La situation des droits de l’Homme en Afrique Aujourd’hui, il faut reconnaître que les droits de l’Homme, particulièrement en Afrique, sont mieux connus qu’il y a quelques années lorsque nous étions dans des régimes répressifs et dictatoriaux. A cette époque, lorsque l’on évoquait les droits de l’Homme, cela était perçu comme une attaque contre le système ou contre le régime. Être militant et défenseur des droits de l’Homme signifiaient que vous êtes subversif. Vous êtes un rebelle. Il faut dire que les mentalités ont beaucoup changé, et ceci grâce au travail de la Commission africaine et aux milliers de défenseurs qui nous ont d’ailleurs précédés et qui ont fait un travail pour amener ces changements dans nos pays. Il faut noter qu’après les indépendances en Afrique, on a connu une série de coups d’État, il s’agit d’une période où la liberté était complètement bâillonnée. Depuis les années 90, on a assisté à une évolution avec un nouveau mouvement constitué de jeunes qui a replacé la question des droits de l’Homme au coeur des débats. Être militant et défenseur des droits de l’Homme signifiaient que vous êtes subversif. Vous êtes un rebelle. Il faut dire que les mentalités ont beaucoup changé Néanmoins, le défi est énorme, malgré cette reconnaissance, l’existence de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la mise en place de la commission, de différents comités qui s’occupent des droits de l’homme, le protocole de Maputo et la mise en place du comité des droits de l’enfant. Malgré l’existence de toutes ces normes, il faut reconnaître que l’Afrique peine à devenir ce continent où on parle de l’effectivité du respect des droits de l’Homme. Je parle de l’effectivité en ce sens que nous avons aujourd’hui beaucoup d’instruments, plusieurs normes et plusieurs institutions, mais malheureusement on se rend compte que le respect des droits de l’Homme reste encore un défi. Les obstacles majeurs Le premier obstacle est d’abord le non-respect des obligations prises par les États. La Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples traduit la volonté et le courage des pays qui accédaient à l’indépendance. Ces pays se sont dit : nous allons construire des nations modèles, ce que nous avons vécu comme situations de répression, nous ferons en sorte que nos citoyens ne les vivent plus. La charte a de nombreuses dispositions: le droit de disposer des ressources, la liberté d’association et de réunion, le droit à la vie, le droit de ne pas être torturé… Elle a de nombreuses dispositions mais elles ne sont pas mises en œuvre. C’est un grand obstacle. La CADHP a pris plusieurs résolutions pour renforcer encore les dispositions de la charte, pour demander aux États de pouvoir mettre en œuvre leurs engagements. Où sont ces résolutions ? Dans des tiroirs ! Et on accusera cette même commission de ne pas respecter les États, d’être contre l’indépendance des États et de jouer le jeu des ONG comme si ces obligations n’étaient pas contenues dans la Charte. Le premier obstacle est d’abord le non-respect des obligations prises par les États Le deuxième obstacle est la question de la gestion et de la gouvernance des ressources naturelles en Afrique. Le troisième obstacle est la volonté de certains dirigeants à rester au pouvoir. Voilà les trois obstacles qui, à mon avis, constituent un handicap sérieux par rapport au respect des droits de l’Homme en Afrique. Efficacité des mécanismes de protection L’existence des mécanismes est une bonne chose mais il nous faut donner les moyens pour que cela fonctionne. On a mis en place des mécanismes de protection de l’enfant, la commission africaine, on a adopté plusieurs protocoles : c’est une bonne chose, on a surtout élaboré un cadre de protection de droits de l’homme important, efficace et intéressant. J’apprécie toutes ces personnes qui se battent chaque jour dans ces comités pour faire leur travail parfois sans avoir les moyens nécessaires de se déplacer pour aller à la rencontre des populations. C’est pour cela que la Charte est dénommée la charte africaine des Droits de l’Homme et des peuples. Ce n’est pas la charte des chefs d’État, mais des peuples c’est-à-dire ceux que la charte considère comme étant les plus vulnérables. La Charte protège les Africains qui pourraient être dans une situation de vulnérabilité. Chaque Africain devrait connaître ses devoirs et droits.
La protection des droits de l’homme concerne tout le monde. Que vous soyez dirigeant ou un simple citoyen, lorsque nous avons un cadre légal qui respecte les droits de l’homme, nous sommes tous en sécurité. Les droits de l’homme sont la base. Il faut avoir la liberté de pouvoir s’exprimer, la liberté de pouvoir dire ce que l’on pense de la politique dans son pays, la liberté de réclamer le droit au partage des ressources naturelles. Ce n’est absolument pas un concept européen. Nous devons bannir ce type de discours pour aller vers un développement inclusif. La protection des droits de l’homme concerne tout le monde. Que vous soyez dirigeant ou un simple citoyen Les droits de l’homme sont à la fois un cadre et un instrument dans lequel tout le monde doit se retrouver et quelle que soit votre position. J’invite la Commission africaine dont le rôle est important pour la situation des plus vulnérables, mais aussi ceux-là qui sont au pouvoir et qui veulent entacher la crédibilité de la commission à penser que demain lorsqu’ils ne seront plus au pouvoir, ils devront bénéficier d’un système de recours. C’est donc dans l’intérêt de tout le monde de respecter les droits de l’homme.