Le contexte actuel des droits de l’Homme en Afrique Il faut reconnaître que l’Afrique est toujours à la croisée des chemins. En matière de droits de l’Homme, le contexte est très difficile, dans le sens où ces droits vont de pair avec la stabilité dans la prise en compte de tout ce qui relève de l’humain. Malheureusement, que ce soit du nord au sud, de l’est à l’ouest, l’Afrique est toujours en train de connaître des foyers d’instabilité. On ne peut pas parler de promotion des droits humains. En matière de droits humains, le contexte est très difficile, dans le sens où les droits humains vont de pair avec la stabilité On est toujours en quête du respect des droits humains même si les acquis ne sont pas préservés; ce qui est acquis aujourd’hui nous échappe demain. En revanche, globalement, je pense que vu l’engouement de la jeunesse qui prend part au débat public – je pense au «Balai citoyen» au Burkina Faso, à «Y’en a marre» au Sénégal et «Filimbi» en République démocratique du Congo, la jeunesse est en train de s’engager. Il y a des motifs de satisfaction pour les perspectives en Afrique en matière de droits humains. Donc de ce point de vue, je reste quand même optimiste. Les droits primordiaux en Afrique Nous nous focalisons généralement sur les droits civils, les droits politiques, mais pour moi, les plus importants sont les droits socio-économiques. C’est l’accès aux services sociaux de base: l’eau, l’éducation, la santé, l’habitation. Ce sont ces droits qui donnent la dignité à l’être humain. Quand un peuple peut manger à sa faim, s’éduquer et a accès à l’eau, on peut parler des libertés. La grande majorité de la population vit en deçà du seuil de pauvreté et ces droits qui permettent à l’être humain d’être digne et de participer au développement de son pays ne sont pas encore un acquis. Nous nous focalisons généralement sur les droits civils et les droits politiques mais pour moi, les plus importants sont les droits socio-économiques Les problèmes des réfugiés sont traités jusque-là, sous forme de charité. On ne parle pas de charité quand il s’agit des réfugiés, mais on parle de droits. Qu’ils soient des Burkinabés, des Maliens, des Sénégalais, des Mauritaniens, un réfugié a toujours un droit. Nous avons des instruments nationaux, régionaux ou internationaux. On doit pouvoir passer par ces canaux-là, pour gérer les réfugiés et non être dans une logique de charité. Ils ont des droits, nous avons des instruments, il faut les appliquer. Malheureusement, nos États s’engagent mais la mise en œuvre reste à désirer. On a vite fait de ratifier des instruments, cela fait plaisir, mais dans l’application il y a un grand pas à faire.
On a vu que chaque pays avait des problèmes et dans tout le travail de la Commission africaine, il n’est pas facile de savoir où se trouve la priorité. Chaque problème est une priorité. Du côté du Burkina Faso, nous avons beaucoup apprécié l’apport de la Commission quand on avait des soucis avec le pouvoir de Blaise Compaoré. La Commission a été à nos côtés quand nous avons voulu une loi qui puisse protéger les défenseurs des droits humains. Madame la rapporteuse spéciale de la Commission africaine chargée des droits de l’Homme, Maître Reine Alapini, a fait les déplacements au Burkina pour veiller à ce que la loi prenne en compte toutes les préoccupations importantes des défenseurs avant son adoption. La Commission a été également à nos côtés dans le cas du dossier Norbert Zongo et nous a accompagnés jusqu’à ce que le dossier soit jugé au niveau de la Cour africaine et que le Burkina soit condamné. Le combat citoyen ne doit plus se mener singulièrement, nous devons aller ensemble, nous devons aller groupés parce que les défis sont tellement immenses Je pense qu’au niveau des réformes, le Burkina a pu faire d’énormes efforts puisque nous avons la dépénalisation des délits de presse aujourd’hui et récemment, en 2018, le Burkina était le premier pays francophone en matière de liberté d’expression. Je pense que tous seuls, nous ne serions pas arrivés là sans l’appui de la Commission et sans l’appui de la Cour africaine. Il y a des moments, il faut savoir dire merci. Tout n’est pas acquis parce qu’il y a des reculs. Le Burkina vient d’avoir le nouveau code pénal qui réduit la liberté d’expression dans la mesure où dans le contexte du terrorisme, il faut avoir une autorisation avant de publier toutes les informations relatives au terrorisme. Pour nous, c’est un recul. Cependant, le contexte est tel que le gouvernement joue son rôle et la société civile doit jouer le sien également. Le combat citoyen ne doit plus se mener singulièrement, nous devons aller ensemble, nous devons aller groupés parce que les défis sont tellement immenses qu’une seule coalition, qu’un seul pays, ne peut pas y arriver. Il est temps que l’Afrique aille en rang groupé tant au niveau des États qu’au niveau de la société civile. C’est ensemble que nous allons bâtir un monde meilleur.
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Merci pour votre combat, et surtout en ce qui concerne le Burkina, la liberté d’expression est CONFISQUEE. Un travail doit être fait. Le couvre feu, quel mécanisme pour permettre au défenseur des droits humains de constater les violations graves, de fois défoncées par la population ? Ensemble nous pouvons.