La situation économique
WATHI propose une sélection de documents sur le contexte économique, social, politique, sécuritaire et alimentaire du Tchad. Chaque document est présenté sous forme d’extraits qui peuvent faire l’objet de légères modifications. Les notes de bas ou de fin de page ne sont pas reprises dans les versions de WATHI. Nous vous invitons à consulter les documents originaux pour toute citation et tout travail de recherche.
Tchad : Plan National de Développement 2013-2015
Ministère du Plan, de l’Economie et de la Coopération internationale
http://www.td.undp.org/content/dam/chad/docs/UNDP-TD-PLAN-NAT-DVLP-2013.pdf
Extraits
La planification récente du développement au Tchad est marquée par deux stratégies successives de réduction de la pauvreté. La première Stratégie Nationale de Réduction de la Pauvreté (SNRP.1) de 2003 à 2006, et la deuxième Stratégie de Croissance et de Réduction de la Pauvreté (SNRP2) couvrant la période 2008-2011.
Compte tenu des exigences de la marche de l’économie et des récents engagements et orientations politiques du Président de la République qui consistent à « promouvoir le développement du monde rural » et de faire du Tchad « une puissance régionale émergente à l’horizon 2025, portée par des sources de croissance diversifiées et durables, créatrices de valeurs ajoutées et d’emplois et assurant à chaque tchadien, un accès adéquat aux services sociaux de base, à un logement décent et à une offre adéquate de formations », le Gouvernement a décidé d’élaborer une stratégie visant à réaliser cet objectif.
Le présent Plan National de Développement (PND) 2013-2015 est une première étape pour les 3 prochaines années qui permet au pays de renforcer les bases de la croissance économique et sociale. Le Gouvernement va engager au courant de l’année 2013 la réflexion pour la définition des stratégies et des programmes visant à faire du Tchad un pays émergent en 2025.
Entre 2004 et 2005, l’exploitation du pétrole a entrainé un quasi doublement du PIB qui est passé de 1 732 Milliards FCFA en 2004 à 3 101 Milliards FCFA en 2005. Le PIB pétrolier représente sur la période 2003-2009 en moyenne 36% du PIB, contre 21% pour les secteurs d’agriculture et de l’élevage, 13% pour le commerce et 29% pour l’ensemble des autres secteurs. La contribution de l’agriculture au PIB sur la période 2005-2008 était de 12,5%, à comparer, à celle du Congo, du Gabon et de la Guinée équatoriale, pays de la région également producteurs de pétrole, qui n’était que de 3 % à 4 % en 2009-2010.
En termes de ressources budgétaires, les revenus du pétrole représentent en moyenne annuelle près de 80% des recettes du budget de l’État. Actuellement, les recettes hors pétrole ne représentent que 13 % du PIB et ne permettent au mieux que de couvrir la masse salariale. La faible pression fiscale qui se situe à près de 8% en retrait de dix points de la norme CEMAC, explique cette situation.
De même, l’aide extérieure, l’autre source de financement de la croissance, a baissé au cours des trois dernières années. Selon l’OCDE , le montant total net d’APD (Aide Publique au Développement) programmable pour le Tchad au cours de la période 2009-2011, tous donateurs confondus, était de 251 millions de dollars américains en 2009 (chiffre effectif), 212 millions de dollars en 2010 et 200 millions de dollars en 2011, soit un indice de variation de 84 en 2010 et 80 en 2011 (2008=base 100).
S’agissant des investissements, le Gouvernement a donné ces dernières années une impulsion à son processus d’industrialisation, surtout grâce à la coopération internationale. Une raffinerie de pétrole qui permet de couvrir les besoins du pays et d’exporter prochainement dans les pays de la CEMAC fonctionne depuis juin 2011 à Djermaya. Un parc industriel, qui produira des sous-produits du pétrole comme des textiles non-tissés, tubes et plastics et du gaz liquide, est en cours de construction dans la même localité.
Une première cimenterie a commencé à produire en mars 2012 à Baoré. Une usine d’assemblage produisant environ 2 800 tracteurs par année a ouvert ses portes à N’Djamena en novembre 2009. Une usine de jus de fruits fonctionne à Doba. Une usine textile qui produit du fil de coton et des habits simples a été rénovée à Sarh. Une usine de produits pharmaceutiques, est en cours de construction à N’Djamena.
Les exportations qui étaient avant l’exploitation du pétrole, dominées par les produits agropastoraux, notamment le bétail (51% des exportations), le coton-fibre (30% des exportations) et la gomme arabique (4% des exportations), sont aujourd’hui supplantées par le pétrole, dont la part s’établit à 88%, contre (6%) pour le bétail, (2%) pour le coton-fibre et (4%) pour les autres produits .
Ce comportement des exportations et de la domination pétrolière par rapport à l’agriculture et l’élevage montre que ce modèle n’est pas créateur d’emplois. Voilà pourquoi, le Gouvernement entend prendre des mesures actives de réorientation vers l’agriculture, l’élevage et l’industrie de transformation pour favoriser la création de richesse et d’emplois.
Le secteur des micros, petites et moyennes entreprises, souvent informelles, représente plus de 70% des emplois en milieu urbain au Tchad. Pendant de nombreuses années, les politiques économiques menées au Tchad se sont focalisées sur la promotion de grandes entreprises publiques et de filiales d’entreprises étrangères de substitution aux importations. Très peu d’attention était accordée aux petites et moyennes entreprises.
La création en 2011 d’un Ministère des Petites et Moyennes Entreprises et d’un Ministère du Micro-crédit a marqué le début d’une prise de conscience par les autorités de l’importance que représente cette catégorie d’acteurs du secteur privé dans la création de richesses, la diversification de l’économie, la création d’emplois et la réduction de la pauvreté.
L’analyse du marché de l’emploi au Tchad révèle que le pays dispose d’un fort potentiel de ressources humaines capables de booster la croissance économique et contribuer à la réduction de la pauvreté. La forte croissance démographique observée au cours de ces dernières années conduit, en effet, à une forte progression du nombre de jeunes recherchant un emploi.
La population en âge de travailler c’est-à-dire celle de la tranche d’âge de 15 à 65 ans représentait en 2010, 5 288 000 personnes, soit 46,2% de la population totale. Actuellement arrivent chaque année sur le marché du travail, environ 170 000 jeunes en âge de travailler, sans que les possibilités d’emplois décents n’existent. Pour les 10 et 20 prochaines années, il faudra trouver ou créer 1,7 million d’emplois entre 2010 et 2020, et 2,5 millions d’emplois entre 2020 et 2030, soit en proportion, subvenir aux besoins de 7 746 000 demandeurs d’emplois en 2020, contre 11 414 000 en 2030.
Ce fort gisement de main d’œuvre peut être résorbé, si le pays parvient à se doter d’une bonne stratégie ordonnée et coordonnée visant à doper l’économie, par l’intégration de la dimension emploi. Un des défis majeurs est non seulement d’assurer leur formation adaptée au besoin du marché, mais aussi surtout de veiller à une formation de qualité qui met sur le marché des compétences professionnelles répondant avec satisfaction au besoin du marché.
Il est vrai que l’agriculture et l’élevage occupent toujours la majorité des actifs tchadiens, principalement les jeunes et les femmes avec un niveau d’instruction très bas et un faible revenu généralement. Cependant, ceux qui travaillent hors du secteur agropastoral sont le plus souvent employés dans le secteur informel, dont la productivité est faible. On estime que les trois quarts au moins du total des emplois non agricoles du pays, ainsi que les activités exercées par les femmes relèvent massivement de l’informel. La population en âge de travailler frôle les 50% et 65% des travailleurs sont constitués d’indépendants, pour seulement 5% de salariés et 28% sont des aides familiales.
Dans ce contexte, le principal défi à relever vise notamment à améliorer les capacités de générer de l’emplois de l’économie nationale, notamment à travers l’organisation du secteur informel, le développement des Micro, Petites et Moyennes Entreprises, la modernisation du secteur rural, la promotion de produits marchands et non marchands à forte intensité de main d’œuvre et la rationalisation et modernisation de l’économie de subsistance, aux fins d’apporter un gain de bien être individuel. Le secteur très créateur d’emplois comme les bâtiments devraient bénéficier d’une attention toute particulière.
Tchad 2015
Banque africaine de développement, Claude N’kodia, Conseiller économique
Programme des Nations unies pour le Développement, African Economic Outlook, Daniel Ndoye Économiste pays
http://www.africaneconomicoutlook.org/fileadmin/uploads/aeo/2015/CN_data/Cn_Long_FR/Tchad_2015.pdf
Extraits
En 2014, le taux de croissance de l’économie tchadienne est ressorti à 7.2 %, selon les estimations, et pourrait atteindre 9 % en 2015 du fait de l’entrée en production de nouveaux champs pétroliers. Toutefois, la conjoncture défavorable prévalant sur le marché international du pétrole pourrait se traduire par une baisse des recettes pétrolières, qui affecterait principalement le secteur hors pétrole en raison de la baisse des investissements publics et de la contraction de la demande interne.
Le taux d’inflation, estimé à 2.9 % en 2014, respecte la norme communautaire relative au pacte de convergence au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (la zone CEMAC), fixée à 3 %. Les résultats satisfaisants obtenus dans la mise en œuvre du programme de référence signé avec le Fonds monétaire international (FMI), en juillet 2013, ont permis au Tchad d’accéder à un programme de réformes soutenu par une Facilité élargie de crédit (FEC), le 1er août 2014.
Sa bonne application, notamment par la poursuite des efforts d’assainissement budgétaire et du Plan national de développement (PND), devrait permettre au pays d’atteindre le point d’achèvement de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) au cours du premier semestre de l’année 2015. Au regard de la forte dépendance de l’économie tchadienne vis-à-vis du pétrole, et alors que le pays est également confronté à la prégnance du défi climatique, accroître sa résilience dans un environnement économique national et régional particulièrement instable devient une nécessité.
Entreprendre des actions en vue d’une plus grande transformation structurelle et d’une meilleure inclusion spatiale pourrait concourir positivement à cet effort de résilience par leurs effets positifs sur le développement socio-économique du pays et sur sa cohésion sociale.
Développements récents et perspectives
Après une croissance exceptionnelle en 2012 liée à une bonne campagne agricole, l’économie du Tchad a connu un fort repli en 2013 sous l’effet de la baisse de la production pétrolière, avec un taux de croissance réelle de 3.9 %. En 2014, l’activité économique s’est nettement redressée, avec un taux de croissance estimé de 7.2 %. La hausse du taux de croissance aurait pu être plus importante, n’eût été l’arrêt momentané de la production pétrolière de l’une des plus grandes compagnies pétrolières du pays.
En effet, à la suite d’un différend pour dégradation de l’environnement, les activités de la filiale tchadienne de la compagnie pétrolière China National Petroleum Corporation (CNPC) ont été suspendues le 13 août 2014. Cette suspension a été assortie d’une amende initiale d’un montant de 1.2 milliard de dollars américains, pénalité qui a évolué vers un accord à l’amiable conclu le 24 octobre 2014 entre le gouvernement et la CNPC.
Cet accord prévoit la restitution par le gouvernement des droits d’exploitation sur cinq blocs de production en exploitation à la compagnie qui s’est engagée, en contrepartie, à réhabiliter les zones polluées. Cet accord stipule également que le Tchad reçoive, au titre du préjudice subi, près de 400 millions de dollars, assorti d’une participation de 10 % dans tous les champs pétroliers en activité de la CNPC.
Les perspectives de croissance pour 2015 restent largement dépendantes de l’évolution des cours du pétrole sur le marché international ainsi que de la situation sous-régionale sur le plan sécuritaire. Près de 150 000 barils/jour pourraient être produits par le secteur pétrolier en 2015, contre 104 000 barils/jour en 2014. En 2015, le taux d’inflation pourrait se situer au-delà de la norme communautaire relative au pacte de convergence en zone CEMAC, fixée à 3 %, en raison de la recrudescence des tensions sous-régionales – avec notamment la fermeture de la frontière avec le Nigéria – qui affectent le commerce intracommunautaire et les voies traditionnelles d’approvisionnement du pays.
Compte tenu du contexte économique et financier actuel, de la forte dépendance du pays à l’égard du pétrole et de l’instabilité que fait peser le climat sur le secteur agricole – dont la vitalité est capitale pour le développement de l’économie tchadienne –, il apparaît nécessaire de renforcer davantage la résilience de l’économie. En effet, la pérennité d’une croissance économique forte, aux fruits partagés, passe impérativement par une transformation structurelle, des investissements sur des pôles régionaux de croissance et par une plus grande inclusion spatiale qui permettra de mieux diversifier les sources de création de richesse.
Coopération économique, intégration régionale et commerce
La structure géographique et sectorielle des échanges n’a pas enregistré de changements significatifs au cours l’année 2014. Le pétrole constitue toujours la principale source de recettes d’exportation du pays – 90% du total des exportations du Tchad –, suivis de la vente de bétail, de coton et de gomme arabique.
Des efforts ont été réalisés pour diversifier les partenaires commerciaux, le pays développant une coopération avec les nouveaux pays émergents (Chine, Inde et Turquie) et s’impliquant également dans le processus d’intégration économique régional à travers deux communautés économiques sous-régionales : la CEMAC et la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC).
La baisse du niveau des exportations pétrolières a affecté la situation des échanges extérieurs en 2013, en raison des difficultés rencontrées par les compagnies pétrolières sur certains champs pétroliers. Cette diminution a impacté négativement le solde de la balance des paiements courants qui a représenté -9.9 % du PIB en 2013, et environ -9.3 % en 2014 selon les estimations.
La baisse des cours du pétrole observée sur les marchés internationaux, si elle devait se prolonger, ne sera pas sans conséquence sur l’économie tchadienne en raison de sa forte dépendance à cette ressource. Elle risque d’affecter fortement les équilibres internes et externes et de conduire à d’importants ajustements budgétaires.
Gestion des ressources naturelles et environnement
La prise de conscience des enjeux environnementaux est à la base des actions initiées par le Tchad afin d’y faire face. Ces actions reposent sur un certain nombre de textes dont différents actes communautaires ainsi qu’un Programme d’action pour l’environnement. Plusieurs textes de loi ont été votés par le Tchad, tels que la loi n° 14 /PR/98 définissant les principes généraux de la protection de l’environnement ainsi que la loi n° 14/PR/2008 relative au régime de l’exploitation forestière et des ressources halieutiques.
Le Tchad a ratifié la convention sur les changements climatiques, la convention sur la protection de la couche d’ozone, son protocole ainsi que les conventions sur les déchets dangereux. Un Plan national d’action sur l’environnement (PNAE), un Programme d’action nationale de lutte contre la désertification (PAN-LCD), ainsi qu’une Stratégie nationale et Plan d’action en matière de diversité biologique (SNPA/DB) ont ainsi été adoptés.
Pour appuyer l’action du gouvernement dans ce domaine, différentes institutions ont été créées et des programmes mis en œuvre. Un Haut comité national pour l’environnement (HCNE) a ainsi vu le jour et une Agence nationale de la Muraille verte a été créée par le gouvernement, conformément aux recommandations de l’agence panafricaine travaillant sur ce projet.
Des actions ont également été entreprises en vue de la protection de l’environnement, notamment dans le cadre du Plan national de développement (2013-15), dont l’un des quatre piliers est consacré à la protection de l’environnement et à la lutte contre les changements climatiques. L’interdiction de sachets en plastique sur toute l’étendue du territoire tchadien est effective depuis 2010, et celle des coupes de bois vert a été décidée en 2008 afin de préserver le couvert végétal.
En matière de prospection pétrolière, des études d’impact environnemental sont désormais exigées. Les atteintes environnementales sont sanctionnées, à l’instar de l’amende infligée à la compagnie pétrolière chinoise CNPC pour dégradation de l’environnement à la suite d’une gestion inappropriée de ses rebus.
Secteur financier
Le secteur bancaire, qui comprend huit banques regroupant une quarantaine d’agences sur tout le territoire, soit un ratio de 250 000 habitants par agence, a connu une activité soutenue tout au long de l’année 2014. Le total du bilan des banques est passé de 713 milliards XAF à 917.1 milliards XAF entre avril 2013 et avril 2014, soit une augmentation de près de 29 % en glissement annuel.
Les crédits accordés à l’État et à ses différents démembrements sont passés sur cette même période de 43.8 milliards XAF à près de 85.9 milliards XAF, soit une augmentation de près de 96 %. Les crédits intérieurs ont connu eux aussi une augmentation de près 33.3 %, passant de 461.3 milliards XAF à près de 615.1 milliards XAF sur la même période.
La Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC) assure la supervision du secteur. Sa solvabilité n’a pas connu de détérioration significative entre avril 2013 et avril 2014. Sept banques parmi les huit ont un ratio de couverture des risques supérieur à 8 %, comme l’année précédente. Les fonds propres nets ont atteint près de 112.2 milliards XAF au 30 avril 2014. À la même date, sept des huit banques respectaient le ratio de liquidité et finançaient à plus de 50 % leurs emplois sur plus de cinq années, contre huit auparavant.
Le secteur de la microfinance, qui se situe à un stade embryonnaire, rassemblait près de 154 établissements en 2013 et comptait près de 123 115 clients, pour un encours de 5.5 milliards XAF pour l’épargne et de 6.7 milliards XAF pour le crédit. Le manque de synergie entre le secteur bancaire et celui de la microfinance limite l’inclusion financière et l’approfondissement de la monétarisation de l’économie.
Le gouvernement a recouru depuis 2011 aux marchés financiers régionaux pour le financement de son développement. Après le lancement en 2011 et en 2013 d’émissions d’emprunts obligataires, pour des montants respectifs de 107.6 milliards XAF et de 85 milliards XAF sur les marchés financiers de la CEMAC, le gouvernement a émis des bons du Trésor assimilables pour un montant total de 27 milliards XAF au cours de l’année 2014.
Il devient ainsi le quatrième pays de la CEMAC à participer à ce marché après le Cameroun, la République centrafricaine et le Gabon. Le lancement de ces différentes émissions contribue ainsi au renforcement de l’intégration financière en Afrique centrale et ouvre de nouvelles opportunités de financement pour le pays.
Tchad — Vue d’ensemble
Banque mondiale, 2016
http://www.banquemondiale.org/fr/country/chad/overview
Extraits
Situation économique
Le Tchad, qui a rejoint l’Organisation des pays producteurs de pétrole (OPEP) en 2003, est devenu fortement dépendant de cette ressource. Avant l’avènement de l’« ère pétrolière », l’économie tchadienne reposait essentiellement sur l’agriculture et le produit intérieur brut (PIB) avoisinait les 220 dollars par habitant en 2001-2002 (soit moins de la moitié de la moyenne de l’Afrique subsaharienne). En 2014, le PIB s’est établi autour de 1 024 dollars par habitant.
En 2015, l’économie réelle du pays a cependant été fortement touchée par la chute des cours du pétrole, la pluviométrie insuffisante et la dégradation du contexte sécuritaire. On s’attend donc à une baisse du taux de croissance du PIB qui devrait atteindre 2,5 % (contre 6,9 % en 2014), en dépit d’un taux de croissance exceptionnel de l’ordre de 33,8 % dans le secteur pétrolier. Les projets de développement de la production pétrolière, peu affectés jusqu’ici par la baisse du prix du pétrole, ont permis de tirer la croissance de ce secteur.
La production agricole a souffert des faibles précipitations, tandis que les secteurs des services et de la construction ont ressenti les effets de la détérioration du contexte sécuritaire, de la forte réduction des dépenses publiques et de l’accumulation des arriérés du gouvernement à l’égard des fournisseurs locaux.
Malgré les efforts du secteur public pour promouvoir la mécanisation agricole, une meilleure gestion des ressources en eau et une plus large diffusion des intrants agricoles et des pesticides, la production agricole tchadienne demeure très fortement dépendante des conditions climatiques et a baissé de 12 % en 2015.
Le taux d’inflation annuel moyen a atteint 4,2 % fin novembre 2015 alors qu’il était inférieur à 1 % sur la même période en 2014. Cette augmentation de l’inflation tient à la baisse de la production agricole, à la dépréciation du franc CFA par rapport au dollar américain et à l’augmentation des coûts de commerce régional à cause des conflits qui sévissent dans la région.
Enfin, l’ensemble des recettes de l’État ont baissé de 37 % entre 2014 et 2015. L’État a dû mener des efforts sans précèdent d’ajustement budgétaire du fait de sa trop forte vulnérabilité aux chocs exogènes.
Tchad : entre ambitions et fragilités, 30 mars 2016
International Crisis Group
Extraits
Depuis fin 2014, l’économie tchadienne est frappée de plein fouet par deux problèmes distincts : la menace terroriste de Boko Haram, en se régionalisant, a forte- ment perturbé les échanges économiques du Tchad avec ses voisins ; la chute du cours du pétrole expose au grand jour la fragilité d’une économie bien trop dépendante des revenus pétroliers. Ces deux problèmes concomitants créent un climat social tendu.
Les conflits qui se déroulent aux frontières du Tchad sont non seulement un problème de sécurité mais aussi un problème économique. En rendant dangereuses les routes qui relient N’Djamena à Maiduguri au Nigéria, à Maroua au Cameroun et, au-delà, au port camerounais de Douala, principal débouché maritime du Tchad, Boko Haram a contribué à asphyxier économiquement la région de la capitale et le sud du pays.
En effet, la menace de Boko Haram dans la région de l’Extrême-Nord au Cameroun et ses attaques sur le lac Tchad, conjuguées dès janvier 2015 à la fermeture provisoire de la frontière avec le Nigéria, ont entravé l’approvisionnement de ce pays enclavé. La pression de Boko Haram réduit les exportations tchadiennes, notamment de bétail, et renchérit les importations de produits alimentaires et manufacturés vers la capitale.
En 2015, les marchandises importées du Cameroun devaient emprunter une route plus longue par le Sud du Tchad (Ngaoundéré-Moundou-N’Djamena) alors que les opérateurs économiques se plaignaient déjà de la lenteur de l’acheminement par la route habituelle Douala-Maroua-N’Djamena. D’autres produits d’importation, comme l’huile en provenance d’Algérie et de Tunisie et le sucre en provenance du port de Cotonou, au Bénin, transitent dorénavant par le Niger, augmentant significativement les coûts de transport.
Alors que le Tchad affiche le deuxième taux le plus élevé de malnutrition au monde avec 4,4 millions de personnes sous-alimentées, soit plus d’un tiers de sa population, la dégradation des activités commerciales, notamment sur le lac, aggravent l’insécurité alimentaire. Dans ces circonstances, l’intervention tchadienne contre Boko Haram début 2015 avait pour premier objectif d’éviter un étranglement économique de la capitale en libérant les deux artères commerciales qui alimentent la capitale tchadienne et le Sud-Ouest du pays.
La chute du cours du pétrole, qui a atteint 30 dollars en janvier 2016, est un autre choc (avec Boko Haram), aux conséquences encore plus importantes pour l’économie tchadienne. Elle provoque une baisse très importante des recettes de l’Etat et la contraction de la commande publique, avec des répercussions pour l’économie.
Perçue par beaucoup de Tchadiens comme « un grand bond en arrière », cette crise met en relief la pétro-dépendance du pays et questionne l’usage de la rente pétrolière par le régime. L’entrée du Tchad dans le club des pays producteurs de pétrole l’a transformé en un Etat rentier. Ainsi, entre 2004 et 2014, le budget de l’Etat a plus que quadruplé, passant d’environ 670 millions de dollars à plus de 2,8 milliards de dollars. Ces recettes nouvelles ont dans un premier temps été mises au service de la survie du régime, avec notamment le renforcement de l’armée et l’achat de matériel militaire.
A partir de 2007, une seconde phase s’est ouverte : la flambée du cours du pétrole et la renégociation des accords fiscaux avec le consortium pétrolier ont permis de recruter davantage de fonctionnaires et de lancer une politique de grands travaux.
Ainsi, beaucoup d’entreprises tchadiennes évoluant dans les secteurs du bâtiment, de la distribution du carburant et des services ont bénéficié des retombées de l’activité du pétrole et des grands travaux lancés depuis plusieurs années. Souvent attribués dans des conditions très opaques, ces contrats seraient aussi une manière de redistribuer une rente à des soutiens.
De grandes fortunes, pas seulement zaghawa, se seraient bâties grâce à la concession de marchés publics et à la délivrance de licences d’importation à des personnalités proches de la famille Itno ou du parti au pouvoir.
En conséquence, alors que depuis plusieurs années, la base politique du pouvoir s’est rétrécie avec le départ de nombreux zaghawa du cercle rapproché du président Déby, le choc économique actuel n’est pas indolore politiquement et pourrait affaiblir un régime dont les alliances reposent en partie sur la redistribution de la rente pétrolière.
Fin 2014, le gouvernement avait dû renoncer à l’organisation du sommet de l’UA, prévu en juin 2015, à la suite de la baisse de la production dans les champs pétrolifères de Doba et des retards dans la mise en exploitation de nouveaux gisements.
Depuis, la situation s’est aggravée. Estimées à 607 milliards de francs CFA en 2014 (environ 1,02 milliard de dollars), les recettes pétrolières devaient, selon les projections d’organismes internationaux, redescendre à 270 milliards de francs CFA en 2015 (environ 450 millions de dollars), soit une baisse de plus de 50 pour cent.
De ce fait, l’Etat accumule les impayés vis-à-vis des entreprises nationales et étrangères et les retards dans le versement des salaires des fonctionnaires, des bourses et des retraites, ont été fréquents ces derniers mois.
Credits Photo: Afrique Arte TV
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