiquement pas dans les statistiques mondiales des pays producteurs d’ananas. Car le pays ne fournit en moyenne que seulement 0,24% de l’ananas exporté sur le marché européen (Arouna et Afommassè, 2005, cité par Adégbola ,2012).
Au Bénin, l’ananas fruit et l’ananas séché demeurent les principaux produits exportés vers l’extérieur. Les autres produits dérivés dont le jus d’ananas sont surtout positionnés sur les marchés local et sous régional. Il faut souligner que L’exportation de l’ananas fruit ne concerne que la variété cayenne lisse et à l’état actuel des choses, on estime à environ 2443 tonnes la quantité d’ananas fruit exportée par le pays en 2011 (FAO, 2013).
Dynamique de l’offre en jus d’ananas destiné au marché sous régional (l’HINTERLAND et le NIGERIA) et les déterminants de la compétitivité
Profil des entreprises exportatrices
Il existe plus de cent (100) unités de transformation de jus d’ananas au bénin ; mais très peu d’entre elles (moins d’une cinquantaine), sont exportatrices de jus d’ananas vers les marchés de l’Hinterland : Burkina-Faso, Nigéria, Niger, Ghana, Mali et Sénégal.
Les données collectées sur le terrain auprès des acteurs ressources couplées aux informations recueillies sur les unités transformatrices, ont révélé que la majorité des unités exportatrices de jus enquêtées à titre individuel sont de type artisanal.
En dehors de la production du jus d’ananas, quelques unités s’adonnent à la production d’autres dérivés de l’ananas fruit comme l’ananas séché, les sirops d’ananas, les confitures d’ananas ou exceptionnellement le vin mousseux d’ananas comme c’est le cas l’entreprise CARDA de l’Ouémé à Porto-Novo.
Les enquêtes de terrain révèlent aussi que les entreprises béninoises exportatrices de jus sont relativement jeunes avec une moyenne de 8 ans d’expériences dans les domaines de la transformation et de l’exportation dans la sous-région. Toutefois, certaines unités de transformation exportatrices de jus comme ETS, FAKO et ETRAPA ont démarré leurs activités depuis 1995.
Figure 7: flux de jus d’ananas béninois sur les marchés de l’hinterland
Volumes de jus positionnés sur le marché
L’analyse de ce graphique révèle que sur ces 5 marchés de l’hinterland vers lesquels le jus béninois est positionné, le Niger, le Burkina-Faso et le Sénégal viennent en tête, et demeurent les destinations les plus privilégiées de ce jus, avec respectivement 40%, 32% et 18% du volume du jus béninois positionné sur ces marchés. Ainsi, ces trois pays consomment à eux seuls près de 90% du volume d’ananas béninois produits. Ces pays sont suivis respectivement du Nigéria (7%) et du Mali (3%). Mais il faut souligner que cette analyse de tendance ne tient pas compte du nombre incalculable de jus d’ananas béninois qui traverse notre pays pour le Nigéria voisin, car elle échappe souvent aux statistiques officielles.
Structures de coût et facteur de compétitivité
Dynamique de la demande et l’environnement concurrentiel relatif au marché du jus d’ananas dans la sous-région
Etat de la demande et de la concurrence en jus d’ananas au Bénin
Il convient de faire remarquer que le milieu rural préfère consommer l’ananas frais plutôt que le pur jus d’ananas. Cependant, l’orientation de l’offre de pur jus d’ananas vers cette cible constitue un marché potentiel non négligeable pour les jus de fruit.
Les résultats d’enquête auprès des consommateurs béninois de jus d’ananas montrent que les jus et boissons gazeuses sont consommés par ordre d’importance. La consommation de jus d’ananas s’élève en moyenne à environ 34 litres par habitant par an (Adégbola et al, 2008). Le niveau de consommation en jus d’ananas constitue un atout et peut conquérir le marché.
Etat de la demande et de la concurrence en jus d’ananas au Burkina Faso
Le Burkina-Faso est un grand pays de l’hinterland consommateur de jus avec un taux annuel de 2L par personne (résultats d’enquête). Les jus produits au Burkina-Faso et destinés au marché local sont loin de satisfaire la demande des Burkinabés. L’engouement pour la consommation du jus et des boissons gazeuses fait du Burkina-Faso le premier marché traditionnel du jus d’ananas du Bénin avec l’effort d’amélioration de la qualité des produits. Les résultats d’enquête auprès des consommateurs de jus d’ananas indiquent que beaucoup de jus de fruits sont présents sur le marché du Burkina.
Etat de la demande et de la concurrence au Nigeria
Le Nigeria a un avantage comparatif dans la production de fruits par rapport à d’autres pays africains. Depuis, l’ananas est le 2ème concentré le plus populaire utilisé par les fabricants de boissons nigérianes et le Nigeria est le 8e plus grand producteur mondial d’ananas. La demande importante fait que la consommation de jus au Nigeria est encore seulement à 3,5 litres par habitant par rapport à la consommation par habitant observé dans d’autres régions. Avec la production actuelle et l’augmentation des revenus, les Nigérians consomment beaucoup plus de jus par habitant et la demande est en croissance de plus de 10% par an.
Plusieurs industries agroalimentaires opèrent dans le domaine de l’ananas au Nigéria. Le plus grand nombre des jus de fruits et boissons fabriqués au Nigéria sont des concentrés. Malgré la position du Nigéria au plan mondial par rapport à la production de l’ananas, l’évolution de sa production ne permet pas de satisfaire la demande du fait du paysage concurrentiel du pays avec l’utilisation par plusieurs industries des concentrés importés (95%). Ci-dessous sont présentés un aperçu des industries agroalimentaires produisant des jus de fruits au Nigéria.
Etat de la demande et de la concurrence au Sénégal
Il faut noter que le Sénégal est de loin l’un des pays à forte tradition en matière de consommation des jus sous différentes formes issues des unités artisanales avec près de 40% des boissons consommés au Sénégal. La consommation traditionnelle des jus de bissap, de tamarin et de baobab constitue l’origine explicative du potentiel actuel de la demande en jus non gazeux au Sénégal.
Actuellement pour placer le jus d’origine béninoise sur le marché sénégalais, il faut absolument se préparer à une forte concurrence. En effet, les industries locales de production de jus se livrent actuellement de grandes concurrences.
Analyse des stratégies de commercialisation et de conquête de marché développées par les exportateurs béninois.
Positionnement sur les marchés régionaux
Les marchés difficilement pénétrables ont trait aux marchés où les commerçants éprouvent d’énormes difficultés pour obtenir les facilités de circulation des produits. Il s’agit notamment des agréments et des certifications. Ces raisons font que très peu d’entreprises béninoises arrivent à se positionner de manière formelle sur ces marchés. L’analyse des données de terrain collectées auprès de différentes catégories d’acteurs rencontrés, a révélé que seulement 5 des 24 unités de transformations exportatrices de jus vers les marchés de l’hinterland, enquêtées disposent d’une certification ou d’un agrément soit un taux de 21%.
Dans cette catégorie de marché, on peut citer le Sénégal, le Nigéria, et le GHANA par exemple. Au Nigéria, il s’agit du certificat d’origine, de l’agrément CEDEAO, de l’enregistrement NAFDAC. Au Sénégal, il s’agit en dehors de l’agrément UEMOA, des relations contractuelles que l’entreprise doit nouer avec le Comptoir commerciale de la distribution des produits alimentaires CCCDPA.
Pour ce qui concerne les marchés accessibles, il s’agit des marchés où les formalités ne sont pas aussi rigides que sur les marchés difficiles. Ces types de marchés offrent des possibilités d’écoulement du jus d’ananas avec les agréments UEMOA, CEDEAO sans autres formes de procédures. Ainsi, dans cette catégorie de marché, on retrouve le Burkina-Faso et le Niger qui demeurent les deux principaux marchés d’exportation pays vers lesquels le plus grand nombre d’entreprises béninoises exportatrices de jus écoulent leurs produits ; avec respectivement 46% d’unités vers le Burkina et 38% des unités enquêtées vers le Niger.
Circuits de distribution et méthodes d’exportation
La commercialisation du jus d’ananas dans les pays de l’hinterland se caractérise par un circuit de distribution court. Ce commerce sous régional, met en contact l’unité de transformation aux consommateurs de jus par l’intermédiaire des grossistes, qui sont pour la plupart les répondants de ces unités dans les pays de l’hinterland respectivement.
Ainsi, on ne distingue qu’un seul type de circuit de distribution du jus d’ananas béninois vers l’hinterland, où on a les grossistes chargés d’approvisionner les consommateurs en passant directement par l’unité de transformation. Aux grossistes, s’ajoutent d’autres acteurs indirects tels que les transporteurs, les manutentionnaires dont les rôles ne sont pas négligeables pour la régularité des flux.
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