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Réseau des Organisations Paysannes et des Producteurs Agricoles de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA) ; European Centre for Development Policy Management (ECDPM)
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Le Niger se classe parmi les pays « à vocation agricole » en raison de l’importance de sa population rurale pauvre et du rôle de l’agriculture en tant que principal moteur de la croissance (46% du PIB entre 2005 et 2008) qui emploie près de 80% de la population active (INS 2001). Depuis le déclin du secteur minier d’uranium, le secteur primaire est devenu le principal pôle économique du pays. Ce secteur a connu une croissance moyenne de 6,4% par an sur la période 1995– 2007. Mais cette croissance est volatile avec une hausse de 1,7% en 2007 contre celle de 7,7% en 2006. Cette variabilité reflète le ralentissement de la production agricole, qui n’a progressé que de 0,7% en 2007 contre 12,4% en 2006, et sa vulnérabilité aux variations climatiques. Le potentiel agro-sylvopastoral du Niger est largement sous-exploité et contribue en deçà de ses capacités à l’économie nationale.
Malgré son étendue, le Niger dispose de peu de terres cultivables (moins de 4% du territoire). Les pâturages permanents couvrent environ 9% du territoire, et les forêts seulement 2%. L’agriculture est limitée au Nord par l’isohyète 350 mm, au-delà duquel la production de mil cesse pratiquement. La zone soudanienne et la zone sahélo-soudanienne sont considérées comme potentiellement sédentaires, contrairement au Nord du pays, où l’on trouve avant tout une activité nomade.
La majorité de la production du sous-secteur agricole est destinée à assurer la sécurité alimentaire des ménages et la commercialisation des produits agricoles, qui est composée des surplus de production et des réponses à un besoin ponctuel de liquidités, est faible. Les cultures vivrières représentent environ 76% de la production agricole et sont dominées par le mil, le sorgho et le riz, mais aussi le niébé et l’arachide. Un peu de coton apparaît plus au sud, dans la zone soudanienne. Les cuvettes sont utilisées pour les cultures maraîchères (tomates, oignons, etc.) ou les arbres fruitiers. Mais, les rendements de ces différentes cultures restent très faibles et très fluctuants avec une croissance de la production fondée essentiellement sur l’augmentation des superficies.
Politiques et programmes
Aperçu historique de la politique agricole nationale depuis le milieu des années 1990
En un demi-siècle, l’Etat nigérien, recherchant quasiment les mêmes objectifs, a emprunté cinq options différentes pour déployer ses dispositifs en milieu rural. Les politiques agricoles sont étayées selon les périodes suivantes:
- 1960-1973, développement sectoriel par l’intervention directe de l’Etat.
- 1974-1983, recherche de l’autosuffisance alimentaire.
- 1984-1991, responsabilisation des populations pour un développement endogène.
- 1992-2000, adoption de Principes directeurs d’une politique de développement rural.
- 2000-2011, adoption de la Stratégie de développement rural.
- 2012-2015 Programme de développement économique et social (PDES) à travers l’initiative 3N : les Nigériens Nourrissent les Nigériens.
Le PDES comme référence de politique agricole depuis 2012
Au Niger, depuis l’avènement de la septième République avec la nouvelle majorité au pouvoir, le seul cadre de référence en matière de développement agricole est le Programme de Développement Economique et Social (PDES).
Les orientations générales en matière de sécurité alimentaire et de développement agricole durable sont celles de l’Initiative 3N, « Les Nigériens Nourrissent les Nigériens».
Ces orientations, qui découlent du Programme de Renaissance du Niger défini par le Président de la République, visent à mettre durablement les populations nigériennes à l’abri de la faim et de la malnutrition et à leur garantir les conditions d’une pleine participation à la production nationale et à l’amélioration de leurs revenus. L’objectif de l’Initiative 3N est de « renforcer les capacités nationales de production alimentaire, d`approvisionnement et de résilience face aux crises alimentaires et aux catastrophes naturelles» (PDES, 2012).
Les principaux programmes du PDES dans le domaine agricole qui ont été retenus sont: i) l’accroissement et la diversification des productions agro-sylvo-pastorales et halieutiques ; ii) l’approvisionnement régulier des marchés ruraux et urbains en produits agro-sylvo-pastoraux et halieutiques ; iii) l’amélioration de la résilience des groupes vulnérables face aux changements climatiques, crises alimentaires et catastrophes naturelles ; iv) l’amélioration de l’état nutritionnel des nigériens et v) l’impulsion de réformes dans le secteur de la sécurité alimentaire et du développement agricole durable.
Mobilisation des ressources financières
Au Niger, malgré que le secteur agricole contribue pour plus de 20% à la formation du Produits Intérieur Brut, le financement de ce secteur à travers le budget de l’Etat n’a pas encore trouvé une place qu’il mérite.
Certes, le Niger fait partie des pays qui ont respecté la déclaration de Maputo sur l’agriculture, néanmoins, les 10% de son budget qu’il affecte à ce secteur proviennent en grande partie des financements des projets d’investissement des partenaires au développement.
Les accords de Maputo fixent à 10% au moins les dépenses du secteur agricole dans l’ensemble des dépenses publiques. Entre 2003 et 2006, le Niger a dédié entre 11 et 14% du budget de l’État à l’agriculture, dépassant donc l’engagement pris aux termes de la Déclaration de Maputo sur l’agriculture et la sécurité alimentaire en 2003, par laquelle les pays membres de l’Union africaine se sont engagés à affecter au moins 10% de leurs dépenses publiques à l’agriculture et au développement rural. Cette proportion élevée s’explique par la forte contribution des PTF internationaux au secteur agricole et rural du Niger, puisque celle-ci représentait 74% du budget du secteur en 2008.
Croissance de la productivité agricole
La productivité agricole est appréciée par l’évolution des différents rendements des principales cultures. Les figures ci-dessous présentent les rendements des principales cultures au Niger.
Dans l’ensemble, on constate que ces rendements sont aussi soumis à de fortes variations comme furent aussi l’ensemble des cultures vivrières au Niger à causes des aléas climatiques.
Figure N°2 : Evolution des rendements des principales cultures au Niger
Marché et commerce
De 1995 à 2002, la part des exportations agricoles dans les exportations totales fluctue entre 10 et 15% avec une moyenne de 14%. En 1999 et 2000, cette part a même atteint respectivement un record de 19 et 18%.
De 2003 à 2012, cette part ne cesse baisser pour passer respectivement de 14% à 3% avec une moyenne de 8%. La plus faible part enregistrée en 2012 coïncide avec le début d’exportation des produits pétroliers au Niger.
De 1995 à 2003 les exportations agricoles du Niger ont conservé une tendance haussière. La moyenne en valeurs de ces exportations est de l’ordre de 16 607 millions de F CFA. Malheureusement, de 2003 à 2012, cette tendance a alterné des périodes de croissance (2007 ; 2008 ; 2009 ; 2010 ; 2011) et des périodes de baisse ((2005 ; 2006 ; 2012) avec une moyenne de 18 514 millions de F CFA.
Lorsqu’on s’intéresse à l’évolution des principales cultures d’exportation, il apparaît qu’en valeur, l’oignon domine largement cette exportation suivis du Niébé et du souchet.
L’importance des importations agricoles du Niger s’apprécie selon que la campagne agricole est bonne ou mauvaise. Ainsi, la valeur de ces importations alterne des périodes de hausse et de baisse pour atteindre le record de 223 672 millions de F CFA en 2012.
En pourcentage des importations totales, cette part est de l’ordre de 13% entre 2009 à 2011, mais des années qui suivent les crises alimentaires affichent des taux très élevés (23% en 2008 et 28% en 2012).
Le Niger échange avec la majorité des pays de la sous régions aussi ceux de l’espace UEMOA que ceux de la CEDEAO. Mais son commerce avec l’Europe est de loin le plus important quand bien même qu’il connaît ce dernier temps une perte de vitesse. La structure des différentes importations montre que l’Union européenne et l’Europe en générale est en tête suivi de l’Afrique, la CEDEAO et l’Asie. De 2000 à 2003, l’Afrique respectivement la CEDEAO était le second partenaire du Niger derrière l’Europe repavement l’Union européenne. Pendant la part de l’Océanie et les pays indéterminés régresse, celle de l’Asie augmente régulièrement.
Concernant les exportations, jusqu’en 2000, les pays de l’OCDE étaient largement en tête avec plus de 50% des exportations du Niger. Ensuite viennent l’Europe respectivement (l’Union européenne) qui, depuis 2002 ont connu une augmentation spectaculaire dans les échanges avec le Niger avec plus de 50% des exportations.
Les exportations nigériennes en direction de l’Afrique respectivement (la CEDEAO) qui progressaient jusqu’en 2000, connaissent ces dernières années une baisse spectaculaire. Parallèlement, les exportations vers l’Asie demeurent relativement constantes.
La part des produits de l’Agriculture dans les exportations totales est de 16% en 2001 et celle des produits de l’élevage est 22% pour cette même période.
La pauvreté et la sécurité alimentaire
International Food Policy Research Institut a calculé pour l’année 2012, les indices de la faim pour un certain nombre des pays dans le monde. Le tableau ci-dessous présente les résultats du Niger.
Source : IFPRI, 2012
L’analyse de ces résultats nous permet de conclure que la proportion de la population sous-alimentée a diminuée en passant de 37% de 1990-1997 à 16% en 2006-2008.
L’indice de la faim pour le cas du Niger a aussi baissé en passant de 36,4/35,9 en 1990-1996 à 30,5/22,3 en 2001/2012. Dans l’ensemble ces résultats sont un peu rassurant lorsqu’on sait que le principal objectif de la politique agricole des autorités publiques c’est de réduire le nombre de malnutris et assurer l’autosuffisance alimentaire.
Les facteurs explicatifs du blocage ou progrès
Plusieurs réflexions faites dans le cadre du développement du secteur agricole ont reconnu que les mauvaises performances de ce secteur sont surtout liées à l’accès limités aux technologies améliorées, aux services financiers sans oublier l’impact des aléas climatiques et la faible proportion des terres irriguées.
La population rurale est en manque souffre aussi de la faiblesse des moyens humains et financiers dont disposent les institutions rurales publiques et paysannes, ainsi que de l’insuffisance des infrastructures rurales, ce qui prive les populations de l’accès aux services essentiels (transports de biens et de personnes, eau potable, santé, éducation, communication, etc.
De manière spécifique, les évaluations des politiques et programmes de développement du secteur agricole révèlent :
- des insuffisances dans la gestion du secteur rural liées à la fragmentation et l’instabilité du cadre institutionnel, la précarité des services d’encadrement des producteurs et de la faible organisation des acteurs ;
- l’accès limité des acteurs ruraux aux services financiers pour acheter des intrants et des matériels de production ;
- l’insuffisance des infrastructures et des équipements, de l’information météorologique pour prévenir les risques et la faible circulation de l’information sur les marchés ;
Conclusions et recommandations
Au Niger, après la déclaration de Maputo, le gouvernement a très tôt pris des mesures nécessaires pour la mise en œuvre effective de cette décision.
C’est ainsi que le pays s’est engagé depuis octobre 2006 dans le processus de mise en œuvre de l’agenda du Programme Détaillé du Développement de l’Agriculture Africaine (PDDAA) et de la Politique Agricole commune de la CEDEAO (ECOWAP), comme faisant partie des efforts nationaux de promotion du développement du secteur agricole et de la croissance économique. Depuis cette date, le plan d’investissement agricole Compact-nationale du PDDAA (PNIA) est en fait le cadre de référence de la politique agricole et de la sécurité alimentaire.
Pour réussir cette politique, la table ronde sur le PNIA/SDR des bailleurs organisée en septembre 2009 a été l’occasion de conforter et de promouvoir ce processus national et a permis à tous les acteurs du secteur rural de s’engager à soutenir sa mise en œuvre.
En somme, on retient que les exportations agricoles du Niger ont significativement augmenté en valeurs de 2003 à 2012 par rapport à la période allant de 1995 à 2002. Néanmoins, les importations agricoles conservent une tendance constante de 2009 à 2011 avant de s’envoler en 2012.
Ce résultat sans doute mitigé du secteur agricole du Niger en matière de capacité production et d’exportation se traduit au niveau de la population rurale par des niveaux d’indice de pauvreté ou d’insécurité alimentaire pas du tout satisfaisant.
En effet, malgré les multiples efforts déployés depuis plusieurs années, et l’accent particulier mis sur la lutte contre la pauvreté, le phénomène n’a connu qu’une légère amélioration passant de 63,7% des pauvres en 1990 à 62,1% en 2005, puis à 59,5% en 2008. Les actions menées en direction du monde rural, n’ont pas encore produit les effets escomptés. Un des obstacles auxquels sont butés les efforts déployés est sans nul doute le rythme exponentiel d’accroissement de la population avec un taux de croissance démographique de 3,3% en liaison avec un Indice Synthétique de Fécondité de 7,1 enfants en moyenne par femme.
De manière spécifique, les évaluations des politiques et programmes de développement du secteur agricole révèlent :
- des insuffisances dans la gestion du secteur rural liées à la fragmentation et l’instabilité du cadre institutionnel, la précarité des services d’encadrement des producteurs et de la faible organisation des acteurs ;
- l’accès limité des acteurs ruraux aux services financiers pour acheter des intrants et des matériels de production ;
- l’insuffisance des infrastructures et des équipements, de l’information météorologique pour prévenir les risques et la faible circulation de l’information sur les marchés.
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