Nkou Sébastien
Au cours des quatre dernières années, deux sommets extraordinaires sur la situation macroéconomique de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) ont été organisés par la conférence des chefs d’État. Le premier s’est tenu par visioconférence, le 18 août 2021 sous la présidence du président Paul Biya, alors président en exercice. Il avait pour objectif d’évaluer la situation macroéconomique de la zone CEMAC dans le contexte de la pandémie de COVID-19 et d’envisager les mesures de redressement.
Le second qui a eu lieu à Yaoundé le 16 décembre 2024, soulignait non seulement l’urgence d’une harmonisation des systèmes économiques fonctionnels mais aussi la nécessité d’une transformation structurelle des économies afin de garantir une stabilité monétaire durable. Cette volonté reflète la nécessité de mûrir les réformes dans des secteurs clés tels que les transports et la migration. Une suite d’actions rapides, vigoureuses et coordonnées, tant au niveau national qu’au niveau sous-régional, nécessaire pour stabiliser le cadre macroéconomique et réaliser une transformation structurelle profonde des économies de la sous-région.
Depuis 2015, la situation macroéconomique de la CEMAC, qui pèse sur son processus de croissance économique, soulève la problématique d’une globalisation des politiques budgétaires, fortement influencées par les fluctuations des prix des matières premières et du pétrole sur le marché mondial.
Deux dimensions expliquent comment cette situation impacte l’économie sous régionale. D’abord, la dégradation des finances publiques et extérieures. Les contres chocs des prix du pétrole et des matières premières, observés ces dernières années, diminuent considérablement les ressources financières. Ils affaiblissent les réserves de change.
Les pays de la CEMAC fortement dépendants des importations de matières premières et du pétrole brut, subissent les effets d’une monnaie faible, ce qui explique leur taux d’échanges sur le marché mondiale. Ces effets en cascade inversent la courbe économique : forte inflation et faible pouvoir d’achat. Cette situation explique la navigation prudente des différents partenaires au développement, qui perçoivent un risque de récession et une situation financière fragile pour le bloc régional.
Dans ce contexte, la question du statut des migrants revêt une importance capitale, cela rend la légalité et la régularisation des migrants indispensables, surtout face à des positions parfois radicales qui aboutissent souvent aux expulsions dans certains pays
Le transport terrestre dans le développement économique de la région
Alors que les gouvernements doivent naviguer avec prudence pour stabiliser la situation économique, l’un des résultats est le développement accéléré des infrastructures de transports nationales et multimodales, accompagné d’une action sous régionale visant une meilleure intégration physique. En effet, les contreperformances économiques des pays membre de la CEMAC mettent en exergue la persistance des inégalités économiques.
Quelques facteurs critiques du transport sous régional expliquent cette sous intégration: la sécurité des routes, les problèmes d’infrastructures et de suprastructures. Même si l’on peut vouloir l’intégration physique, la solidarité ou la modernisation des économies, il reste difficile de répondre efficacement aux attentes des populations (tant que les infrastructures routières demeurent constamment en travaux).
Cela implique de prendre en considération la démocratisation des forces économiques et financières pour limiter l’endettement et réaliser d’autres projets structurants. Par exemple, au Cameroun, pays leader de la CEMAC, de nombreux projets de construction et de réhabilitation des routes et autoroutes sont soit à l’arrêt, soit n’ont jamais vu le jour. Cet état de chose permet de cerner les contours et les limites de l’hypercentralisation du financement et de l’endettement pour la réalisation des projets d’investissement.
Dès lors, il s’agit de faire émerger un nouveau paradigme basé sur la confiance des entreprises et les établissements financières locales. Cet impératif s’inscrit tout autant dans le caractère inédit des micro-infrastructures, notamment les péages et pesages dans les actions de réhabilitations et de construction des routes. Contrairement à ce qui est fait, l’État ne finance pas les constructions, mais crée les mécanismes de démocratisation de financement et un environnement de confiance propice aux investisseurs. La définition de la globalisation qui met en accord les économistes critiques est : « l’interdépendance croissante de tous les marchés nationaux […], d’un marché mondial unifié ». Un coefficient de rationalisation du commerce bilatéral et le niveau d’ouverture en termes d’indicateur d’échange et le degré d’accessibilité.
Le premier niveau est le dénuement des conséquences différentielles du niveau d’infrastructures de transports souvent inadaptées et en mauvais état que souffre la CEMAC. Le ratio entre la dette publique/Pib qui a augmenté de 1,3%, atteignant 53,8 % du PIB en 2023, aussi le processus d’intégration en dents de scie, résident dans un paradoxe redoutable. Les visions qui guident les stratégies de développement et de gouvernance sont répit de tous discours univoques.
Par exemple, au Cameroun, pays leader de la CEMAC, de nombreux projets de construction et de réhabilitation des routes et autoroutes sont soit à l’arrêt, soit n’ont jamais vu le jour
La force de la mobilité intrarégionale, un dossier toujours sensible en zone CEMAC
En octobre 2017 déjà, la conférence des chefs d’État avait souligné que la mobilité intrarégionale constitue un avantage pour la globalisation, l’intégration, la solidarité et la croissance économique. Certes, la migration au sein de la CEMAC est un phénomène à la fois historique et actuel.
Cependant, la situation concernant la libre circulation des personnes (n’est pas alignée avec) les dynamiques économiques que pourraient renforcer les migrations. Par exemple, la vulnérabilité économique est marquée par des difficultés de croissance, exacerbées par une chute brutale du commerce intrarégional.
Cette situation est aussi considérable au regard du taux de chômage dans l’ensemble des pays membres. Dans les deux cas, il s’agit notamment de minimiser la virulente controverse entre le taux de croissance et le taux d’inflation, en mettant au profit une véritable libre circulation des travailleurs, aussi que des expertises pour créer plus d’emplois. Pour rehausser le commerce transfrontalier déjà précaire et sous-valoriser.
Toutefois, la matérialisation de la libre circulation des personnes reste à des degrés différents, si bien que, structurellement la question des droits des migrants n’a jamais fait l’unanimité. Dans ce contexte, la question du statut des migrants revêt une importance capitale, cela rend la légalité et la régularisation des migrants indispensables, surtout face à des positions parfois radicales qui aboutissent souvent aux expulsions dans certains pays. L’approche légale et régulatrice des États, convaincue de la nécessité de mesures visant à atténuer les effets indésirables associés à la migration, montre que cette question nécessite une attention particulière et un consensus international. La controverse entourant la situation des migrants dans la zone CEMAC peut également être comprise à travers le prisme du contexte politique.
En effet, l’exploitation des migrants semble devenir un enjeu central dans les préoccupations liées aux élections présidentielles. Il est donc tentant de faire un lien entre les récentes vagues d’expulsions en Guinée Équatoriale et les accusations de bourrage des urnes portées par l’opposition camerounaise contre le parti au pouvoir impliquant certains de ces ressortissants.
Repositionnement stratégique du leadership au sein de la CEMAC : un intérêt commun
Ces deux sommets extraordinaires des chefs d’État de la CEMAC témoignent d’une prise de conscience collective des enjeux pressant auxquels la région est confrontée, notamment la nécessité d’une politique monétaire harmonisée. Ce repositionnement stratégique doit prendre en compte les intérêts variés des États membres, tout en favorisant un leadership efficace et partagé. En outre la stabilité politique et la bonne gouvernance sont essentielles et renforcent la confiance du bloc régional, face à d’autres organisations économiques africaines qui ont réussi à promouvoir l’intégration économique.
Crédit photo: Jeune Afrique
Nkou Sébastien est titulaire d’un Master de Géographie de l’Université de Douala en géographie, spécialisé dans la géopolitique des transports. Il s’intéresse aux enjeux liés aux transports et à la migration au sein de la CEMAC.