Auteur : Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi), Chaire Sahel
La Chaire Sahel de la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi) a pour objectif d’éclairer les décisions des acteurs publics et privés dans leur action pour la sortie de crise et pour le développement durable de la région Sahel.
La Chaire Sahel travaille en étroite relation avec les administrations africaines et les partenaires de leur développement. Elle s’appuie sur la recherche internationale ainsi que sur les capacités sahéliennes d’analyse des politiques tout en visant à les renforcer. Elle conduit ses travaux dans un cadre régional.
Ses travaux examinent la mise en œuvre des différents plans et politiques et leurs effets, avec pour objectif d’en renforcer l’impact sur les populations et dans les secteurs d’activité ciblés (éducation, développement rural, santé, gouvernance/ institutions). Elle cherche à adapter les méthodes d’analyse au contexte de fragilité de la zone.
Date de publication : Décembre 2018
Lien vers le document original
Site de l’organisation : Ferdi – Chaire Sahel
Le Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) définit l’aide publique au développement (APD) comme étant l’aide fournie par les États dans le but de promouvoir le développement économique et d’améliorer les conditions de vie dans les pays en développement. Selon l’Agence française de développement (AFD), la moitié de l’aide publique au développement a pour destination les pays les moins avancés (PMA), dont la majorité se situe sur le continent africain. Il est indéniable que la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne ont reçu une aide publique significative de la communauté internationale. En 2014, l’aide publique au développement représentait 2,65% du PIB en Afrique subsaharienne. Ce document a été choisi par WATHI parce qu’il fournit des données sur les pays du Sahel dans un contexte médiatisé de l’augmentation de l’aide . L’étude permet de nuancer les chiffres donnés et de mettre l’accent sur les problèmes de transparence et de gouvernance avec des responsabilités partagées entre les donateurs et les pays aidés. L’étude révèle que plus de 34 milliards de dollars ont été alloués aux pays du Sahel entre 2006 et 2016. Il faut tout de même noter que pour la majorité des pays étudiés, les engagements sont supérieurs aux versements. Plus de trois quarts des engagements et des versements d’aide transférable dans les pays du G5 Sahel sont à destination du Mali, du Burkina Faso et du Niger. La Mauritanie et le Tchad n’ont reçu respectivement que 10% et 12% des versements accordés au Sahel. En considérant la somme des versements d’aide transférable dans les pays du G5 Sahel, les principaux donneurs sont: les institutions de l’Union européenne qui figurent au premier rang (21,5% des versements d’aide transférable), le Groupe Banque mondiale au second rang (14,7%), les États‐Unis au troisième rang (12,9%), la France au quatrième rang (6%), l’Allemagne au cinquième rang (4,1%). L’aide transférable au Sahel est principalement destinée aux infrastructures et aux services sociaux (43,5% des versements), puis aux services économiques (13,8%), à la production (12,7%) et enfin les projets plurisectorielles (6,3%). Ce document permet ainsi de mieux appréhender la notion d’aide publique et ses instruments financiers. Il permet également de mieux connaître la part effective transférée aux États bénéficiaires.Enfin, il informe sur l’utilisation des aides budgétaires et aux priorités sectorielles de ces aides.
Plutôt que de parler d’aide publique au développement en général, les auteurs se réfèrent à la notion d’aide « transférable » qui est l’aide publique au développement dont sont soustraites les composantes sans impact direct ou immédiat sur les pays du Sahel. L’analyse des aides transférables aux pays du Sahel doit inciter la communauté internationale à augmenter son assistance vis-à-vis de ces pays en renforçant son efficacité, car force est de constater qu’il devient de plus en plus difficile pour les donneurs de débourser rapidement les aides. C’est le cas de la Mauritanie, où contrairement aux autres pays du G5 Sahel, les versements en aide transférable ont diminué de 2,9% en moyenne annuelle entre 2012 et 2016. Au Tchad, la part des aides budgétaires et de l’assistance technique est plus faible que dans les autres pays du Sahel et les versements sous forme d’aide aux projets ont diminué sur la période contrairement aux autres pays où ils augmentent. Quant au Burkina Faso, les engagements et les versements sous forme de dons ont diminué sur la période 2012‐2016. En outre, les auteurs soulignent la nécessité de prioriser l’aide consacrée à l’éducation, en particulier l’éducation primaire, dans les pays du Sahel où la part de cette aide est faible. En effet, les analyses montrent que le Tchad reçoit de moins en moins de versements pour les secteurs de l’éducation et de l’agriculture au profit de l’aide humanitaire. Le constat est le même au Burkina Faso.
Les extraits suivants proviennent des pages : 12-14, 21-29, 37 ; 39 ; 41-42 ;60-61 ;63-66
Introduction
En 1970, les pays développés ont fixé un seuil minimal de 0,7% de leur revenu national brut consacré à l’Aide publique au développement (APD), cet engagement, maintes fois renouvelé au sommet des Nations unies, a rarement été honoré. En 2016, encore 23 pays ne l’ont pas respecté. Les versements en APD ont atteint un sommet en 2016 avec un montant de 180 milliards de dollars soit 6,5 milliards de dollars de plus qu’en 2015 (équivalent à une hausse de 3,7 % par rapport à 2015 après prise en compte des taux de change et de l’inflation). Toutefois, 60% de cette augmentation s’explique par l’accroissement de l’aide consacrée aux réfugiés dans les pays donneurs selon les données officielles que le Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a recueillies.
En juillet 2017, la France, l’Allemagne, l’Union européenne, soutenues par la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et rejoints par l’Italie, l’Espagne et le Royaume‐Uni, ont créé l’Alliance pour le Sahel, une coalition pour transformer le Sahel à l’horizon 2022. Elle vise à promouvoir, amplifier et accélérer une approche intégrée de sécurité et de développement pour appuyer les efforts des pays du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Burkina Faso et Tchad).
Cependant, l’aide au développement telle qu’elle est définie par le CAD recouvre des catégories d’aide qui ne correspondent pas à des versements dans les pays receveurs de l’aide et elle ne peut être comparée à la statistique des pays receveurs. Il s’agit soit de dépenses dans les pays donneurs tels que les bourses et autres frais d’étude dans les pays donneurs, l’accueil des réfugiés ou les frais administratifs, ou encore d’annulations de dettes qui ne se traduisent pas immédiatement par des ressources supplémentaires dans les pays concernés. Ainsi ces catégories d’aide n’exercent pas d’impact direct dans les pays receveurs, en l’occurrence les pays du Sahel. Le souci de redevabilité qui est au centre des préoccupations de l’Alliance pour le Sahel ne peut concerner que les aides directement versées au Sahel.
C’est pourquoi le rapport se réfère à la notion d’aide «transférable». Celle‐ci est définie comme l’aide publique au développement dont sont soustraites les composantes qui n’ont pas d’impact direct ou immédiat sur les pays du Sahel. Par définition, l’aide humanitaire et l’aide alimentaire sont donc incluses puisqu’elles ont un impact direct sur la situation des pays sahéliens et sont souvent un préalable indispensable à des actions en vue du développement.
Le champ de l’analyse
Cette étude porte sur les pays qui se sont regroupés en 2014 au sein du G5 Sahel : le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Les flux accordés à ces cinq pays sont totalisés sous l’appellation «Pays du Sahel». La Côte d’Ivoire et le Sénégal sont pris en compte dans l’analyse en raison de leur proximité à la zone d’étude. Le groupe de référence auquel sont comparés les pays du Sahel comprend l’ensemble des pays d’Afrique subsaharienne à l’exception de l’Afrique du Sud.
L’aide de l’ensemble des donneurs a été analysée dans la mesure du possible: membres du CAD, multilatéraux et non membres du CAD. Toutefois, un focus a été fait sur les trois premiers donneurs bilatéraux et les trois premiers donneurs multilatéraux de la zone Sahel. Sur la période 2012‐2016, ils apportent au total 61,7% des versements d’aide transférable dans cette zone. Ce sont respectivement par ordre décroissant : les institutions de l’Union européenne, le Groupe de la Banque mondiale, les États‐Unis, la France, l’Allemagne et la Banque africaine de développement.
Le choix de ces six donneurs, tous membres de l’Alliance pour le Sahel à l’exception des États‐Unis, permet d’apprécier les efforts fournis par chacun d’entre eux sur la période de l’étude, afin d’en tirer des orientations futures pour la réussite des objectifs à l’horizon 2022.
La répartition de l’aide transférable entre pays sahéliens et son évolution
Les montants engagés et versés sur la période 2006‐2016 au titre de l’aide transférable. On note que plus de 34 milliards de dollars ont été versés dans les pays du Sahel entre 2006 et 2016. Pour l’ensemble des pays étudiés, les engagements sont supérieurs aux versements. Plus de ¾ des engagements et des versements d’aide transférable dans les pays du G5 Sahel sont à destination du Mali, du Burkina Faso et du Niger. La Mauritanie et le Tchad n’ont reçu respectivement que 10% et 12% des versements accordés au Sahel.
Cette étude porte sur les pays qui se sont regroupés en 2014 au sein du G5 Sahel : le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad
En utilisant le déflateur du CAD afin de tenir compte de la variation des taux de change des donneurs avec le dollar, mais aussi de l’inflation chez les donneurs, on note que les pays du Sahel ont reçu 31,9 millions de dollars constants 2016, soit 6,6% de moins qu’en dollars courants.
De manière globale, le taux de croissance annuel moyen (TCAM) des engagements et des versements est nettement plus élevé sur la période 2006‐2012 que sur 2012‐2016, mettant en exergue un ralentissement de l’augmentation des flux accordés au pays du Sahel. En effet, les versements aux pays du Sahel ont crû à un rythme annuel de +21,5% entre 2006 et 2012 et de seulement +3,9% entre 2012 et 2016. L’écart est encore plus important dans le groupe de référence (+23,5% par an sur 2006‐2012 et +3,2% sur 2012‐2016). Une partie de ce ralentissement s’explique par l’amélioration de la couverture des donneurs à la fin des années 2000.
Mais lorsqu’on exclut l’aide des donneurs pour lesquels les données de versement ne sont pas disponibles en 2006, l’aide transférable a quand même augmenté plus vite entre 2006 et 2012 (+14,2%) qu’entre 2012 et 2016 (+ 5,5%). Toutefois, on note qu’au Mali, le TCAM des engagements est plus élevé sur la période 2012‐2016 que sur la période 2006‐2012 (+20,9% par an sur 2012‐2016 contre +14,7% par an sur 2006‐2012). Ce n’est pas le cas pour le TCAM des versements. Ceci s’explique par l’augmentation significative des engagements des donneurs à la sortie de crise du Mali, mais tous ces engagements supplémentaires n’ont pas pu se concrétiser par des versements.
En Mauritanie, on remarque une diminution des engagements et versements sur la période 2012‐2016, notamment en termes de versements (‐2,9% par an entre 2012 et 2016). Comparativement au groupe de référence, les pays du Sahel ont vu leurs engagements et versements légèrement moins augmenter sur la période 2006‐2012. Par contre, sur la période 2012‐2016, les engagements et versements en aide transférable ont crû plus vite que dans le groupe de référence, mettant en exergue un intérêt accru des donneurs pour cette région ces dernières années.
En dépit de la croissance annuelle de l’aide transférable vers l’ensemble des pays, on observe une importante variabilité des engagements, révélatrice de l’instabilité des politiques d’aide au développement
En dépit de la croissance annuelle de l’aide transférable vers l’ensemble des pays, on observe une importante variabilité des engagements, révélatrice de l’instabilité des politiques d’aide au développement.
Au Mali, après avoir diminué de moitié leurs engagements en 2012 en raison de la crise politique, les donneurs les ont accrus significativement en 2013 (multipliés par 3,7 par rapport à 2012). Cette tendance est constatée pour l’ensemble des principaux donneurs du Mali à l’exception des États‐Unis dont l’aide transférable est restée relativement stable sur la période.
Analyse des flux en fonction de la population
Le montant d’aide transférable par habitant a globalement augmenté de +10,5% par an sur les 10 dernières années au Sahel, notamment au Tchad (+16,4% par an), au Niger (+12,3% par an) et au Mali (+10,5%). Le Burkina Faso et la Mauritanie sont les pays qui ont vu leur aide par habitant le moins augmenter (respectivement +7,6% et +9%). Comparativement au groupe de référence, l’aide par habitant a moins augmenté au Sahel sur la période 2006‐2016.
Mali (54 USD/an/hab.) et au Burkina Faso (49,5 USD/an/hab.) est supérieure à celle du groupe de référence (35,1 USD/an/hab.). Par contre, elle est seulement de 28,8 USD par habitant au Tchad et de 31,9 USD par habitant au Niger. Ainsi, sur les 10 dernières années, un Mauritanien a reçu 2,6 fois plus d’aide qu’un Tchadien.
Sur les 10 dernières années, un Mauritanien a reçu 2,6 fois plus d’aide qu’un Tchadien
L’évolution de l’aide par habitant au Sénégal suit celle des pays du Sahel même si son taux de croissance annuel moyen est légèrement plus faible (8,5% par an contre 10,5% au Sahel).
Analyse des flux en fonction de la richesse du pays
Si l’on compare les versements d’aide en fonction de la richesse des pays, on note que sur la période 2006‐2016, l’ensemble des pays du Sahel reçoivent plus d’aide rapportée au revenu national brut (RNB) que le groupe de référence (7,2% du RNB contre 3,3% du RNB pour le groupe de référence). Il en est de même pour le Sénégal (5,7% du RNB) contrairement à la Côte d’Ivoire (2,7%).
L’ensemble des pays du Sahel reçoivent plus d’aide rapportée au revenu national brut que le groupe de référence
Ainsi, la Mauritanie arrive en première position en termes d’aide transférable versée par habitant (loin devant le Mali et le Burkina Faso ‐ le Tchad et le Niger étant en dernières positions). En revanche, elle est en 4ème position en termes d’aide transférable en pourcentages du RNB derrière le Niger, le Mali et le Burkina Faso.
Les principaux donneurs dans les pays du Sahel
Lorsque l’on considère la somme des versements d’aide transférable dans les pays du G5 Sahel, les institutions de l’UE figurent au premier rang des donneurs des pays du G5 Sahel (21,5% des versements d’aide transférable), le Groupe Banque Mondiale au second rang (14,7%), les États‐Unis au troisième rang (12,9%), la France au quatrième rang (6%), l’Allemagne au cinquième rang (4,1%), la Banque africaine de Développement au sixième rang (3,9%), le Canada au septième rang (3,4%), le Fonds monétaire international au huitième rang (3,1%), la Suisse au neuvième rang (3%) et le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme au dixième rang (2,7%).
Ainsi les États‐Unis, la France et l’Allemagne sont les principaux donneurs bilatéraux de la zone. Les trois premiers donneurs multilatéraux sont les institutions de l’Union européenne, le Groupe Banque Mondiale et la Banque africaine de Développement. Notons que dans cette étude nous considérons les agences des Nations Unies individuellement, autrement l’organisation prise dans son ensemble arriverait en troisième position, avant la Banque africaine de Développement.
Le classement des donneurs des pays du G5 Sahel diffère de celui du groupe de référence où les États‐Unis occupent la première place des donneurs avec 20,5% des versements d’aide transférable, suivi du Groupe Banque Mondiale avec 14,5%, des institutions de l’Union européenne avec 10,4%, du Royaume‐Uni avec 8,3% et du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme avec 5,1%. La Banque africaine de Développement occupe la sixième place des donneurs du groupe de référence avec 4,3% des versements tandis que la France arrive en 7ème position avec 3,9% des versements.
Globalement, les financements des donneurs membres de l’Alliance pour le Sahel sont en priorité dirigés vers les pays du Sahel comparativement au groupe de référence sur la période 2012‐2016. Notons que la Mauritanie présente quelques particularités avec la prépondérance des bailleurs non membres du CAD. C’est le seul pays receveur où le Fonds arabe (FADES) arrive en tête de classement avec 20,6% des versements, suivi des donneurs traditionnels de la région : les institutions de l’Union européenne (15,1% des versements), la France (9,3% des versements), et le Groupe Banque Mondiale (8,2% des versements).
La Mauritanie … est le seul pays receveur où le Fonds arabe (FADES) arrive en tête de classement avec 20,6% des versements, suivi des donneurs traditionnels de la région
Comparaison entre l’aide transférable et l’APD au sens du CAD
Considérer l’aide transférable plutôt que l’aide publique au développement permet d’avoir une mesure plus juste des apports financiers ou en nature réellement susceptibles d’être utilisés par les pays bénéficiaires de l’aide.
Dans les pays du Sahel, les versements en aide transférable représentent 71,7% des versements en aide publique au développement (contre 69,2% dans le groupe de référence). Autrement dit, sur 100 dollars d’APD notifiés en tant que versements dans le système de notification du CAD, seulement 72 dollars sont réellement transférés aux pays sahéliens.
Sur 100 dollars d’APD notifiés en tant que versements dans le système de notification du CAD, seulement 72 dollars sont réellement transférés aux pays sahéliens
Cette proportion est légèrement plus faible pour le Tchad (70,5%), le Mali (70,3%) et la Mauritanie (68,3%), mettant en exergue la part plus importante dans ces pays de l’APD non transférable. En Côte d’Ivoire et au Sénégal, l’aide transférable ne représente respectivement que 55,7% et 63,6% de l’APD.
Pour l’ensemble des pays, on note que la part de l’aide transférable dans l’APD est plus élevée si l’on considère les engagements plutôt que les versements. Cela reflète les plus grandes difficultés à débourser l’aide transférable plutôt que l’APD dans sa globalité. En effet, une annulation de dette (incluse dans l’APD, mais pas dans l’aide transférable) est plus facilement réalisée qu’un projet de construction d’une infrastructure.
Mais cela peut également s’expliquer par l’absence de conditionnalité ou par une meilleure disposition des donneurs à honorer leurs engagements lorsque la dépense est effectuée dans leur pays plutôt que vers un pays tiers. Lorsque l’on considère l’aide transférable plutôt que l’aide publique au développement, la part des versements sous forme de dons au Sahel diminue passant de 83,2% à 77,1% soit 6,1 points de moins contre 6,7 points de moins dans le groupe de référence).
L’écart est encore plus important en Mauritanie où seulement 50,5% des versements en aide transférable sont sous forme de dons contre 65,8% des versements d’APD. Cela s’explique par l’importance des bourses et frais d’étude, des allègements de dette et autres dépenses dans le pays donneur qui sont généralement notifiées en tant que dons, mais qui ne font pas l’objet d’un transfert financier vers le pays bénéficiaire. En Côte d’Ivoire et au Sénégal, l’écart entre la part des dons dans l’aide transférable et dans l’APD est respectivement de 6 points et de 13,3 points.
Une annulation de dette est plus facilement réalisée qu’un projet de construction d’une infrastructure
Répartition de l’aide transférable par instruments financiers selon les pays sahéliens
À l’instar du groupe de référence, l’essentiel de l’aide transférable est engagé sous forme de dons sur la période 2012‐2016 (70,3% pour les pays du Sahel contre 68,4% pour le groupe de référence). La part de prêts engagés par l’ensemble des bailleurs oscille entre 19,6% pour le Tchad et 53,4% pour la Mauritanie. Les prises de participation sont quasi inexistantes au Sahel.
Si l’on considère les versements au Sahel, la part des dons augmente (78,2% pour les versements contre 70,3% pour les engagements) laissant supposer que les dons sont mieux déboursés que les prêts. Ceci s’explique en partie par l’aide humanitaire (dons) qui représente 19,3% des versements aux pays du Sahel sur la période et pour laquelle les versements sont supérieurs aux engagements à l’exception du Tchad.
Répartition par secteurs de l’ensemble de l’aide transférable dans les pays sahéliens
À l’instar du groupe de référence, l’essentiel de l’aide transférable au Sahel est à destination des infrastructures et services sociaux (43,5% des versements contre 51,1% pour le groupe de référence), puis des infrastructures et services économiques (13,8% contre 15,9% pour le groupe de référence), de la production (12,7% contre 9,6% pour le groupe de référence) et enfin fait l’objet de destinations plurisectorielles (6,3% contre 6,6% pour le groupe de référence).
Considérer l’aide transférable plutôt que l’aide publique au développement permet d’avoir une mesure plus juste des apports financiers ou en nature réellement susceptibles d’être utilisés par les pays bénéficiaires de l’aide
L’aide alimentaire représente 4,3% des versements au Sahel entre 2012 et 2016 contre 2,1%. Pour le Niger et la Mauritanie, la part de l’aide alimentaire est même supérieure (respectivement 7,7% et 5,1%). L’aide humanitaire représente au Sahel 19,3% des versements en aide transférable sur la période 2012‐2016 contre 14,8% pour le groupe de référence.
À l’instar du groupe de référence, l’essentiel de l’aide humanitaire sert aux interventions d’urgence (95,4% des versements au Sahel contre 93,6% dans le groupe de référence), suivi de la reconstruction et réhabilitation (2,4% des versements contre 3,2% dans le groupe de référence) et de la prévention des catastrophes (2,4% des versements contre 3,3% dans le groupe de référence). Ainsi, l’aide humanitaire sert plus à répondre aux crises qu’à les prévenir.
La diversité des priorités entre pays sahéliens et globalement par rapport aux pays de comparaison (Afrique Subsaharienne hormis l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et le Sénégal) apparaît bien, si l’on compare les pays sahéliens dans leur ensemble aux trois comparateurs ; la différence la plus frappante concerne l’importance des aides tant alimentaire qu’humanitaire. Cette importance s’explique par le déficit alimentaire marqué au Sahel (particulièrement en Mauritanie et au Niger) et à l’aide d’urgence résultant en particulier des déplacés et réfugiés, particulièrement forte au Tchad (40% de l’aide transférable) et au Niger (25%).
Éducation
L’éducation représente au Sahel 7% des versements en aide transférable hors aide alimentaire et aide humanitaire contre 6,9% pour le groupe de référence. Au Tchad et en Mauritanie, ce taux est encore plus faible (respectivement 4,2% et 5,9% des versements). Alors qu’une part très élevée de l’aide est destinée à l’éducation au Sénégal (12,9%), seuls 4,3% des versements en Côte d’Ivoire étaient destinés à ce secteur sur la période 2012‐2016.
Dans les pays du Sahel, 48,3% des versements dans le secteur de l’éducation sont à destination de l’éducation de base (contre 36,2% dans le groupe de référence). La part des versements à un niveau non spécifié est de 23,8% (contre 35,8% dans le groupe de référence) et celle destinée au secondaire est de 22,6% (contre 19,7% dans le groupe de référence). L’enseignement supérieur ne représente au Sahel que 5,3% des versements à l’éducation, contre 8,3% dans le groupe de référence.
On note qu’au Burkina Faso et au Mali, la part de l’éducation de base est nettement supérieure à celle du Sahel (respectivement 7,5 points et 6,2 points de pourcentage en plus). À l’inverse, la part de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur est plus élevée en Mauritanie (respectivement 45,6% et 23,8%) par rapport au Sahel, au détriment notamment de l’éducation de base.
Santé
La santé représente au Sahel 14,7% des versements en aide transférable hors aide alimentaire et aide humanitaire contre 16,6% pour le groupe de référence, 15,7% en Côte d’Ivoire et 12,5% au Sénégal. En Mauritanie, ce taux est particulièrement bas (5,4%). Dans les pays du Sahel, 30,8% de l’aide versée au secteur de la santé sont destinés aux soins et services de santé de base (28,6% pour le groupe de référence), 24,7% pour la lutte contre le paludisme (27% pour le groupe de référence), 17,7% pour la nutrition (9% pour le groupe de référence), 13,6% pour le secteur en général (14,1% pour le groupe de référence), 5,7% pour la lutte contre les maladies infectieuses (11,6% pour le groupe de référence). Les infrastructures pour la santé de base, la lutte contre la tuberculose, l’éducation sanitaire et la formation du personnel de santé sont les catégories ayant le moins reçu d’aide.
Le développement agricole est en première position des versements
Agriculture, sylviculture et pêche
Dans les économies sahéliennes qui sont à forte dominante agricole, ce secteur représente naturellement une part importante de l’aide accordée aux pays du G5 (14,5% des versements en aide transférable hors aide alimentaire et aide humanitaire contre 9% pour le groupe de référence). Toutefois, cette part est beaucoup plus faible au Tchad (7,7%) et en Mauritanie (6,2%).
Le développement agricole est en première position des versements (27,3% contre 32,3% dans le groupe de référence). Les ressources en eau à usage agricole arrivent en seconde position (21,9% contre 11,1% dans le groupe de référence), puis la politique agricole et la gestion administrative (13,8% contre 16,1% dans le groupe de référence). Le bétail, la recherche agronomique et la production agricole reçoivent chacun entre 5 et 6% des versements. Une part plus faible de l’aide à l’agriculture est à destination de la sylviculture et de la pêche (respectivement 3,8% et 3% contre 4,3% et 3,1 % dans le groupe de référence). Ainsi, on note une priorité au Sahel pour les ressources en eau à usage agricole et le bétail comparativement au groupe de référence.
Source photo : opex360.com