Auteur : Amel Bouzabata
Organisation affiliée : Sci Dev Net
Type de publication : Article
Date de publication : 1er avril 2020
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Les croyances ont joué un rôle dans toutes les épidémies et à toutes les époques. Partout dans le monde, on assiste à un attachement profond aux traditions populaires pour se protéger contre la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) : des amulettes au Mexique, de l’ail bouilli dans l’eau au Maghreb, du pouvoir magique de quelques ingrédients antiviraux et antigrippaux dans la région de Ghardaïa en Algérie : thym, verveine, basilic, miel, huile d’olive, gingembre frais, armoise et cannelle. A la recherche de recettes traditionnelles, beaucoup croient dans le pouvoir miraculeux des plantes, renforçant leur immunité pour se protéger de la Covid-19.
La grande popularité de toutes ces pratiques, a poussé l’OMS à publier en ligne des conseils pour en finir avec toutes les idées fausses perçues comme moyens de guérison de la Covid-19.
Nous citons quelques exemples de conseils : manger de l’ail peut-il aider à prévenir l’infection par le nouveau coronavirus ? Selon l’OMS, l’ail est un aliment sain qui peut avoir certaines propriétés antimicrobiennes. Cependant, rien ne prouve que sa consommation protège contre le nouveau coronavirus.
Une autre fakenews démentie par l’OMS : l’huile de sésame empêche le coronavirus de pénétrer dans l’organisme. A ce jour, aucune preuve scientifique ne valide les propriétés antivirales de l’huile de sésame vis-à-vis de l’agent infectieux SARS-Cov-2.
Paradoxalement, en médecine occidentale, la chloroquine (molécule connue comme un antipaludique, et actuellement utilisée contre des maladies auto-immunes telles que le lupus et des maladies rhumatoïdes) a été proposée comme traitement contre la Covid-19. Les premiers résultats ont été publiés dans la revue de BioScience Trends, à partir de 100 patients qui ont montré une efficacité apparente et une innocuité acceptable pour le phosphate de chloroquine contre la pneumonie associée à la Covid-19.
Propriétés médicinales
L’histoire des antipaludéens a commencé avec la découverte de la quinine, qui est le composé actif de l’écorce de quinquina, dont les propriétés médicinales étaient connues depuis longtemps chez les indigènes d’Amérique du Sud dans les régions tropicales des Andes, et qui était utilisée contre les frissons et la fièvre. Les conquérants espagnols l’ont introduite en Europe dans les années 1600. La quinine a été isolée en 1820, par Caventou et Pelletier de l’écorce du quinquina Cinchona officinalis L.
Actuellement, en raison de l’urgence sanitaire, la chloroquine ou l’hydroxychloroquine ont été autorisées dans plusieurs pays en Afrique, ainsi que la combinaison chloroquine-azithromycine ou l’association Iopinavir/Ritopinavir pour le traitement des patients atteints par la Covid-19. L’efficacité de ces antiviraux contre la Covid-19 a été démontrée aussi bien in vitro qu’in vivo.
Selon l’OMS, l’ail est un aliment sain qui peut avoir certaines propriétés antimicrobiennes. Cependant, rien ne prouve que sa consommation protège contre le nouveau coronavirus
En parallèle, le Burkina Faso coopère avec le Bénin voisin, qui a lui aussi autorisé l’usage de la chloroquine à des fins thérapeutiques. Les deux pays conduisent un essai clinique international dénommé Api-Covid-19. Cette étude est coordonnée par une équipe de l’Institut de recherche en sciences de la santé (IRSS), qui vise à évaluer l’efficacité clinique et virologique d’un médicament à base de plantes nommé Apivirine chez les patients atteints de Covid-19.
Covid-19 et médecine traditionnelle : S’agit-il d’un problème d’immunité?
Les médecines douces sont considérées comme des méthodes efficaces pour enrayer un problème infectieux, diminuer son intensité, raccourcir son évolution, voire éviter ses récurrences. L’efficacité des médecines douces tient essentiellement au choix des produits, qui permettent d’optimiser le fonctionnement du système immunitaire et renforcer sa réactivité .
L’immuno-stimulation est présentée dans le domaine des aliments et des compléments alimentaires, comme une augmentation de la capacité à résister à une infection par exemple virale, ou bactérienne en période hivernale, par une augmentation de l’efficacité ou de l’ampleur de la réponse de l’organisme.
L’ail : Les propriétés antimicrobiennes de plusieurs espèces médicinales contre les infections respiratoires ont été démontrées. Une étude publiée en 2009 dans Iranian Journal of Virology, a montré que l’extrait d’ail inhibait in vitro la prolifération ainsi que la pénétration cellulaire du virus de l’influenzae (H1N1).
Le gingembre : Le potentiel protecteur du gingembre frais dans l’inhibition du virus respiratoire syncytial humain (VRS ou HRSV) a été décrit par le Journal of Ethnopharmacology. Les HRSV sont la cause la plus fréquente des infections respiratoires des jeunes enfants. La prescription de 300 μg/mL du gingembre frais stimulait les cellules respiratoires à sécréter une protéine antivirale appelée interféron beta.
L’oligothérapie : Les apports de certains oligoéléments sont également importants pour la réactivité du système immunitaire. Exemple : le cuivre, et le zinc. Les apports se font habituellement par une alimentation variée et de qualité. Les médicaments sont administrés lorsqu’une carence existe. A titre d’exemple, au Maghreb, la consommation d’un mélange de céréales torréfiés, de légumineuses, et assaisonnée avec des épices (la marjolaine, la coriandre, l’anis et le fenouil), ainsi que des aromates tonifiantes, astringentes aux propriétés antiseptiques, est très populaire. Elle est connue sous le nom de Rouina en Algérie, et de Bssissa en Tunisie, riche en magnésium, en zinc et en calcium.
L’huile essentielle d’eucalyptus : L’eucalyptus est une plante originaire d’Australie utilisée depuis toujours par les aborigènes pour lutter contre les infections et la fièvre. Il est introduit dans tout le bassin méditerranéen pour assécher les zones marécageuses. Les anciens faisaient bruler ses feuilles pour désinfecter les lieux et prévenir l’épidémie. L’huile essentielle d’eucalyptus riche en eucalyptol (80-85%), très utilisée contre les problèmes respiratoires, aseptise les voies pulmonaires, et fluidifie des mucosités pulmonaires. Elle est utilisée pour les frictions, les inhalations, les fumigations et les diffusions dans l’atmosphère. Les propriétés anti-inflammatoires et anti-infectieuses de l’huile essentielle d’eucalyptus, ainsi que de l’eucalyptol ont été confirmées.
Médecine traditionnelle chinoise
Cependant, malgré le succès de toutes ces thérapies comme moyens préventif et curatif des maladies infectieuses, aucune recherche scientifique n’a prouvé leur efficacité dans le traitement de la Covid-19.
En dernier point, mais pas le moindre, on ne saurait oublier la place de la médecine traditionnelle chinoise (MTC) dans la bataille contre l’épidémie de nouveau coronavirus. Selon la tradition chinoise, le système immunitaire du patient reste le point crucial à analyser dans la médecine chinoise traditionnelle.
Dans ce cadre, un programme de prévention de la Covid-19 a été lancé dans 23 provinces de Chine. Une étude publiée dans le Chinese Journal of Integrative Medicine a recommandé la racine d’astragale (Radix astragali), la racine de réglisse (Radix glycyrrhizae), la racine de silère (Radix saposhnikoviae), le rhizome d’actractyle (Rhizoma Atractlylodis macrocephalae), le rhizome de chèvrefeuille (Lonicerae japonicae Flos) et le fruit de forsythia (Fructus forsythia) à titre préventif contre la Covid-19.
Toutefois, en dépit de cet enthousiasme, la communauté scientifique reste sceptique, vu l’absence de rigueur dans les essais cliniques. L’assurance de l’efficacité et de l’innocuité d’un remède traditionnel est nécessaire pour la sécurité des patients traités.
Ainsi, beaucoup reste à faire. Tout comme la découverte de l’artémisinine, substance active isolée d’Artemisia annua L., connue en herboristerie chinoise depuis plus de 2000 ans pour ses propriétés antipaludiques, il faudra beaucoup de persévérance mais aussi de la chance, pour que la COVID-19 ait ses médicaments.
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