Parce que les économies ouest-africaines devront créer beaucoup plus d’emplois qu’elles ne le font aujourd’hui pour faire face à l’accélération du nombre de jeunes qui arriveront sur le marché du travail au cours des prochaines années et décennies. Selon le Population Reference Bureau , il y a plus de 100 millions de jeunes dans la région, ce qui représente un tiers de la population totale, sachant que ce chiffre atteindra 218 millions d’ici 2050. Il y a 10 à 12 millions de jeunes qui arrivent sur le marché du travail chaque année en Afrique. D’ici 2050, il devrait y en avoir 47 millions. Il faudra créer des emplois aussi bien dans les zones urbaines que dans les zones rurales où les activités économiques sont encore aujourd’hui peu diversifiées, peu productives et peu attractives pour les jeunes.
Parce que les quinze pays de la CEDEAO ainsi que le Tchad, le Cameroun et la Mauritanie, qui constituent la zone de focalisation de WATHI, sont presque tous caractérisés par des performances économiques acceptables mais insuffisantes sur longue période pour réduire significativement les niveaux de pauvreté toujours très élevés et impulser les transformations nécessaires des structures économiques et sociales au bénéfice des populations. Du Nigeria à la Guinée, en passant par le Mali, le Niger, la Côte d’Ivoire ou le Ghana, la région compte des grands exportateurs de ressources minières, pétrolières et agricoles mais ces richesses n’ont pas été utilisées pour diversifier leurs bases économiques et améliorer le bien-être de la majorité de leurs populations.
Parce que les pays ont besoin de créer de la richesse et de mobiliser beaucoup plus de ressources financières internes pour relever tous les défis majeurs qui se posent aux pays de la région ouest-africaine et au-delà, qu’il s’agisse de l’amélioration des systèmes d’éducation et de formation, des systèmes de santé, des politiques de protection sociale et de réduction des inégalités, du renforcement de la sécurité, de la stabilité politique et de la consolidation des institutions démocratiques. La production de richesses par les économies locales est cruciale aussi bien pour le bien-être des populations directement que pour la capacité d’action des Etats qui ont besoin d’accroître significativement leurs ressources fiscales.
Parce que la croissance économique, pour être positive pour toutes les populations, pour être durable et qu’elle ait du sens pour les futures générations en préservant les ressources naturelles et l’environnement, doit impliquer une participation aussi large que possible des femmes et des hommes dans les processus de production et d’échanges de biens et de services, et servir à maintenir les équilibres fondamentaux qui assurent la stabilité politique et sociale dans chaque pays. Au-delà des taux de croissance annuels du PIB, les pays de la région ont besoin d’examiner le fonctionnement réel de leurs économies aujourd’hui : qui produit quoi ? Où ? Comment ? Avec quelle intensité de création d’emplois qualifiés et non qualifiés et avec quelle répartition des profits entre acteurs nationaux et étrangers ?
Parce que les questions économiques fondamentales sont à la fois essentielles et parmi les moins connues et maîtrisées par les citoyens des pays de la région, parce qu’elles sont souvent discutées dans les cercles d’experts, d’universitaires, d’acteurs du monde de l’entreprise et de la finance, alors que toutes les catégories sociales participent dans un pays à la création de richesses, dans les secteurs formels ou informels, et que seuls des citoyens mieux informés sur les enjeux et le fonctionnement de l’économie seront à même d’exiger de leurs gouvernants des mesures pour rectifier des politiques économiques qui ne profitent pas au plus grand nombre et creusent les inégalités.
Parce que les pays africains sont tous intégrés dans la mondialisation des échanges, dans la recherche de sources de financement extérieures pour leur développement économique, et sont signataires d’accords internationaux de libre échange en plus des processus d’intégration régionale et continentale, et que le sentiment dominant au sein des populations est que cette ouverture au marché international ne favorise pas suffisamment l’émergence d’un secteur privé local fort et d’une dynamique de croissance portée par des acteurs nationaux et régionaux. Les échanges intra-africains aujourd’hui ne représentent que 16 % du commerce en Afrique. Le continent africain reste par ailleurs un acteur marginal dans le commerce mondial avec uniquement une part de 2,2% pour les exportations et 4% pour les importations.