Fatoumata Bintou Rassoul Ka
Le dernier rapport du Programme commun de surveillance de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) publié le 29 août 2022 atteste que « l’hygiène de base fait défaut dans la moitié des établissements de santé dans le monde».
Si ce rapport s’adresse aux établissements de santé dans le monde en général, force est de souligner qu’en Afrique subsaharienne, seules 37 infrastructures (rapport OMS cité ci-dessus) de santé disposent d’eau potable et de savon pour une hygiène des mains acceptable. Cela n’est pas surprenant compte tenu du fait que le dysfonctionnement des systèmes de santé notamment le manque d’hygiène de base représente un réel marqueur de pauvreté. D’ailleurs, les travaux de l’OMS sur l’indice de la santé montrent qu’il y a un lien positif entre résultats de santé et niveau de revenus du pays.
Dans ce même rapport, l’une des conséquences désastreuses de cet état de fait est l’incontestable hausse des risques d’infection. Ceux-ci, avec les risques médicamenteux et les risques liés aux pratiques, sont les trois grandes catégories de risques dans le domaine de la santé. Dans ce cas, on parle d’infection nosocomiale ou hospitalière qui peut être définie comme une « infection acquise à l’hôpital par un patient admis pour une raison autre que cette infection ». Cela suppose que l’infection n’était ni déjà présente ni en incubation dans l’organisme du patient au moment des soins.
Ces infections sont favorisées par l’hygiène des mains défectueuse, la désinfection insuffisante, l’asepsie insuffisante qui prévient l’introduction de microbes dans l’organisme, la stérilisation des espaces et du matériel inefficace et une antibiothérapie aveugle (traitement par les antibiotiques au bout duquel les bactéries deviennent résistantes à un ou plusieurs antibiotiques).
Si l’hygiène de base fait défaut et est à l’origine de plusieurs infections chez les patients, il va sans dire que la qualité des soins délivrés n’est pas au rendez-vous. On parle de soins de qualité en prenant en compte l’expérience du client dans les établissements de santé, l’efficacité des soins et surtout la sécurité pendant le processus de soins.
L’occurrence d’infections est très liée au non-respect ou manque de connaissances du protocole de soins à adopter. Ce dernier est défini comme « le descriptif des techniques à appliquer ou des consignes à observer dans certaines situations de soins ou pour l’administration d’un soin ». En plus de garantir la continuité des soins, le protocole de soins permet de limiter les infections et de renforcer la qualité et la sécurité des interventions médicales.
De la désinfection des lieux et du matériel au lavage des mains, il y a des changements réels à opérer à différentes échelles pour rétablir l’hygiène de base dans les établissements de santé et ainsi, concourir à l’atteinte de l’Objectif de Développement Durable 3 « permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge ».
La première solution comme préconisée par le rapport Mataki, document de référence du think tank citoyen WATHI sur l’amélioration des systèmes de santé, est qu’il faut accroître l’investissement dans le secteur de la santé pour atteindre l’objectif de 15% du budget national fixé par la déclaration d’Abuja (2001). Ce financement de la santé pourrait servir à la construction de nouvelles infrastructures ou rénovation des infrastructures existantes en assurant l’accès à l’eau potable et la mise à disposition de produits de nettoyage et de désinfection.
Cet investissement permettrait également le recrutement de ressources humaines qualifiées, chargées de garder les espaces de soins propres et aseptiques. Enfin, il est important de revoir la gouvernance de la santé. Les enjeux actuels des systèmes de santé imposent que la manière de gérer change. Il faut nécessairement un système basé sur la transparence et la reddition de comptes par les différents responsables. Pour ce faire, il faut la création d’indicateurs SMART (spécifique, mesurable, atteignable, réalisable et temporellement défini).
Ces derniers assureront un meilleur suivi des investissements et de la performance dans le secteur. Pour que cela contribue à la marche vers l’amélioration des systèmes de santé, ces indicateurs devraient faire l’objet de publication pour une plus grande implication de tous les acteurs.
Fatoumata Bintou Rassoul Ka, Consultante au Think Tank WATHI