Auteurs : Mohamed Kanate
Organisation affiliée : Espace géographique et société marocaine
Type de publication : Article de revue scientifique
Date de publication : 2019
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La problématique de l’implantation des activités informelles est de plus en plus au centre des préoccupations qui touchent la gestion des espaces urbains, industriels et même administratifs. Comprendre les raisons qui expliquent leur implantation spatiale, serait d’un enjeu utilitaire pour la gestion de ces espaces hautement structurés comme les ports.
Le port d’Abidjan qui est un espace de transport multimodal drainé par moult rues, présente des particularités sur l’implantation des activités informelles. Elles s’y pratiquent préférentiellement sur des espaces alloués ou des interstices qui leur assurent la sédentarité outre la visibilité.
L’analyse interactive et la géolocalisation des unités de production informelles (UPI) révèlent que la typologie de ces sites informels dans le dit port est liée aux besoins des services formels et unités industrielles avoisinants ou co-contractantes selon le principe suivant : Les activités informelles occupent les espaces disponibles les plus proches des unités formelles où leurs utilités est avérées.
Approche physique des activités informelles au port d’Abidjan
La direction d’étude économique de la stratégie et du plan du port d’Abidjan a distingué d’une part les activités informelles non liées au port et d’autre part les activités informelles liées au port. La distribution typologique montre que seulement 4 sur 16, soit 25% des types d’activités informelles ont une distribution spatiale généraliste, les 75 % des types d’activités informelles se déroulent sur des sites spécialisés.
Les activités informelles qui se pratiquent sur ces espaces spécialisés sont liées au port car faisant partie de son cœur de métier et contribuent à sa chaîne des valeurs. Elles sont des UPI spécialisées et s’opposent aux UPI généralistes (restauration et commerce général) qui s’implantent partout sans tenir compte des spécificités anthropologiques zonales.
Restitution cartographique des résultats obtenus
Il existe une corrélation positive entre l’implantation de l’UPI spécialisée, son niveau de rentabilité et la spécificité anthropique de la zone portuaire. Cette corrélation se manifeste par la similitude de cœur de métier entre l’activité informelle et les services formels avoisinants, elle se matérialise aussi par le fait que l’activité informelle en question soit partie intégrante de la chaîne de valeurs des entreprises avoisinantes.
Les unités de production informelles liées au port ont tendance à s’implanter dans les zones portuaires où leur cœur de métier prédomine et cela participe à accroître leur rentabilité. Par contre les unités de production qui ne sont pas liées au port ne recherchent pas la similitude de cœur de métier pour s’implanter dans une zone portuaire, car cela n’est pas indispensable pour leur rentabilité.
L’existence du secteur informel au port d’Abidjan est due à l’existence de besoins non assouvis par les services formels. Cependant le principe fondamental qui gouverne l’implantation de ses sites est« être au mieux accessible ». Ce principe se manifeste par la visibilité à la clientèle lorsqu’il s’agit des UPI non liées au port et par la proximité avec les sociétés cocontractantes lorsqu’il s’agit des UPI liées au port.
Les UPI générales, la quête des zones portuaires denses
Les acteurs des UPI générales sont attirés par la présence d’une forte clientèle. Ainsi leurs regroupements se font par ordre de densité des lieux en clientèle.
C’est donc le développement des sites non- alloués au cœur des regroupements d’unités industrielles. C’est alors qu’on constate que c’est au niveau des entrées principales très fréquentées, qu’ils se situent ; surtout quand sur une même rue débouchent plusieurs entrées de structures différentes. Ils s’installent comme s’ils voulaient occuper le barycentre entre les différentes sorties de ces usines en considération du nombre des personnes qui les sollicitent.
Les UPI spécialisés au port d’Abidjan, un ancrage permanent des sites sur interstice
Outre la restauration qui se pratique sur tout l’espace portuaire, certaines activités informelles sont typiques à des sites spécialisés. On entend par sites spécialisés d’activités informelles des espaces qui présentent une singularité dans les activités qu’ils abritent comparativement aux autres espaces.
Il existe une corrélation positive entre l’implantation de l’UPI spécialisée, son niveau de rentabilité et la spécificité anthropique de la zone portuaire. Cette corrélation se manifeste par la similitude de cœur de métier entre l’activité informelle et les services formels avoisinants, elle se matérialise aussi par le fait que l’activité informelle en question soit partie intégrante de la chaîne de valeurs des entreprises avoisinantes
Au port d’Abidjan, ces espaces et ces activités sont: le pied nord du pont Felix Houphouët Boigny spécialisé en vente de fruits. l’espace caillou spécialisé en vente de boisson alcoolisée ou non. – le couloir entre la cité cadre et l’INHP spécialisé en location de chariots élévateurs. le grand hangar du port de pêche spécialisé en vente de poisson. les parkings automobiles spécialisés en garages mécaniques et vente de pièces automobiles.
La spécialisation décrite ici n’emporte pas de l’exclusivité d’une activité sur un site. Elle traduit simplement le fort taux de cette activité sur le dit espace comparativement aux autres espaces. Par exemple on peut retrouver des vendeuses de fruits individualisés disséminées au port, mais c’est au pied nord du pont FHB qu’il y’a leur plus grand regroupement.
On remarque un rapprochement géographique entre sites informels et structures formelles sur la base de la similitude de leurs cœurs de métier. Ce rapprochement se fait selon des rapports verticaux ou horizontaux entre les différentes entités en présence au port d’Abidjan.
Ils se traduisent par les liens de causalités qui existent entre elles. Les rapports verticaux entre activités impliquent une hiérarchisation entre elles, mettant par-dessus les entités formelles et par-dessous les activités informelles qu’elles engendrent. Aussi, lorsque certaines activités informelles engendrent d’autres, elles sont liées aussi par un rapport vertical. Les rapports horizontaux s’établissent entre les activités informelles lorsqu’elles ne sont pas subordonnées les unes aux autres.
L’espace caillou est réputé pour ces vendeuses de boisson alcoolisée ou non. Il est situé non loin d’unités commerciales dont tout ou partie de l’activité principale concerne la vente de boisson. Cet espace comme les autres espaces alloués, fut concédé à des acteurs de l’informel dans le but de la restauration des agents portuaires.
Cependant ces commerçantes seront de plus en plus utilisées pour la vente de boisson émanant de compagnies formelles que sont : La CDCI (compagnie de distribution de Côte d’Ivoire), SODIBRA une société de distribution de boisson dont un grand dépôt central est situé à trois minutes de marche de l’espace caillou et SICODIS (société ivoirienne de commerce et de distribution). Toutes Situées autour de l’espace caillou, ces compagnies offrent des facilités à ses vendeuses de boisson. L’influence des entreprises formelles dépeint sur leur environnement immédiat au point d’y imposer leur cœur de métier aux entreprises informelles.
Installés sur une superficie de 2,5 hectares entre la cité-cadre et l’INSP le long des rails de la SITARAIL, les loueurs de chariots interviennent dans les différents entrepôts de la zone des entrepôts et de surcroit dans la zone sous-douane du port d’Abidjan. Cette intervention dans la zone sous-douane concerne principalement les quais céréaliers et minéraliers qui sont souvent débordés par les opérations de manutention.
On remarque un rapprochement géographique entre sites informels et structures formelles sur la base de la similitude de leurs cœurs de métier. Ce rapprochement se fait selon des rapports verticaux ou horizontaux entre les différentes entités en présence au port d’Abidjan
Ils viennent donc en appoint à ces sociétés formelles qui restent leurs principaux clients. Ils sont régis en association dont les responsables arguent qu’ils n’accepteraient jamais être délocalisés de cet endroit car cela pourrait mettre en mal leur différentes opérations. Ce site n’est pas le lieu d’exercice de leur activité mais simplement leur parking.
Le parking malien est situé au niveau du couloir gauche du carrefour TRIPOSTAL. Il est au cœur des sociétés de transit, de distribution et de manutention, dont les parcs automobiles offrent un nombre impressionnant de véhicules. Ce parc automobile est renforcé par la présence de multiples camions de particuliers stationnés sur le boulevard attendant d’être chargés ou déchargés. C’est ce grand nombre de véhicules en ces lieux qui y attire l’installation des mécaniciens, électriciens et tôliers automobiles depuis l’amont du pont de VRIDI. Par ricochet, la forte concentration de ces garages entraine l’installation des vendeurs de pièces automobiles.
Les acteurs de l’informel ont pour objectif l’optimisation de leur profit, pour se faire, ils s’installent dans les zones où leur utilité est avérée. Cela entraine une similitude de cœur de métier entre ces activités informelles et les activités formelles voisines.
La durabilité ou viabilité de l’activité est aussi une condition du profit, alors ces acteurs vont rechercher les sites les moins enclins au déguerpissement. Au port d’Abidjan ceux-ci sont les sites alloués et les interstices. Cependant, le niveau d’encombrement des sites alloués fait que d’autres installations d’acteurs sont impossibles. Par ailleurs, les quantités de marchandises et d’équipements qu’ils possèdent surpassent les possibilités spatiales qu’offrent les sites alloués. Ceci entraine leur choix préférentiel pour les interstices portuaires.
Discussion
L’implantation des sites d’activités informelles est soit concédée par l’autorité portuaire, soit par les acteurs eux-mêmes, mais dans ce cas elle bénéficie de la tolérance de cette même autorité.
Ainsi des activités portuaires entrainent dans leurs environnements immédiats, des activités et services non-portuaires mais nécessaires à leur fonctionnement : La manutention (acconage) entraine la location des chariots élévateurs et le développement des fabricants de palettes. Le transport entraine le développement des services de maintenance et de réparation de camions. Ces services se localisent au sein des différents parkings sur le domaine portuaire. Les vendeuses de fruits sont situées non loin du quai fruitier. Les vendeuses de boissons sont situées dans le triangle formé par trois grands dépôts et distilleries que sont SODIBRA SICODIS et SOLIBRA. Cela crée une connexité entre le secteur formel et le secteur informel.
Il crée un lien de causalité entre les activités informelles elles-mêmes. Selon le type de sites, les activités informelles entretiennent entre elles, soient des rapports de verticalité soient des rapports d’horizontalité.
La durabilité ou viabilité de l’activité est aussi une condition du profit, alors ces acteurs vont rechercher les sites les moins enclins au déguerpissement. Au port d’Abidjan ceux-ci sont les sites alloués et les interstices. Cependant, le niveau d’encombrement des sites alloués fait que d’autres installations d’acteurs sont impossibles
La verticalité entre les activités est donnée par la causalité qui existe entre elles dont une principale entraine d’autre subsidiaires. Ce tribut se traduit par le conditionnement de leur existence les unes par rapports aux autres.
L’horizontalité traduit le même droit de cité entre les activités informelles sur un même site: il s’agit des rapports qui existent entre par exemple, des restauratrices, des boutiquiers, des cireurs, des gérants de cabine téléphoniques dont la présence ou l’absence des uns ne conditionne pas celles des autres. Il n’existe donc pas de lien de causalité entre elles et l’extinction d’une n’entraine pas la disparition de l’autre.
Si la géographie des sites de l’informel est dictée par les besoins des structures formelles à des fins économiques, la géométrie de cette implantation est manifestement déterminée par des contraintes légales et physiques. Au port d’Abidjan, la contrainte légale se concrétise par l’interdiction de toutes activités informelles dans la zone sous-douane : Cela confère du coup le caractère illégal de ces activités dans cette zone.
Les contraintes physiques concernent les obstacles matériels qui délimitent les interstices, sites préférentiels des acteurs de l’informel au port d’Abidjan. Ces obstacles sont les voiries, les bâtiments, la lagune et autres installations. Les activités informelles occupent les espaces disponibles les plus proches des zones formelles où leurs utilités est avérées.
Il explique par ailleurs la forme des sites : par exemple on a un site à forme linéaire pour les loueurs de chariots du fait de l’espace laissé par les rails et les clôtures des bâtisses et un site triangulaire pour les vendeuses de fruit car leur site est délimité par trois tracés : la voirie, le rivage lagunaire et la clôture de l’école de douane.
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