Ministère de la Femme et de l’Action Sociale
Direction de l’équité et de l’égalité des genres
2016
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Situation différenciée des femmes et des hommes dans la création de richesse
Disparités selon le sexe dans l’emploi et le chômage
L’examen de la structure de l’emploi au niveau national, permet de relever des taux d’emploi mettant en évidence une nette prédominance des jeunes hommes sur les jeunes femmes, avec respectivement 55,2% et 34,6%. Une distribution du même ordre de 60,3% pour les jeunes hommes et 39,3% pour les jeunes femmes, est aussi observée pour ce qui concerne le taux d’activité.
La répartition des emplois selon les classes d’âges présente les mêmes disparités en défaveur des jeunes femmes. Il en est également ainsi du taux de chômage pour lequel on note, au niveau national et par classes d’âges, des taux pour la plupart deux fois plus élevés pour les jeunes femmes que pour les jeunes hommes. Pour ce qui concerne la durée moyenne du chômage, les proportions sont de 15 jours pour les hommes contre 18 pour les femmes. Et pour le sous-emploi, 18,1% et 39,6% pour la tranche moins de 40 heures et 81,9% contre 60,4% pour la tranche 40 heures et plus.
Il est à noter que l’avance des filles pour la tranche 40h et plus du taux de sous-emploi s’explique en partie par la relative féminisation de l’économie rurale et par l’exode massif des jeunes hommes des zones rurales vers les villes et à l’extérieur.
Répartition des personnes occupées selon le secteur d’activité et le sexe
Sur un effectif global de 1 934 722 jeunes occupés, en 2011, dans les différents secteurs de l’économie nationale, la population masculine représente 1 134 271 contre 800 451 pour les femmes, soit respectivement 58,6% et 41,4%. Au point de vue emploi par secteur, 59,6% des postes dans le primaire sont occupés par les hommes, 66,8% dans le secondaire et 45,1% dans le tertiaire contre pour les femmes 40,4% dans le primaire, 33,3% dans le secondaire et 55% dans le tertiaire. Ce qui laisse apparaitre, aux niveaux primaire et secondaire, une prédominance des hommes dans les emplois et une majorité de femmes dans le tertiaire.
Dans les villes, 41,1% des jeunes hommes ont un travail contre 35,3% pour les jeunes femmes, alors que dans les zones rurales, ces dernières ont plus de travail que les jeunes hommes avec 64,7% contre 58,9% pour ces derniers
Du point de vue de la répartition entre zone rurale et zone urbaine, la population active jeune est à 37,3% en zone urbaine contre 62,7% pour la zone rurale, avec, pour cette dernière, un effectif de 1 211 928 individus occupés à 74% dans le secteur primaire, où les femmes et les filles représentent encore une bonne partie de la main-d’œuvre bien qu’elles soient marginalement détentrices des facteurs de production de base du secteur.
Répartition des jeunes femmes et hommes ayant un emploi selon le milieu
La distribution de l’emploi des jeunes selon le milieu, montre que 61,3% des jeunes ruraux ont un emploi contre 38,7% pour les jeunes des centres urbains, avec toutefois une inégale répartition des emplois selon le milieu et le sexe. Dans les villes, 41,1% des jeunes hommes ont un travail contre 35,3% pour les jeunes femmes, alors que dans les zones rurales, ces dernières ont plus de travail que les jeunes hommes avec 64,7% contre 58,9% pour ces derniers.
A l’échelle nationale, la problématique de l’absence d’emploi touche donc deux fois plus les jeunes femmes que les jeunes hommes
Cette situation s’explique par des raisons à la fois sociologiques et économiques. Les femmes en milieu rural ont en effet relativement moins de mobilité professionnelle que les hommes, qui sont pour l’essentiel, les principaux candidats à l’exode rural et à la migration externe. Cette situation met de fait les femmes au-devant comme main-d’œuvre de substitution, ceci en plus de leurs charges et responsabilités familiales accentués par le poids des traditions qui les confinent au foyer pour la gestion des tâches domestiques.
Du point de vue de la distribution par sexe pour la région de Dakar, 53% des emplois disponibles sont détenus par les jeunes hommes contre 47% pour les jeunes femmes, tandis pour l’ensemble des autres régions, on observe une situation légèrement inversée, avec environ 51% des emplois tenus par les femmes et 49% par les hommes.
Répartition des sans-emplois selon le sexe, l’âge, le milieu et le niveau d’instruction
Sur l’effectif national de 2 307 460 jeunes sans emploi, 1333 484 sont en zone urbaine contre 973 976 en zone rurale. Du point de vue de la distribution selon le sexe 1 535 178 jeunes femmes dont 832 560 vivent en villes et 702 618 du monde rural, sont sans emploi, contre 772 281 de jeunes hommes répartis dont 500 924 vivant en zones urbaines et 271 357 en zones rurales, soit en valeurs relatives, au niveau national, de 66,6% de jeunes femmes sans emploi et 33,4% de jeunes hommes.
Pour la quasi-totalité des critères utilisés pour étudier le problème de l’emploi des jeunes, le trait commun qui apparait est que les filles sont presque toujours en position de désavantage par rapport aux garçons
La comparaison intra-zone donne pour la zone urbaine, 62,4% de jeunes femmes sans emploi contre 37,6% de jeunes hommes et pour la zone rurale, 72,2% de jeunes femmes contre 27,8% de jeunes hommes. A l’échelle nationale, la problématique de l’absence d’emploi touche donc deux fois plus les jeunes femmes que les jeunes hommes. L’effet de féminisation de l’emploi noté en zone rurale se révèle malheureusement faiblement compensateur pour combler l’écart entre les jeunes femmes et les jeunes hommes.
Au plan de la répartition par région, la région de Dakar absorbe 31,2% des sans emploi, soit 719 920 jeunes, composés de 449 310 jeunes femmes et de 270 610 jeunes hommes, soit 62,4% de jeunes femmes et 37,6% de jeunes hommes. Le reste de la population, soit 68,8% correspondant à1 587 537 individus, est partagé par l’ensemble des autres régions, avec 1.085.667 jeunes femmes contre 501 670 jeunes hommes sans emploi, soit respectivement 68,4% et 31,6%.
Sous l’angle du niveau d’instruction, sur les 1 440 979 jeunes sans emploi des différents cycles d’enseignement, la population féminine est de 837 662 et celle masculine de 603 317 soit respectivement, 58,1% et 41,9%. Pour la quasi-totalité des critères utilisés pour étudier le problème de l’emploi des jeunes, le trait commun qui apparait est que les filles sont presque toujours en position de désavantage par rapport aux garçons ; ce qui pour les décideurs, constitue une contrainte de plus dans la recherche de solutions au problème de l’emploi des jeunes. En sus, se pose donc pour eux la question de la répartition équitable du potentiel emploi de l’économie du pays entre les garçons et les filles ; pour répondre à la fois à des considérations de justice sociale, mais aussi de rationalité et d’efficacité économique.
Disparités entre femme et homme dans le secteur informel
Le secteur informel non agricole emploie 2 216 717 personnes, soit 48,8% de la population active occupée estimée à 4 538 360 personnes par l’Enquête Sénégalaise sur les Priorités II (ESPS II). Le secteur informel est majoritairement dominé par les hommes qui représentent 79,9% de l’ensemble des entrepreneurs contre 20,1% pour les femmes dont l’effectif le plus important est enregistré dans la fabrication de glace pour une proportion de 89,2% et dans les hôtels, bars et restaurants avec 61,2%.
Au niveau des secteurs d’extraction minière, les femmes représentent que 12,8% contre 87,20% pour les hommes ; pour le secteur de la fabrication de produits alimentaires elles sont à un niveau presque paritaire avec les hommes pour respectivement 50,9% et 49,10%, pour la branche manufacturière 12,30% pour les femmes et 87,70%, pour l’Eau et l’Electricité 89,20% pour les femmes et 10,80% pour les hommes, pour les BTP qui demeurent un secteur où les femmes sont presque absentes avec 0,20% et 99,80% pour les hommes.
La plupart des femmes entrepreneures (41,3%) n’ont aucun niveau d’étude : 27% ont un niveau primaire, 18,4% ont fréquenté le secondaire et seulement 2,9% ont atteint le niveau supérieur
Pour le commerce, où les hommes dominent encore fortement, on relève 21,90% pour les femmes et 78,10% pour les hommes, pour la restauration, les bars et hôtels où dominent les femmes avec 61,20% et 38,80% pour les hommes, le transport et les télécommunication avec une primauté des hommes qui représentent 98,30% alors que les femmes ne comptent que pour 1,70% et les autres secteurs non dénommés où les hommes dominent très largement encore pour 88,8% contre 11,20%.
La plupart des femmes entrepreneures (41,3%) n’ont aucun niveau d’étude : 27% ont un niveau primaire, 18,4% ont fréquenté le secondaire et seulement 2,9% ont atteint le niveau supérieur. Elles sont 3,0% à être alphabétisées en langue nationale tandis que les hommes entrepreneurs ont en majorité le niveau primaire (28,5), suivis de ceux qui n’ont aucun niveau d’études (24,3%.).
Disparités entre femme et homme dans le sous-secteur de la micro finance
Le secteur financier au Sénégal a connu un développement significatif au cours de la décennie 2005-2015, avec notamment l’augmentation et la diversification des prestataires, l’amélioration et l’extension de l’offre, ainsi que la mise en œuvre de stratégies d’inclusion des populations à faibles revenus. Le secteur de la micro finance au Sénégal a été bâti autour des acquis des mouvements associatifs à caractère coopératif portés par les femmes à travers les groupements de promotion féminines.
Les groupes de femmes ont été utilisés par l’essentiel des grands réseaux de Services financiers décentralisés (SFD) pour mobiliser leurs usagers et clientèles composés d’hommes de femmes. Grâce à l’appui de projets initiés à l’époque par le Ministère de la Femme, des réseaux de mutuelles d’épargne et de crédit avaient été mis en place au niveau national sous l’égide de la Fédération Nationale des Groupements de Promotion Féminine (FNGPF) et la Fédération des Associations Féminines du Sénégal (FAFS).
Au Sénégal, le niveau d’accès des femmes et les hommes, variables d’un milieu à un autre, est encore marqué par la faiblesse du taux de bancarisation. En effet, le paysage de l’accès aux services financiers, concept permettant de mieux cerner la situation de l’inclusion financière et d’évaluation de sa progression à différents moments dans le temps laisse apparaitre de réelles disparités sur le niveau de pénétration des populations.
L’amélioration des indicateurs de portée des SFD entre juin et décembre 2014 n’a pas pleinement profité aux femmes. En effet, l’accès relatif des femmes aux services financiers des SFD a globalement régressé au cours du second semestre de 2014 :
– leur poids dans le sociétariat a légèrement baissé, de même que la proportion de femmes emprunteurs actifs ;
– leur part dans le portefeuille de crédit a également baissé, entrainant une légère diminution du crédit moyen qui passé de 280 225 à 279 360 FCFA.
Le secteur de la micro finance sénégalaise, en constance progression, fut-elle faible, offre aux populations des opportunités d’accès à des services financiers et non financiers sur l’étendue du territoire. En 2014 et pour l’essentiel des SFD sous contrôle des services chargés de la règlementation et de la surveillance 2 193 268 clients ont été enregistrés. Les femmes dont l’effectif était de 636 475 usagères en 2008 ont progressées très faiblement d’année en année pour atteindre un total de 901 653 en 2014.
La proportion d’hommes clients qui étaient de 56% en 2008 à 41,11% en 2014 alors que pour les femmes, elle a été 44% en 2008 et 41,11% en 2014. Ce qui laisse apparaitre, dans la période considérée, une faible variation à la hausse du nombre de clients, autant pour les hommes que pour les femmes.
Autres contraintes non moins importantes demeurent le niveau des taux d’intérêt appliqués et les délais de grâce accordés qui dépassent rarement deux mois alors que le délai de remboursement des fonds empruntés et investis se situent bien au-delà des premières échéances
Pour ce qui est l’encours de crédit, les femmes ne pèsent, en 2010, que pour 27,7% correspondant à 47,20 milliards du volume total qui était, dans la même année, de 170,45 milliards avant de croitre de 2010 à 2014 pour atteindre 257,1 milliards. Après 2011, année où le volume de l’encours de crédit pour les femmes avait atteint son niveau le plus élevé avec 74,20 milliards soit 36,26% du volume total, la part des femmes a connu une baisse de 2011 à 2012 avant de croitre de 2013 à 2014.
Globalement, les interventions des SFD et les différents mécanismes d’appui mobilisés sous forme de fonds ou d’agence d’appui à l’insertion des jeunes n’ont pas permis de répondre substantiellement aux besoins des femmes en matière de financement. En témoigne le taux de pénétration qui ne dépasse guère 15% des femmes. Pour l’essentiel, les disparités relevées entre les femmes et les hommes, qui sont aussi faiblement touchés, dans l’accès aux services financiers sont liées à de multiples contraintes que doivent surmonter tous les opérateurs économiques.
Les femmes, qui subissent bon nombres d’obstacles liés à leur statut social doivent faire face, plus que les hommes, aux contraintes d’accès alignées de plus en plus sur les exigences de rentabilités des structures de financement alors que ces dernières devaient beaucoup s’orienter sur la viabilité et non sur des surplus qui vont plus vers le marché financier. Ainsi, doivent-elles faire face à des critères d’allocation de crédit de plus en plus basés sur des conditionnalités qu’elles arrivent difficilement à satisfaire.
Certaines obligées de s’y soumettre doivent faire face à des termes des modalités de prêts qui réduisent la couverture des besoins justifiant le recours au crédit et s’exposent alors à la non rentabilité de l’activité exploitée et dans certains cas, à un appauvrissement.
Autres contraintes non moins importantes demeurent le niveau des taux d’intérêt appliqués et les délais de grâce accordés qui dépassent rarement deux mois alors que le délai de remboursement des fonds empruntés et investis se situent bien au-delà des premières échéances. De telles conditions contraignent les femmes à recourir à des pratiques qui ne leurs permettent point de développer leurs activités et d’améliorer difficilement leurs revenus et autonomie financière.
Ainsi, le secteur de la micro finance et les fonds concourant au financement des femmes devraient, plus que par le passé, concevoir et mettre à la disposition des femmes des produits financiers et non financiers économiquement rentabilisables et financièrement supportables.
Ceci parait être un impératif pour l’égalité de chance d’accès des femmes et des hommes aux financements et surtout une exigence pour que les femmes tirent pleinement profit de l’impact attendu de la transformation structurelle de l’économie et la création de richesse. A cette fin, les orientations de la nouvelle Lettre de Politique Sectorielle Micro finance, qui a retenu, comme élément à considérer dans son deuxième axe d’intervention, la demande des usagers des SFD, plus que par le passé, sont à traduire en réalité. La prise en compte réelle de la demande imposerait un questionnement permettant de définir, concevoir et offrir des produits financiers et non financiers plus adaptés aux exigences des activités économiques des femmes.