Auteur : Isabelle Marchais, Pascal Lamy
Site de publication : Institut Jacques Delors
Type de publication : Article
Date de publication : Février 2022
L’Afrique, un continent encore faiblement vacciné
En Afrique, seuls 11% des adultes sont entièrement vaccinés (contre 82% dans l’UE) et 85 % de la population n’a encore rien reçu.
Ces chiffres cachent d’importantes disparités, avec quelques États qui affichent des taux de vaccination avoisinant ou dépassant 60%, comme le Maroc ou la Tunisie, et des pays qui n’ont pratiquement pas commencé à vacciner, comme la République démocratique du Congo ou le Tchad.
La situation est en train de s’améliorer. Le taux de vaccination a plus que triplé en l’espace de trois mois et l’approvisionnement a considérablement augmenté. Six millions de personnes sont désormais vaccinées en moyenne chaque semaine ; ce chiffre devra être multiplié par six pour atteindre l’objectif convenu au niveau mondial.
Les Européens en première ligne pour la fourniture de vaccins
Accusée d’avoir accumulé un trop grand nombre de doses aux dépens des pays à bas revenu, l’Union européenne peut se targuer de jouer désormais un rôle central dans la lutte contre la pandémie de Covid-19. Elle a produit à ce jour plus de 3,2 milliards de doses de vaccins et en a exporté 1,8 milliard dans le monde entier, dont près de 280 mil- lions en Afrique.
Mais cet afflux de vaccins soulève de nouveaux problèmes. Certaines doses offertes par les pays occidentaux sont détruites ou ne trouvent pas preneur, faute d’une organisation adaptée, de ressources humaines suffisamment formées et nombreuses, et d’une prise en compte idoine des capacités d’absorption des bénéficiaires.
La situation devrait cependant s’améliorer car, depuis janvier 2022, COVAX n’expédie des vaccins que sur demande, pour permettre aux pays de recevoir le bon volume au bon moment.
Un nouvel élan en faveur d’une production locale de vaccins
Les dirigeants africains ont aussi pris conscience avec la pandémie qu’il y avait un vrai déficit de sécurité et de souveraineté sanitaires sur le continent.
L’Afrique représente près de 25 % de la demande mondiale de vaccins mais dépend à plus de 99% du reste du monde.
La Commission européenne a saisi l’importance du sujet ; parallèlement aux travaux menés sur le Covid-19, elle souhaite appuyer dès maintenant la mise en place d’une autonomie de la production vaccinale et pharmaceutique sur le continent africain.
Rassemblés dans Team Europe, l’UE et ses États membres ont lancé au printemps 2021 une initiative à hauteur d’1 milliard d’euros concernant la production de vaccins, de médicaments et de technologies de la santé.
L’Afrique représente près de 25 % de la demande mondiale de vaccins mais dépend à plus de 99% du reste du monde
La toute nouvelle Agence africaine du médicament (AMA) pourra en outre compter sur l’expérience de l’Agence européenne des médicaments et sur l’aide financière de l’UE. Dans un premier temps, l’UE soutiendra des centres de production en Afrique du Sud, au Sénégal, au Rwanda et au Ghana.
Des propositions alternatives à la levée des brevets
La construction de capacités de production durables, assortie de transferts de technologie et de main d’œuvre, peut apparaître comme une alternative à la levée des brevets réclamée par de nombreux pays, ONG et acteurs économiques.
L’idée est a contrario critiquée par l’Union européenne et plusieurs pays dont le Canada, le Royaume-Uni et la Suisse, qui voient dans les brevets une juste rémunération de l’innovation et soulignent que la production de vaccins dépend de nombreux autres éléments, comme le savoir-faire et l’accès aux composants actifs.
L’Union européenne a soumis à l’OMC une proposition alternative visant à simplifier le mécanisme complexe de licence obligatoire qui permet en temps de crise sanitaire de lever le brevet sur un produit spécifique et dans un délai circonscrit.
Améliorer le déploiement de vaccins
Le problème pour l’Afrique est par ailleurs moins lié aujourd’hui à la disponibilité des doses et de traitements qu’à la mise en place de capacités suffisantes pour les recevoir et les distribuer convenablement. À cela s’ajoutent des barrières socio-économiques qui peuvent expliquer ce qu’il est convenu d’appeler certaines formes d’« hésitation vaccinale ».
Augmenter le taux de vaccination de la population africaine suppose donc de travailler sur la logistique.
La capacité du continent à gérer les cas de Covid-19 commence à s’améliorer lentement, avec une disponibilité accrue de personnel de santé formé, d’oxygène et d’autres fournitures médicales.
Des campagnes d’information, ciblées, adaptées aux populations locales, doivent en outre être menées pour lutter contre la réticence vaccinale.
Les Européens doivent donc continuer à soutenir, via des actions structurelles, les efforts africains en matière de santé.
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