La situation de l’économie nigérienne
Développement territorial et inclusion spatiale : perspectives économiques en Afrique 2015
Banque africaine de développement, Organisation de coopération et de développement économiques, Programme des Nations Unies pour le développement
www.africaneconomicoutlook.org
Extraits
Le Niger est un pays enclavé et relativement vaste. Avec une superficie de 1 267 000 km2, les deux tiers de sa surface, situés en zone saharienne, sont désertiques. Sa population est ainsi concentrée dans la bande sud du pays, où elle peut pratiquer les activités agropastorales, et en particulier l’agriculture pluviale. Zinder, Tahoua et Maradi, au centre-sud du pays, sont les départements les plus peuplés, avec 60 % de la population totale du pays. Les départements de Tillabéry et de Dosso, au sud-ouest du pays, regroupent quant à eux 28 % de la population (Recensement général de la population et de l’habitat, 2012).
La population totale s’élève à 17 138 707 habitants, dont 83.8 % vit en zone rurale. Le taux de croissance de la population nationale a franchi la barre des 3.0 % à partir de 1990, pour se situer à 3.9 % en 2012, avec des pointes à 4.6 % à Tahoua et à 4.7 % à Zinder. Au rythme moyen de 3.9 % de taux de croissance, la population double tous les 18 ans. Cette situation s’explique notamment par une forte culture nataliste. Avec 7.6 enfants par femme en moyenne, ce chiffre est le plus élevé au monde, mais malgré tout significativement inférieur au nombre d’enfants désirés, à savoir 9.5 pour les femmes et 12.4 pour les hommes (INS, Enquête démographique et de santé et à indicateurs multiples du Niger, 2013). Si la densité de la population est de 13.5 habitants au km2 en 2012, on estime que ce chiffre atteindra 27.0 habitants au km2 en 2030.
Les systèmes agraires, qui occupent 80 % de la population, sont tributaires des aléas climatiques qui se traduisent par l’alternance des périodes de sécheresse et d’inondations, exposant les populations rurales aux pertes de récoltes, de bétail et d’autres ressources. Cette situation entraîne ainsi des mouvements migratoires importants vers les villes, accélérant d’autant plus la dynamique d’urbanisation en cours
La qualité de l’offre de biens et services publics auprès des citoyens s’améliore globalement, mais reste insuffisante à l’aune d’indicateurs tels que l’IDH ou les OMD, voire au regard des aspirations exprimées par les populations durant les consultations nationales post-2015. Ces attentes concernent tout particulièrement i) la sécurité alimentaire et nutritionnelle ; ii) l’accès aux services sociaux de base et aux infrastructures ; iii) l’emploi des jeunes ; et iv) la bonne gouvernance. Parallèlement, les infrastructures structurantes de soutien à la croissance (énergie, transport, communication et irrigation) sont insuffisantes. Cette situation renforce l’enclavement du pays, renchérit les coûts des facteurs de production, et limite les échanges commerciaux, donc le développement d’une économie moderne, diversifiée et compétitive. Conscientes de ces enjeux, les autorités ont élaboré un programme ambitieux pour renforcer les infrastructures de transport routier (y compris les pistes rurales) et ferroviaire. Elles ont également démarré d’importants travaux d’aménagement urbain et de construction d’infrastructures structurantes dans les principales capitales régionales (Niamey Nyala, Dosso Sogha, etc.).
Un fort biais urbain persiste, l’essentiel des ressources pour le développement étant consacré aux centres urbains. La proportion de la population pauvre à Niamey est ainsi de 10.2 %, alors qu’elle est de 48.2 % pour l’ensemble du Niger. Les populations rurales sont les plus concernées par le phénomène de pauvreté en raison de leur structure et de leur mode de production qui repose essentiellement sur l’agriculture pluviale et l’élevage, tous deux fortement dépendants des aléas climatiques. Le milieu urbain détient la proportion la plus élevée de classe moyenne supérieure, à 25.1 % contre 6.8 % en milieu rural (Étude classe moyenne, INS/PNUD, 2014). Niamey, la capitale, avec 1 026 848 habitants en 2012 (6.0 % de la population totale du pays), est la localité la plus développée. L’essentiel des industries, des infrastructures et des services y est implanté. À titre d’illustration, on y compte un médecin pour 6 366 habitants, contre une moyenne nationale d’un médecin pour 29 986 habitants. Le taux d’accessibilité géographique aux services de santé dans un rayon de 5 km y est de 79.4 % contre 36.1 % à Zinder par exemple.
La mise en œuvre de ces politiques globales et sectorielles souffre cependant des faibles capacités des institutions et des collectivités territoriales à assumer ces nouvelles fonctions. Le transfert des ressources vers les zones rurales constitue ainsi le principal défi auquel se trouve confronté l’ensemble des politiques de développement rural. Compte tenu de la faiblesse de l’activité économique formelle dans ces zones, la base fiscale des communautés rurales reste très modeste, sinon insignifiante. En outre, les collectivités territoriales souffrent de faiblesses en matière de maîtrise d’ouvrage.
Afin de réduire le biais urbain, l’État prend des initiatives en matière d’électrification rurale. Une centrale solaire de 5 mW et un projet d’électrification rurale par systèmes solaires photovoltaïques pour 200 villages ont ainsi été mis en place. Il a également pris des dispositions pour relever le niveau de développement des régions défavorisées. Ainsi, Diffa, région la moins développée et très enclavée, pourrait bénéficier de ressources supplémentaires dans le cadre de la politique de rétrocession de 15 % des redevances pétrolières. Il en est de même pour les communes des régions minières qui bénéficient également d’une rétrocession de 15 % des redevances collectées par l’État sur l’exploitation des minerais.
Niger: Document combiné de stratégie pays 2013-2017 et de revue du portefeuille
Groupe de la Banque Africaine de Développement
Extraits
En dépit d’une croissance en 2012 (+16,5% contre -3,7% en 2011), le secteur primaire connait une performance irrégulière, qui contribue à une certaine insécurité alimentaire dans les zones rurales et même urbaines du pays. Une analyse en longue période montre que la production agricole est assez souvent affectée par les aléas climatiques. Ainsi, le Niger fût parmi les pays du Sahel ayant connu les crises alimentaires aiguës de 2005 et de 2010, dues à la sécheresse. Ces crises avaient touché plus de 10 millions de personnes dans la région, dont 2 millions au Niger. La recherche d’une plus grande sécurité alimentaire est donc un objectif prioritaire pour le Niger. Pour y contribuer, les autorités ont, en avril 2012, adopté l’Initiative dénommée «les nigériens nourrissent les nigériens» ou 3N, qui vise à promouvoir la sécurité alimentaire et le développement agricole durables.
En 2012, le risque de surendettement du Niger est passé de « faible » à « modéré ». Après l’Initiative PPTE renforcé dont a bénéficié le Niger en avril 2004, les ratios d’endettement s’étaient réduits substantiellement. A la fin 2010, le niveau d’endettement public était faible : la dette publique totale (intérieure et extérieure) représentait environ 19,8% du PIB. L’inventaire complet de la dette intérieure et la signature en juillet 2010 d’une convention sur le remboursement des prêts bancaires avec la BCEAO avaient permis d’améliorer la situation financière de l’État. Toutefois, depuis 2011, la dette publique s’est accrue. Le stock de la dette extérieure est passé de 16,8% du PIB en 2010 à 20,1% du PIB en 2012.
Cela résulte de la garantie accordée par l’État au prêt chinois non concessionnel consenti à la raffinerie de pétrole (SORAZ), de l’obtention d’un prêt pour financer la participation de l’État à la mine d’uranium d’Imouraren et d’un emprunt de 50 milliards auprès du Congo. L’analyse de viabilité de la dette a ainsi mis en relief un risque de surendettement qui est passé de « faible » à « modéré ».
Les autorités se sont engagées à renforcer la gestion des ressources naturelles ainsi que la gouvernance environnementale. Bien qu’elle représente potentiellement une importante source de revenus pour soutenir les progrès économiques et sociaux du pays, le récent développement de l’exploitation des ressources minières et du pétrole s’accompagne aussi de défis pour la gouvernance notamment environnementale qui doit être renforcée. Les autorités s’y attellent. Le pays s’est ainsi doté d’une charte nationale sur la bonne gouvernance et sur la gestion des ressources minérales et des hydrocarbures.
Par ailleurs, l’atteinte en 2012 du statut de conformité totale de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) a eu pour implication, l’obligation pour tout investisseur de réaliser une Etude d’impact environnemental et social (EIES) et de disposer d’un Plan de gestion environnemental et social (PGES), pour tout projet dans les secteurs des mines et des hydrocarbures. En outre, dans le cadre de la révision du code minier et du code des investissements, le gouvernement envisage de renforcer les normes environnementales en les alignant sur les standards internationaux. Par ailleurs, la gestion environnementale est aussi prise en compte dans l’Initiative 3N à travers : (i) la gestion durable des ressources naturelles, (ii) le renforcement des capacités des acteurs, (iii) l’appui à la sécurisation foncière et ; (iv) la mise en place d’un système participatif de gouvernance.
Dans le secteur de l’énergie, le sous-secteur électrique est caractérisé par un faible taux d’accès à l’électricité (10%) et un vieillissement du réseau de transport et de distribution. Par ailleurs, le Niger importe du Nigéria environ 86,6% de l’électricité consommée sur le territoire national, sur la base d’un accord datant de 1972 et renégocié en 2010. Les réformes en cours au Nigeria dans le secteur de l’énergie pourraient remettre en cause les tarifs préférentiels à l’exportation vers le Niger tels que pratiqués aujourd’hui. En effet, les tarifs en vigueur au Niger datent de 1994 et n’ont pas fait l’objet de modification substantielle depuis lors . Ainsi, les défis du secteur sont multiples et sur le plan électrique, ils ont trait notamment à la nécessité de : (i) augmenter l’accès et réduire la disparité entre le milieu rural (1% d’accès) et urbain (50% d’accès) ; (ii) moderniser les infrastructures de transport et distribution ; (iii) mettre en place des systèmes d’information et plans directeurs appropriés (Plan directeur national et Plan national d’électrification rurale) ; (iv) renforcer les capacités des acteurs du secteur et mener une étude tarifaire qui permette de cadrer les hypothèses de croissance et ; (v) doter le secteur électrique d’un régulateur indépendant, au regard de l’installation progressive des producteurs indépendants d’électricité.
Les infrastructures structurantes de soutien à la croissance (énergie, transport, communication et irrigation) sont insuffisantes. Cela renforce l’enclavement du pays, renchéri les coûts des facteurs de production, limite les échanges commerciaux à l’intérieur du pays et l’intégration régionale, et donc le développement d’une économie moderne, diversifiée et compétitive (voir Encadré 2). Dans le domaine de l’énergie, les besoins ne sont pas couverts16ce qui influe sur l’activité industrielle. L’analyse des infrastructures de transport fait ressortir : (i) une dégradation accélérée du patrimoine routier17, (ii) l’ensablement progressif du fleuve Niger qui réduit considérablement sa navigabilité, (iii) une vétusté et un sous-équipement des trois aéroports de Niamey, Zinder et Agadez et, (iv) une absence de réseau ferroviaire.
Les infrastructures de transport font partie des enjeux prioritaire et à ce titre, le Niger a fait le choix de son désenclavement externe et interne. Le gouvernement a entrepris l’actualisation de la Stratégie nationale des transports 2004-2010 (SNT) qui ne traitait que du transport routier. Elle sera étendue aux autres modes de transport (aérien, ferroviaire, maritime et fluvial). La nouvelle SNT 2011-2025 en cours de validation, est présentée sous forme d’un ensemble de politiques de transports pour chacun des modes de transport et d’un plan d’action chiffré sur 15 ans.
Le secteur privé reste marqué par la prépondérance du secteur informel. L’essor du secteur privé formel est limité par la faible compétitivité, l’étroitesse du marché intérieur et le faible accès au financement. Le secteur privé moderne, dont le poids dans l’économie était estimé à 20% du PIB dans les années 1990, n’a cessé de régresser pour ne représenter que moins de 5% du PIB en 2012. Il est dominé par le secteur informel qui représente environ 70%. Le secteur formel est constitué de PME/PMI et son essor reste tributaire de l’amélioration du cadre des affaires, d’un système financier adéquat, la levée des contraintes institutionnelles et fiscales. On dénote une forte concentration des activités dans les branches du commerce et des services, au détriment des activités industrielles plus transformatives.
L’industrie agroalimentaire dispose d’un potentiel encore sous-exploité. Elle peut constituer un levier de croissance et une source de diversification de l’économie. Le secteur industriel non extractif demeure extrêmement marginal dans l’économie nigérienne. Concentré sur la transformation agroalimentaire, sa contribution au PIB représente moins de 2%. Le coût élevé des facteurs de production dont l’électricité limite fortement la compétitivité des produits industriels transformés au Niger. L’insuffisance du cadre juridique et fiscal contribue à la prédominance du secteur informel. En levant les contraintes susmentionnées, les filières agro-pastorales porteuses de croissance identifiées dans l’étude financée par la Banque en 2004 et dans le projet d’appui aux exportations financé par la Banque mondiale offrent de véritables opportunités de diversification de l’économie.
Rapport National sur les Progrès vers l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement, 2014
Institut national de la statistique du Niger et le PNUD
Extraits
Comme beaucoup d’autres pays africains, l’économie du Niger est essentiellement tirée par la production agricole. Malheureusement, celle-ci est exposée aux chocs exogènes tels que les sécheresses, les inondations et les invasions acridiennes. Cela se traduit par une évolution en dents de scie de la production agricole qui n’arrive pas à insuffler un dynamisme de long terme à la croissance économique.
L’évolution du revenu indique globalement une croissance aux amplitudes variables selon les années et ce, surtout à partir de 1994 et après près de quatre (04) années de contraction sur la période considérée. Ces dernières années, le Gouvernement, conscient de cet état des faits, a apporté un certain nombre de réponses en élaborant et en mettant en œuvre des politiques et programmes de développement, dont le plus important est le Plan de Développement Economique et Social (PDES) 2012-2015, intégrant l’Initiative 3N « les Nigériens Nourrissent les Nigériens », afin de contribuer à une sécurisation alimentaire durable des populations.
Du côté de l’offre, la croissance économique est marquée par une baisse de la production des secteurs primaire et secondaire.
Le secteur primaire, constitué de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche et de l’exploitation des produits forestiers, occupe encore une place prépondérante dans l’activité économique et ses performances ont une forte incidence sur la croissance économique caractérisée par une forte dépendance des conditions climatiques. En 2013, il a connu une croissance nulle en se situant à 41,7% du PIB contre une hausse de 13,2% en 2012. Cette évolution est essentiellement imputable à la baisse de 2,0% de la production agricole en 2013, après une hausse de 19,5% en 2012.
Représentant 15,5% du PIB, le secteur secondaire enregistre une hausse de 7,3% en 2013 après 42,3% en 2012. Cette évolution s’explique par la baisse de la production minière due à l’arrêt des activités de la SOMAIR durant deux mois environ, suite à l’endommagement des installations techniques de cette société. Elle s’explique également par la baisse du rythme de production pétrolière après le niveau atteint en 2012.
Avec 36,2% du PIB, le secteur tertiaire enregistre une croissance réelle de 6,7% en 2013 contre 5,0% en 2012. Cette évolution est imputable à la bonne tenue des activités de services publics, de commerce et de télécommunications. En termes de demande, la structure de l’économie nigérienne est dominée par les dépenses de la consommation finale des ménages qui représente 70,9% du PIB, soit une hausse de 3,9% du PIB en 2013.
Au niveau des finances publiques, la situation est caractérisée par une détérioration des soldes budgétaires, en dépit d’une tendance à l’amélioration de la mobilisation des recettes fiscales, comparativement aux dépenses publiques qui connaissent une forte évolution.
Ainsi, le taux de pression fiscale qui était de 13,5% en 2009 est passé à 15,8% en 2013. Ce niveau est en deçà de la nouvelle norme communautaire de 20,0% au sein de l’UEMOA. Le poids du secteur informel très peu fiscalisé, la fraude fiscale, le niveau élevé des exonérations, les retards et la lenteur dans la mise en œuvre des réformes, notamment au niveau des régies financières sont autant de facteurs qui justifient la faible mobilisation des recettes fiscales.
Le taux de pression fiscale du Niger est de 15,8% en 2013. Il est inférieur à la norme retenue par les critères de convergence pour la zone UEMOA. Cette même situation s’observe au Bénin (15,9%), au Mali (15,2%) et en Guinée Bissau (10,3%). Il est important de rappeler que la politique fiscale constitue l’un des instruments par lesquels l’action publique peut avoir un impact positif sur la réduction de la pauvreté. Cet impact peut se traduire à la fois sur la croissance économique et sur la redistribution des revenus. En d’autres termes, il est important de manier avec précaution cet outil, à la fois afin de favoriser l’éclosion d’un secteur formel et moderne, ainsi que l’extension de l’assiette fiscale de l’Etat.
Parallèlement, les dépenses publiques ont connu une forte progression avec une hausse de 27,9% en 2013 pour représenter de 28,1% du PIB contre 23,9% du PIB en 2009. Cette évolution est essentiellement due à la hausse des dépenses en capital en rapport avec la volonté du Gouvernement consistant à investir massivement dans les infrastructures et les secteurs sociaux.
Credits Photo: presidence.ne
WATHI propose une sélection de documents sur le contexte économique, social et sécuritaire du Niger et les enjeux les plus importants pour les cinq prochaines années. Chaque document est présenté sous forme d’extraits qui peuvent faire l’objet de légères modifications. Les notes de bas ou de fin de page ne sont pas reprises dans les versions de WATHI.