Auteurs : Aka Assale Félix et Mamoutou Toure
Type de publication : Article de revue scientifique
Date de publication : 2020
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Toute comme dans le reste de l’Afrique, l’aménagement des villes en Côte d’Ivoire, s’est fait à l’image de la politique coloniale qui a érigé successivement en capitale Grand-Bassam, Bingerville puis Abidjan.
L’aménagement de la ville d’Abidjan est rendu possible grâce au miracle économique ivoirien entre 1960 et 1970. Ainsi, l’essor économique de la Côte d’Ivoire a permis un aménagement moderne de la métropole semblable à celles des villes des pays nantis avec des espaces urbains projetés dans le futur. Cette planification sa configuration très particulière réussie de la ville d’Abidjan explique son appellation de « Perle des lagunes ».
Cette forte concentration des activités en son sein va favoriser une forte migration androgène et exogène, entraînant ainsi une croissance quasi vertigineuse de sa population. Alors, partie de petits villages d’une centaine d’habitants en 1900, Abidjan est devenue l’une des plus grosses agglomérations d’Afrique noire avec une population qui est passée de 1 929 080 habitants en 1988 à 3 796 677 habitants, soit un triplement en dix ans de l’effectif de la population.
Avec une économie de base fragile dominée par l’agriculture et les industries extractives, la Côte d’Ivoire, à l’image de la plupart des pays africains, va connaître de séries de crise économique depuis les années 1980. Il s’agit entre autres l’extrême paupérisation des populations avec moins d’un dollar par jour, la raréfaction de l’emploi, l’élévation du taux de chômage, la délinquance, le vol (etc.). Comme alternative de la paupérisation croissante des populations urbaines, l’initiative privée et l’entrepreneuriat sont encouragés par les décideurs politiques.
Une autre forme d’appropriation, orchestrée par un système commercial informel, reconfigure ces mêmes espaces urbains. Il n’en demeure pas le moins de voir les servitudes publiques dont les bienfaits sont reconnus au triple plan social, économique et touristique, se dégrader, se transformer en de véritables marchés à ciel ouvert dans des situations plus complexes.
Cette réalité a fait naître une juxtaposition de fonctions urbaines et d’organisation des systèmes formels et informels dans un contexte d’une très forte pression démographique sur les infrastructures socioéconomiques abidjanaises.
Alors, partie de petits villages d’une centaine d’habitants en 1900, Abidjan est devenue l’une des plus grosses agglomérations d’Afrique noire avec une population qui est passée de 1 929 080 habitants en 1988 à 3 796 677 habitants, soit un triplement en dix ans de l’effectif de la population
Résultats
Actuellement, ville macrocéphale, Abidjan s’illustre par son centre-ville construit à l’image des villes américaines. Cette ville s’est transformée radicalement en rénovant son paysage et en étoffant ses infrastructures équipements et surtout les édifices commerciaux. Cette politique de développement des infrastructures a valu sa position de plateforme commerciale de la Côte d’Ivoire avec d’innombrables infrastructures commerciales à l’image des pays développés.
Dans les espaces communaux de Cocody, du Plateau, de Yopougon, de Tréichville et d’Adjamé, la politique de développement infrastructurel a permis la mise en place d’une armature d’équipements commerciaux modernes de type urbain pour son développement. Ces équipements sont divers, multiformes et admettent une distribution spatiale très particulière. La politique de spatialisation des infrastructures socio-économiques dans ces communes du district d’Abidjan obéit à une modélisation conceptuelle relative à la distribution dans l’espace. Ces infrastructures commerciales sont nées dans les noyaux centraux urbains et à la périphérie des grandes artères.
L’essor véritable des infrastructures commerciales d’Abidjan a été concrétisé à partir de 1970, date à laquelle la Côte d’Ivoire a connu ce que le monde entier a appelé le « miracle ivoirien ». Le développement du pays s’est accéléré, en particulier dans la ville d’Abidjan. L’espace abidjanais s’est accru rapidement pour représenter 70 % de l’espace urbain total, avec la création de nouveaux quartiers.
Le développement des lieux de commerce a mobilisé des énergies considérables et a suscité un grand intérêt auprès des élus locaux. Cet intérêt manifeste part de l’utilité des équipements commerciaux dans la vie économique des villes africaines. Ainsi, dans chaque quartier des communes du district sont parsemés de marchés satellites et de boutiques qui ravitaillent les ménages éloignés des marchés centraux. Ces marchés regroupent toutes les activités banales jusqu’aux plus rares avec différentes variétés de produits.
Ce qui frappe, c’est l’ampleur et l’animation du marché, car il s’étend de façon tentaculaire dans toutes les rues adjacentes. Le grand marché est fréquenté pour sa large palette de produits et services, ainsi que pour ses prix moins élevés et la possibilité d’acheter en gros.
L’exécution des projets immobiliers, même si elle est réalisée par des entreprises parapubliques ou privées, sous appel d’offres, son contrôle est assuré par l’Etat à travers le ministère de l’Urbanisation et de Construction de l’Habitat. Ce contrôle permet ainsi l’État de tenir compte des besoins fonciers pour l’édification infrastructurelle publique. Ce contrôle de l’État centralisateur et interventionniste, avec le suivi rigoureux et le respect scrupuleux des cahiers de charge des dossiers d’appel d’offres public, dans la période de 1960 à 1970, a permis aux décideurs urbains de réussir un pari : celui de l’élaboration d’un projet d’urbain abidjanais ambitieux aux normes élevées similaires aux villes européennes.
Cependant, depuis les années 1980, l’étude de la dynamique spatiale d’Abidjan met en évidence l’extension spatiale rapide liée à la célérité dans la production d’habitat conséquence de la rapide création des quartiers périphériques sur l’impulsion d’une très forte demande de logements formulée par une population sans cesse croissante.
Comme bilan, plusieurs quartiers périphériques, sur l’impulsion des sociétés immobilières, naissent chaque année sous différents vocables : Salem, Bolly, ADO, Km17, Km35 à Yopougon, Nouveau CHU, Star, Sir, nouveau camp, BECEAO, Impôts à Cocody, Kobakro, Stade olympique, Concorde à Abobo, Aéroport, à Port-Bouët, etc. La célérité dans la naissance de ces quartiers a engendré une extension non contrôlée sans précédente de la ville d’Abidjan.
Espaces publics à l’épreuve, dans un contexte de manque d’infrastructures commerciales
Lieu d’expression de la vitalité urbaine, la rue est l’articulation de la ville. La rue est inscrite dans la complexité urbaine, elle assure l’extension urbaine et est l’essentielle dans opérations de lotissement urbain. De ce fait, toutes les infrastructures et activités commerciales sur l’espace abidjanais s’organisent autour des voiries. Cette organisation des équipements économiques répond au besoin d’accessibilité des équipements commerciaux, la fluidité des flux commerciaux, la mobilité des hommes et de leurs biens.
À Abidjan, les cas d’occupation des abords des voiries par des infrastructures économiques, à l’échelle d’une autoroute, d’un boulevard, d’une avenue, d’une rue ou d’un échangeur sont récurrents. L’occupation des périphéries de ces servitudes est multiforme et diffère d’une commune à une autre. Ainsi, au cœur des quartiers, des principaux édifices économiques et sociaux s’organisent à la lisière des artères les plus essentielles débordant les limites prescrites par les normes du plan d’aménagement.
Dans les communes du district d’Abidjan, le caractère commun se présente au niveau du mode d’occupation du sol (MOS), tandis que les contrastes se situent au niveau de la densité dans l’occupation spatiale.
Les équipements économiques et sociaux s’alignent le long des principales artères et populaires. Ainsi, dans toutes les communes du district, ces aménagements infrastructurels aux alentours des voies de desserte, à l’échelle des boulevards, des avenues, des ruelles, des passerelles, ont une emprise sur les trottoirs.
Lieu d’expression de la vitalité urbaine, la rue est l’articulation de la ville. La rue est inscrite dans la complexité urbaine, elle assure l’extension urbaine et est l’essentielle dans opérations de lotissement urbain. De ce fait, toutes les infrastructures et activités commerciales sur l’espace abidjanais s’organisent autour des voiries
À l’analyse du Mode d’Occupation des Sols (MOS) des espaces publics dans ces communes, il ressort que 60,3 % de la superficie totale des trottoirs des rues contiguës aux infrastructures commerciales est utilisé par les activités économiques informelles. Aussi, 30 % des espaces restants sont occupés par les véhicules de la clientèle à défaut de parking de stationnement au sein de ces infrastructures. Ainsi, le cumul montre que plus de 90 % de ces trottoirs sont occupés.
Les difficultés liées au maintien de l’ordre sur les espaces publics d’Abidjan sont surtout dues selon la direction de gestion du patrimoine public du district au manque de moyen financier et à l’absence d’un code de bonne conduite. Le budget alloué à l’entretien et à la gestion du patrimoine public est insuffisant et presque inexistant. Quant au manque de code de bonnes conduites, et le laxisme dans l’application des lois existantes, ils accentuent l’incivisme des populations. Le manque de la culture d’entretien dans le quotidien des Ivoiriens, selon la direction de gestion du patrimoine public (2018), caractérise le désordre dans les espaces urbains.
En dépit de l’existence des règles de gestion des espaces publics, le désordre semble se renforcer dans les communes avec le développement de nouvelles formes d’occupation des espaces. Les causes de ce bilan mitigé sont endogènes. À l’analyse de ces causes, il ressort un laxisme des gestionnaires dans l’application des lois et de la réglementation d’occupation spatiale. Ainsi, certains agents de gestion spatiale font l’objet d’accusation dans l’exercice de leur fonction.
Conclusion
Conçus pour répondre aux exigences d’accessibilité et aux besoins des populations résidentes, ces équipements sont soumis à une pression démographique dans un contexte de croissance démographique au-delà des prévisions lors des aménagements. Le surplus des besoins non satisfait, dans un souci d’insertion pour exercer le commerce occupe le patrimoine public au détriment des normes urbanistiques et fonctionnelles. Ainsi, une mutation fonctionnelle et structurelle de ce patrimoine public est-elle entamée.
À l’analyse du Mode d’Occupation des Sols (MOS) des espaces publics dans ces communes, il ressort que 60,3 % de la superficie totale des trottoirs des rues contiguës aux infrastructures commerciales est utilisé par les activités économiques informelles. Aussi, 30 % des espaces restants sont occupés par les véhicules de la clientèle à défaut de parking de stationnement au sein de ces infrastructures. Ainsi, le cumul montre que plus de 90 % de ces trottoirs sont occupés
Mais faute de moyens financiers et humains conséquents pour assurer la gestion du patrimoine public conformément aux normes urbaines, l’État assiste, impuissant aux mutations fonctionnelles et structurelles des espaces publics. Ces évolutions observables dans toutes les communes d’Abidjan posent en filigrane la question d’une crise spatiale et de la prospective de développement des marchés.
Il convient donc de noter que si l’on veut des communes équipées en infrastructures, avec des cadres de vie sains, propres et ordonnés, de mettre à disposition les moyens adéquats aux collectivités qui passent nécessairement par le transfert effectif des compétences aussi bien financières qu’humaines.
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