Auteurs : Antoine Sehi Tape Bi, Ferdinand Adja Vangah, Paul Kouassi Anoh
Organisation affiliée : PASRES (Programme d’Appui Stratégique à la Recherche Scientifique
Type de publication : Article de revue scientifique
Date de publication : 2018
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Les études sur le système des soins de santé en Afrique subsaharienne révèlent que le taux de fréquentation des districts sanitaires est très faible (0,24% au mali ; 0,34 au Burkina-Faso ; 0,30 au Bénin) malgré la présence des infrastructures sanitaires. Dès son accession à l’indépendance dans les années 1960, elle [La Côte-d’Ivoire] a investi d’énormes ressources dans la construction des établissements sanitaires et dans la formation des professionnels de santé. Ainsi, cette offre de soins s’est caractérisée par sa densité et sa disponibilité dans la capitale économique qui est Abidjan, contrairement en milieu rural.
Malgré cette importante offre de soins, le taux de fréquentation de la population abidjanaise reste faible. Ainsi, selon les données statistiques, ce sont 38,49% de la population vivant à Abidjan qui fréquentent les infrastructures sanitaires. On note aussi, 0,4% de consultation en moyenne par personne et par an chez un généraliste.
Yopougon-Sicogi, l’un des quartiers de cette commune abrite plusieurs établissements sanitaires privés avec une diversité de services d’offre de soins. Cependant, le taux de fréquentation de l’ensemble de ces structures sanitaires reste très faible. Il est de 8,89% en 2010 et 10,41% en 2013 ne dépassant guère la norme recommandée par l’OMS qui est 50% de fréquentation.
Bilan de la fréquentation des structures sanitaires
Sur les deux années d’exercice (c’est-à-dire 2013 et 2014), la fréquentation des structures de Yopougon-Sicogia connu une baisse de l’ordre de 33,76%. De 6255 cas traités en 2013, ces infrastructures de santé ont enregistré en 2014, 4143 patients.
Toutefois, on note que, le manque d’intérêt des populations vis-à-vis des structures sanitaires de Yopougon-Sicogi est caractérisé par une baisse du niveau de fréquentation de 2013 à 2014 tant au niveau des riverains que des individus résidant hors de Yopougon-Sicogi. La fréquentation a baissé de 10,80% pour les usagers résidant dans le quartier et de 69,42% pour les patients qui viennent hors de cette unité infra-communale de Yopougon.
Ce manque d’intérêt des populations vis-à-vis des établissements sanitaires de leur quartier a considérablement maintenu le taux de fréquentation de ceux-ci à un niveau très bas passant de 10,41% en 2013 à 9,28% en 2014. Ces différents taux de fréquentation sont très éloignés de ceux obtenus dans les districts sanitaires de la ville d’Abidjan en 2013.
Malgré cette importante offre de soins, le taux de fréquentation de la population abidjanaise reste faible. Ainsi, selon les données statistiques, ce sont 38,49% de la population vivant à Abidjan qui fréquentent les infrastructures sanitaires. On note aussi, 0,4% de consultation en moyenne par personne et par an chez un généraliste
Selon le District Sanitaire de Yopougon Est dont dépend Yopougon-Sicogi, le taux de fréquentation des infrastructures sanitaires dans ce district de santé était de 29,25% en 2014 et 32% en 2015. Cependant, malgré les efforts des autorités sanitaires et politiques et des organisations qui militent dans le domaine de la promotion de la santé des populations, ces différents taux restent très en dessous de la norme de l’OMS qui est de 50%.
Profil démographique et motifs de la faible fréquentation des structures sanitaires de Yopougon-Sicogi
Parmi les chefs de ménages qui ne fréquentent pas les structures sanitaires de leur quartier, ceux de sexe masculin sont les plus nombreux. Ils représentent 71% contre 29 % pour les chefs de ménages de sexe féminin.
On observe que les retraités représentent 58% de l’effectif des ménagères ne recourant pas aux établissements de soins. Ensuite, viennent les ménagères, les sans emplois et les commerçants. Les ménages concernés représentent respectivement 13% et 8%. On note que, la proportion des sans emplois est identique à celle des commerçants. Suivent enfin, les salariés et les fonctionnaires avec respectivement 6% et 7% de l’effectif total.
On constate que parmi 100% des chefs de ménage n’ayant pas recours aux infrastructures de santé de Yopougon-Sicogi dans le cadre de leur recherche de soins, 42% trouvent que l’offre des services de soins est inadaptée à leur besoin. 37% d’entre eux disent ne pas avoir confiance au personnel médical contre 21% qui justifient leur renoncement aux structures sanitaires de Yopougon-Sicogi par l’accès facile (proximité, faible coût et durée de déplacement,) à l’hôpital public le plus proche (Hôpital Général de Yopougon ex. PMI).
Sur les deux années d’exercice (c’est-à-dire 2013 et 2014), la fréquentation des structures de Yopougon-Sicogia connu une baisse de l’ordre de 33,76%. De 6255 cas traités en 2013, ces infrastructures de santé ont enregistré en 2014, 4143 patients
Cependant, les résultats de cette étude montrent aussi que, les structures de soins de santé modernes ne constituent pas la seule voie de recours aux soins à Yopougon-Sicogi. Mais il existe aussi sur cet espace, un secteur informel traditionnel et moderne d’offre de soins animé par les herboristes, les guérisseurs traditionnels, les cellules de prière thérapeutiques et les vendeuses de médicaments modernes ‘’de rue’’. Selon nos enquêtes, à Yopougon-Sicogi ce sont 30% des chefs de manage qui ont recours à ce type de soins dont 17% pour l’automédication et 13% pour la médecine traditionnelle
Discussion
Les établissements sanitaires de Yopougon-Sicogi restent faiblement fréquentés malgré leur proximité et les efforts importants consentis par les promoteurs de soins résultant de l’accroissement des structures d’offre de soins.
Plus l’offre de services de soins est inadaptée aux besoins des ménages plus la probabilité qu’ils renoncent aux structures de santé de Yopougon-Sicogi est élevée. En effet selon nos enquêtes, 56% des chefs de ménage qui n’utilisent pas les établissements de soins de Yopougon-Sicogi sont vieillissants. Ils appartiennent tous à la classe d’âge 60 ans et plus. Or, plusieurs pathologies sont liées à l’âge avancé, ce qui est d’ailleurs le cas de ces chefs de ménage. 85% de leurs dernières consultations ont été relatives aux pathologies telles que le diabète, la prostate, le rhumatisme, l’arthrose et des crises de vieillesses. Il est donc recommandé des services de soins spécialisés, pour le moment inexistants à Yopougon-Sicogi.
Aussi, à Yopougon-Sicogi, toutes les structures de santé sont de type privé nécessitant de moyens financiers. Or, la capacité de tout individu à assurer les frais inhérents à sa santé sont fortement liés à son revenu et souvent à sa profession. Ce qui est difficile d’être le cas à Yopougon-Sicogi
L’absence de certains services de santé liée à l’âge est aussi observée au niveau du genre. En effet, des services de gynéco-obstétrique et de la maternité qui sont sollicités exclusivement par des femmes ne sont également pas disponibles à Yopougon-Sicogi. Il en est également pour les services de planning familial et de pédiatrie qui accueillent le plus souvent les femmes et les enfants accompagnées de leurs mamans. Or, plusieurs études montrent que, les individus de sexe féminin fréquentent plus les centres de santé que ceux de sexe masculin.
Aussi, à Yopougon-Sicogi, toutes les structures de santé sont de type privé nécessitant de moyens financiers. Or, la capacité de tout individu à assurer les frais inhérents à sa santé sont fortement liés à son revenu et souvent à sa profession. Ce qui est difficile d’être le cas à Yopougon-Sicogi car 63% des chefs de ménage interrogés gagnent moins de 100.000f CFA (152,44€) mensuellement, 21% sont sans revenu et 58% d’entre eux sont des retraités.
Plus les ménages n’auront pas confiance au personnel médical moins ils utiliseront les infrastructures sanitaires de leur quartier. A Yopougon-Sicogi, au sein des établissements sanitaires, il ne se passe pas deux années de suite sans aucune erreur médicale grave ne soit enregistrée à cause de la maladresse et des mauvaises décisions prises par certains agents de santé. Ce qui a pour corollaire des décès de patients. Le personnel permanant de ces centres de soins est constitué essentiellement d’aide infirmier (aide-soignant). Ils interviennent le plus souvent en l’absence des médecins et infirmiers qui sont du reste tous fonctionnaires exerçant dans des structures de santé publiques au moment où les patients sollicitent les centres de soins.
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