Auteur : Educo
Date de publication: 2015
Type de publication : Rapport
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Climat favorable aux droits
Le Burkina Faso a ratifié, sur le plan international, un certain nombre de traités et de conventions dont la Convention relative aux Droits de l’Enfant (CDE) le 23 Juillet 1990 ; la Convention internationale concernant la lutte contre la discrimination dans le domainede l’enseignement en 2012 et la Convention relative aux droits des personnes handicapéesen 2009.En plus des textes et traités ratifiés sur le plan international, le pays s’est également aligné sur le plan régional à travers son adhésion à plusieurs instruments tels que la Charte Africaine pour le Développement et le Bien-être des Enfants (CADBE) et le protocole de Maputo.
Sur le plan national, de nombreuses lois ont été adoptées dont la loi d’orientation de l’éducation adoptée le 30 juillet 2007 qui est l’épine dorsale du système éducatif et le décret du 22 avril 2009 portant sur la détermination de la liste des travaux dangereux interdits aux enfants au Burkina Faso. Son adoption marque une application de l’article 4 de la convention OIT Nº182 qui demande que chaque pays membre établisse sa propre liste selon ses réalités.
De plus, le Code du travail de 2008 intègre les pires formes de travail des enfants et fixe l’âge minimum d’accès à tout type d’emploi à 16 ans, afin de l’harmoniser avec l’âge de fin de la scolarité obligatoire. Enfin il y a l’adoption de la loi sur la protection et la promotion des droits des personnes handicapées du 24 juin 2010 et le Code pénal adopté en 1996 qui prévoit de nouvelles infractions pour protéger l’enfant victime de certaines pratiques traditionnelles néfastes à sa santé et à son bien-être (mariage précoce et/ou forcé, dot, excision, etc.).
Ce dispositif juridique devrait placer le Burkina Faso dans un environnement favorable à la réalisation des Droits de l’Enfant. Cependant, cette présente ASDE constate des insuffisances dans leur jouissance.
Mesures générales pour la mise en place de la Convention des Droits de l’Enfant-ONU
Il est important de rappeler que le Burkina Faso a ratifié la CDE en juillet 1990 et la CADBE en 1999. Le pays démontre par cette adhésion son plein engagement et sa volonté à œuvrer pour la promotion et le respect des Droits de l’Enfant. Des avancées notables sont constatées sur le plan législatif avec l’adoption de textes et lois à cet effet, néanmoins, des faiblesses sont notées dans l’application de ces instruments juridiques internationaux et nationaux.
Aussi, bien que le Burkina Faso ait ratifié la quasi-totalité des instruments juridiques applicables en matière de promotion et de protection des Droits de l’Enfant, il est à constater que ces dispositions ne sont pas suffisamment respectées. La situation des droits à l’éducation est loin d’être satisfaisante selon les indicateurs dans ce domaine. En effet, l’éducation pour tous n’est pas encore garantie et plusieurs catégories d’enfants sont hors du système de l’éducation formelle.
À titre d’exemple, pour les enfants en situation de handicap, bien qu’il existe une Direction Nationale de la Promotion de l’Éducation Inclusive, l’État ne dispose à ce jour d’aucun établissement public spécialisé ou inclusif. Nous constatons que : «beaucoup d’enfants en situation de handicap sont encore enfermés dans un univers loin de l’école, un univers défavorable qui leur ôte toute chance d’un avenir, faute de posséder les outils, les connaissances et le savoir pour s’insérer dans la société» malgré les décrets d’application de la loi portant sur la protection et la promotion des droits des personnes porteuses de handicap. Cette situation est plus aigüe en milieu rural où 80,9 % des enfants en situation de handicap n’ont aucun niveau d’éducation contre 35,6 % en milieu urbain.
L’une des recommandations de la CDE est de garantir la justiciabilité des droits.
Cette recommandation est difficile à respecter pour le Burkina Faso à cause de l’inexistence de mécanismes de dénonciation indépendants qui permettraient à la communauté, aux enfants et aux différents acteurs de pouvoir rapporter les cas de violations des droits. De même, les enfants ne sont pas conscients de leur droit à dénoncer les cas d’abus à leur égard.
Le Droit à l‘Éducation
En dépit des progrès réalisés par le système éducatif burkinabé et les changements opérés ces dernières années, il reste beaucoup de défis à relever tels que la réalisation d’infrastructures éducatives dans les zones à faible taux de scolarisation, le transfert des compétences des centres décisionnels vers les structures locales18 ou l’approche participative et l’implication des populations aux questions éducatives.
L’ASDE d´Educo a identifié trois problématiques majeures sur le Droit à l’Éducation :
- Insuffisance d’application des textes et lois en matière de promotion des Droits de l´Enfant (volet Éducation) ;
- Insuffisance de l’offre éducative ;
- Inégalité dans l’accès à l’éducation (répartition géographique, groupes vulnérables, sous-scolarisation des filles).
Insuffisance d’application des textes et lois en matière de PDE (volet Éducation)
Malgré la ratification de la CDE par l´État burkinabé, il y a une méconnaissance des textes car sa vulgarisation n’est pas encore effective. Il reste encore beaucoup à faire pour former les professionnels pour la mise en œuvre des principes de la CDE, car sa traduction sur le plan social et juridique est notamment insuffisante.
Les Droits de l’Enfant ne sont pas pris en compte dans les programmes d’enseignement et, selon les derniers rapports alternatifs, la promotion de ces droits ne semble pas être une priorité de l’État.19 Reste aussi à réaliser au plus tôt l’évaluation de l’impact des formations de ces professionnels sur la mise en œuvre de la législation.
Insuffisance d’application des textes relatifs à la gratuité de l’enseignement primaire pour tous et sur l’égalité des chances
L’article 28 de la CDE stipule que « les États parties reconnaissent le droit de l’enfant à l’éducation, et en particulier, en vue d’assurer l’exercice de ce droit progressivement et sur la base de l’égalité des chances, ils rendent l’enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous. » Le Burkina Faso, pour respecter son engagement envers la CDE, a pris un décret20 portant organisation de l’enseignement primaire en trois niveaux, établit les conditions pour le recrutement des enseignants et rappelle les principes de gratuité de l’éducation et de la non-discrimination.
Ceci étant, bien que l’enseignement soit officiellement gratuit, le coût est extrêmement important pour les familles car scolariser un enfant engendre nécessairement des coûts indirects ne se limitant pas seulement aux seules cotisations instaurées par l’Association des Parents d’Élèves (APE) et l’Association des Mères Éducatrices (AME).
Il y a, entre autres, des coûts liés à l’alimentation, aux soins de santé, à l’habillement des enfants scolarisés. Au niveau des frais APE/AME les cotisations varient entre 2 000 FCFA à 4 000 FCFA en milieu rural et entre 3 000 FCFA à 6 000 FCFA en milieu urbain et servent à couvrir les dépenses au niveau des écoles comme les réparations de table-bancs, l’achat de craie, etc.
Selon le décret ci-dessus mentionné, les enfants dont les parents n’ont pas les moyens d’assurer les frais ne devraient pas être exclus des écoles, mais les recherches réalisées sur le terrain nous montrent que les exclusions de ce type ont souvent lieu. À cela, il faut ajouter le fait que le Burkina fasse partie des pays les plus pauvres de la planète, classé 181ème sur 187 pays au dernier classement 2013 de l’Indice de Développement Humain avec un Produit Intérieur Brut par tête de l’ordre de 1,5 € (environ 1 000 FCFA) par habitant et par jour, ce qui constitue aussi un frein à l’accès à l’éducation. Non seulement certains parents se trouvent en situation de pauvreté, mais l’État lui aussi rencontre des difficultés financières.
Ces difficultés contribuent à la faiblesse de l’évolution du Taux Net de Scolarisation (TNS) qui est passé de 63,2 % en 2012-2013 à 64,4 % en 2013-2014. Dès lors, ces chiffres montrent qu’environ 35 % des enfants ne peuvent pas jouir de leur droit à l´éducation. En définitive, l’une des principales raisons de la non-scolarisation des enfants est liée à l’insuffisance des ressources des familles pour garantir le droit à une éducation de qualité pour tous les enfants du Burkina.
Insuffisance d’application des textes liés à la loi portant protection et promotion des droits des personnes handicapées au Burkina-Faso
L’éducation pour tous suppose qu’il ne faille pas faire de discrimination de quelque nature que ce soit pour l’accès de tous les enfants à une éducation de qualité. La loi stipule que l’éducation inclusive doit être garantie dans les établissements préscolaires, primaires, post-primaires, secondaires et universitaires du Burkina Faso et que toutes les conditions doivent être réunies pour rendre ces établissements accessibles physiquement et le plus proche possible des personnes en situation de handicap.
La prise en compte de ces mesures est loin d’être une réalité malgré la récente création d’une Direction de Promotion de l’Éducation Inclusive au niveau du MENA en 2014 qui s’est dotée d’une politique nationale en matière d’éducation inclusive. Le domaine de l’éducation inclusive semble être laissé aux mains des religieux et de certains centres privés.
Selon les estimations du Recensement Général de la Population et de l’Habitat22 (RGPH) le nombre de personnes en situation de handicap au Burkina Faso en 2012 était estimé à environ 168 000, soit 1,2 % de la population totale. La Fédération burkinabé des associations pour la promotion des personnes handicapées (FEBAH) évalue à 66 % le nombre de personnes en situation de handicap n’ayant aucun niveau d’instruction et seulement 16,5 % ayant atteint le niveau primaire.
Le contexte socioéconomique et politico-administratif du Burkina Faso n’est pas encore favorable au développement, de manière pérenne, d’éléments permettant une éducation inclusive. Sur le plan spatial, la répartition géographique de l’éducation inclusive est en décalage avec la demande éducative. La grande présence des écoles inclusives en milieu urbain ne correspond pas à la demande éducative selon les données des statistiques nationales.
Au Burkina, 80,9 % des enfants en situation de handicap en milieu rural n’auraient aucun niveau d’éducation contre 35,6 % en milieu urbain. Cette répartition spatiale inégale est à l’origine des longues distances entre le domicile des ESH et l’école, et des difficultés d’accueil dans les centres.
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Comment peut-on organiser la discipline dans un établissement d’enseignement post-primaire et secondaire quand des élèves brandissent leurs droits dont ils viennent de prendre connaissance, sans enfreindre les dispositions de la convention internationale des droits des enfants ?