Auteur : Thomas Allen
Organisation affiliée : Organisation de coopération et de développement économiques (OECDE)
Type de publication : Notes ouest-africaines
Date de publication : Septembre 2017
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Pourquoi les niveaux de prix alimentaires sont-ils importants?
De plus en plus de consommateurs nets de produits alimentaires
En 2010, le niveau d’urbanisation était de 42 %. En conséquence, les ménages d’Afrique de l’Ouest sont aujourd’hui plus nombreux à vivre d’activités non agricoles. Si cette situation concerne la plupart des ménages urbains, elle s’applique également à de nombreux ruraux, étant donné que 25 % de ces derniers exerceraient une activité principale non agricole. Cette diversification économique dans des secteurs autres que l’agriculture a changé les modes et sources d’approvisionnements alimentaires.
Un nombre et un pourcentage croissants de Ouest-Africains sont dépendants des marchés pour leurs approvisionnements alimentaires et sont devenus consommateurs nets. Dans l’ensemble, les marchés fournissent désormais au moins deux tiers de l’approvisionnement alimentaire des ménages d’Afrique de l’Ouest. Ces changements structurels exigent de revoir l’impact et le rôle des prix alimentaires.
Étant donné que la majorité des Ouest-Africains est consommatrice nette de denrées alimentaires, les conséquences des niveaux de prix alimentaires élevés sur le bien-être des ménages évoluent. En effet, les prix ont des effets contrastés sur le bien-être des ménages. Plus élevés, ils sont synonymes de hausse de revenus pour les producteurs, mais se traduisent par des produits plus chers pour les consommateurs. L’effet global net dépend de la structure de l’économie.
Un nombre et un pourcentage croissants de Ouest-Africains sont dépendants des marchés pour leurs approvisionnements alimentaires et sont devenus consommateurs nets
Dans les économies principalement agricoles, la majorité des ménages profite de la hausse des prix alimentaires. En revanche, lorsque les consommateurs nets de produits alimentaires deviennent majoritaires, l’équilibre entre les avantages pour les producteurs et pour les consommateurs et l’impact net sur l’économie dans son ensemble changent.
À mesure que les marchés se développent, les prix deviennent un facteur déterminant de l’accessibilité des ménages à l’alimentation et donc de la sécurité alimentaire. En théorie, la sécurité alimentaire repose sur quatre piliers : la disponibilité, l’accessibilité, l’utilisation et la stabilité, qui revêtent chacun des dimensions à la fois distinctes et liées. Dans les économies de subsistance, les leviers de l’offre sont déterminants en matière de sécurité alimentaire.
Dans ce contexte, l’accès à l’alimentation dépend des disponibilités au sein du ménage ou de la communauté et les chocs touchant la production agricole (sécheresse, inondations, parasites et maladies) ont un impact direct sur cet accès. En revanche, l’accès aux denrées alimentaires pour les ménages qui les acquièrent sur les marchés dépend principalement de leur capacité à acheter. Ce pouvoir d’achat dépend des prix.
Par ailleurs, étant donné la part élevée du budget consacrée à l’alimentation, les ménages ouest-africains sont extrêmement sensibles aux prix. La nourriture représente en moyenne 55 % des dépenses totales d’un ménage, un chiffre qui varie entre les zones rurales et urbaines. Dans les secondes, qui affichent une densité plus élevée d’habitants pauvres, l’accessibilité économique des produits alimentaires est un enjeu majeur.
La majorité des Ouest-Africains est consommatrice nette de denrées alimentaires, les conséquences des niveaux de prix alimentaires élevés sur le bien-être des ménages évoluent
De surcroît, les prix alimentaires sont généralement plus élevés dans les zones urbaines que dans les zones rurales, surtout en ce qui concerne les denrées non transformées. Les ménages urbains pauvres dépensent 347 USD par personne et par an en nourriture, contre 297 USD par personne et par an pour les ménages ruraux. Cet écart de 17 % peut probablement s’expliquer par des différences de prix. En d’autres termes, les ménages urbains pauvres ne consomment pas forcément davantage de produits alimentaires que les habitants pauvres des zones rurales, ils paient simplement plus par unité de consommation. Par conséquent, toute hausse des prix diminue leur capacité à répondre à leurs besoins.
Des tensions croissantes sur les marchés
Entraînée par la croissance de la population et des revenus et par l’urbanisation, la demande alimentaire a été multipliée par six au cours des 65 dernières années (de quelque 62 000 milliards de kcal en 1960 à 362 000 milliards de kcal en 2015). Par ailleurs, les habitudes de consommation se sont transformées. En effet, les consommateurs recherchent de plus en plus des aliments pratiques à acheter, à préparer et à consommer. La consommation d’aliments transformés s’accroît rapidement, ainsi que celle de fruits, de légumes, de viande et de poisson.
Trente-neuf pour cent de tous les aliments consommés en Afrique de l’Ouest sont transformés. Ces modifications des habitudes de consommation ne se limitent pas aux villes. Le taux est simplement un peu plus bas dans les zones rurales (36 %) que dans les zones urbaines (41 %). Les modifications du volume et de la structure de la demande changent les conditions de marché et ont une incidence sur les prix des denrées alimentaires.
Trente-neuf pour cent de tous les aliments consommés en Afrique de l’Ouest sont transformés. Ces modifications des habitudes de consommation ne se limitent pas aux villes
En Afrique de l’Ouest, la production régionale a su répondre en grande partie à la croissance de la demande alimentaire. Les importations représentent une part limitée, mais croissante, de la demande, atteignant 7 % de la valeur monétaire de la consommation alimentaire en 2010. Pourtant, la croissance de la demande a dépassé celle de l’offre locale et les prix à l’échelon régional sont plus élevés que les moyennes historiques avec une volatilité à court terme plus forte.
Du côté de la demande, l’inélasticité de la demande alimentaire accentue encore davantage la dynamique de hausse des prix avec une demande légèrement excédentaire par rapport à l’offre entraînant une hausse plus que proportionnelle des prix. Compte tenu du contexte de baisse des prix à long terme sur le plan international, les tensions actuelles sur les marchés ouest-africains érodent la compétitivité des produits locaux, ce qui pourrait empêcher la région de profiter pleinement des opportunités qui émergent dans l’économie alimentaire.
Un facteur déterminant de compétitivité
L’économie alimentaire qui regroupe toutes les activités contribuant à la production alimentaire, de l’exploitation agricole à la transformation en passant par le transport et la distribution constitue le secteur privé le plus important de la région. Sa valeur s’élevait à 178 milliards USD en 2010, soit 36 % du PIB régional. Les activités agricoles en amont (intrants, semences) et en aval (transformation, vente au détail) le long des chaînes de valeur alimentaires représentent déjà 40 % de la création de valeur du secteur et vont continuer de se développer en fonction de la demande. Selon les tendances actuelles, c’est la demande d’aliments transformés et/ou à forte valeur ajoutée qui va croître le plus vite. Le développement de ces activités et produits dépendra également de la compétitivité de l’économie alimentaire régionale.
Les prix représentent un élément essentiel de la compétitivité. Des prix peu compétitifs empêchent les pays de vendre leurs produits à l’étranger, mais aussi de renforcer et de gagner des parts de marché sur leurs marchés nationaux. Même si d’autres facteurs non liés aux prix, comme la qualité, contribuent également à la compétitivité, les produits de base et les matières premières se font majoritairement concurrence sur les prix.
Le prix relatif du maïs entre les États-Unis et le Nigéria donne une indication de la compétitivité-prix des produits agricoles ouest-africains. Celui-ci a diminué depuis la fin des années 60, reflétant la chute continue des prix agricoles sur les marchés internationaux. Cependant, cette tendance s’est inversée depuis la crise de 2008, et en particulier à la suite de la dépréciation du naira par rapport au dollar américain.
Le prix relatif du maïs entre les États-Unis et le Nigéria donne une indication de la compétitivité-prix des produits agricoles ouest-africains
Au-delà des aliments bruts, comme le riz, la région doit également devenir plus concurrentielle dans les gammes de produits plus sophistiqués et à plus haute valeur ajoutée, comme les aliments transformés et les produits laitiers, si elle veut maintenir et gagner des parts de marchés dans les segments à forte croissance et à haute valeur ajoutée des chaînes de valeur alimentaires.
Les prix de ces produits dépendent de plus en plus d’un ensemble d’activités variées effectuées le long de la chaîne de valeur, qu’il s’agisse de l’agriculture et de l’élevage ou de la transformation et du transport. Toutefois, de nombreuses chaînes de valeur alimentaires souffrent d’une mauvaise coordination et d’un manque de confiance entre les différents acteurs, une situation exacerbée par des infrastructures de marché et de transport peu développées et un approvisionnement en électricité incertain.
Un accès cher à l’alimentation
Des prix élevés ? Une comparaison internationale
Les prix alimentaires varient fortement d’un pays à l’autre. Les prix, et notamment les prix des denrées alimentaires, sont généralement moins élevés dans les pays pauvres. Des données empiriques suggèrent l’existence d’une corrélation positive forte entre le niveau des prix et le PIB par habitant, connue sous le nom d’effet Balassa-Samuelson ou effet Penn. Le niveau des prix global augmente à mesure qu’un pays devient plus riche.
Cette évolution s’explique par la croissance de la productivité dans le secteur marchand (les activités dont la production est échangée à l’échelon international) supérieure à celle du secteur non marchand. Les gains de productivité du secteur marchand entraînent une hausse des salaires qui se traduit par des prix relatifs plus élevés pour les biens non marchands.
L’économie alimentaire qui regroupe toutes les activités contribuant à la production alimentaire, de l’exploitation agricole à la transformation en passant par le transport et la distribution constitue le secteur privé le plus important de la région. Sa valeur s’élevait à 178 milliards USD en 2010, soit 36 % du PIB régional
Afin de montrer l’impact des prix alimentaires élevés sur le pouvoir d’achat, l’Inde sert de pays de comparaison. Bien qu’elles soient très différents sur le plan démographique, l’Inde (1.2 milliard d’habitants) et l’Afrique de l’Ouest (370 millions) ont en commun un PIB par habitant similaire (environ 1 200 USD). Le prix d’un panier alimentaire moyen est calculé pour chaque pays selon les prix indiens (en gardant constantes les quantités consommées, mais en utilisant les prix indiens) afin de fournir une indication du niveau de perte de bien-être des ménages résultant de l’écart de prix entre l’Inde et l’Afrique de l’Ouest.
En Afrique de l’Ouest, les prix alimentaires sont supérieurs de 50 % à 130 % à ceux de l’Inde. En fonction du pays, les ménages économiseraient entre 19 et 33 % de leurs revenus s’ils achetaient leur nourriture aux prix indiens. Dans des pays comme le Tchad, le Libéria et le Nigéria, les économies réalisées par les ménages se chiffreraient à environ 30 %. Purement théorique, cette comparaison ne tient pas compte des effets de substitution et des changements conséquents des habitudes alimentaires qui se produiraient si les prix étaient plus bas.
En Afrique de l’Ouest, les prix alimentaires étaient supérieurs de 50 % à 130 % selon les pays à l’indice de prix global (tous produits confondus) en 2011, ce qui indique que la nourriture est plus chère en valeur réelle que les produits non alimentaires. Ces prix relatifs élevés laissent entrevoir un système alimentaire moins efficace en Afrique de l’Ouest. Ils informent sur les niveaux de rareté relatifs et les écarts de productivité.
Selon le principe général, le prix des biens rares augmente jusqu’à ce que l’offre et la demande parviennent à un équilibre. In fine, la rareté est liée à la disponibilité et à l’utilisation des ressources productives. Dans un contexte de demande croissante, le principal moyen de réduire la pénurie consiste à augmenter la productivité. La plus faible productivité des pays à faible revenu contribue à une plus grande pénurie des denrées alimentaires et, en conséquence, à des prix relatifs des produits alimentaires plus élevés.
En résumé, les produits alimentaires ouest-africains ne sont pas seulement chers par rapport aux pays en développement d’autres régions du monde, ils sont également chers par rapport aux biens non alimentaires.
Quels sont les pays plus chers? Perspective régionale
Les données ICP de 2011 permettent de comparer les prix alimentaires des pays d’Afrique de l’Ouest. À l’exception du Libéria, c’est dans les économies les plus riches, c’est-à-dire au Cabo Verde, au Ghana et au Nigéria que les prix alimentaires sont les plus élevés. En revanche, les pays où l’on trouve les denrées alimentaires les moins chères sont les pays les plus pauvres, à l’exception de la Mauritanie. Il est intéressant de noter que les prix alimentaires sont en moyenne significativement inférieurs dans les pays de l’UEMOA, alors que le Ghana, le Libéria et le Nigéria, qui ne font pas partie de l’UEMOA, font augmenter la moyenne régionale. Cependant, les prix alimentaires les plus bas s’observent dans deux pays ne faisant pas partie de l’UEMOA (la Gambie et la Mauritanie).
En Afrique de l’Ouest, les prix alimentaires sont supérieurs de 50 % à 130 % à ceux de l’Inde. En fonction du pays, les ménages économiseraient entre 19 et 33 % de leurs revenus s’ils achetaient leur nourriture aux prix indiens. Dans des pays comme le Tchad, le Libéria et le Nigéria, les économies réalisées par les ménages se chiffreraient à environ 30 %
Écarts de prix et nécessité de faciliter le commerce régional
Les écarts de prix relativement importants, allant de -28 % en Mauritanie à +14 % au Ghana par rapport à la moyenne régionale, reflètent l’inefficacité relative du marché alimentaire régional. La cartographie des écarts de prix observés entre les pays indique que ces derniers sont plus faibles entre les pays de l’UEMOA, qui partagent la même monnaie, qu’entre l’UEMOA et les pays n’en faisant pas partie. Ces écarts sont particulièrement faibles entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, entre le Bénin et le Burkina Faso, et entre le Burkina Faso et le Niger. Ils sont les plus élevés entre le Ghana, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, ce qui est dû en grande partie aux prix alimentaires ghanéens élevés par rapport à la moyenne régionale.
Les écarts de prix ne semblent pas être totalement exploités par le commerce. En effet, les différentiels de prix importants entre deux pays peuvent être interprétés comme reflétant des coûts de transaction élevés ou un potentiel d’échanges inexploité. Il existe plusieurs segments de frontières où ces écarts dépassent +/- 17 % de la moyenne régionale. De nombreuses études ont souligné les coûts de transaction élevés des flux intrarégionaux en Afrique de l’Ouest, qui sont dus en grande partie à la faiblesse des infrastructures de transport et de communication, à la fragmentation des marchés régionaux et aux politiques commerciales insuffisamment mises en œuvre. Depuis le lancement du Schéma de libéralisation des échanges de la CEDEAO au début des années 90, il n’existe plus de barrière officielle au commerce dans la zone. Pourtant, sa mise en œuvre reste aléatoire avec de nombreuses barrières qui subsistent dans les faits.
Quels sont les produits les plus chers?
On obtient une hiérarchie nette des prix entre les différents pays de la région : les produits laitiers, les graisses et huiles sont toujours les aliments les plus chers, tandis que le poisson est l’aliment le moins cher. Les céréales, les fruits et légumes comptent parmi les groupes d’aliments les moins chers, mais leurs écarts de prix varient en fonction des pays. Deux éléments clés doivent être soulignés.
Premièrement, en Afrique de l’Ouest, les produits laitiers, graisses et huiles sont plus chers en valeur absolue qu’aux États-Unis. En d’autres termes, les mêmes produits laitiers coûtent plus en Afrique de l’Ouest, alors que le pouvoir d’achat y est beaucoup plus bas. Le prix de la viande est rarement plus de 20 % inférieur à celui des États-Unis. Par rapport aux niveaux de revenus locaux, ces produits sont donc très chers, ce qui explique qu’ils représentent une faible part de la consommation des ménages.
Deuxièmement, les structures de prix ont une corrélation inverse aux habitudes de consommation : les produits les moins chers par rapport aux États-Unis sont les plus consommés. Dans de nombreux pays en développement, les sources de protéines non animales continuent d’être dominantes. Les céréales restent la source de nourriture la plus importante en Afrique de l’Ouest, puisqu’elles contribuent à 45 % des apports caloriques et représentent au moins 30 % des dépenses alimentaires totales. Les fruits et légumes constituent le deuxième groupe et, dans certains pays, représentent le poste le plus élevé dans les dépenses alimentaires.
Ce groupe inclut un large éventail de familles de végétaux, comme les racines, les tubercules, les feuilles, les tiges, les bourgeons, les fleurs et les fruits. Les ménages consacrent une grande partie de leurs revenus à ces deux groupes d’aliments. Par rapport aux prix américains, les prix ouest-africains sont les plus bas dans ces groupes. Fait intéressant, dans une économie très ouverte et dépendante des importations comme celle du Cabo Verde, les écarts de prix avec les États-Unis sont répartis de manière plus homogène entre les différents groupes d’aliments, avec des variations moins importantes entre les prix des aliments (à l’exception du poisson qui représente quelque 10 % des dépenses alimentaires des ménages et qui est principalement produit localement sur l’archipel).
Implications politiques et sécurité alimentaire
Suivre les prix alimentaires et l’accessibilité économique
Les décideurs politiques doivent revoir les systèmes de suivi des prix afin qu’ils intègrent à la fois le large éventail de produits alimentaires consommés et les moyens financiers des ménages. Les systèmes existant en Afrique de l’Ouest, comme le cycle PREGEC (Dispositif régional de prévention et de gestion des crises alimentaires) au sein du Réseau de prévention des crises alimentaires (RPCA), collectent des informations sur la pluviométrie, la production agricole ainsi que la consommation alimentaire des ménages, la nutrition, les revenus et les stratégies permettant de surmonter les situations difficiles.
Le PREGEC suit également les prix des marchés agricoles, utilisant notamment les prix collectés par le Réseau des systèmes d’information des marchés en Afrique de l’Ouest (RESIMAO) qui suit un large éventail de prix agricoles dans dix pays de la région. Il existe d’autres systèmes spécifiques à des produits. Tous ces systèmes de suivi des prix peinent à maintenir la pérennité de leurs ressources financières. Cependant, leur mission, qui consiste à fournir des informations précises et à jour sur les prix, est plus importante que jamais. Étant donné le contexte actuel, le périmètre des données collectées doit être étendu et les méthodologies d’analyse perfectionnées afin de mieux rendre compte des enjeux liés à l’accessibilité économique à l’alimentation.
Premièrement, le nombre de produits alimentaires suivis doit être élargi. De nombreux pays d’Afrique de l’Ouest souffrent de l’absence de couverture systématique des produits non céréaliers. Par exemple, l’Analyse et cartographie de la vulnérabilité (VAM) du Programme alimentaire mondial (PAM) dispose d’un système de suivi des prix des produits alimentaires qui compte parmi les bases de données les plus exhaustives (361 marchés dans 16 pays de la région). Cependant, 85 % des séries de prix concernent les céréales et les grains.
Activer les liens entre productivité et prix La demande alimentaire à long terme dépend de la croissance de la population, de l’urbanisation et de la modification des habitudes alimentaires. À long terme, l’approvisionnement alimentaire sera déterminé par la quantité de ressources (terres, eau, main-d’œuvre, capital, etc.) disponibles pour sa production ainsi que par la productivité de ces ressources. La hausse de la productivité est essentielle pour faire baisser les prix et augmenter les revenus des agriculteurs.
Profiter des ressources disponibles
L’un des principaux obstacles à la hausse de la productivité en Afrique de l’Ouest vient de l’insuffisante utilisation des technologies agricoles et des pratiques de production modernes. Tout d’abord, l’Afrique est la région du monde qui affiche le plus faible pourcentage de terres cultivées irriguées (5 %, contre plus de 40 % en Asie). Ces terres agricoles irriguées notamment en Asie du Sud-Est, permettent de produire plusieurs récoltes par an et garantissent aux agriculteurs de travailler toute l’année.
L’irrigation joue un rôle fondamental dans la hausse des rendements et de la productivité du travail et permet de faire baisser les prix alimentaires. Les semences de qualité, l’utilisation d’engrais et d’équipements modernes ont également joué un rôle important dans l’augmentation de la productivité. Les services de vulgarisation et de conseil devraient diffuser plus largement des informations sur les pratiques de culture efficaces et l’adaptation des nouvelles technologies aux conditions locales.
Le coût de ces investissements invite à relancer le débat sur la taille optimale des exploitations agricoles. Les hausses de prix ne peuvent pas être le seul moteur de la productivité du travail et des revenus des producteurs. La production par travailleur doit elle aussi augmenter, ce qui implique d’augmenter les rendements et l’intensité culturale, mais aussi la taille des exploitations. Ce dernier critère n’est pas incompatible avec l’agriculture familiale et n’est pas nécessairement synonyme de «taille unique».
Monter en gamme: transformation et commercialisation des aliments
Les programmes et les stratégies de production et de transformation agricoles doivent être pensés au regard de la demande des consommateurs finaux. Les aliments transformés représentent désormais une part importante de la consommation alimentaire dans toutes les classes de revenus, même les plus basses, et devraient connaître la croissance la plus rapide dans les années à venir. Les activités en aval de l’économie alimentaire vont jouer un rôle croissant dans les transformations de l’agriculture, la compétitivité et la formation des prix.
Il importe désormais de relever les défis également dans les segments en aval des chaînes de valeur alimentaires. Les politiques et les programmes devraient clairement viser à stimuler le développement de nouvelles activités et la création d’entreprises tout au long des chaînes de valeur, et à améliorer les conditions de distribution et de commercialisation. La question des prix alimentaires et la capacité de la région à profiter des opportunités de création de valeur ajoutée dépendront des gains réalisés à chaque étape de la chaîne.
Soutenir les chaînes de valeur émergentes
Afin de diminuer l’ensemble des prix alimentaires, les gouvernements devraient cibler les chaînes de valeur émergentes. Les modes de production, de transformation et de commercialisation des aliments changent rapidement. Les consommateurs recherchent de plus en plus des produits alimentaires sûrs, faciles à préparer et de meilleure qualité. Cette évolution crée des opportunités pour les agriculteurs, les transformateurs, les grossistes et les détaillants le long des chaînes de valeur alimentaires. Il est essentiel d’évaluer la contribution des prix des différents aliments à l’indice global de niveau des prix alimentaires, car cela permet de savoir sur quels produits ou chaînes de valeur intervenir en particulier pour améliorer l’accessibilité des ménages à l’alimentation.
Faciliter le commerce régional avec de nouveaux corridors
Le renforcement et la facilitation des échanges régionaux peuvent faire baisser les prix alimentaires. L’agrandissement du réseau régional des corridors commerciaux devrait être une priorité des politiques publiques. Ces corridors correspondent à un ensemble de routes qui bénéficient de programmes de facilitation du commerce, reliant notamment les ports aux principaux marchés intérieurs et offrant ainsi des connexions internationales et des débouchés aux pays enclavés.
Un grand nombre de frontières où les écarts de prix alimentaires sont élevés ne sont pas traversées par des corridors existants. Les corridors qui ont la priorité des programmes de facilitation du commerce comme ATP ou Trade Hub s’inscrivent souvent dans un axe nord-sud et ont été initialement créés pour tirer profit des productions de cultures de rente et favoriser l’import-export extrarégional. Sur de nombreuses routes commerciales ouest-est, les écarts de prix montrent le fort potentiel du commerce régional.
À l’exception du corridor Abidjan-Lagos, nombre de ces corridors transversaux ont été ignorés par les politiques, notamment l’axe Libéria-Sierra Leone-Sénégal. À mesure que le marché domestique se développe, il devient nécessaire de faciliter le commerce le long de nouveaux corridors qui relient mieux entre elles les zones de production et de consommation en pleine croissance.
Le passage des corridors commerciaux aux « corridors de développement » a récemment été préconisé comme un outil efficace pour surmonter les problèmes de coordination et les défi s politiques engendrés par les initiatives de promotion du commerce. Cette approche vise à augmenter le commerce régional par de meilleures infrastructures physiques et « immatérielles » (qui renvoient à des éléments tels que le cadre directif et la réglementation), un accès amélioré au marché et une plus forte implication auprès des investisseurs. Le cadre institutionnel nécessaire devrait être placé sous l’égide des deux organisations régionales mandatées pour renforcer l’intégration économique de la région, à savoir la CEDEAO et l’UEMOA.
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