Mon expérience en politique « Yeumbeul Nord est divisé en quatre zones, je suis la présidente de la zone de Darou Salam. Lors des dernières élections locales, j’étais deuxième sur la liste derrière Samba Demba Ndiaye, c’est ce qui m’a amenée à siéger à la ville de Pikine comme conseillère municipale. Nous étions soixante-seize conseillers, sept parmi nous ont été affectés à Pikine et j’en fais partie. Il s’agit de trois femmes et quatre hommes. Depuis, je continue à travailler pour mon parti, sans répit. Depuis 2011, à l’appel du président Macky Sall, je fais partie des premières femmes à avoir monté des comités dans ma localité et aidé d’autres à le faire. En tant que responsable politique, je suis très active et ne ménage aucun effort pour solidifier notre base, depuis que j’ai rejoint le parti du Président. Je mène beaucoup d’activités avec les femmes de ma localité, on a une caisse qui nous permet de nous financer à hauteur de millions sans l’appui d’aucune institution financière. Donc nous travaillons. » La participation dans le processus de prise de décision au niveau local « Si on parle de politique à la base aujourd’hui, cela concerne essentiellement les femmes. Ce sont elles qui mobilisent. Dans les différents rassemblent, elles sont présentes à 70 %, donc elles ont poids en politique à ne pas négliger au Sénégal. Dans l’exercice de mes fonctions de conseillère, il faut savoir qu’il n’y a pas de rémunération. Nous le faisons bénévolement et nous y allons pour participer aux débats et aux votes de budget. D’habitude, c’est le bureau municipal qui se réunit en amont et nous fait des propositions. Les membres du bureau nous expliquent les différentes dépenses et recettes, si nous avons des questions ou remarques nous les mettons sur la table des discussions. Si nous sommes satisfaits des réponses, nous votons en faveur de la proposition. Et même si nous ne pouvons pas refuser systématiquement de voter si les réponses sont peu convaincantes, nous faisons en sorte de pousser la discussion pour trouver un terrain d’entente et apporter des ajustements. Cela se passe ainsi dans nos zones à Yeumbeul Nord. Nous prenons toujours le temps de voir si nous devons voter pour tel budget ou pas, en faisant en sorte de faire part au maire de nos différentes préoccupations pour qu’il les prenne en compte. En tant que femme, notre voix est écoutée parce que nous allons toujours vers un consensus. Nous discutons tous ensemble et au besoin, nous n’hésitons pas à taper du poing sur la table jusqu’à ce que notre voix soit prise en compte. » Le respect de la parité dans les instances locales « Comme je l’ai rappelé au début, on ne peut pas parler de politique sans les femmes. À la base, elles ont une grande force. Quand on prend les listes électorales, au niveau des communes, elles sont paritaires. Les listes non paritaires ne sont pas valables, dont c’est obligatoire qu’il y ait cette parité sur les listes. Mais malheureusement, là où la parité ne s’applique pas c’est au sein du bureau municipal. Dans notre commune, nous n’avons qu’une seule adjointe au maire. Au niveau départemental, il n’y a pas d’adjointe, ce qui n’est pas normal. C’est ce problème que nous avons. Dans les instances de prise de décisions, les femmes sont la plupart du temps au second plan derrière les hommes. De mon point de vue, l’État a une part de responsabilité. Nous aussi femmes avons notre part de responsabilité. Dans la mesure où parfois, nous ne sommes pas solidaires entre nous. Nous n’hésitons pas à nous mettre des bâtons dans les roues. Alors que les hommes ont toujours le soutien de leurs pairs et des femmes. De la même manière qu’on s’est battu pour avoir la loi sur la parité, on doit continuer le combat pour qu’elle soit respectée dans toutes les instances locales. Si les femmes se mettent ensemble pour cela, nous pourrons y arriver. » Les difficultés des femmes dans le champ politique « La politique n’est pas simple. Quand on a une base avec des personnes derrière nous, il y a forcément des attentes. C’est plus compliqué en banlieue, où les populations vivent dans la précarité. Elles comptent beaucoup sur leurs responsables politiques pour les soutenir et forcément cela demande des moyens. Dans mon quartier, beaucoup de personnes pensent que j’ai une grande influence auprès du président de la République, des ministres ou mêmes des députés. C’est une grande difficulté de les satisfaire et donc d’entretenir et de conserver sa base politique. Si aujourd’hui, tu n’as pas un poste politique important qui puisse te permettre de le faire, cela devient compliqué. Les populations placent beaucoup espoir en nous pour que nous les soutenons. Quand je faisais campagne pour le président Macky Sall et notre maire actuel, je l’avais fait sans condition, ce qui ne sera pas le cas pour les prochaines élections. Il faut qu’il y ait un changement. Nous avons aussi des difficultés en tant que femmes, au niveau familial. Nous sommes dans les maisons, nous nous occupons du foyer etc. On le remarque pour les jeunes filles qui après le secondaire, pour la plupart, sont sorties de l’école. Ce qui nous freine, parce que nous avons un niveau d’éducation faible comparé aux hommes. Il y a aussi une mauvaise compréhension de la parité qui favorise beaucoup de réticences. Alors que nous ne cherchons que l’égalité en politique. Dans mon propre ménage, je reconnais l’autorité de mon époux et cherche toujours à avoir son aval. Mais dans le milieu professionnel et politique, il faut qu’il y ait cette parité et une reconnaissance égale pour les femmes. Elles doivent avoir la possibilité d’exercer toutes fonctions. » L’accès aux plus hautes fonctions locales et étatiques « Si j’avais l’ambition de devenir maire, je sais qu’actuellement ce sera difficile. Il y a beaucoup de calculs en politique. Il faut faire son propre calcul avant de se positionner pour ce poste. Je pense qu’il faut y aller par étapes et apprendre petit à petit avant d’y arriver. Le jour où je prendrai la décision de me présenter pour être maire, je serai prête pour cela et saurais que j’ai franchi les étapes pour être élue maire. Je ne suis pas pressée. Toutefois, il y a des femmes très compétentes qui sont ministres, députés ou directrices de société. Donc, il y a plusieurs femmes qui ont les compétences et capacités pour être maires. Nous n’avons pas encore de femme maire dans ma commune, mais je ne désespère pas. Cela viendra. Il faudrait mieux accompagner les femmes actrices de développement « Il faut plus nous accompagner. Par exemple, le président Sall encourage la création d’emplois, ce que je fais dans ma localité à travers mon établissement d’enseignement. Des personnes comme moi, méritent plus de soutien de la part des décideurs. Il ne s’agit pas seulement de donner des financements à court terme, mais de faire en sorte qu’on ait des ressources stables et suffisantes. Je dois reconnaitre que le président personnellement m’accompagne et c’est connu de mon entourage. Toutefois, en tant que directrice d’école surtout et actrice de développement, il peut y avoir une meilleure définition des besoins et un soutien sur le long terme pour que je puisse continuer à servir ma localité. Il y a dans toutes les localités du Sénégal des dames de fer, qui font de leur mieux et qui avec un peu plus d’accompagnement pourront réaliser des choses extraordinaires pour leurs localités. Il faut les identifier et les soutenir. »
Elle est responsable politique au parti « Alliance pour la République » depuis 2009 et directrice de l’école privée Alioune Badara Seck à Yeumbeul Nord.
Présidente de la zone de Darou Salam, Madame Ngom est conseillère municipale de la ville de Pikine.