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Oxfam International est une confédération composée de dix-neuf organisations indépendantes de même sensibilité qui agissent contre les injustices et la pauvreté. Elles travaillent ensemble et en collaboration avec des partenaires locaux répartis dans près de cent pays.
Date de publication : 03 Juillet 2019
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Ce document fait partie d’une série de textes écrits pour informer et contribuer au débat public sur des problématiques relatives au développement et aux politiques humanitaires. L’analyse globale réalisée par Oxfam mesure les efforts réalisés dans la réduction des inégalités par les pays de l’Afrique de l’Ouest. Elle montre malheureusement que c’est la région la moins engagée dans la lutte contre les inégalités et que les pays sahéliens ont d’importants progrès à réaliser. La fracture économique, sociale et politique croissante rend la vie de millions de personnes plus dure et plus courte. Les inégalités sont criantes et se manifestent dans tous les domaines de la vie. Elles enferment une part croissante de la population dans la pauvreté et les laissent sans perspectives d’avenir. Elles alimentent les injustices et les tensions, mettent à mal le contrat social et les relations entre les groupes de population. Elles créent les conditions de déstabilisation et de l’insécurité qui prévaut aujourd’hui dans la région. De ce document ressort un point essentiel : la résolution durable des conflits dans la région doit impérativement passer par la prise en compte des inégalités sociales, économiques et politiques sur lesquelles la violence armée se développe. WATHI a choisi de faire connaître largement ce document parce qu’il documente de manière précise l’ampleur et les formes des inégalités dans des pays du Sahel qui font tous partie de la zone d’intérêt principale de WATHI.
Alors que 40% de la population vit avec moins d’1,90$ par jour et que la situation politique, économique, sociale et sécuritaire s’est fortement dégradée ces dernières années, ce document appelle les États de la région et la communauté internationale à redoubler d’efforts. Les réponses apportées par les États aux crises humanitaires, alimentaires, climatiques, sécuritaires doivent prioriser la réduction des inégalités et des injustices. Ce prisme est essentiel pour mettre les populations sur une trajectoire de développement inclusif et pour apporter des réponses durables à l’insécurité actuelle. Dans une société moins inégalitaire, l’ensemble du pays est gagnant, avec une diminution de la criminalité, une confiance plus forte, une meilleure santé et des vies plus longues et plus heureuses. Différentes recommandations sont formulées, envers les acteurs impliqués dans la gestion des conflits, pour atteindre ces objectifs. Il s’agit notamment pour :
Les extraits sélectionnés proviennent des pages : 12 – 13, 17 – 20, 28 – 30, 37 – 46.
L’urgence de réduire les inégalités
Des travaux récents du Fond monétaire international (FMI) montrent l’impact négatif des inégalités de revenus sur la croissance et la prospérité à long terme d’un pays, lorsqu’elles dépassent un certain seuil. Et ce d’autant plus que les revenus sont fortement concentrés dans les mains d’une minorité de personnes ou d’acteurs. Or tous les pays de la région sont au-dessus de cette limite.
Le Tchad et le Sénégal sont, comparativement à leurs voisins, les pays sahéliens les plus inégalitaires, où les 10% de la population la plus riches possèdent une part deux fois plus importante du revenu national brut que les 40% de la population les plus pauvres. Le FMI reconnait aujourd’hui que la dégradation des inégalités dans de tels contextes réduit encore le consensus social et risque de conduire à des troubles sociaux, si des solutions justes et durables ne sont pas envisagées et mises en œuvre. La réduction des inégalités sous toutes ses formes est donc un impératif économique, social et politique pour les pays sahéliens et les États disposent de nombreuses options politiques pour cela.
Par des politiques sociales inclusives et de qualité
Les politiques publiques d’éducation, de santé et de protection sociale profitent à tous, mais elles bénéficient encore plus aux populations pauvres et parmi elles aux femmes, qui n’ont plus à financer ces services à partir de leurs revenus déjà très faibles ni à les substituer avec leurs services de soin non rémunérés. Pourtant si ces services publics sont essentiels, l’accès y demeure très inégal, entre riches et pauvres, urbains et ruraux, hommes et femmes, limitant les perspectives d’avenir d’une grande partie de la population.
Les États africains se sont engagés à consacrer des parts importantes de leurs budgets à l’éducation (20% de leur budget et 6% de leur PIB) et à la santé (15% de leurs budgets et 5% de leur PIB). Ils ont fait d’importants progrès pour donner accès globalement à ces services à une population grandissante, mais les efforts budgétaires sont encore loin du compte.
- Dans le secteur de l’éducation
Quatre des pays sahéliens sont proches de consacrer 20% de leurs budgets nationaux à l’éducation, le Sénégal ayant même dépassé cet objectif. Mais au- delà des pourcentages, la faiblesse des budgets nationaux et le nombre très important d’enfants à scolariser, suivant une croissance démographique très importante, font peser d’énormes défis sur les systèmes éducatifs. Cela se reflète par exemple dans les budgets consacrés par enfant scolarisé. En 2012 pour l’éducation primaire, seuls le Sénégal et la Mauritanie atteignent le niveau de dépenses par élève considéré comme nécessaire pour offrir une éducation de bonne qualité.
Le Tchad et le Sénégal sont, comparativement à leurs voisins, les pays sahéliens les plus inégalitaires, où les 10% de la population les plus riches possèdent une part deux fois plus importante du revenu national brut que les 40% de la population les plus pauvres
- Dans le secteur de la santé
Le Sahel a connu des avancées certaines en matière de santé, notamment sous l’impulsion des objectifs du millénaire pour le développement. La mortalité maternelle à baissé de plus de moitié depuis les années 1990 au Burkina Faso, passant de 727 décès pour 100 000 naissances vivantes à 371 en 2015. Les taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans ont quant à eux baissé de plus de moitié au Burkina, Tchad et Mali et plus de deux tiers au Niger et au Sénégal.
Ces progrès ont été permis notamment grâce à des politiques d’exemptions de paiements et de renforcement de l’offre de soins, comme l’extension de la couverture vaccinale. Le taux de couverture vaccinale antidiphtérique-antitétanique-anticoquelucheux (DTC3) est par exemple passé de 15% en 2000 à plus de 90% en 2015 au Burkina Faso, et au Niger de 34% à 75%.
Mais le Sahel reste l’une des régions du monde enregistrant les statistiques sanitaires les plus alarmantes du monde. L’espérance de vie en bonne santé à la naissance, de 53 ans en moyenne, (et de seulement 50,7 au Mali) y est parmi les plus basses au monde, et de vingt ans inférieurs à la moyenne des pays du G7. Les taux de couverture des soins essentiels sont en deçà de la moyenne africaine et le Tchad, le Mali, le Niger et la Mauritanie figurent parmi les 10 pays ou la couverture des soins essentiels est la plus faible du monde. Un enfant sur cinq meurt avant l’âge de cinq ans, le plus souvent de maladies évitables.
La qualité de l’offre de soins et des services de santé reste très limitée par différents facteurs, au premier rang desquels le manque du personnel de santé qualifié et sa concentration dans les villes. Alors que le standard minimal de densité médicale pour l’OMS est de 10 médecins pour 10 000 habitants, la densité est de 0,9 en moyenne au Sahel et autour de 0,5 au Burkina Faso, au Tchad et au Niger. Le manque de financement des politiques de santé se répercute sur le personnel, l’équipement et l’approvisionnement des centres de santé en médicaments et en matériel médical.
Par des politiques d’adaptation aux changements climatiques centrées sur les plus vulnérables
Le Sahel est une des régions du monde qui subit le plus les inégalités climatiques mondiales. Les pays sont responsables d’une part infime des émissions mondiales de gaz à effet de serre, estimée à 0,25% avec les émissions par habitant de quatre pays (Burkina Faso, Tchad, Mali et Niger) parmi les 10 % les plus faibles au monde. Pourtant le Sahel est l’une des régions les plus vulnérables aux impacts des changements climatiques. Selon l’indice GAIN90, les pays sahéliens d’Afrique de l’Ouest se classent parmi les 20% des pays les plus vulnérables au monde, le Niger étant considéré comme le pays le plus vulnérable du monde aux changements climatiques et le Tchad le 3ème.
Les changements climatiques sont déjà à l’œuvre au Sahel, devenu plus sec et plus chaud : la température a augmenté plus vite que la moyenne mondiale et les précipitations moyennes ont diminué dans tous les pays. La mauvaise répartition des pluies dans le temps et l’espace provoque des épisodes de sècheresse suivis d’inondations, détruisant les cultures lors des crues, par exemple du fleuve Niger ou provoquant des déplacements de population importantes (l’inondation de la ville de Ouagadougou en 2009 a forcé 150 000 personnes à quitter leur domicile).
La fréquence des tempêtes extrêmes a déjà plus que triplé ces 35 dernières années au Sahel et sont parmi les plus explosives de la planète. Et les prévisions climatiques sont alarmantes : la CCNUCC révèle des scénarios d’augmentation de températures de 4 degrés dans les pays de l’intérieur (Mali, Tchad, Burkina Faso, Niger) d’ici à 2100, l’augmentation des évènements climatiques violents et la réduction globale des ressources en eau.
Ces changements climatiques ne touchent pas tout le monde de manière égale. Les petits agriculteurs, les populations pastorales, les femmes et les populations les plus pauvres, vivant dans des conditions précaires (logement, ressources, etc.) sont les plus affectés par les changements climatiques et leurs manifestations violentes.
Le Sahel reste l’une des régions du monde enregistrant les statistiques sanitaires les plus alarmantes du monde. L’espérance de vie en bonne santé à la naissance, de 53 ans en moyenne, (et de seulement 50,7 au Mali) y est parmi les plus basses au monde, et de vingt ans inférieurs à la moyenne des pays du G7
Les changements climatiques déplacent des populations et alimentent des crises aux dimensions nombreuses et dramatiques (humanitaires, alimentaires, sanitaires, sécuritaires). Les politiques d’adaptation et de lutte contre les changements climatiques sont des questions critiques pour les pays sahéliens.
Tous ont ratifié les conventions onusiennes sur la biodiversité, la désertification, le changement climatique, ainsi que l’accord de Paris. Ils ont préparé et mettent en œuvre des stratégies nationales, des politiques et des plans d’actions relatifs aux changements climatiques et à l’adaptation. Ces documents soulignent leur vulnérabilité et leurs énormes besoins pour restaurer les terres dégradées, reboiser des territoires pour lutter contre la désertification, développer des modes de production agricoles et animales plus adaptés et diversifiés, améliorer la gestion de l’eau, renforcer les systèmes d’alerte précoces, etc.
En février dernier, 17 États de l’ensemble de la bande du Sahel ont annoncé un « plan d’investissement climatique » de 400 milliards de dollars sur douze ans (2018-2030). Un premier programme prioritaire a reçu des promesses d’aide à hauteur de 3,41 milliards de dollars, mais les besoins de financement restent immenses.
Mieux coordonner les réponses à la crise et placer les besoins des populations au centre des interventions
La gouvernance et la sécurité humaine doivent être au cœur des réponses
Si les mesures de sécurité sont nécessaires, elles ne permettent pas de s’attaquer aux causes profondes de la crise et peut conduire à une approche militarisée unidimensionnelle de la sécurité, et doivent donc nécessairement faire partie d’un plan à long terme intégrant pleinement les problématiques de résilience, de sécurité et de gouvernance des communautés. La résolution durable des conflits ne sera possible qu’en prenant en compte les causes structurelles, et en premier lieu les inégalités sociales, économiques, politiques sur lesquelles se développe la violence armée au Sahel.
Le Tchad, le Mali, le Niger et la Mauritanie figurent parmi les 10 pays ou la couverture des soins essentiels est la plus faible du monde. Un enfant sur cinq meurt avant l’âge de cinq ans, le plus souvent de maladies évitables
Les approches de la communauté internationale et des États du G5 Sahel se retrouvent sur le principe que la sécurité et le rétablissement des structures de l’État sont des conditions préalables à la stabilité et au développement durable. Or dans les zones où la souveraineté de l’État est contestée, les approches de renforcement de la gouvernance devraient privilégier le rétablissement des liens et de la confiance entre les populations et les institutions. Elles devraient également s’attaquer aux inégalités horizontales, entre différentes communautés et groupes de population, entre les sexes, et se concentrer sur la transparence et la responsabilité des institutions, pour rétablir ou renforcer le contrat social.
Oxfam estime que les personnes doivent être au centre des interventions en matière de sécurité. Cela implique de comprendre les perceptions des gens à propos de leur propre sécurité, l’impact de l’insécurité et de la violence sur leur vie quotidienne et de renforcer les solutions locales et les stratégies élaborées en conséquence. Cette approche permet aux personnes de définir leurs propres critères de risque et leurs propres idées sur la nature des interventions appropriées. Si les efforts de sécurité de l’État visant à réduire la violence armée et à contenir les conflits ne prennent pas pleinement en compte la dimension humaine de la sécurité, elles auront peu de chances de réussir à long terme.
Face à l’augmentation des dépenses militaires, les choix budgétaires des États doivent répondre aux attentes sociales des populations
Pour faire face au défi sécuritaire et rendre opérationnelle la force conjointe du G5 Sahel, les dépenses budgétaires liées à la défense et à la sécurité publique ont augmenté dans tous les pays du G5 Sahel ces dernières années. Selon le Sipri, l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, entre 2013 et 2018, les dépenses militaires du Mali ont presque quadruplé, celles du Niger ont été multipliées par 2,5 et celles du Burkina Faso ont doublé.
Pourtant les premières analyses ne laissent pas apparaître d’augmentations significatives des déficits budgétaires. La crainte est donc forte de voir les dépenses de développement contraintes, à un moment où ces pays en ont le plus besoin et alors qu’il est justement reproché aux États de ne pas remplir leurs devoirs de provision de services sociaux de base.
Le manque de financement des politiques de santé se répercute sur le personnel, l’équipement et l’approvisionnement des centres de santé en médicaments et en matériel médical
L’analyse des budgets nationaux réalisée par Oxfam sur la période 2016-2019 semble corroborer un certain effet d’éviction des dépenses de développement par les dépenses de sécurité et de défense. Les dépenses sociales n’ont pas diminué en volume ces quatre dernières années (à l’exception du Burkina et du Tchad), mais les arbitrages ont conduit à contraindre fortement les dépenses sociales et de développement.
Outre les dépenses croissantes de défense et de sécurité, il convient de souligner que la dette des pays africains, y compris au Sahel, a largement augmenté ces dernières années, notamment du fait d’une part du manque de transparence et de contrôle démocratique sur cette question, et d’autre part de l’émergence de nouveaux bailleurs (Chine, Arabie Saoudite, banques privées) peu vigilants sur la solvabilité de long terme des emprunteurs, sur l’impact du surendettement sur les services publics des pays concernés et jusqu’à présent peu intégrés dans les espaces multilatéraux de négociation sur cette question.
Du côté de l’aide que perçoivent les pays sahéliens, le compte n’y est pas pour permettre d’investir suffisamment dans les budgets sociaux et réduire les inégalités. La gravité de la situation a été rappelée par la chancelière allemande Angela Merkel en visite officielle au Burkina Faso en mai 2019 : « Les pays affectent 15 voire 20 % de leur budget à la défense et à la sécurité. Donc beaucoup de projets de développement ne peuvent pas être mis en œuvre. »
Coordonner les initiatives pour le Sahel pour construire des politiques publiques durables capables de s’attaquer à la réduction des inégalités
Depuis les crises en Libye et au Mali, la mobilisation sur le Sahel de la communauté internationale et des États s’est traduite par l’élaboration d’un grand nombre d’initiatives ou de stratégies visant à cadrer leur vision et proposer des orientations de leurs actions. États de la région, Nations Unies, Banques de développement, institutions régionales, coopérations bilatérales et multilatérales (etc.) ont produit des nombreux cadres d’intervention ou stratégies sur le Sahel. La note publiée à ce sujet par l’Institut d’études de sécurité début 2015 analysait leur convergence sur quatre principaux domaines : la sécurité, le développement et la résilience (y compris les infrastructures), la gouvernance et l’éducation.
Mais elle soulignait également leurs divergences, que ce soit sur les zones géographiques incluses (de 5 à 12 pays), leurs priorités respectives au-delà d’une lecture globalement commune des enjeux, les instruments de mise en œuvre, les partenariats prévus et leur capacité ou volonté à fédérer d’autres acteurs. Les auteurs insistaient sur le besoin de coordination, évoquant le risque que les logiques de concurrence entre les acteurs prennent le dessus sur la coordination des interventions.
Selon l’indice GAIN90, les pays sahéliens d’Afrique de l’Ouest se classent parmi les 20% des pays les plus vulnérables au monde, le Niger étant considéré comme le pays le plus vulnérable du monde aux changements climatiques et le Tchad le 3ème
Chacune de ces initiatives a défini des domaines prioritaires et des objectifs précis. S’ils sont proches les uns des autres, ils ne recouvrent pas pour autant les mêmes enjeux, secteurs d’intervention ou thématiques. L’articulation et la complémentarité de ces initiatives est pourtant un enjeu majeur, dans un contexte particulièrement complexe. Les analyses partagent la nécessité d’allier réponses humanitaires, sécuritaires et de développement et d’agir dans l’urgence tout en construisant les bases du développement. Mais l’opérationnalisation de ces principes et la coordination des interventions restent des défis de taille. Il s’agit à la fois de désenclaver des territoires et de construire des infrastructures (de transport, d’énergie, d’eau et d’assainissement, etc.), en cohérence avec fourniture de services et le développement de politiques publiques de qualité pour l’ensemble de la population (sociales, de citoyenneté, de développement économique, etc.).
Pourtant en l’état actuel, les initiatives portées par les différents acteurs ne permettent pas d’entrevoir le développement d’un plan concerté et cohérent d’aménagement des régions sahéliennes. Le chemin semble encore long et devrait nécessairement passer par l’élaboration conjointe d’une vision inclusive du développement. Une telle vision doit nécessairement prioriser la réduction des inégalités, qui s’expriment dans tous les pans de la vie des populations sahéliennes, qu’elles soient économiques, sociales ou de représentation citoyenne ou politique.
Recommandations
Les inégalités de revenus, d’accès à des services publics de qualité, mais aussi entre les genres et entre des catégories de populations délaissées ou discriminées maintiennent des millions de personnes dans la pauvreté et sans perspectives d’avenir, minent la cohésion sociale, engendrent des frustrations politiques et sociales et forment un terrain sur lequel les conflits peuvent perdurer. Combattre les inégalités sous toutes ces formes ne devrait plus être un choix mais une nécessité urgente à laquelle l’ensemble des acteurs doit s’attaquer avec ardeur pour résoudre durablement les crises que traversent le Sahel. Cela passe par la construction de politiques et de modes de gouvernance plus justes et équitables, centrées sur les besoins des populations et répondant aux aspirations des citoyen.ne.s des pays sahéliens.
Si les efforts de sécurité de l’État visant à réduire la violence armée et à contenir les conflits ne prennent pas pleinement en compte la dimension humaine de la sécurité, elles auront peu de chances de réussir à long terme
De manière coordonnée, chaque acteur a un rôle déterminant à jouer :
- Les États du Sahel doivent refondre leurs politiques fiscales, renforcer leurs politiques sociales et de développement, et réformer profondément leurs modes de gouvernance afin d’atteindre l’ODD 10 sur les inégalités.
- La CEDEAO et l’UEMOA doivent élaborer des cadres régionaux qui orientent les pays vers des politiques justes et équitables et qui renforcent leur collaboration pour la gestion des zones transfrontalières.
- Le G5 Sahel doit fortement renforcer les dimensions de développement et de gouvernance de son action, reconnaissant que l’approche sécuritaire actuellement privilégiée ne permettra pas une résolution durable des conflits. Il doit impulser une vision inclusive du développement du Sahel avec les États, les organisations régionales, les populations, les partenaires du développement et les organisations de la société civile.
- L’Alliance Sahel doit assurer une véritable coordination de l’aide au développement pour le Sahel et renforcer les efforts communs pour élaborer et mettre en place de véritables politiques publiques de qualité, sous le leadership des États.
- Le G7 doit traduire son discours de lutte contre les inégalités en actions et instruments concrets pour répondre à l’urgence et apporter des réponses durables en s’attaquant aux causes structurelles des vulnérabilités des populations sahéliennes.
Pour ce faire ; États, Institutions et coopérations régionales, bailleurs de fonds et acteurs du développement et de la coopération internationale doivent agir de manière coordonnée pour combattre les inégalités :
- Par la mise en place de politiques fiscales progressives et justes qui réduisent les inégalités de revenu et permettent de générer des financements suffisants pour financer des politiques sociales et de développement, de qualité et inclusives.
- Par des politiques d’éducation, de santé et de protection sociale qui garantissant des services gratuits, universels, publics, adaptés aux femmes et aux filles et transparents envers les bénéficiaires.
- Par des politiques agricoles et d’élevage justes et équitables, qui offrent des opportunités de travail, de revenus et de vie dignes à l’ensemble des personnes qui vivent de ces activités et permettent de renforcer la résilience et la sécurité alimentaire de la population.
- Par des politiques d’adaptation rapides aux changements climatiques qui renforcent les capacités de prévention et de résilience des populations les plus directement touchées par les bouleversements en cours.
- Par des cadres règlementaires, juridiques, politiques et des institutions sociales qui luttent contre les inégalités différenciées et la vulnérabilité des femmes sahéliennes dans tous les domaines de la vie publique, économique et politique et dans la sphère privée.
- Par la reconstruction d’une gouvernance plus juste et inclusive à tous les niveaux de décision, du local au régional, la protection et le renforcement de l’espace civique, qui permettre à toutes et tous d’être représenté et de participer activement à la vie publique et politique.
- Par des réponses aux crises coordonnées qui répondent aux besoins des populations en termes de sécurité humaine, de développement et d’accès à des services publics gratuits, universels et de qualité.
Source photo : Oxfam