Article publié sur le blog de Halima.co
24 novembre 2018
Lien vers le document original
Au travail, les femmes l’ont toujours été ; mais elles l’étaient gratuitement, dans l’enceinte gardée de la maison et de la famille. Aujourd’hui, leur champ d’action s’est ouvert ; leurs responsabilités se sont accrues ; leur travail est devenu l’objet d’un salaire, directement fonction de leur peine ou de leur compétence. Et c’est dans le sens restrictif d’une activité exercée hors de la maison et rémunérée qu’il faut entendre les mots « de femmes au travail ».
Désormais, travailler ne relève plus du masculin. Il s’agit, pour les femmes d’un instrument de valorisation de soi et comme la clé d’or qui ouvre toutes les portes. De plus, le travail constitue un véritable outil d’insertion et de lutte contre la pauvreté. En Afrique et notamment au Sénégal, les femmes demeurent cantonnées aux activités informelles et peu rentables. Cette représentation des femmes dans l’économie informelle ne pose pas de questions car elle est vue comme l’expression normale des différences entre les sexes.
En sciences sociales, les recherches montrent que de tout temps, les filles et garçons ne suivent pas les mêmes filières scolaires, n’accèdent pas aux mêmes savoirs, n’exercent pas les mêmes métiers et ne valorisent pas leur diplôme de la même façon.
De plus, les femmes ont des carrières moins rapides et « moins abouties » que les hommes, qu’elles aient ou non des enfants. Partout, on constate que les femmes (dans l’emploi formel) sont de plus en plus rares au fur et à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie et qu’elles demeurent minoritaires dans les postes de décisions et de responsabilités de haut niveau.
Les femmes disposant d’une fiche de paie sont visibles dans le secteur formel mais elles sont surreprésentées au secrétariat, dans les domaines du care, du social, des services à la personne (infirmière, aide-soignante) ou encore dans l’éducation. Tout ce qui a attrait aux professions incarnant les vertus dites féminines. Les femmes sont alors naturellement écartées de tout pouvoir de décision.
Les métiers de femmes sont, par définition, conformes à l’idée que l’on se fait de la femme, ce sont les moins métiers des métiers… parce que les vrais métiers dont des métiers d’hommes. Un métier de femme c’est un métier féminin donc subordonné, souvent mal payé, enfin, c’est une activité où la femme est censée exprimer ses dispositions naturelles ou considérées comme telles.
Ce sont alors des milliers de petits détails, tous fondés sur le postulat qu’une femme au pouvoir, une femme qui commande, cela ne va pas de soi, ce n’est pas « naturel ». Dans la définition d’une profession, il y a aussi tout ce qui lui est conféré par la personne qui l’exerce. Si c’est fait pour un homme (à moustache) et que l’on voit arriver une petite minette en minijupe, ça ne va pas ! Il lui manquera toujours la moustache, la voix grave et forte qui convient à une personne d’autorité : « Parlez plus fort, on ne vous entend pas ! », quelle femme n’a pas essuyé cette réflexion dans les réunions de travail ?
La définition tacite de la plupart des positions de direction implique un port de tête, une manière de poser la voix, l’assurance, l’aisance, le « parler pour ne rien dire », et si on arrive avec un peu trop d’intensité, de sérieux, d’anxiété, c’est inquiétant. Les femmes, sans toujours l’analyser, le ressentent, et souvent dans leur corps, sous forme de stress, de tension, de souffrance, de dépression…
Le vrai diplôme pour les femmes serait le mariage. Demeure toujours la crainte de voir l’instruction des femmes bousculer l’ordre familial. L’accession des femmes au savoir est présentée comme un danger. Trop de sciences leur feraient oublier leurs plus élémentaires devoirs.
La position défavorable des femmes sur le marché du travail peut s’expliquer par un conflit de rôles entre l’exercice d’une activité économique et les activités familiales qui leur incombent. Or, seules les femmes sont questionnées sur l’articulation entre leur vie privée et leur travail. Leur ambition est rapidement stigmatisée et la disponibilité pour l’institution se retourne contre les mères dont on attend majoritairement le soin aux enfants. L’étalon de la réussite est donc fortement «sexué».