« L’État doit laisser la parole aux jeunes filles, nous écouter pour qu’on puisse expliquer notre situation… »
Extraits de l’entretien
Dépendance financière des jeunes filles
« Beaucoup de jeunes filles courent derrière les hommes pour des biens matériels… »
« Beaucoup de jeunes filles viennent à l’école pour se faire remarquer et ne travaillent plus. D’autres viennent pour l’habillement ou courent derrière les hommes pour trouver de l’argent pour acheter des habits ou des téléphones portables. De nos jours, celles qui n’ont pas des téléphones de marque iPhone ne sont pas à la mode. Donc, elles sont obligées d’aller vers les garçons pour se trouver de l’argent car, il y a des filles qui n’ont pas les moyens. Leurs parents ne peuvent pas leur donner de l’argent donc elles courent derrière les hommes pour avoir de l’argent. Les hommes d’aujourd’hui font des chantages aux jeunes filles. Par exemple, si tu veux un iPhone, il te dit « tu viens chez moi », et si tu n’es pas assez intelligente, tu y vas… »
Obstacles au bien-être des femmes
« Les hommes n’aiment pas que les filles soient devant eux… »
« Des fois, je me pose des questions. Pourquoi une femme ne peut pas être une présidente au Sénégal ? C’est rare de voir une femme qui se présente aux élections. Même si elle se présente, les autres disent qu’une femme ne peut pas diriger un peuple. Alors, elle n’obtient pas assez de voix. Les hommes n’aiment pas qu’une femme soit devant eux, c’est le problème.
C’est rare de voir une femme qui se présente aux élections
Entre femmes aussi, c’est la jalousie qui nous tue. Je vois qu’une femme peut être présidente parce qu’elle en a les capacités mais je refuse de voter pour elle puisqu’elle sera devant moi. »
Abandon de l’école
« J’ai une amie qui a arrêté l’école car ses parents n’avaient plus les moyens..»
« Dans mon quartier, beaucoup de jeunes filles de mon âge ont des enfants, ce qui fait qu’elles ne vont plus à l’école. Certaines s’occupent de leur bébé, pour d’autres, leurs parents sont fâchés contre elles et ne veulent plus investir dans leur éducation. Pour éviter cela, il faut s’abstenir.
Il y a aussi le manque de moyens. Une de mes amies a arrêté l’école car ses parents n’avaient plus les moyens. Sa mère était malade et elle était obligée de travailler pour payer ses ordonnances et prendre soin de ses parents. Cette situation à mon avis, n’est pas normale ; ce n’est pas à elle de se sacrifier pour assurer les dépenses de sa famille. »
La place des jeunes filles dans le débat public
« On a pas assez de personnes pour évoquer notre situation..»
« Je crois qu’il n’y a pas assez de débats. Les chaines de télévision doivent organiser des débats, inviter des jeunes filles de différentes écoles et leur donner la parole afin qu’elles expriment leurs difficultés.
Il faut des personnes pour les aider financièrement et psychologiquement
Nous n’avons pas assez de personnes pour évoquer notre situation. L’Etat doit laisser la parole aux jeunes filles, nous écouter pour qu’on puisse expliquer notre situation, nos faiblesses et les difficultés qu’on rencontre dans nos familles.
Il faut construire des centres de formation pour les jeunes filles. Il faut des personnes pour les aider financièrement et psychologiquement. Ma famille me pousse à aller de l’avant, à bien travailler. On me dit qu’une jeune fille ne doit pas penser aux garçons. Elle doit travailler, aller à l’école, chaque chose à son temps.
Mettez-vous au travail ! Laissez les hommes de côté. Il faut vraiment travailler. Et refusez certaines choses ! »
Photo : WATHI
Viviane Basséne est élève en classe de Première L2