Les reformes prioritaires dans le domaine de l’efficacité énergétique « En première instance, les candidats doivent s’exprimer par rapport à la nouvelle loi votée dernièrement, qui définit le nouveau code de l’électricité. Dans ce code, il est actuellement permis à un usager de produire pour sa consommation et de revendre le surplus. Les candidats doivent se prononcer sur les modalités de connexion, mais surtout sur l’impact sur le réseau énergétique. Il faut également revoir la politique de l’AEME (l’Agence pour l’économie et la maîtrise d’énergie), qui s’intéresse à l’efficacité énergétique, redéfinir ses missions au niveau des énergies renouvelables est une urgence nationale, d’autant plus que le Sénégal dispose d’un bon potentiel. Ensuite, l’Agence sénégalaise pour l’électrification rurale (ASER) et l’Agence nationale des énergies renouvelables (ANER) doivent être fusionnées pour qu’il n’y ait pas de chevauchement dans les programmes et pour une meilleure efficience. De plus, le prochain Président de la République et les candidats doivent se prononcer sur l’accès à l’énergie du monde rural qui est de 40 % seulement. Il faut que le monde rural puisse avoir de l’énergie disponible à prix abordable comme les habitants des zones urbaines et péri urbaines. Au-delà de ces trois premiers aspects, les candidats devront se prononcer sur l’exploitation des ressources minières pour avoir de l’énergie propre que cela soit dans le domaine de la construction ou dans le domaine des énergies. Il est nécessaire de développer l’écoconstruction. Pour avoir de l’air frais, les usagers des bureaux sont obligés d’utiliser l’air conditionné, ce qui augmente la facture énergétique. Si les matériaux de construction avaient été mieux choisis, dans une perspective d’écoconstruction, la consommation d’air conditionné aurait été plus faible et le confort meilleur à l’intérieur.
Il faut que le monde rural puisse avoir de l’énergie disponible à prix abordable comme les habitants des zones urbaines et péri urbaines
Les candidats doivent aussi se prononcer sur la valorisation des résidus agricoles pour permettre aux cultivateurs et maraîchers d’avoir de l’engrais vert pour développer le bio, ce qui permettra d’améliorer les rendements à l’hectare, mais aussi la santé. Garantir une efficacité énergétique dans le contexte de l’exploitation du gaz et du pétrole au Sénégal Le Sénégal a un des tarifs les plus élevés de la zone CEDEAO en ce qui concerne la production d’énergie. Le kW/heure coûte 85 francs en Côte d’Ivoire tandis qu’il est facturé entre 110 et 120 francs au Sénégal. Les coûts de production impactent fortement le coût d’exploitation de nos industriels qui ne peuvent pas concurrencer les entreprises implantées en Côte d’Ivoire. L’État sénégalais doit accepter d’utiliser ce gaz pour revoir le parc de production et améliorer les rendements. Si les capacités de productions augmentent, il faudra impérativement étudier des réseaux de transport permettant d’acheminer la production vers les centres de consommation. Les candidats doivent discuter de la réduction du coût du kW/heure pour que les entreprises sénégalaises soient compétitives par rapport aux autres entreprises de la sous-région et à l’international. Je proposerai d’abord de revoir nos centrales thermiques qui sont à fuel lourd et d’utiliser le gaz pour produire de l’énergie électrique. Je recommanderai aux futurs candidats de former les sénégalais dans les filières gazières et dans les filières pétrolières, parce que nous sommes en train de nous tromper d’objectif. Il faut former suffisamment de ressources humaines de qualité pour maitriser la chaîne de valeur du pétrole et du gaz pour en faire bénéficier les Sénégalais. Les réseaux de gazoducs assurant le transport des points de production jusqu’au niveau des lieux de consommation les plus éloignés doivent être développés. Cela évitera l’utilisation des citernes avec des longues durées de trajet et des problèmes de sécurité routière (notamment les explosions de citernes). Réformer l’enseignement supérieur et renforcer la recherche scientifique Il est nécessaire de revoir notre système éducatif depuis l’élémentaire en modifiant le contenu des programmes et en renforçant les filières professionnalisantes à partir du niveau secondaire afin d’offrir à tout le monde des qualifications leur permettant d’exercer.
Les candidats doivent discuter de la réduction du coût du kW/heure pour que les entreprises sénégalaises soient compétitives par rapport aux autres entreprises de la sous-région et à l’international
L’artisanat ouvrier ainsi que l’entreprenariat seront favorisés. Il n’y a pas un seul pays au monde qui systématise les orientations des bacheliers et la généralisation des bourses. Il faudrait que le système de bourse soit offert aux plus méritants. De plus, il faut changer les contenus de l’enseignement supérieur pour les adapter aux réalités socioprofessionnelles offertes du Sénégal. Actuellement, dans des instituts supérieurs d’enseignement professionnel, les ZEP (zones d’éducation prioritaires) et dans certaines écoles d’ingénieurs, on pratique l’approche par les compétences, bien développée au Canada. Cette méthode part de la commande du milieu professionnel pour aboutir à une filière de formation. De ce fait, le contenu de formation permettra à l’apprenant d’être opérationnel dès sa sortie et le milieu socioprofessionnel pourra modeler les profils qu’ils souhaiteraient. Le cadre doit donc être modifié pour revoir les contenus et l’approche pédagogique depuis l’élémentaire jusqu’au niveau de l’université. Pour favoriser le développement du Sénégal, un système de recherche innovant et performant est nécessaire pour se préparer aux technologies futures. Le futur Président doit investir dans le domaine de la recherche. Il faut promouvoir cette recherche et valoriser les résultats pour des impacts positifs pour la population.
Il faut former suffisamment de ressources humaines de qualité pour maitriser la chaîne de valeur du pétrole et du gaz pour en faire bénéficier les Sénégalais
Les priorités nationales globales pour le bien-être collectif Tant que la justice n’est pas équitable pour tous, il sera très difficile d’avancer. Par exemple, la plupart du temps, les étudiants n’ont pas d’espace où revendiquer leurs droits ou s’ils portent plainte contre un de leur enseignant, c’est quasiment peine perdue. Les dirigeants politiques doivent encourager des formations pour que l’Homme sénégalais comprenne les priorités et enjeux actuels. Il faut permettre aux sénégalais de bénéficier de ressources de qualité et améliorer le système sanitaire. Pour parvenir à cela, il faudrait qu’on exige à l’ensemble de nos élus et à l’ensemble de nos fonctionnaires, d’utiliser les services publics de manière générale, que cela soit l’enseignant, l’éducation, la santé, ou même les transports. »
Docteur en systèmes énergétiques et environnement, Mouhamadou Thiam est enseignant chercheur au département Génie électromécanique de l’École Polytechnique de Thiès mais intervient également dans les autres universités dans les domaines de l’électricité, l’électronique (analogique et de puissance), le dimensionnement et la maintenance des systèmes solaires photovoltaïques, le diagnostic énergétique entre autres. Il participe également en tant que technicien supérieur à l’encadrement des étudiants dans les travaux pratiques et bureaux d’études au département Génie électrique de l’École Supérieure Polytechnique (ESP) de Dakar.
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Merci professeur
Bonne contribution pour un Sénégal du futur.
Merci pour ces pertinentes pistes de solution
Le grand énergiste. Tu nous dégage des pistes pour le futur president. Merci de ces pertinentes orientations.
Merci beaucoup
Intervention très instructive merci professeur, nous vous attendons dans d’autres perspectives
Merci beaucoup
Belle analyse professeur de la situation énergétique au Sénégal.
Merci beaucoup Président