Théo Thibaut-Pinon et Hervé Diaz
Trop longtemps, la République française s’est montrée timorée dans sa volonté de renouer avec le continent africain, riche de promesses et d’opportunités. Il est désormais temps de rompre avec les vieilles lenteurs et de rebâtir sur des bases neuves nos relations avec ces nations sœurs. Depuis les indépendances dès les années 1960, l’État français a progressivement réduit son aide publique au développement envers les pays africains. En début d’année, le gouvernement annonçait encore une coupe de près de 12,5% du budget de l’aide publique au développement, pour arriver à un niveau parmi les plus faibles chez les pays développés, ce qui intervient après un nouveau report de 5 ans en ce qui concerne l’objectif d’allouer 0,7% du PIB à la solidarité internationale, objectif fondamental de la République qui n’a encore jamais atteint ce jalon alors même qu’elle s’y était engagée[1].
En parallèle, l’influence économique française s’est érodée. Alors que 18% des importations africaines provenaient de l’Hexagone en 2000, ce chiffre n’était plus que de 6,9% en 2020[2], dépassé par la Chine (16,7%), et bientôt l’Inde (6,8%). Sur le plan des investissements directs étrangers aussi, la France est désormais distancée par des partenaires comme la Chine, bien moins regardant sur le fonctionnement des institutions des États africains.
Ainsi, nos futures coopérations doivent se nourrir d’un dialogue constant et d’une authentique volonté de compréhension mutuelle. Évitons tout jugement dépréciatif envers des modèles de gouvernance qui, pour être différents des nôtres, n’en demeurent pas moins légitimes aux yeux des populations locales. Respectons les spécificités de chaque nation, issues de leur évolution singulière, qui doit composer avec des frontières créées à la carte.
Cela ne signifie nullement de renoncer à la défense de nos valeurs fondamentales de démocratie et de droits humains, si étroitement liées aux idéaux de la République ni à l’idée de la France, patrie que nous nous devons de respecter. Mais transmettons ce message de manière ouverte et pédagogique, sans hold-up financier, ni bâton de berger. Par le dialogue, l’exemplarité et cherchons à convaincre bien plus qu’à imposer.
En premier lieu, renforçons nos liens culturels et intellectuels séculaires. La création de réseaux d’universités francophones d’excellence, l’accueil facilité d’étudiants et de chercheurs prometteurs sur notre territoire, l’envoi de coopérants qualifiés dans les domaines de l’éducation et de la santé sont autant de gestes forts pour raviver la flamme d’un riche partage des savoirs. Il est également impératif que les communes développent un sentiment de coopération et d’échange.
Ainsi, nos futures coopérations doivent se nourrir d’un dialogue constant et d’une authentique volonté de compréhension mutuelle. Évitons tout jugement dépréciatif envers des modèles de gouvernance qui, pour être différents des nôtres, n’en demeurent pas moins légitimes aux yeux des populations locales. Respectons les spécificités de chaque nation, issues de leur évolution singulière, qui doit composer avec des frontières créées à la carte
N’oublions pas non plus l’impérieuse nécessité de consolider nos attachés diplomatiques et sécuritaires. Resserrons nos rangs pour lutter contre les fléaux transnationaux tels que le terrorisme, le trafic d’armes et la criminalité organisée. Favorisons l’avènement d’une force africaine de maintien de la paix sous l’égide de l’Union Africaine que nous devons accompagner et non déconsidérer comme une tierce organisation.
Pour cela, il est désormais crucial de dépasser notre prisme occidental et d’embrasser pleinement une coopération à l’africaine. Soyons enfin cette puissance fédératrice dont la Présidence s’est tant auréolée, mettons en avant les qualités de notre France qui équilibre les sentiments, développant des programmes communs de coopération décentralisée entre régions, associant populations et acteurs locaux dans une dynamique de co-développement participatif et équitable.
Que cette nouvelle donne devienne le creuset d’une prospérité mutuelle et durable. Saisissons l’occasion de rebâtir, sur les fondations d’une amitié séculaire, un édifice moderne où la confiance réciproque sera le ciment d’une coopération réinventée entre égaux. Montrons la voie d’un partenariat revigoré, loin des errances modernes, pour le bien commun de nos deux continents liés par l’Histoire. Il ne suffit plus de réagir par tête politique, ni même de caractériser un ami par le régime politique qu’il habite, si nous souhaitons répandre la parole de l’évangile que l’on se prête. Le bien et la concorde internationale ne peuvent être sacrifiés au titre de tout intérêt plus obscur que celui de l’intérêt général.
Image d’illustration: Jeunesse du Mboa
Théo Thibaut-Pinon est référent jumelage de l’Association des jeunes élus de France.
Hervé Diaz est le président du Groupe école de commerce de Lyon et Président-fondateur de l’Alliance des étudiants francophones.