Auteur(s) :
Ambassade de France au Ghana, service économique d’Accra
Date de publication : Mai 2016
Le Ghana est depuis fin 2010 un pays producteur de pétrole. Avec l’exploitation de nouveaux champs, le pays devrait voir sa production multipliée par six d’ici à 2018. Celle-ci devrait ainsi atteindre 242.3 M de barils en 2018, contre 39.1 M en 2015. La production de gaz devrait quant à elle atteindre 16 Mds m 3 .
Le gouvernement ghanéen s’est engagé dans une gestion transparente des recettes liées aux hydrocarbures et impose des contraintes en matière de contenu local sur ces activités qui pourraient devenir le premier poste d’exportation devant le cacao et l’or. Pourtant, avec la baisse continue des cours, et les estimations alarmistes plaçant le prix du baril à 20 USD, l’économie ghanéenne a souffert en 2016 avec des recettes en forte chute. Par ailleurs, les produits pétroliers sont sans cesse soumis à de nouvelles taxes.
Un pays producteur de pétrole
La production actuelle au Ghana Le Ghana s’est récemment imposé comme un pays producteur de pétrole. La première découverte d’un gisement date de 2007 sur le champ pétrolifère offshore de Jubilee. L’exploitation a pu démarrer en un temps record dès la fin 2010, soit dans un délai de 42 mois. La production de ce champ s’est élevée à environ 100 000 barils par jour (bpj) en 2015, en légère baisse par rapport à 2014 (104 000 bpj). L’Institut Ghanéen de Gouvernance et de Sécurité estime à 130 000 bpj la production à la fin de l’année 2016. Le pays est ainsi le 4ème producteur de pétrole sur le Golfe de Guinée derrière le Nigéria, la Guinée Equatoriale et le Gabon. Cette découverte a permis au Ghana de connaître une croissance de plus de 14% l’année suivant les débuts de l’exploitation de ce champ. On estime à 2.7 Mds USD les recettes pétrolières de 2010 à 2014. Par ailleurs les revenus pétroliers représentent pour l’année 2015 2.9% du PIB (estimations du FMI).
Le champ de Jubilee est aujourd’hui le principal lieu de production. C’est un champ offshore situé à 60 kms des côtes ghanéennes à une profondeur moyenne de 1.5 kms, à cheval sur les blocs Deepwater Tano et West Cape Three Points. Tullow Ghana Limited (anglais, 35.5% des parts) est l’opérateur principal pour le compte d’une joint-venture également composée de Kosmos Energy (américain, 24.1%), Anardarko (américain, 24.1%), Ghana National Petroleum Corporation (13.6%) et PetroSA (sud-africain, 2.7%).
L’exploitation se fait par une unité flottante de production, de stockage et de déchargement (FPSO). Technip, société française, a obtenu plusieurs contrats importants pour le développement de ce champ. Le pétrole produit est de bonne qualité, léger, peu soufré et riche en gaz associés. Il se négocie quasiment aux prix du brent sur les marchés internationaux. Les réserves seraient comprises entre 800 M et 1.2 Mds de barils, dont 1/5ème aurait déjà été exploité à ce jour.
De nouveaux projets en cours de développement
La production sur le champ de Tweneboa Enyenra et Ntomme (TEN) situé à l’ouest de Jubilee sur le bloc Deep Water Tano, plus près de la frontière avec la Côte d’Ivoire, devrait démarrer dans le courant de l’année. On estime à 245 millions de barils les réserves de ce gisement, avec un potentiel de 2.4 millions m3 par jour. Son plan de développement a été approuvé par le Ministère de l’Energie en 2013, Tullow devenant l’opérateur principal pour le compte de Kosmos Energy, Anadarko, GNPC et PetroSA.
L’exploitation (production et stockage) se fera également par FPSO (unité flottante de production, stockage et déchargement pour le secteur pétrolier), livré au Ghana le 2 mars. Cette unité, la seconde opérationnelle dans le pays, fabriquée à Singapour (avec un important contenu local, notamment pour le pont du FPSO en partie réalisé par la société locale d’origine française ORSAM), sera basée au sein du bloc Tano à 80 kms des côtes ghanéennes.
On notera également que l’Américain General Electric a remporté un contrat de 850 M USD pour la fourniture de machineries et d’équipements sous-marins sur le site. Début janvier, Tullow a annoncé que les aménagements des infrastructures étaient prêts à 80%, et que les premiers barils devraient être extraits dès le mois de juillet 2016. Le plan de développement de 2013 estimait un pic de production à 80 000 bpj mais ces prévisions ont été revues à la baisse compte tenu de la chute des cours du pétrole. Tullow a ainsi annoncé une diminution de 35% de ses investissements au Ghana, prévoyant 23 000 bpj soit à peine un quart des estimations du plan de développement.
Par ailleurs, un conflit existe sur le développement de ce champ entre le Ghana et la Côte d’Ivoire, concernant la frontière maritime entre les deux pays, qui va faire l’objet d’un arbitrage international de la part du Tribunal international du droit de la mer (arbitrage estimé pour 2017). En effet, on estime entre 200 M et 1.2 Mds de barils les réserves de cette zone, que le Ghana réclame.
Début 2015, l’Italien ENI, Vitol, Kosmos, Anadarko, PetrolSA et la GNPC ont trouvé un accord avec le gouvernement ghanéen sur le développement des champs de Sankofa et Gye Nyame situés dans le bloc Offshore Cape Three Point (voir carte jointe). Le montant prévisionnel de l’investissement s’élève à 7 Mds USD pour un projet d’exploitation jointe de pétrole et de gaz. La production devrait démarrer en 2017 pour atteindre 80 000 bpj en 2019 selon les différentes estimations. ENI Ghana sera l’opérateur principal sur le projet (47,2% des parts) en partenariat avec Vitol (37,8%) et GNPC (15%). D’après Vitol, l’exploitation du gaz permettrait d’alimenter en quantités suffisantes les centrales thermiques du pays d’ici 2036. On estime qu’en 2017 le gaz extrait sera suffisant pour produire 700 MW d’électricité.
Les dernières études estiment à 500 000 bpj le pic de production de pétrole au Ghana en 2024. Alors que les estimations étaient de 250 000 bpj en 2014, ces derniers résultats font suite à la découverte de 7 nouveaux gisements pétroliers par la société américaine Hess Corporation. Des études sont actuellement en cours pour connaître la viabilité de ces champs et estimer les potentielles réserves. D’autres projets d’exploration sont en cours impliquant notamment Vanco (USA) et Lukoil (Russie). Mais il faut souligner que malgré tout, le Ghana ne sera jamais un grand pays producteur comme le Nigéria (2 M bpj).
Une production de gaz intensifiée
En novembre 2014 a eu lieu l’inauguration de l’unité de production gazière d’Atuabo qui a permis au Ghana de devenir un producteur de gaz transformé. A plein régime, entre 3 et 4 M m3 standards pourront être produits quotidiennement. Le complexe qui comprend l’usine de production et un pipeline d’acheminement (Western Corridor Gas Infrastructure Project), est opéré par la Ghana National Gas Company (GNGC) et prévoit la livraison de gaz pour la centrale de production de la Volta River Authority (VRA) à Aboadze.
L’usine d’Atuabo est approvisionnée par Tullow avec le gaz du champ de Jubilee. Ce projet de production gazière a pour l’instant rencontré de nombreuses difficultés : quantités de gaz livrées insuffisantes et irrégulières, problèmes techniques chez la GNGC, incapacité de VRA à absorber le gaz livré depuis Atuabo. Début 2015, le débit de gaz envoyé depuis Atuabo ne représentait que la moitié de sa charge maximale. La production de plein régime pourrait être atteinte dans le courant de l’année.
La production domestique de gaz est très importante pour le Ghana puisque le pays dépend essentiellement du Nigéria pour l’approvisionnement de ses centrales thermiques. Les livraisons par le West African Gas Pipeline sont devenues très erratiques depuis 2012. A titre d’exemple, le pipeline est resté hors d’usage en 2012/2013. Par ailleurs, le pays a menacé de réduire de 70% ses exportations vers le Ghana, en raison d’impayés de la part de VRA, ainsi que de l’augmentation de sa demande intérieure.
Pour l’instant la capacité de production ghanéenne ne permet qu’un approvisionnement aux centrales de VRA. L’extraction du gaz sur les champs de TEN en 2017 (potentiel de 2 M m3 standards/jour) et Sankofa (4 M/jour) en 2018 devrait permettre d’étendre l’alimentation à d’autres centrales thermiques dans le pays et assurer l’indépendance du Ghana.
La Banque Mondiale estime que le développement de gisements de gaz non-associé doit être la priorité principale du Ghana étant donné la surexploitation actuelle de ses capacités électriques. Ainsi, elle a approuvé en août 2015, 700 M USD de garanties d’investissements pour le projet gazier de Sankofa destiné à aider le Ghana à faire face aux coupures d’électricité. Cela devrait permettre à la Ghana National Petroleum Corporation de lever près de 7.9 Mds USD afin d’assurer le démarrage de la production du gisement en 2018.
Cela permettrait de fournir près de 1 000 MW supplémentaires et ainsi réduire la dépendance du pays aux importations d’hydrocarbures (près de 12 M de barils chaque année). Malgré tout, ces estimations sont à nuancer en raison de la tendance générale de baisse des cours qui fragilise le développement d’investissements dans le pays. Le Ministre des hydrocarbures, Emmanuel Kofih-Buah, a néanmoins déclaré qu’en dépit de la baisse des cours, le Ghana poursuivait ses investissements notamment dans le secteur gazier qui devrait contribuer à la génération de 80% de l’électricité du pays au cours de la prochaine décennie.
Réglementations
Le gouvernement ghanéen a adopté en 2011 le « Petroleum Revenue Management Act » qui fixe à 70% le montant des revenus pétroliers touchés par l’Etat. En outre, il en fixe l’utilisation par le gouvernement. Ce cadre législatif est inspiré de celui mis en place par le gouvernement norvégien. Les recettes liées aux hydrocarbures sont ainsi réparties entre un fonds destiné à alimenter le budget de l’Etat pour des projets d’investissement (Annual Budget Funding Amount), un fonds de stabilisation pour compenser les fluctuations dans les rentrées financières (Ghana Stabilization Fund), un fonds destiné aux générations futures (Ghana Heritage Fund) et la GNPC.
En 2014 est entrée en vigueur la loi « Petroleum Regulation on Local Content and Participation » qui prévoit de donner la priorité aux entreprises locales pour l’obtention de licences dans le secteur des hydrocarbures. Cette loi demande également aux compagnies étrangères de donner la priorité aux fournisseurs locaux et à la main d’œuvre ghanéenne dans le cadre de leur activité. Les entreprises étrangères sont tenues de remettre chaque année un rapport sur leurs actions en matière de contenu local.
La Petroleum Commission encadre les activités d’exploration et la GNPC est l’entreprise ghanéenne qui a le statut de partenaire associé sur les différents projets en cours de développement. Son objectif, à moyen terme, est de devenir un opérateur indépendant. La Petroleum Commission est l’entité en charge de la régulation du secteur « upstream » dans les hydrocarbures. Elle délivre notamment les licences dans le secteur et fait respecter les lois et normes en vigueur.
Par ailleurs, depuis 2014, le gouvernement ghanéen instaure régulièrement de nouvelles taxes sur les produits pétroliers, compte tenu de la chute des cours du baril et de la mauvaise santé économique du pays. La Special Petroleum Tax, instaurée en novembre 2014 pour soutenir le budget 2015 a particulièrement été décriée. Cette dernière prévoit une imposition de 17.5% sur certains produits pétroliers (pétrole, diesel, gaz de pétrole liquéfié, gaz naturel, kérozène).
Les revenus de cette taxe ont été estimés à 349 M EUR en 2015. Début janvier 2016, l’introduction d’une nouvelle taxe sur les produits pétroliers a provoqué une augmentation de 33% des prix de l’essence, et 40% du diesel. Les taxes sur les produits pétroliers au Ghana dépassent désormais 40%, contre une recommandation du FMI de 30% pour les PED, et risquent d’affecter fortement l’attractivité économique du pays.
Des enjeux cruciaux pour les années à venir
La forte chute du cours du pétrole depuis un an et la perspective d’un prix du baril de brut se maintenant à un niveau faible impactent l’économie ghanéenne. L’exploitation pétrolière au Ghana se fait dans de l’offshore profond avec des coûts de production très élevés. Un prix du baril durablement bas menace grandement le modèle économique d’une entreprise spécialiste de l’offshore profond comme Tullow qui ne peut atteindre son seuil de rentabilité.
La cotation boursière de Tullow a fortement baissé en réaction à cette nouvelle donne sur le marché du pétrole. Le gouvernement ghanéen a revu à la baisse ses prévisions de recettes liées aux hydrocarbures pour 2016, et le manque à gagner serait estimé à 200 M USD. Toutefois, le montant des importations de pétrole a diminué de 1.5 Mds USD en 2015, baisse en grande partie expliquée par la chute des cours du pétrole. Ceci équivaudrait au double de ce que le pays a perdu sur le montant de ses exportations pétrolières suite à cette même baisse. D’un point de vue purement comptable, le Ghana est donc globalement gagnant de la baisse des cours, les importations restant supérieures aux exportations.
Les Wathinotes sont soit des résumés de publications sélectionnées par WATHI, conformes aux résumés originaux, soit des versions modifiées des résumés originaux, soit des extraits choisis par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au thème du Débat. Lorsque les publications et leurs résumés ne sont disponibles qu’en français ou en anglais, WATHI se charge de la traduction des extraits choisis dans l’autre langue. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.
The Wathinotes are either original abstracts of publications selected by WATHI, modified original summaries or publication quotes selected for their relevance for the theme of the Debate. When publications and abstracts are only available either in French or in English, the translation is done by WATHI. All the Wathinotes link to the original and integral publications that are not hosted on the WATHI website. WATHI participates to the promotion of these documents that have been written by university professors and experts.