Auteur : Youenn Gourlay
Organisation affiliée : Le Monde
Type de publication : Article
Date de publication : 19 juillet 2019
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Le quartier semble être l’endroit idéal pour une partie de cache-cache. Aux Deux-Plateaux, les lieux branchés se dissimulent derrière de grandes portes noires sécurisées et mal indiquées ou dans des petites rues. Toujours à l’écart des sempiternels embouteillages qui enfument la grande rue des Jardins, principal axe pour remonter le quartier le plus huppé de la commune abidjanaise de Cocody. Certains dimanches heureusement, on peut lâcher la carte, et se laisser guider par la musique ivoirienne.
Durant la saison sèche, en fin d’après-midi et parfois jusqu’à deux heures du matin, le jardin de la Fondation Donwahi pour l’art contemporain se transforme en petit festival de plein air le temps de la Sunday, le rendez-vous festif du dimanche. Des tapis au sol, quelques tables en bois et des coussins en wax pour le décor, des musiques afro-house, soul, raps africain et afro-américain pour l’ambiance.
Le tout agrémenté de petits stands valorisant la culture ivoirienne : studio photo d’extérieur avec des objets d’antiquaires africains proposés par Lafalaise Dion, ou le body painting de Saraï d’Hologne, rappelant le kaolin sur le corps des danseuses traditionnelles.
Depuis quelques mois, la Sunday a attiré plus de 2 000 personnes chaque week-end dans une ambiance jeune et survoltée. Une véritable réussite. « On n’aurait pas pu espérer mieux, c’est dans la lignée de ce que je veux faire depuis que je suis revenu en Côte d’Ivoire il y a trois ans, confesse Aziz Doumbia, co-organisateur de l’événement.
« Dépasser les habits traditionnels »
Aziz Doumbia est en train de réussir son pari de faire d’Abidjan « un lieu cool ». Tout a commencé à deux pas de la fameuse rue des Jardins, dans les prémices de son futur concept store à succès nommé Dozo. « Quand je suis rentré, il y avait de plus en plus de bonnes marques avec un univers bien pensé, de bons choix de matières, mais c’était compliqué pour elles de gérer le produit et la communication, retrace l’Ivoirien. J’ai donc commencé à travailler pour eux. Dozo, c’est la continuité. »
Du nom des chasseurs traditionnels et protecteurs des villages du nord ivoirien grâce à leurs fétiches divins, Dozo est aujourd’hui le lieu de référence de la jeune génération. Une « nouvelle vague » qui a bien souvent vécu entre la France, l’Amérique et la Côte d’Ivoire, qu’Aziz qualifie de « privilégiée » et à qui incombe selon lui la « responsabilité » de donner un nouveau souffle à la culture locale.
A l’intérieur de la petite boutique sur deux étages, à peine visible depuis la rue, des créateurs ivoiriens et africains exposent leurs vêtements, accessoires et autres produits locaux. Dès l’entrée, des tablettes de chocolat MonChoco, fabriquées avec du cacao ivoirien, attirent l’œil et les papilles. La chocolatière ivoiro-libanaise Dana Mroueh qui concasse les fèves de la matière première à l’aide d’un vélo, professe un message très politique : montrer que l’on peut aussi transformer l’or brun sur place plutôt que dans les usines d’Europe ou d’Amérique.
D’autres créateurs ont leur atelier juste à côté, bien souvent à domicile. C’est le cas de Rebecca Zoro, une jeune Ivoirienne qui a même installé son showroom, « absolument pas indiqué mais connu des fidèles », dans son salon. La créatrice de Yhebe Design s’inspire pour chaque saison d’une des soixante ethnies de son pays.
La chocolatière ivoiro-libanaise Dana Mroueh qui concasse les fèves de la matière première à l’aide d’un vélo, professe un message très politique : montrer que l’on peut aussi transformer l’or brun sur place plutôt que dans les usines d’Europe ou d’Amérique
J’essaie de faire connaître ma culture à travers la mode, chaque ethnie a ses masques, ses pagnes, ses danses, mais peu d’Ivoiriens les connaissent vraiment. A 32 ans, la couturière a trouvé son public chez elle, aux Deux-Plateaux. « Un quartier central, aisé, commerçant, où se croisent les influences ». Mais aussi grâce aux défilés et aux commandes Internet à l’international. Vendues entre 45 euros et 250 euros – une moyenne aux Deux-Plateaux –, ses créations ne sont pas à la portée de tous. « On est fatigués d’être dans la norme, on veut s’exprimer, casser les codes et dire qui on est », justifie-t-elle.
« Image positive »
En remontant le quartier, le Lof vient d’ouvrir. Le restaurant chic et cosy décoré de matériaux locaux affiche ses ambitions : « Le “manger bien”, le “manger local” et le soutien aux agriculteurs ivoiriens », résume Florence Yao, la fondatrice. Un défi dans un pays qui aime manger lourd et gras.
J’essaie de faire connaître ma culture à travers la mode, chaque ethnie a ses masques, ses pagnes, ses danses, mais peu d’Ivoiriens les connaissent vraiment
Un peu plus haut, le concept d’Imalk, aka Malik Coulibaly, cartonne. Celui qui faisait des goodies publicitaires a créé sa marque et sa signature : des tee-shirts et sacs en toile aux messages et clins d’œil ivoiriens – « C’est gâté », « Qui a mis l’eau dans coco ? » – et des tableaux graphiques représentant les villes du pays. « Je voulais valoriser la culture de la rue, les expressions, le quotidien, les taxis, la nourriture : passer des messages autrement », détaille-t-il.
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