Auteur : Agence Française de Développement
Type de document : Article
Site de publication : afd.fr
Date de publication : Mars 2021
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Au printemps 2020, face au risque de pandémie, le Niger ferme ses écoles. Dans un pays où le système éducatif est déjà en proie à de nombreuses difficultés, la mobilisation est rapide : avec l’appui de l’Agence française de développement (AFD), de l’Unicef et du Partenariat mondial pour l’éducation, les autorités lancent un plan de soutien au secteur. Premiers retours sur cet ambitieux programme partenarial.
Au Niger, quand toutes les écoles ont fermé pour limiter la propagation du coronavirus au printemps 2020, 3,7 millions d’élèves se sont retrouvés sans accès à l’éducation. Or, « l’accès à Internet n’est pas généralisé dans les foyers, souligne Audrey Martinenq Duplessis, responsable d’équipe projet Éducation et Formation à l’AFD. Les enfants ne possèdent pas de manuels pour travailler à domicile et les parents n’ont pas forcément le niveau d’instruction nécessaire pour les accompagner ».
Les services connexes ont également été suspendus, notamment la restauration scolaire qui représente pour de nombreux enfants le seul repas équilibré de la journée. Le plus gros risque, dans une telle situation, reste que les enfants se déscolarisent alors que le système éducatif est déjà fragile : « 45 % des enfants ne vont pas à l’école. Neuf enfants sur dix sortant du CM1 n’ont pas les connaissances de base en lecture et mathématiques », détaille ainsi Julie Maline, chargée de mission Éducation à l’AFD de Niamey.
Entre approche humanitaire et aide au développement
Rapidement, les autorités nigériennes élaborent un plan de soutien au système éducatif : le Partenariat mondial pour l’éducation (PAM) débloque 11 millions d’euros, tandis que l’AFD et l’Unicef sont mandatés pour mettre en œuvre ce financement dont une partie transite par le Fonds commun sectoriel de l’éducation (FCSE). D’un montant d’environ 132 millions de dollars rassemblés par la Coopération suisse, la Coopération luxembourgeoise, l’Unicef et l’AFD, ce fonds a pour objectif de faire effet de levier pour la structuration de l’éducation au Niger.
L’objectif de ce programme, dont le déploiement s’étale sur 18 mois (juillet 2020 à décembre 2021), se situe « au carrefour de l’humanitaire et du développement », explique Julie Maline. En s’appuyant notamment sur les capacités logistiques de l’Unicef, il s’agit de mettre en place des actions d’urgence afin d’éviter au maximum la déscolarisation définitive des élèves les plus fragiles. Mais, à moyen terme, le but est aussi de renforcer la résilience du système éducatif afin de lui permettre de mieux résister aux crises, nombreuses, qui agitent le pays : crises sécuritaires, épidémiques (paludisme, choléra, méningite) et climatiques, telles les inondations d’août et de septembre 2020.
Des résultats concrets
« Cette approche permet d’engager un dialogue de haut niveau avec les autorités nigériennes sur trois axes : la réduction des inégalités – entre zones urbaines et rurales et entre filles et garçons – dans l’accès à l’éducation ; l’amélioration des apprentissages en particulier en lecture, écriture et calcul ; et enfin l’efficacité de la gouvernance du système éducatif », analyse Audrey Martinenq Duplessis. Le financement de 11 millions d’euros apparaissant limité au regard de tels enjeux, il a fallu prioriser les actions : elles ont donc ciblé d’abord les élèves présentant les plus forts risques de déscolarisation, notamment ceux vivant en milieu rural, ainsi que les filles et les élèves des premières années du primaire.
Continuité éducative et lutte contre la déscolarisation
Ce plan s’est concrétisé par la distribution de milliers de manuels scolaires et de livrets d’exercice aux élèves, sans oublier l’impression de supports pédagogiques. « Nous avons réussi à distribuer des supports de mathématiques et de français à tous les élèves de CP. En classe de 6e et 5e, les collégiens disposent aujourd’hui d’un manuel pour deux élèves contre un pour cinq ou sept auparavant », détaille Julie Maline.
Quant aux enseignants, ils se sont vu allouer des moyens spécifiques : grâce à la mise à disposition de crédits téléphoniques, ils ont pu suivre à distance leurs élèves. Autre levier pour maintenir la relation pédagogique, la diffusion de cours par la radio. Testée jusqu’ici dans certaines régions, cette approche innovante sera déployée à plus large échelle en 2021. L’Unicef va ainsi démarrer prochainement la distribution de 75 000 postes de radio.
S’agissant des enfants les plus vulnérables, le but a été de les encourager à retourner à l’école. Au programme : distribution de rations alimentaires, de kits d’hygiène menstruelle pour les jeunes filles et de plus de 10 000 kits de lavage de mains dans 6 000 établissements scolaires. Des campagnes de communication ont également été menées pour annoncer la réouverture des écoles et sensibiliser aux gestes barrières.
Des enseignants mieux formés aux situations de crise
Dernier volet du plan, le renforcement de la résilience du système éducatif. Grâce à un dispositif développé par l’Unicef, les responsables politiques locaux vont pouvoir mieux appréhender les enjeux éducatifs sur leur territoire : fermeture des classes, besoins en matériel scolaire ou en formation des enseignants.
Mais l’accent a surtout été mis sur le développement des compétences des enseignants. Ceux-ci ont été formés à la rééducation pédagogique (remédiation) des apprentissages de base, à l’organisation de leur enseignement en période de rupture mais aussi à l’adaptation de leurs cours en fonction des difficultés d’enfants qui peuvent être réfugiés, issus de familles déplacées ou encore victimes de stress post-traumatique.
« La pandémie comme accélérateur de changement »
Tous ces efforts ont payé. D’après une évaluation réalisée par l’Unicef, 670 000 enfants ont pu bénéficier des appuis du programme et sont retournés à l’école à la rentrée scolaire. Au-delà de cette réussite, ces dispositifs visant à faciliter l’instruction hors de l’école ouvrent des pistes pour le système éducatif au Sahel, comme le souligne Audrey Martinenq Duplessis : « La pandémie a agi comme un accélérateur de changement. Dans des pays avec des ressources contraintes et un nombre toujours plus grand d’enfants à scolariser, il faut penser des alternatives innovantes, complémentaires au modèle scolaire, capables de répondre à ces nouveaux enjeux et aux attentes des parents. »
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