Auteurs : Charlotte Gonzales, Julien Dechan
Organisation affiliée : CEIS
Type de publication : Research Paper
Date de publication : Novembre 2015
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Introduction
Selon l’essayiste américain Jeremy Rifkin , « L’Afrique est sur le point d’accéder à une nouvelle ère économique prometteuse. Alors que les enjeux et les obstacles à franchir sont nombreux, les bénéfices liés à la création d’une « Afrique digitale » constituent un potentiel de transformation réel et considérable ». Effectivement, la transformation numérique vers laquelle le continent africain se tourne est signe d’ouverture internationale et d’accroissement économique. Ces dernières années, nous constatons l’apparition d’un certain nombre de nouveaux usages, destinés à une population grandissante.
L’Afrique est un continent très jeune : 200 millions de personnes sont âgées de 15 à 25 ans, lesquelles vivent principalement en milieu urbain. En outre, la classe moyenne africaine se développe puisque d’ici à 2060, elle devrait passer de 335 millions à 1,1 milliard de personnes. Toutes ces évolutions entrainent de facto de nouveaux besoins, ce qui ne peut qu’encourager le développement de nouveaux secteurs d’activités comme celui des télécommunications : le marché d’internet et de la téléphonie mobile a donc un bel avenir devant lui. Les revenus issus de la téléphonie mobile représentent 3,7% du PIB sur le continent africain, soit le triple de ceux des économies développées.
Selon l’Union Internationale des Télécommunications, ces quatre dernières années, la part de la population africaine ayant accès à internet est passée de 10 à 20%. Par ailleurs, le taux d’abonnés mobile est passé de 2 à 20 %.
Cependant, l’accès à ces nouvelles technologies s’accompagne de nouveaux risques. En effet, comme bien souvent, une nouvelle technologie a pour corollaire le développement d’une nouvelle forme de délinquance. Le développement du numérique n’échappe pas à cette règle. Bien que ces attaques soient pour le moment encore ponctuelles et sans impact majeur, leur développement est sérieusement préoccupant.
Une population de plus en plus connectée
Les ménages africains sont encore pour le moment faiblement équipés d’ordinateurs et de connexion internet fixe. Alors que 7,8 % des ménages au Sénégal possèdent un ordinateur, seulement 1,5 % de ceux-ci sont connectés à internet via l’ADSL.
Le marché d’internet et de la téléphonie mobile a donc un bel avenir devant lui. Les revenus issus de la téléphonie mobile représentent 3,7% du PIB sur le continent africain, soit le triple de ceux des économies développées
Mais cela ne signifie pas pour autant que cette population n’a pas accès à l’internet ; le développement des cybercafés contribue largement à pallier ce déficit, comme cela a été le cas en France au moment du démarrage d’Internet, il y a près de 20 ans. Ainsi, selon l’Union Internationale des Télécommunications, en 2014, 21,96% de la population sénégalaise était connectée à internet grâce aux cybercafés mais également grâce au rechargement de crédit internet sur des téléphones mobiles. Les pays les plus connectés à internet sont le Maroc, le Kenya, l’Egypte, le Nigeria et le Sénégal, même si le haut débit est très faiblement développé dans ces pays.
Selon une étude McKinsey, au sein des villes les plus connectées en Afrique (Alger, Casablanca, Dakar, Lagos, Abuja, Cape Town, Johannesbourg, Nairobi, Addis Abeba, Le Caire, Alexandrie), 25% des résidents urbains sont en ligne quotidiennement, 21% d’entre eux passent plus de 10 heures par jour sur internet et 54% ont leur propre appareil leur permettant de se connecter à internet. Enfin, 57% d’entre eux « surfent » régulièrement sur les réseaux sociaux.
Les infrastructures
Pour que le nombre d’internautes croisse et pour faire de l’Afrique un continent connecté au reste du monde, encore faut-il développer les infrastructures, condition sine qua non du comblement de ce retard. Bien avant de se soucier des infrastructures télécoms, il est important de souligner que toutes les régions en Afrique ne sont pas reliées aux réseaux d’électricité.
Ainsi, pour que les infrastructures de télécommunications se développent, il faut en parallèle se pencher sur la question des infrastructures de distribution électrique. Depuis 1992, RASCOM, l’Organisation Régionale Africaine de Communication par Satellite, a pour missions « de fournir, sur une base commerciale, et de mettre à la disposition de toutes les régions des pays africains des moyens efficaces et économiques de télécommunications et de répondre à leurs besoins en matière de radiodiffusion sonore et télévisuelle, afin de favoriser le développement des pays d’Afrique ».
Les pays du littoral africain sont les mieux desservis par la fibre optique. Le développement de backbones8 nationaux de fibres optiques permettra de désenclaver le reste du continent dans ce domaine. Treize pays africains bénéficient du haut débit grâce au développement du câble sous- marin de fibre optique ACE mis en place en 2012 par Alcatel-Lucent. Sept autres pays devraient bénéficier de la fibre optique ces prochaines années. Ce câble d’une longueur de 17 000 kilomètres (de Penmar en Bretagne à Cape Town en Afrique du sud) et d’une capacité de 40Gbits/s permet la numérisation des pays côtiers.
La fracture numérique : le dernier kilomètre
Tous les pays africains ne sont pas reliés aux infrastructures de manière égale. Ainsi, les pays côtiers sont plutôt bien desservis tandis que les pays à l’intérieur du continent restent exclus. Le Maroc, l’Algérie et l’Afrique du Sud sont les pays qui comptent le plus grand nombre d’internautes avec plus de 20% de la population connectée. Néanmoins, en raison des difficultés de couverture de territoires immenses et enclavés, des solutions du « dernier kilomètre » se développent.
Le « dernier kilomètre » désigne « l’ensemble des agents, opérations et équipements associés et mis en œuvre dans les derniers segments de la chaine de distribution finale des biens ou services ». La société Duons est présente sur le continent dans le but d’apporter aux zones enclavées une connexion au réseau internet. En Côte d’Ivoire par exemple, les solutions de Duons permettraient de couvrir 400 localités à moindre coût, notamment avec la mise en place de cabines téléphoniques. Cependant, ces solutions sont assez marginales et reposent beaucoup sur la connexion sans-fil, et plus encore le mobile.
Cependant, éloignement ne signifie pas nécessairement marginalité. Les Technologies de l’Information et de la Communication sont bien là pour permettre à tous une connexion au monde. Au Sénégal, en janvier 2013, l’Agence De l’Informatique de l’Etat (ADIE) a signé un protocole d’accord avec TCIL India pour la construction d’un cyber village à Dakar.
Ce village a notamment pour missions de produire et d’exporter des innovations numériques ainsi que de consolider les infrastructures sénégalaises en matière de télécommunication. Pour cela, le cyber village doit accompagner le développement des technologies numériques, former des professionnels du secteur et favoriser le transfert de technologies.
Tous les pays africains ne sont pas reliés aux infrastructures de manière égale. Ainsi, les pays côtiers sont plutôt bien desservis tandis que les pays à l’intérieur du continent restent exclus. Le Maroc, l’Algérie et l’Afrique du Sud sont les pays qui comptent le plus grand nombre d’internautes avec plus de 20% de la population connectée
L’explosion du secteur mobile
Alors qu’internet peine à se développer sur le continent par manque d’infrastructures, le mobile connaît quant à lui un essor fulgurant. En Afrique sub-saharienne, le taux de pénétration mobile est passé de 2 % de la population en 2000 à 82 % en 2015.
Les pays d’Afrique du Nord et du Sud (Algérie, Maroc et Afrique du Sud) sont ceux qui comptent le plus grand nombre de téléphones cellulaires, avec plus de 40 % de la population équipée. Cependant, contrairement à la connexion internet, les inégalités entre pays sont moins importantes.
Les principaux opérateurs de téléphonie mobile
Une étude de Bearingpoint publiée en 2012 dresse un panorama des principaux opérateurs téléphoniques sur le continent :
- MTN, opérateur sud-africain, présent dans 15 pays, 91 millions d’abonnés ;
- Orange, opérateur français, présent dans 18 pays, 50 millions d’abonnés ;
- Bharti Airtel, opérateur indien, présent dans une quinzaine de pays, 42 millions d’abonnés. Les challengers sont des opérateurs émergents comme Tigo, Vodafone et Etissalat. En effet, selon un rapport de l’OCDE, de plus en plus d’investissements proviennent de pays du Sud (Koweït frique du Sud, Egypte, Inde et Chine), sous forme de prêts ou de fourniture de matériels comme le montre la carte ci-dessous qui décrit la provenance des flux d’investissements et leur destination :
- En Afrique du nord, les investissements proviennent surtout de la Banque mondiale et de Fonds souverains du Golfe ;
- L’Afrique australe a reçu en 2010 un nombre important d’investissements pour l’organisation de la Coupe du monde de football ;
- L’Afrique subsaharienne reçoit des investissements principalement en provenance de grands opérateurs transnationaux et panafricains.
Les NTIC au service de l’innovation
Les incubateurs
L’essor des télécommunications en Afrique favorise l’innovation. Ainsi, un nombre important de laboratoires et d’incubateurs dessine les contours d’une Afrique innovante. Les zones les plus dynamiques dans ce domaine sont l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. Selon la Fondation Omidyar Network, « l’apparition de nouvelles start-up en Afrique est le premier facteur de développement. » En effet, les incubateurs en Afrique sont de véritables vecteurs d’innovations et de développement.
Les formations universitaires
Compte tenu de cette ambition novatrice, le paysage universitaire des pays moteurs se transforme afin d’accompagner les jeunes talents à devenir de nouveaux entrepreneurs. Au Ghana, la MEST (Meltwater School of Technology) a pour vocation, selon son fondateur norvégien Jorn Lyseggen, de « former des entrepreneurs ghanéens aux métiers d’entrepreneurs numériques sur deux ans.
Au programme, entraînement à la programmation informatique et au business : marketing, business plans, pitching, etc ». Depuis 2008, cet incubateur aurait contribué à la création d’une dizaine de start up africaines. Au Congo, le projet Yekolab, fondé par Max Bontel, a pour objectif de former les jeunes dans le domaine des technologies de l’information et de la communication. Cette structure se décline en trois volets :
- Formation ;
- Incubation, Y-incubateur ;
- Laboratoire, Y-laboratoire.
Au Sénégal, en 2015, KTM Advance a ouvert une filiale. Un investissement de 12 milliards d’euros qui a permis la création de 150 emplois directs. Selon Yves Dambach, Président de KTM Advance, l’objectif est d’ « améliorer l’adéquation emploi-formation et la création d’entreprises ». « La plateforme contribuera aussi à faire de la jeunesse africaine une opportunité et le moteur d’une croissance durable et partagée sur le continent ».
Cependant, au Sénégal, aucune formation en cybersécurité n’est dispensée. La sécurité informatique n’est pas encore ancrée dans les mentalités et, par conséquent, les règles de base de l’hygiène cybernétique ne sont ni enseignées ni appliquées. A titre d’exemple, l’université Cheick Anta Diop de Dakar propose un master en cryptologie qu’il serait intéressant de faire évoluer en master sur la cybersécurité.
Au Burkina Faso, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), en partenariat avec Telecom Paris Tech, a initié des formations diplômantes en régulation des communications électronique.
Les investissements
En 2013-2014, les capitaux investis dans les start-ups africaines sont passés de 12 millions à 26,9 millions de dollars. Comme nous l’avons vu, l’essor de l’utilisation du mobile a été un accélérateur pour l’ensemble de l’écosystème innovant et a contribué au développement de nouvelles solutions adaptées aux besoins du continent. Selon VC4 Africa, « les investissements dans les start-ups africaines auraient plus que doublé en 2014, portés par la levée record de l’e-commerçant nigérian Konga (25 millions de dollars) », ce qui laisse présager que de nouveaux investissements, encore plus importants, sont à prévoir dans les années à venir.
Des services de paiement mobile très développés
En Afrique, le taux de bancarisation est extremement faible. Cela est dû, entre autres, à l’insuffisance et l’irrégularité des revenus, mais aussi à l’inaccessibilité des services bancaires. En 2011, 80 % des adultes d’Afrique subsaharienne ne possédaient pas de compte bancaire. Le mobile sert ici à pallier l’éloignement des individus du système bancaire traditionnel.
Selon le Rapport Global Findex d’IBM, 12 % des adultes en Afrique subsaharienne disposent d’un compte bancaire par téléphone mobile (contre 2 % en moyenne au niveau mondial). Selon McKinsey, grâce au mobile banking, plus de 60 % des Africains pourraient avoir accès aux services bancaires d’ici 2025, et 90 % utiliseraient leur mobile pour réaliser des transactions bancaires quotidiennes.
La bancarisation mobile a permis d’augmenter la proportion d’Africains détenant un compte bancaire. Ainsi, le taux global de bancarisation qui était de 24 % en 2011 a atteint 34 % en 2014. L’Afrique est la zone où la part de comptes mobiles parmi l’ensemble des solutions bancaires est la plus importante, puisqu’elle représente près de 20 % de l’ensemble des moyens financiers. A titre de comparaison, en Europe, la part de solutions financières mobiles est inférieure à 5 %.
De nouvelles pratiques de consommation : le e-commerce
Ainsi, le développement de services de transferts d’argent par mobile a permis celui de nouvelles pratiques de consommation, comme le e-commerce, qui offrent la possibilité à de nombreux consommateurs éloignés des circuits de consommation d’y être insérés. En outre, la classe moyenne africaine devrait passer de 335 millions à 1,1 milliard de personnes, d’ici 2060, soit 42 % du continent africain. Le e-commerce en Afrique est amené à croitre considérablement.
D’après l’agence Ecofin, « plusieurs facteurs expliquent cet engouement en Afrique : insuffisance d’infrastructures commerciales de qualité, augmentation croissante des personnes connectées à Internet, création d’une nouvelle classe moyenne jeune et avide de consommation, capacité de la population à rapidement assimiler les innovations technologiques. ».
Cependant, selon une étude du Cabinet Deloitte, l’un des freins majeurs au e-commerce est le faible maillage postal sur le continent. Ainsi, le concept « Click and Collect » permettra aux Africains de faire des achats sur internet et de les récupérer dans des points de vente partenaires.
En 2011, 80 % des adultes d’Afrique subsaharienne ne possédaient pas de compte bancaire. Le mobile sert ici à pallier l’éloignement des individus du système bancaire traditionnel. Selon le Rapport Global Findex d’IBM, 12 % des adultes en Afrique subsaharienne disposent d’un compte bancaire par téléphone mobile (contre 2 % en moyenne au niveau mondial).
Le développement du e-commerce permet d’offrir un plus large choix aux consommateurs, une meilleure qualité, à des prix plus attractifs. D’ici à 2025, le e-commerce représenterait en Afrique 10 % des ventes, soit 75 milliards de dollars. Pour l’instant, seulement 15 % des utilisateurs d’internet font des achats sur internet sur des plateformes telles qu’ Afrimarket, Jumia ou Konga.
Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication créatrices de richesse
D’après McKinsey, dans son rapport Lions go to digital, la contribution d’internet au PIB africain est de 1,1 % et de 3,3 % au Sénégal. Internet pourrait contribuer à hauteur de 300 milliards de dollars au PIB africain d’ici à 2025, soit 5 à 6 % du PIB africain, ce qui correspond à la même contribution que dans des pays comme le Royaume Uni, la Suède ou Taiwan. Paradoxalement, seulement 24 % de la population africaine a accès à l’électricité.
Dans ce contexte, les Technologies de l’Information et de la Communication « peuvent apporter leur contribution au même titre que des utilities comme l’eau potable, l’électricité ou les transports. Les retombées des technologies sont visibles directement à travers les milliers d’emplois créés et les recettes réalisées et, indirectement, dans l’apparition de nouveaux biens et services qui soutiennent l’activité des autres secteurs ».
Le développement du e-commerce permet d’offrir un plus large choix aux consommateurs, une meilleure qualité, à des prix plus attractifs. D’ici à 2025, le e-commerce représenterait en Afrique 10 % des ventes, soit 75 milliards de dollars. Pour l’instant, seulement 15 % des utilisateurs d’internet font des achats sur internet sur des plateformes telles qu’ Afrimarket, Jumia ou Konga
Outre l’amélioration de la qualité de vie à travers les différents usages qui peuvent être faits des Technologies de l’Information et de la Communication, les télécommunications sont un secteur dynamique, créateur d’emplois. Au Nigeria, le secteur de la téléphonie mobile est le principal employeur. Il a créé près de 400 000 nouveaux emplois selon l’Union Internationale des Télécommunications.
En Côte d’Ivoire, les Technologies de l’Information et de la Communication auraient permis la création de 520 000 emplois directs. L’objectif pour 2020 est que ce secteur d’activité représente 15 % du PIB. D’après Daniel Kablan Duncan, Premier ministre ivoirien, la Côte d’Ivoire a ainsi pour « ambition de se hisser au rang des nations tournées vers la maitrise des techniques et des technologies ».
Au Sénégal, l’Autorité de Régulation des Télécommunications et des Postes (ARTP) a mis en œuvre un Plan Stratégique 2015-2017 au travers duquel elle souhaite « contribuer de manière significative au développement du pays ».
Des initiatives de e-gouvernement
Les technologies numériques premettent aux citoyens et aux gouvernements de se rapprocher. Aujourd’hui, selon McKinsey, seulement 12 % des gouvernements africains ont une présence sur internet. Le cabinet de conseil estime que d’ici 2025, la moitié des départements gouvernementaux africains seront présents sur la toile.
Le Nigeria est tout particulièrement en avance sur le vote électronique. En effet, différentes plateformes de vote sont utilisées au Nigeria à l’occasion des élections :
- La plateforme Nigeria Elections Hub diffuse des actualités sur les élections ;
- Pledge to vote est une plateforme sociale visant à encourager les Nigerians à participer au processus électoral ;
- ReVoda est un système de contrôle qui permet de signaler ce qui se passe dans les bureaux de vote. En outre, le service de l’immigration a développé une plateforme permettant d’effectuer des demandes de passeport sur internet.
En outre, le Gabon a récemment lancé un appel d’offres pour la création d’une carte nationale d’identité à puce. Au Burkina Faso, le projet d’un cloud gouvernemental est en cours de lancement. D’après Alfred N. Sawadogo, Directeur général de l’Agence nationale de Promotion des Technologies de l’Information et de la Communication (ANPTIC), le pays serait ainsi le premier « en Afrique francophone, sinon en Afrique de l’Ouest, à disposer d’un Cloud aux normes internationales ». Ce G-Cloud permettrait d’améliorer de nombreux services d’Etat comme l’e-éducation, l’e-santé ou l’e-gouvernement.
L’Afrique : un far west cybernétique ?
L’Afrique est le continent qui connait le plus de retard en matière de réglementation. L’Afrique de l’Ouest démontre cependant son dynamisme et sa volonté d’intégrer la région dans un cadre réglementaire international. Selon le Rapport 2015 sur l’économie de l’information de la CNUCED, 50 % des pays de la région ont ainsi une législation sur les transactions électroniques, 56,3 % ont légiféré sur la protection des consommateurs et 62,5 % sur la protection de la vie privée et des données. Cependant, la cybercriminalité est encore peu encadrée en Afrique de l’Ouest puisque seulement 37,5 % des pays de la région ont une législation sur la cybercriminalité.
Mouhamadou Lô, Président de la Commission des Données Personnelles du Sénégal, invite le secteur privé à « veiller à ce que le traitement des données à caractère personnel soit appliqué conformément aux dispositions légales ». Selon lui, « la protection des données personnelles attire les investisseurs. Par conséquent, il s’avère urgent d’élaborer un cadre réglementaire et juridique sur la protection des données personnelles ». Un cadre réglementaire complet offre une meilleure sécurité et des perspectives économiques plus encourageantes pour les investisseurs souhaitant s’installer en Afrique.
Les législations se mettent en place
L’Union Internationale des Télécommunications (UIT) est l’institution des Nations Unies dédiée aux Technologies de l’Information et de la Communication. Sa mission est de « connecter tous les habitants de la planète » en attribuant des fréquences radioélectriques et des orbites satellites. Son rôle est également d’élaborer des normes techniques afin d’assurer une interconnexion de l’ensemble des réseaux.
L’UIT a notamment aidé l’Union Africaine dans l’instauration d’une convention sur la cybersécurité. Ce projet nommé HIPSSA (Appui à l’Harmonisation des Politiques Sur les TIC en Afrique Subsaharienne) a contribué au rapprochement législatif des pays de la région.
L’UIT aide également au développement de CERT (Computer Emergency Response Team) dans les pays africains. Elle apporte un support technique et matériel. L’AfricaCERT, un organisme indépendant, apporte aussi son expertise dans la création de CERT mais souffre d’un manque de financements. Aujourd’hui, 15 pays africains sur les 54 du continent disposent d’un CERT opérationnel.
Les pays d’Afrique de l’Ouest disposant d’un CERT sont : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigéria. En outre, la majorité des pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’ivoire, Ghana, Nigéria, Togo, Sénégal) dispose désormais d’une législation en matière de cybercriminalité. Les initiatives sont, jusqu’à présent, plutôt nationales alors que la Commission des Etats d’Afrique de l’Ouest encourage ses membres à renforcer la coopération en matière de cybersécurité pour réduire les coûts et les risques.
Le chapitre 3 de la Convention est consacré à la promotion de la cybersécurité et à la lutte contre la cybercriminalité. Ainsi, « chaque Etat partie s’engage en collaboration avec les parties prenantes, à se doter d’une politique nationale de cybersécurité qui reconnaisse l’importance de l’infrastructure essentielle de l’information pour la nation, qui identifie les risques auxquels elle est confrontée en utilisant une approche tous risques et qui définit dans les grandes lignes la façon dont les objectifs seront mis en œuvre ».
Pour l’Union Africaine, il est nécessaire de développer une « culture de la sécurité », à la fois « dans les entreprises et au sein de la société civile ». Il faut pour cela lancer « un programme de sensibilisation nationale détaillé et complet pour les internautes, les petites entreprises, les écoles et les enfants ».
Les data centers, clé de l’indépendance numérique
Pour devenir indépendante dans l’accès aux nouvelles technologies, l’Afrique doit notamment se doter d’un certain nombre de data centers. Le continent compte aujourd’hui près de 34 data centers. Or il en faudrait beaucoup plus pour répondre au besoin grandissant de stockage de données. De plus, la plupart de ces installations se trouvent en Afrique du Sud.
En juin 2014 a été inauguré le premier data center d’Afrique de l’Ouest en Côte d’Ivoire. Fruit d’un partenariat entre MTN Côte d’Ivoire, Flexenclosure et leadcom/STA, son partenaire local, ce datacenter de 336m2 est une infrastructure moderne, évolutive et peu gourmande en énergie.
Pour l’Union Africaine, il est nécessaire de développer une « culture de la sécurité », à la fois « dans les entreprises et au sein de la société civile ». Il faut pour cela lancer « un programme de sensibilisation nationale détaillé et complet pour les internautes, les petites entreprises, les écoles et les enfants »
Plusieurs millions d’euros d’investissement sont nécessaires pour la construction d’un data center. De plus, un certain nombre de contraintes sont à prendre en compte, qu’elles soient environnementales (zone sismique, désertique) ou d’infrastructures (alimentation en électricité). Dans ce cadre, des partenariats public/privé sont un très bon moyen d’attirer des investisseurs qui obtiennent par ce biais un soutien étatique.
L’Etat a un rôle crucial à jouer dans l’acquisition sur son territoire de data centers. Au-delà de créer des emplois, les data centers, souvent intégrés dans des projets de technopoles, sont un élément majeur de modernisation du territoire.
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