Auteur (s) : Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (ONUWAS)
Type de publication: Etude
Date de publication: Août 2018
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L’étude présente est destinée à examiner les causes et les moteurs des conflits liés aux éleveurs dans six pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel : la Mauritanie, la Guinée, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Nigeria. Ces pays ont été sélectionnés car ils constituent une ceinture de transhumance qui lie toute la région et fournissent des éléments de comparaison intéressants. Le pastoralisme est important dans chacun de ces pays, mais l’échelle et la dynamique des conflits impliquant des éleveurs sont différentes d’un pays à l’autre. Les politiques étatiques et les pratiques locales envers les éleveurs varient. L’un des objectifs de la comparaison est d’identifier les exemples de bonne pratique et, à l’inverse, de souligner les facteurs contribuant aux conflits.
Le pastoralisme est important dans chacun de ces pays, mais l’échelle et la dynamique des conflits impliquant des éleveurs sont différentes d’un pays à l’autre. Les politiques étatiques et les pratiques locales envers les éleveurs varient
Tout en relevant les défis spécifiques du pastoralisme dans chaque pays, l’étude souligne la nécessité de prioriser les solutions durables et inclusives pour les agriculteurs ainsi que pour les éleveurs. Ces solutions ont une dimension à la fois nationale et régionale.
Recommandations pour le Burkina Faso
- Sensibiliser les populations aux textes juridiques régissant les terres, notamment les terres pastorales et la transhumance ;
- Encourager les systèmes de rotation d’utilisation des terres entre les agriculteurs et les éleveurs – rotation des terres saisonnière ou annuelle ;
- Investir davantage dans le secteur de l’élevage et de l’agriculture et réduire le nombre de troupeaux en déplacement vers le sud vers les États côtiers de l’Afrique de l’Ouest ;
- Protéger et préserver la végétation locale et les écologies des sols ;
- Protéger et maintenir les zones pastorales existantes ;
- Investir dans l’éducation rurale pour tous les enfants, en ciblant en particulier les éleveurs notamment dans le nord du Burkina Faso. Cela aiderait les éleveurs et les agriculteurs à diversifier leurs moyens de subsistance et à s’engager politiquement davantage;
- Promouvoir des mécanismes communautaires de résolution des conflits et soutenir la participation des femmes et des jeunes.
Recommandations pour la Guinée
- Soutenir davantage le Ministère de l’Élevage et améliorer les systèmes de production de l’élevage et la protection des écosystèmes du pastoralisme, notamment en démarquant les itinéraires de transhumance;
- Renforcer les services essentiels aux éleveurs et aux agriculteurs avec des investissements dans l’infrastructure en eau, les services vétérinaires et les itinéraires de transhumance;
- Apporter un soutien technique et financier aux activités des femmes comme les coopératives de production laitière, les mini-laiteries;
- Soutenir et renforcer les dialogues inclusifs et les structures de prévention et de résolution des conflits là où des différends surviennent le plus souvent – notamment en Guinée maritime et en Guinée forestière.
Recommandations pour le Mali
- Soutenir davantage les secteurs de l’agriculture et de l’élevage par des investissements et des politiques publiques ;
- Restaurer la présence de l’état en particulier les infrastructures de base et les services sociaux en milieu rural, pour reconstruire les liens avec les communautés ;
- Prendre en compte les causes profondes du recrutement d’éleveurs dans les groupes d’insurgés ;
- Renforcer le dialogue national et local pour rechercher des solutions politiques aux crises au centre du Mali. Ces initiatives doivent être combinées à des programmes de développement afin d’aider les agriculteurs et les éleveurs et prévenir l’escalade des conflits ;
- Les conflits au Mali ont un impact spécifique sur les femmes ; des interventions politiques spécifiques à cet égard sont nécessaires pour apporter des solutions ;
- Instaurer une réponse judiciaire capable de répondre aux violations des droits de l’homme dans le contexte des violences entre éleveurs et agriculteurs, en identifiant les coupables et en les présentant devant la justice.
Recommandations pour la Mauritanie
- Établir des commissions transfrontalières permanentes entre la Mauritanie et le Sénégal, et la Mauritanie et le Mali pour aider à coordonner et faciliter la transhumance transfrontalière. La coopération entre les États pourrait être axée sur des questions telles que les droits de passage, les époques de transhumance et, si nécessaire, l’identification officielle des itinéraires de transhumance.
- Construire d’autres points d’eau le long des itinéraires de transhumance, en Mauritanie, au Mali et dans le nord du Sénégal. Tout en fournissant de l’eau autant que possible dans les zones où elle est rare, la consommation durable d’eau devrait être également encouragée.
- Établir ou renforcer les opérations existantes de juridictions coutumières et renforcer les mécanismes traditionnels et administratifs de résolution des différends non-violents.
- Appliquer le Code pastoral mauritanien et sensibiliser la société civile, les agriculteurs et les bergers sur leurs droits et leurs devoirs en vertu du Code pastoral.
Recommandations pour le Niger
- Garantir les terres de pâturage et les parcours de bétails et les droits sur les terres des éleveurs;
- Réactiver les comités chargés de la gestion de l’accès aux ressources naturelles pour les agriculteurs et les éleveurs afin de réduire les conflits, et promouvoir la participation des femmes dans la résolution des conflits;
- Produire et mieux distribuer les aliments pour animaux en saison sèche, à des prix abordables;
- Construire de nouveaux points d’eau et de nouveaux puits et forages dans les zones pastorales et agropastorales et résoudre les problèmes de stockage de l’eau ;
- Formuler des politiques avec les agriculteurs, éleveurs et les communautés locales pour lutter contre le banditisme et le vol de bétail.
Recommandations pour le Nigéria
Toutes les recommandations citées devraient prendre en considération la représentation des femmes pour la gestion des conflits entre éleveurs et agriculteurs au Nigeria. Les femmes et les filles jouent un rôle primordial dans la normalisation des relations entre communautés et peuvent avoir une influence sur les jeunes qui sont les principaux protagonistes des conflits.
À court et à moyen terme
- Appuyer les efforts entrepris au niveau fédéral et étatique pour mettre fin à la violence associée aux affrontements entre éleveurs et agriculteurs, en renforçant la sécurité, le dialogue communautaire et le processus judiciaire, tout en respectant les obligations nationales et internationales en matière des droits de l’homme.
- Plus d’analyses sur le terrain doivent être faites concernant l’insécurité liée au pastoralisme et sur les questions liées aux droits de l’homme dans les états affectés de la « Ceinture centrale », du sud-est et du sud-ouest, pour documenter les défis actuels et proposer des solutions immédiates et de long terme.
- Renforcer l’analyse alertes rapides et les risques en matière de droits de l’homme pour mieux comprendre les tendances et la dynamique des conflits et éclairer les réponses politiques.
- Établir ou renforcer des comités de gestion des conflits dans toutes les Zones de gouvernement local (LGA) où des tensions surviennent entre éleveurs et agriculteurs. Ces comités devraient inclure des représentants masculins et féminins d’agriculteurs et d’éleveurs et assurer la médiation pour résoudre les conflits. Une supervision fédérale ou un arbitrage neutre pourrait être bénéfique.
- Analyser les questions juridiques et constitutionnelles relatives aux conflits entre éleveurs et agriculteurs et l’applicabilité au Nigeria du Protocole de la CEDEAO sur la transhumance et des autres instruments pertinents.
À long terme
- Étudier et proposer différentes options de modernisation, transformation et réglementation du secteur de l’élevage et de déplacement de la production animale au Nigeria pouvant bénéficier à la fois aux agriculteurs et aux éleveurs et à d’autres communautés concernées ; évaluer les besoins infrastructurels et de partenariat nécessaires pour chaque option à court, moyen et long terme ; et appliquer les leçons d’autres pays ayant une expérience dans ce domaine (par exemple, le Brésil).
- Étudier l’impact des conflits entre éleveurs et agriculteurs au Nigeria (i) sur les femmes et leur autonomisation économique et (ii) sur les droits des communautés autochtones sur les terres et la culture ; et proposer des mesures et des options.
- Soutenir les autorités nigérianes dans l’organisation de consultations avec des parties prenantes gouvernementales et non-gouvernementales et des acteurs extérieurs, si nécessaire, pour délibérer sur les solutions données par les études mentionnées dans les deux premières recommandations.
Recommandations générales pour les différents pays de la zone
- Renforcer la gouvernance nationale des déplacements de troupeaux, notamment des mécanismes d’identification et de traçabilité, et établir ou redynamiser les réseaux ou comités locaux et nationaux en vue de gérer la transhumance.
- Identifier, élaborer et mettre en oeuvre des programmes régionaux transfrontaliers sur les infrastructures de la transhumance le long des corridors de transhumance identifiés (par exemple, des forages et parcs de regroupement de la transhumance où fournir des aliments pour animaux, de l’eau, des points de repos, des services vétérinaires, type observatoire).
- Explorer des partenariats avec la communauté internationale et le secteur privé pour creuser des forages (utilisant par exemple l’énergie solaire) dans des lieux stratégiques de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel afin d’améliorer la résilience des pasteurs en saison sèche en coordonnant ainsi les déplacements de la transhumance et le cycle des cultures.
- Concevoir une stratégie à long terme face aux effets du changement climatique – rareté de l’eau, déforestation et érosion des sols – sur les moyens d’existence et la coexistence pacifique des éleveurs et des agriculteurs de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.
- Dynamiser et étendre la portée du Projet Régional d’Appui au Pastralisme au Sahel, (PRAPS, financé par la Banque mondiale, dirigé par la CEEDEAO-UEMOA avec la coordination du CILSS) et d’autres projets comparables d’appui au pastoralisme au Nigeria qui compte la plus importante population de pastorale et le nombre le plus élevé de conflits entre agriculteurs et éleveurs en Afrique de l’Ouest.
- Encourager les États membres de la CEDEAO à affecter au secteur de l’élevage 3 % de l’accord relatif à 10 % de leur budgétisation à l’agriculture en vertu de la Déclaration de Maputo.
- Dans le cadre de la Convention de la CEDEAO sur les armes légères et de petit calibre, effectuer une analyse de l’impact de la circulation d’armes dans la région sur les conflits entre agriculteurs et éleveurs et formuler des recommandations sur la manière de relever ce défi.
- Mettre à la disposition des Équipes-Pays des Nations Unies et les encourager à traduire les conclusions de cette étude dans leur travail programmatique en appui à la Stratégie intégrée de l’ONU pour le Sahel (UNISS) concernant les questions transfrontalières.
- Faciliter, en collaboration avec la CEDEAO, les États membres, la société civile et les partenaires concernés, le partage d’expérience entre les pays de la CEDEAO en vue de reproduire les bonnes pratiques.
- Sensibiliser à la nécessité d’assistance aux moyens de subsistances des agriculteurs et des éleveurs affectés par les conflits, en particulier dans les zones d’insurrection, notamment le centre et le nord du Mali et le Bassin du Lac Tchad.
- Explorer le développement par le secteur privé de la couverture des TIC dans les zones rurales afin de faciliter l’enseignement à distance (alphabétisation, notions de calcul, éducation générale) et pour une inclusion plus profonde des communautés pastorale dans le cadre économique régional global.
- Procéder, en collaboration avec la CEDEAO, à une évaluation et à une étude de faisabilité d’écoles rurales et de l’éducation d’enfants et d’adultes nomades dans la région par exemple, avec la création de pensionnats et des cours d’enseignement virtuels par la radio et les téléphones mobiles.
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