Créée le 24 février, l’université de Dakar fut officiellement inaugurée le 09 décembre 1959. Œuvre de la colonisation française, elle constituait la principale université de la quasi-totalité des Etats de l’Afrique occidentale française (AOF). En 1987, elle prend la dénomination de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). Elle comptait 85 000 étudiants en 2014. C’est une université qui attire des étudiants venant de tous les coins du continent en l’occurrence de l’Afrique de l’Ouest. Comme pratiquement toutes les universités du monde, elle doit relever des défis dans son fonctionnement, mais aussi et surtout dans la gestion de la vie sociale estudiantine.
Ce dernier aspect est sous la direction du Centre des œuvres universitaires de Dakar (COUD) qui est chargé de l’aide sociale, de l’accueil des nouveaux bacheliers et des étudiants étrangers, de la restauration, du logement et des activités sportives et culturelles au sein de l’université. L’UCAD est confrontée à de nombreuses difficultés qui ne manquent pas d’affecter le quotidien des étudiants.
Un manque criard de moyens dans les facultés
L’UCAD compte six (6) facultés : la Faculté des sciences et techniques (FST), la Faculté des sciences juridiques et politiques (FSJP), la Faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie (FMPO), la Faculté des lettres et sciences humaines (FLSH), la Faculté des sciences et technologies de l’éducation et de la formation(FASTEF) et la Faculté des sciences économiques et de gestion (FASEG).
Il y a également le problème de la documentation. La FSJP, par exemple ne compte qu’une seule salle de lecture et de documentation ne pouvant contenir les seuls étudiants de la première année
Une comparaison entre le nombre de facultés et le nombre d’étudiants inscrits informe du caractère minimal de l’offre de formation. Cette situation est l’une des principales causes du surnombre dans les facultés. A cela s’ajoute le fait que les conditions d’étude y sont particulièrement chaotiques. Prenons l’exemple de la FSJP, il n’y a pratiquement pas de climatisation dans les amphithéâtres et les salles de cours, dans une région de Dakar qui enregistre des températures avoisinant les 27 degrés durant le jour pendant au moins sept (7) mois. Les tables-bancs ne sont pas des plus modernes, les tableaux sont parfois inutilisables du fait du manque constant d’écritoires et d’effaceurs, etc. Cette situation est à l’image de presque toutes les autres facultés à quelques exceptions près, celle de médecine par exemple ne connait pas ces difficultés liées au surnombre.
Toutefois, il est à souligner que depuis l’année universitaire 2015-2016, des réformes sont entreprises par le gouvernement allant dans le sens de la rénovation des facultés de sciences juridiques et politiques et des sciences et techniques, de la création de nouveaux bâtiments dans les facultés de lettres et de médecine. Mais ces rénovations ne sont pas sans conséquences, car elles rendent inaccessibles bon nombre d’amphithéâtres et accentuent ainsi la promiscuité dans les salles de substitution, sans compter le fait qu’actuellement, les étudiants de la première et de la deuxième année de la FSJP et de la FST font cours dans des bâches provisoirement installées dénommées souvent « chapiteaux » par les étudiants. Il y a également le problème de la documentation. La FSJP, par exemple ne compte qu’une seule salle de lecture et de documentation ne pouvant contenir les seuls étudiants de la première année.
Un nombre de logements insuffisant face à une forte demande estudiantine
Les logements sont très insuffisants pour accueillir tous les étudiants désireux de s’établir dans le campus universitaire. Ce qui fait qu’on peut trouver dans une chambre devant normalement accueillir au maximum deux (2) étudiants, six (6) à huit (8) étudiants. Il arrive même que certains passent la nuit dans les couloirs. Ce problème est certes lié à une insuffisance des logements, mais également et surtout à une mauvaise gestion du COUD au niveau des pavillons disponibles. En effet, ce dernier devrait pouvoir mettre en place une organisation lui permettant d’identifier d’abord les étudiants originaires d’autres régions du Sénégal afin de les privilégier dans l’octroi des logements. Ces derniers, ne pouvant pas, pour la majeur partie, trouver un logement ailleurs, sont obligés de rester au campus, ce qui est loin d’être le cas des étudiants dakarois.
Aussi le COUD devrait supprimer la pratique qui consiste à laisser une partie de la gestion des chambres à la disposition des présidents d’amicales des étudiants des différentes facultés. En effet, au lieu de distribuer les logements en fonction des besoins de leurs bénéficiaires, certains de ces présidents d’amicales mettent en avant des relations personnelles et parfois vont même jusqu’à monnayer l’accès aux chambres.
En effet, au lieu de distribuer les logements en fonction des besoins de leurs bénéficiaires, certains de ces présidents d’amicales mettent en avant des relations personnelles et parfois vont même jusqu’à monnayer l’accès aux chambres
Il existe par ailleurs un autre problème lié aux logements, c’est celui de l’accès à l’eau et de la salubrité des toilettes. Il est indispensable de souligner que dans certains pavillons, comme le pavillon A, l’eau est introuvable dans les lieux d’aisances. Les étudiants sont obligés de faire la navette tous les jours vers d’autres pavillons pour satisfaire des besoins vitaux et urgents. Nous ne saurons donner les raisons de cette situation que nous trouvons déplorable et auquel le COUD devrait trouver des solutions immédiates. Il en est de même de l’insalubrité des toilettes liée d’une part au manque d’eau permanent, mais également au manque de contrôle du personnel chargé de l’entretien. Cependant, il convient de souligner que de nouveaux bâtiments sont en cours de construction et nous pouvons espérer que les problèmes liés au manque de logement seront définitivement résolus.
Des conditions de restauration inadaptées et non respectueuses des normes d’hygiène
L’une des plus grandes tares de l’UCAD, pour ne pas dire la principale, est le manque de qualité dans l’alimentation fournie aux étudiants. Depuis des années, ces derniers ne cessent de déplorer ce phénomène dans l’insouciance absolue des autorités universitaires. D’abord, se pose le problème de la variété du menu, les plats sont les mêmes toutes les semaines. Ensuite, la quantité des repas fournie est insuffisante pour certains étudiants. Enfin, comme nous l’avons déjà dit, la qualité laisse à désirer. Ceci sans compter sur le fait qu’à certaines heures, les étudiants sont obligés de faire la queue pour accéder aux restaurants universitaires qui peinent à satisfaire la forte demande.
Pour permettre des changements dans ce secteur, nous ne réfutons pas (s’il n’existe que cette possibilité) une revue à la hausse du prix des tickets de « resto » qui s’élèvent actuellement à 75 francs CFA (0,11 centimes euros) pour le petit déjeuner et 150 francs CFA (0,22 centimes d’euros) pour le déjeuner et le dîner
D’ailleurs, il arrive souvent qu’il y ait ce que les étudiants appellent communément « rupture » et dans ce cas ils sont obligés de patienter en faisant la queue le temps d’une nouvelle cuisson d’une durée de 40 minutes au minimum. Face à cette situation, certains anciens étudiants affirment même (sans que cela ne soit véritablement prouvé par une étude) qu’un habitué de la restauration universitaire de l’UCAD ne pourrait terminer son cursus sans contracter au moins une maladie gastrique. L’affirmation nous semble plausible car l’on sait qu’aucune des recommandations en termes de gastronomie (temps de cuisson, hygiène dans les locaux de préparation, propreté et précautions des cuisiniers ..) n’est respectée. A notre sens, chacune des autorités de cette université a une part de responsabilité et des mesures doivent immédiatement être prises sans quoi la santé des étudiants en sera affectée.
Pour permettre des changements dans ce secteur, nous ne réfutons pas (s’il n’existe que cette possibilité) une revue à la hausse du prix des tickets de « resto » qui s’élèvent actuellement à 75 francs CFA (0,11 centimes euros) pour le petit déjeuner et 150 francs CFA (0,22 centimes d’euros) pour le déjeuner et le dîner. Il serait également nécessaire de mettre en place un organe chargé de contrôler le respect de toutes les mesures allant dans le sens d’une alimentation saine, riche et variée dans nos restaurants universitaires. Nous pensons que c’est le minimum, et d’ailleurs cela constituait l’une des attentes majeures des étudiants lors de l’augmentation des frais d’inscription il y a trois (3) ans de cela.
Une bourse d’étude insuffisante et souvent reçue tardivement
Parler d’argent au sein de l’université ne serait pas anodin d’autant plus que 80% des étudiants ne viennent pas de la capitale sénégalaise et devront par conséquent se prendre en charge. Il faut aussi tenir compte du fait qu’ils sont pour la plupart issus de familles modestes. Le régime des bourses est ainsi libellé : le nouveau bachelier admis à l’université, en fonction de ses résultats au baccalauréat, peut avoir soit une demi-bourse d’un montant de 18.000 francs CFA (27,44euros) par mois, soit une bourse entière de 36000 francs CFA (54,88 euros) par mois.
L’obtention de la bourse en première année d’inscription n’étant pas automatique, un système d’aide à hauteur de 60000 francs CFA (91,46 euros) par année est mis en place. A partir de la deuxième année, tous les étudiants (boursiers ou non en première année) ont droit à une bourse entière de 36000 francs CFA et il en est ainsi pour la troisième année de licence et pour le Master 1. Au niveau du Master 2, l’étudiant aura droit à une bourse de 60000 francs CFA par mois.
Il nous semble que les données suffisent pour témoigner du caractère dérisoire de la bourse accordée aux étudiants au Sénégal. A cela s’ajoute le fait qu‘elles ne sont pas perçues à temps
Il nous semble que les données suffisent pour témoigner du caractère dérisoire de la bourse accordée aux étudiants au Sénégal. A cela s’ajoute le fait qu‘elles ne sont pas perçues à temps. Le plus souvent c’est vers la fin du mois que la bourse du précédent mois est payée et il en est de même pour le rappel des bourses en fin et en début d’année. Un autre problème qui ne touche que les étudiants inscrits en deuxième année de Master, est la subvention annuelle de 150000 francs CFA (228,67euros) destinée aux dépenses liées à leurs recherches et à la rédaction du mémoire. Mais il se trouve qu’à chaque année les étudiants peinent à percevoir à temps ce montant. Généralement, elle n’est payée qu’après une année de recherche sachant que le Master 2 à l’UCAD s’étale au moins sur deux ans.
Les problèmes structurels et fonctionnels de l’UCAD sont nombreux et appellent à un nécessaire redressement de la part de l’Etat. Malheureusement, l’on constate une indifférence totale des autorités face aux problèmes de survie des étudiants. Faire des réformes pour améliorer la qualité de l’enseignement supérieur, sans une préalable prise en compte des besoins primaires et vitaux des étudiants tels que les logements, l’hygiène, une bonne alimentation et un cadre d’étude adéquat et moderne, ne serait qu’une perte de temps et une volonté manifeste de ruiner l’avenir du pays. Pour l’instant, ce que nous remarquons, c’est un ministre de l’Enseignement supérieur félicité et reconduit dans ses fonctions par le chef de l’Etat après chaque remaniement ministériel.
Crédit photo : Senenews
Ndèye Maréme Sow Diallo est inscrite en Master 2 recherches option Droit privé/Sciences criminelles à la Faculté des sciences juridiques et politiques de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal).
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La terre senegalaise est vraiment vaste , donc décentraliser certaines facultés dans d’autres régions avec ,bien sûr , la fondation de nouvelles universites .