Étude monographique sur la filière cacao dans l’UEMOA
Auteur(s) :
Direction des Études et de la Recherche, Direction Générale de l’Économie et de la Monnaie, Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO)
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Introduction
Le cacao constitue, selon l’Agence Belge de Développement « Trade for Development Centre », le troisième marché alimentaire mondial, avec un montant annuel des échanges estimé à environ 10 milliards de dollars. A la faveur de l’émergence d’une classe moyenne dans plusieurs pays d’Asie, d’Amérique Latine et d’Europe de l’Est, la demande de cacao et de ses produits dérivés a progressé au cours des dernières années. Selon les statistiques de l’Organisation Internationale du Cacao, la demande, approximée par les quantités broyées, est passée de 3,2 millions de tonnes en 2004 à prés de 4 millions de tonnes en 2012.
Pour répondre à cette demande mondiale sans cesse croissante, le développement de la culture du cacao a pris de l’ampleur, notamment en Asie, après l’Afrique où elle est fortement ancrée. Les perspectives de la filière cacao demeurent d’autant plus favorables que la demande effective et la demande potentielle sont appelées à croître, eu égard aux profondes mutations en cours, notamment la montée en puissance de la classe moyenne partout dans les pays en développement, y compris ceux d’Afrique.
Dans l’UEMOA, le cacao fait partie des principaux produits de base exportés par les États membres. Il provient essentiellement de la Côte d’Ivoire et du Togo. Avec en moyenne 35% de la production mondiale de fèves ces dernières années, l’UEMOA se positionne comme le premier producteur mondial. En Côte d’Ivoire, la production de cacao est le principal pilier du sous-secteur agricole et revêt, de ce fait, une importance stratégique pour l’équilibre macroéconomique et la stabilité sociale.
Durant ces dernières années, la filière cacao dans l’Union a été confrontée à plusieurs contraintes et difficultés qui ont entravé son plein développement. Le dynamisme qui caractérisait la situation de la filière cacao a commencé à montrer des premiers signes d’essoufflement vers le milieu des années 1980. En réponse à ces difficultés, les Autorités ivoiriennes ont mis en œuvre jusqu’en 2011 plusieurs réformes dont les résultats ont été mitigés. Les objectifs de transformation n’ont jamais été atteints et la filière peine à se consolider autour d’une économie cacaoyère durable. Prenant en compte les limites des mesures successives, une nouvelle réforme a été adoptée en novembre 2011.
La présente étude s’inscrit dans le cadre de l’approfondissement de la connaissance des économies de l’Union. Elle vise principalement à analyser les tendances actuelles du marché mondial du cacao, les défis présents et futurs à relever pour permettre à la filière cacao de continuer à jouer un rôle de locomotive de la croissance en Côte d’Ivoire
Le marché mondial du cacao
- Analyse du marché international du cacao
Evolution de la production
La production mondiale du cacao n’a cessé d’augmenter depuis 1960. Elle est passée de 1,2 million de tonnes en 1961 à 1,7 million de tonnes et 5,0 millions de tonnes respectivement en 1980 et 2012. Cette progression est pour l’essentiel due à l’extension des superficies plantées et dans une moindre mesure, à l’accroissement des rendements qui sont, en moyenne, passés de de 352,4 kg à 503,6 kg entre 1980 et 2012, soit une hausse de 43% en 26 ans. Ils atteignent 2kg à l’hectare actuellement dans les pays les plus performants.
La carte géographique de l’offre de cacao a connu des bouleversements durant les cinq dernières décennies. L’Amérique Latine, d’où est originaire le cacaoyer, est passée du stade de premier producteur avec plus de 80% des quantités mondiales à la fin du 19e siècle, à la troisième position derrière l’Afrique de l’Ouest et l’Asie en 2012. En Afrique de l’Ouest, la production est passée d’environ 1.000.000 tonnes à près de 1.400.000 tonnes au cours de la décennie 1980. Elle se situait autour de 3.000.000 tonnes en 2012.
Le changement dans la hiérarchie des producteurs s’est accéléré au cours des années 1980, lorsque des pays d’Asie, tels que l’Indonésie et la Malaisie, ont adopté une politique de développement de la culture du cacao. Au cours des dernières années, la majeure partie de la production, environ les deux tiers, provient d’Afrique, singulièrement de l’Afrique de l’Ouest, où la Côte d’Ivoire et le Ghana assurent plus de 50% de l’offre mondiale.
Elle est suivie par l’Asie et l’Amérique Latine qui contribuent chacune pour environ 15%. Cette configuration de la production mondiale de cacao pourrait se maintenir au cours des années à venir, eu égard aux efforts déployés par les plus gros producteurs pour maintenir leur positionnement sur le marché mondial, notamment la réforme ambitieuse entamée en Côte d’Ivoire depuis la fin de l’année 2011 et la politique de renouvellement des plants au Ghana.
- Physionomie de la demande
La demande de cacao, approximée par le volume broyé, est estimée à près de 4,0 millions de tonnes depuis 2012. Elle émane essentiellement des pays du Nord, principalement de l’Europe. En 2009, 60% du cacao produit dans le monde étaient exportés vers l’Europe, 21% vers l’Amérique du Nord, 10% dans la Communauté des Etats Indépendants (CEI) et le reste en Asie.
Cette situation s’expliquerait par le fait que, l’Amérique du Nord reste, avec l’Europe, les principaux consommateurs de chocolat, selon l’ICCO. Le cacao est généralement importé sous forme de fèves, de beurre et de tourteaux destinés à l’alimentation, et dans une moindre mesure aux industries pharmaceutique et cosmétique.
La demande de poudre de cacao est prédominante dans les pays d’Asie où elle est utilisée pour parfumer les biscuits, glaces et boissons chocolatés de plus en plus consommés dans cette région du monde. Par ailleurs, la demande de cacaos « spéciaux » et de cacao d’origine est très dynamique. L’organisme de certification Fairtrade estime que la vente de cacao issu du commerce équitable a augmenté de 35% en 2009.
La demande mondiale de cacao est suffisamment couverte par la production et les stocks disponibles. Elle s’est, avec celle des produits dérivés, accompagnée au cours des dernières années d’une évolution des exigences des consommateurs. Les grands industriels du secteur ont édicté des normes regroupées sous le vocable de « cacao durable ». C’est un ensemble de règles de production qui doit respecter trois aspects essentiels : économique, social et environnemental. L’objectif visé est de mettre sur le marché un produit de bonne qualité de façon durable, faisant l’objet de transactions transparentes et équitables, afin d’améliorer les conditions de vie des producteurs et de porter un coup d’arrêt au travail des enfants dans les plantations.
- Aspects normatifs en matière de production du cacao
La production de cacao fait l’objet d’une grande attention qui la place au centre d’un intense débat à l’échelle mondiale sur les méthodes employées dans le secteur. La filière se retrouve ainsi impliquée dans les grandes questions d’actualité internationale telles que le travail des enfants, la préservation de l’environnement et la pauvreté en milieu rural. Ces sujets sont étroitement liés aux normes internationales de qualité de la production de cacao.
Le travail des enfants dans les plantations de cacao, considéré comme répulsif par les industriels et les consommateurs de cacao, en particulier européens, fait l’objet d’une attention soutenue depuis quelques années. Il est à l’origine de menace de boycott du cacao produit dans certains pays. Dans ce cadre, le Gouvernement ivoirien, des ONG et de grandes compagnies se sont impliqués sur le marché national du cacao, en vue de surveiller la main d’œuvre utilisée dans la filière.
L’aspect environnemental est lié à la problématique du développement durable, notamment la préservation de la forêt. Afin de contribuer à limiter la déforestation, les industriels du cacao encouragent les producteurs à abandonner la culture extensive au profit de méthodes pointues pouvant garantir un approvisionnement continu sans compromettre l’activité dans le secteur pour les générations futures.
La filière cacao dans l’UEMOA
- Expérience de gestion
La réforme actuelle, débutée en 2011, est mise en œuvre par le Conseil de Régulation, de Stabilisation et de Développement de la Filière Café-Cacao connu sous l’appellation du Conseil du Café-Cacao. Elle vise principalement à promouvoir une économie cacaoyère durable.
Pour la prise en charge de la mission qui leur est assignée, les dirigeants de la filière ont arrêté les principales mesures suivantes :
- L’instauration d’un prix d’achat minimum garanti équivalent à 60% du prix CAF et la limitation des prélèvements sur la filière à 22% du prix CAF en vu d’améliorer les revenus des producteurs ;
– la consolidation de la vente à l’exportation par la méthode de vente anticipée de 70% à 80% de la production de la campagne suivante.
- Evolution de la production et performance économique de la filière
Dans l’UEMOA, le cacao est cultivé en Côte d’Ivoire et au Togo, sur une superficie estimée à environ 2,6 millions d’hectares en 2011, selon les données de la FAO. Au Bénin, il n’existe pas, à l’heure actuelle, de statistiques suffisantes sur cette culture qui y est encore à l’état embryonnaire. Le cacao est la culture de rente la plus importante de l’Union.
Les chiffres des organismes de commercialisation agricole des Etats membres de l’UEMOA montrent qu’au cours des cinq dernières années, la production moyenne a été d’environ 1.400.000 tonnes. Elle a procuré à la Côte d’Ivoire 30% des recettes d’exportation et a représenté pour l’Union près de 17% des exportations.
La culture du cacao représente entre 15% et 20% du PIB en Côte d’Ivoire, où elle emploie près de 600.000 planteurs et fait vivre près du quart de la population, soit environ 6 millions de personnes, selon le Conseil du Café-Cacao. A ce titre, cette filière est le principal pilier de l’économie ivoirienne.
La production cacaoyère semble avoir atteint ses limites comme en témoigne l’évolution de certains indicateurs au cours des dernières années. Les croissances moyennes de la production, du rendement et de la surface cultivée en Côte d’Ivoire au cours des vingt-cinq dernières années (1987 à 2011) sont respectivement de 3,6%, 0,6% et 3,0%. Estimés sur les quinze dernières années (1997 à 2011), ces chiffres décroissent et se situent respectivement à 2,4%, 0,1% et 2,3%.
Selon des études effectuées dans le secteur, l’âge moyen des vergers était de 20 ans au début de la décennie 2000, contrairement au Ghana où des efforts d’investissement ont été consentis pour renouveler les plants de cacaoyer. En Côte d’Ivoire, le projet « Quantité-qualité-croissance (2QC)», un programme national de développement durable de la lière café-cacao est mis en œuvre depuis 2009 pour améliorer globalement les conditions de production du cacao.
La production cacaoyère de l’UEMOA est principalement exportée vers l’Europe où elle représente 75% des importations de cette zone en provenance de l’UEMOA. Pour les Etats-Unis, le cacao représente 50% des importations en provenance de l’UEMOA.
La Côte d’Ivoire devrait demeurer pour longtemps encore, le premier producteur mondial de cacao. Les contraintes environnementales qui se posent à tous les producteurs limitent l’extension des plantations et emmènent les acteurs de la filière à agir sur d’autres leviers, tels que le rendement et l’industrialisation du secteur. La Côte d’Ivoire s’est engagée sur cette voie en axant la nouvelle réforme de la filière, adoptée en novembre 2011, sur la transformation de la production nationale de cacao en produits semi-finis et l’utilisation de semences à haut rendement par les producteurs. Elle ambitionne d’augmenter le taux de broyage pour le faire passer de 35% actuellement à 50% à l’horizon 2015-2020, les principaux produits semi-finis fabriqués étant le beurre et la poudre de cacao.
- Evolution des prix et des revenus des producteurs
En Côte d’Ivoire et au Togo, la filière cacao est placée respectivement sous la tutelle du Conseil du Café-Cacao (CCC) et du Comité de Gestion des Filières Café et Cacao (CGFCC), qui sont des organismes publics chargés d’encadrer le processus de production et de commercialisation. Les prix payés aux producteurs sont axés par ces structures en fonction des cours du marché international. Ils ont enregistré une tendance baissière depuis 2009 dans le sillage des prix mondiaux, en liaison avec la crise économique et financière qui a prévalu dans les principaux pays importateurs.
Toutefois, à la faveur d’une reprise de l’activité dans les pays avancés, les cours se redressent progressivement. En Côte d’Ivoire, cette situation, conjuguée à la mise en œuvre de la nouvelle réforme de 2011, qui a réintroduit le système du prix minimum garanti, a favorisé la hausse du prix payé aux producteurs. Au cours de la campagne 2013/2014, il a été axé à 750 FCFA/kg contre 725 FCFA/kg et 657 FCFA/kg au cours des deux dernières campagnes, soit un taux de croissance moyen de 7% contre 12% pour les cours mondiaux. Les revenus perçus par les producteurs se sont établis en moyenne à 944,6 milliards sur la période 2007-2012. Ils sont estimés à 1.087 milliards en 2013.
- Contraintes pesant sur les performances de la filière
La relance durable de la filière cacao en Côte d’Ivoire se heurte à plusieurs problèmes d’ordre technique et institutionnel.
La principale contrainte a trait au vieillissement des plantations. Elle est également liée à l’âge avancé des cacaoculteurs. L’âge moyen des cacaoyers en Côte d’Ivoire était de 20 ans en 2001 tandis que celui des planteurs se situait à 49 ans. Les plantations, par manque d’entretien, de renouvellement des cacaoyers, ainsi que d’engouement chez les cacaoculteurs, sont à la fin de leur cycle de vie. Cela se traduit par des rendements décroissants depuis quelques années.
La petite taille des exploitations, qui sont en majorité de type familial et le manque de formation des agriculteurs entravent le développement des plantations et l’amélioration des rendements. En effet, l’usage de méthodes agricoles archaïques, notamment une culture extensive avec une sous utilisation de produits phytosanitaires appropriés accentue la détérioration de la qualité des sols et affecte la productivité des plantations ainsi que leur rendement.
En outre, les maladies du cacaoyer demeurent l’une des difficultés majeures auxquelles la filière est confrontée depuis plusieurs années. Le Swollen Shoot et la Pourriture Brune qui sévissent dans les pays tropicaux d’Afrique sont responsables avec d’autres maladies, de la perte de 30% des récoltes annuelles de cacao.
Au niveau institutionnel, l’une des difficultés importantes réside dans la défaillance relevée dans les différentes structures de gouvernance de la filière, à l’origine des échecs répétés. En outre, les revenus perçus par les producteurs ont continué à baisser au cours des dernières années. Par ailleurs, les difficultés d’accès des planteurs au financement exacerbent les problèmes rencontrés dans la filière, en limitant les possibilités de développement des plantations ainsi que l’acquisition de matériels et produits agricoles modernes.
Défis émergents
Les mutations en cours depuis quelques années dans l’économie cacaoyère sont sources de nouvelles pressions liées aux aspects fondamentaux ci-après :
– la durabilité environnementale ;
– la durabilité économique ;
– la durabilité sociale ;
– le rôle croissant des multinationales en amont de la lière.
Le premier défi a trait à la préservation de l’environnement ainsi qu’à la santé des consommateurs. Lesproducteurs subissent des pressions pour adopter des comportements responsables vis-à-vis de l’écosystème et de la biodiversité en vue de limiter la déforestation. Les enjeux y relatifs sont énormes. L’essentiel du couvert forestier ivoirien, qui ne compte plus qu’entre 2,5 millions et 3 millions d’hectares de forêt, est désormais localisé dans la seule partie ouest montagneuse et dans le sud-ouest du pays. Les tensions inter- communautaires en zone rurale, récurrentes ces dernières années, sont induites par la forte pression sur les terres. L’adoption de techniques agricoles modernes qui accroissent le rendement et améliorent la qualité du cacao est, à cet égard, un objectif important à atteindre.
Au niveau social, le défi majeur de la filière est de parvenir à mettre fin au recours à la main d’œuvre infantile. Ceci touche le modèle de production actuel. Cette question est étroitement liée à la survie de la filière, eu égard au risque de boycott du cacao par les consommateurs. La prise en charge de ce défi entraînera un bouleversement majeur dans le modèle de production.
L’amélioration des conditions de vie des planteurs par une meilleure rémunération de leur activité et la stabilisation de leurs revenus est un point essentiel de la durabilité économique de la production de cacao. Elle est une condition vitale pour la survie de la filière, car l’intérêt des planteurs pour la cacaoculture en dépend. A cet égard, l’objectif de création d’une chaîne de valeur dans la filière est crucial pour accroître les marges bénéficiaires des producteurs.
Ces défis résument la problématique de la production du cacao. Leur prise en charge devrait conduire à la création d’une économie cacaoyère durable qui favorise un approvisionnement sécurisé du marché et une répartition plus équitable des revenus générés par le secteur.
Perspectives et priorités d’actions
Perspectives
La dynamique en cours dans le secteur du cacao aura des répercussions au cours des années à venir sur la demande et l’offre. Les analystes estiment que la demande de cacao augmentera au cours des dix prochaines années de 30%, principalement sous la poussée de la demande asiatique, mais aussi de celle des pays de l’Europe de l’Est. Ce mouvement sera favorisé et amplifié par l’avantage comparatif des pays émergents dont la démographie se caractérise non seulement par sa vitalité, comparée à la population européenne vieillissante, mais aussi par la formation d’une classe moyenne appelée à se renforcer au fil des années. Au regard de la tendance actuelle de l’accroissement de la production, il est prévu à moyen terme un déficit de production de fèves de 1 million de tonnes.
Autrefois dominées par les filiales des multinationales européennes et américaines, les activités de transformation sont de plus en plus exercées par des entreprises ivoiriennes telles que Oct Holding, Ivcao, Tafi et Choco Ivoire. La progression de la demande sera à la fois quantitative et qualitative, notamment avec la hausse de la part de la poudre de cacao et de l’exigence normative des grands industriels du secteur. Afin de profiter de cet atout, la Côte d’Ivoire doit relever efficacement les défis qui se posent à la filière en vue d’en faire, de nouveau, un secteur de croissance.
Priorités d’actions
En vue d’aider au développement de l’agriculture, de nombreuses initiatives ont été prises dans les pays de l’UEMOA. A cet égard, le Programme National d’Investissement Agricole (PNIA) en Côte d’Ivoire et le Programme National d’Investissement Agricole et de Sécurité Alimentaire (PNIASA) au Togo, prévoient des financements importants dans le secteur. Au titre de la filière café-cacao, ces efforts devraient se poursuivre, à travers notamment les actions principales ci-après :
En devenant le premier broyeur mondial, la Côte d’Ivoire a consenti des efforts considérables sur la voie de l’industrialisation. Toutefois, la valeur ajoutée à ce stade de la transformation étant devenue relativement faible, les actions futures devraient viser d’autres maillons de la chaîne de valeurs, notamment la fabrication de chocolat de qualité, au standard international mais aussi adapté aux goûts des populations locales, la confection de produits pharmaceutiques et cosmétiques à base de produits de cacao, etc. Les revenus générés par la filière devraient être optimisés à travers la création en amont de ces chaînes. C’est le lieu de saluer la signature, en janvier 2014, de la convention entre le Gouvernement de Côte d’Ivoire et le groupe Cemoi pour la construction d’une chocolaterie devant être opérationnelle en 2017.
Action 2 : la promotion d’investissements structurants qui permettent d’améliorer les capacités de production avec le moins de main d’œuvre possible
A cet égard, l’utilisation des nouveaux plants de cacao dont le délai de production a été raccourci à dix-huit mois, contre cinq ans auparavant, offre une opportunité de renouvellement généralisé des plantations. Elle devrait s’accompagner de l’acquisition de matériel performant dans le cassage des cabosses. Pour ce faire, des mesures d’accompagnement sont nécessaires, notamment la facilitation de l’accès des producteurs au financement. Ce dispositif faisait partie de la mission de l’ex-FGCCC. Il devrait donc être actualisé en y apportant des améliorations pour le rendre plus efficace. A cet égard, Anna LIPCHITZ et Thierry PLOUCH indiquent dans leur étude, intitulé « Les mutations des marchés mondiaux du café et du cacao » réalisée en 2007, qu’une solution innovante et plus appropriée serait de faire adopter par les paysans un plan d’épargne contractuelle, où ils déposeraient régulièrement une somme donnée, en échange du droit d’obtenir des services financiers comme des facilités de crédit.
Action 3 : la promotion de la formation de spécialistes en cacao devrait être un axe majeur de la politique agro-alimentaire en Côte d’Ivoire, eu égard à l’importance du secteur dans son économie
Une filière de formation exclusivement dédiée au cacao dans les programmes des écoles spécialisées en agriculture, telles que les lycées agricoles, l’Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie et l’Institut des Techniques Agricoles pourrait être développée, afin de former l’élite du secteur à tous les stades de sa chaîne de valeurs. Elle prendrait en charge la recherche scientifique en vue de mettre au point de nouvelles variétés plus productives et résistantes. Elle mettrait également l’accent sur la qualité qui, du reste, apparaît aujourd’hui comme le facteur majeur influençant les marchés.
Action 4 : la promotion de la diversification des cultures, a n de mettre les producteurs à l’abri de tout choc brutal qui interviendrait dans la lière cacao
L’exploitation parallèle d’autres spéculations, ainsi que de produits vivriers, devrait permettre aux producteurs de cacao, non seulement de se créer des alternatives, mais aussi, d’assurer leur autosuffisance alimentaire.
Conclusion
Le cacao demeure encore un pilier solide de l’économie de l’UEMOA, singulièrement de la Côte d’Ivoire. Toutefois, la détérioration des indicateurs de rendement et de croissance de la production, conjuguée aux difficultés que connaît la filière depuis quelques années, en font de moins en moins un secteur porteur de croissance. Pourtant, les mutations en cours actuellement, notamment la hausse de la demande potentielle, laissent entrevoir des lendemains prometteurs pour la filière. Elles montrent aussi, au regard des tendances, que la Côte d’Ivoire peut, encore pendant longtemps, jouer le rôle de premier plan. Pour ce faire, elle devrait s’adapter à l’évolution en cours sur le marché mondial du cacao, afin de répondre plus efficacement à la demande. Aussi, en vue de tirer le meilleur parti de la filière et en faire de nouveau un secteur porteur de croissance, les Autorités chargées du développement de la filière devraient-elles mettre un accent particulier sur la recherche de la qualité et l’approfondissement de la chaîne de valeurs. Elles gagneraient donc à aller au delà de l’étape du broyage des fèves, vers la fabrication du chocolat de qualité et susciter des spécialisations pointues dans les différents centres et écoles de formation en agriculture. Ces innovations s’avèrent nécessaires pour assurer la compétitivité du secteur sur un marché devenant de plus en plus exigeant.
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