Auteur : Olivier Nieburg
Site de publication : JeuneAfrique
Date de publication : 2021
Type de publication : Article
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Déjà une réalité au Kenya, en Afrique du Sud et au Nigeria, l’évaluation du risque crédit via l’intelligence artificielle dispose d’un fort potentiel en Afrique de l’Ouest malgré les inquiétudes liées à la protection de la vie privée.
Pour octroyer un crédit, les prêteurs utilisent traditionnellement le système du credit score. Ils évaluent notamment si un client à des antécédents de défaut de paiement liés à sa carte de crédit. Si ce n’est pas le cas, ils s’appuient sur des données démographiques ou sectorielles, comme l’existence d’une source de revenus réguliers ou encore la stabilité du secteur d’activité de l’emprunteur, sachant que les profils féminins sont associés à un meilleur taux de remboursement que les profils masculins. Or, cette approche défavorise les personnes non bancarisées et celles qui travaillent dans le secteur informel.
Dans 70 % des cas, les emprunteurs ne parviennent pas à obtenir les scores nécessaires et, mécaniquement, leurs dossiers sont rejetés. En effet, 57 % des africains ne sont pas bancarisés, ne disposant que de revenus en espèces ou utilisant des cartes de débit plutôt que de crédit.
Pour remédier à cette situation, une solution a émergé au Kenya au milieu des années 2010 : l’évaluation alternative du risque crédit, développée grâce à l’intégration d’outils d’intelligence artificielle (IA) aux services de crédit mobile M-Shwari de Safaricom, proposés via la plateforme M-Pesa.
Orange Bank
Depuis, des fintechs locales, comme Jumo, dont le siège est au Cap, ou encore la start-up nigériane Kiakia, se sont fait une place sur ce marché. Parmi les autres acteurs, le singapourien Credolab, créé en 2016 et présent en Afrique du Sud, au Nigeria, au Kenya et au Ghana, et l’américain Branch, qui analyse les données SMS, gagnent du terrain sur le continent.
Concrètement, Credolab intègre un kit de développement logiciel (SDK) mobile dans les applications bancaires des emprunteurs, que ce soit sur Android ou iOS, afin de collecter des données microcomportementales. Il s’agit de regarder, par exemple, le pourcentage de selfies sur le téléphone d’un client ou encore le nombre de jeux installés ou de vidéos créées par mois, mais aussi l’utilisation éventuelle d’un réseau privé virtuel.
Côté prêteurs, la First National Bank of South Africa, les kenyans NCBA Group et Equity Bank, et la française Orange Bank ont été parmi les premiers adeptes de ces solutions.
Mobile money et questionnaire de personnalité
Une fois collectées, ces données déterminent la probabilité d’un défaut de paiement et génèrent un score de crédit. Parmi les autres méthodes émergentes figurent l’analyse des transactions de mobile money ou encore des questionnaires de personnalité.
En raison de la forte pénétration de l’argent mobile en Afrique, les portefeuilles mobiles sont aujourd’hui la meilleure source de scoring alternatif
En raison de la forte pénétration de l’argent mobile en Afrique, les portefeuilles mobiles sont aujourd’hui la meilleure source de scoring alternatif, affirme Dmitry Borodin de Creditinfo.
Fiabilité et confidentialité
La fiabilité reste une préoccupation majeure, même en Europe, où la plupart des prêteurs utilisent déjà des méthodes alternatives. « Un comportement humain instable met le modèle en échec », souligne ainsi Hervé Phaure, responsable risque crédit chez Deloitte en France, pointant le fait que les comportements des clients peuvent évoluer rapidement.
À cela s’ajoute la question de la confidentialité des données. Pour rappel, seule la moitié des gouvernements africains a adopté des lois sur la protection des données. Des groupes de défense tels que Privacy International s’inquiètent du sort des informations récoltées et redoutent des dérives comme la surveillance de masse.
Seule la moitié des gouvernements africains a adopté des lois sur la protection des données
Face à ces écueils, Credolab, qui souligne que l’accord de crédit via l’IA permettrait de donner accès au crédit à un milliard de personnes sans historique, se veut rassurant. Il assure qu’il ne collecte que des métadonnées comportementales telles que le nombre de contacts ajoutés à la semaine : rien de personnel comme le nom des contacts ou le contenu des photos, des SMS et des PDF. Ces données sont collectées une fois que le client a demandé un prêt, ajoute la fintech.
Mais, dans une étude publiée en mars 2020, le Parlement européen a mis en garde contre cette méthode qui pourrait contribuer à perpétuer des préjugés. Par exemple, une personne pourrait se voir refuser un prêt à cause de la qualité des vêtements qu’elle achète.
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