Auteurs : Akoue Yao Claude ; Adaman Sinan ; Zon Dehenouin Alphonse
Organisation affiliée : European Scientific Journal
Type de publication : Article scientifique
Date de publication : Janvier 2017
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D’une superficie totale de 3.474 ha, le Parc National du Banco joue un rôle prépondérant de par sa situation géographique au cœur de la capitale économique ivoirienne. Mais ce parc comme tous les autres subit de très fortes pressions anthropiques. Bordé de quatre communes, ce parc subit les conséquences de l’urbanisation galopante et vertigineuse de la ville d’Abidjan.
Stratégies de conservation du parc
Ce massif forestier fut classé réserve forestière en 1926. Selon le découpage administratif actuel, le parc est à cheval sur les communes d’Adjamé, de Yopougon et d’Abobo. Cet écosystème forestier fait partie du réseau de Parcs Nationaux et Réserves naturelles qu’on dénomme aire protégée, gérée en Côte d’Ivoire par l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves.
Toutes les aires protégées de Côte d’Ivoire, tout comme celles de l’Afrique francophone et anglophone, ont connu dans un premier temps la période de la conservation dirigiste et font actuellement l’expérience de la conservation participative.
Les politiques étatiques de gestion des ressources naturelles lancées à partir de la fin du 19eme siècle se sont d’abord inscrites dans un système de relation de domination. Autrement dit, la conservation se faisait au détriment des populations locales. Cette approche dirigiste a provoqué un profond sentiment d’injustice chez les populations locales.
François CONSTATIN, pense que la dégradation et le sabotage des ressources naturelles par les populations sont l’expression d’un désintéressement profond pour les politiques officielles qui, imposées de l’extérieur, tant par les gouvernements que par « l’évidence écologique » occidentales, méprisent totalement les préoccupations locales.
Les populations durant la période de la conservation dirigiste au niveau du Parc National du Banco se sentaient exclues de toutes activités visant à la conservation du parc. La notion de participation, envisage la conservation de la nature par la gestion du social. Il faut intégrer les populations locales dans les stratégies de conservation par une approche participative basée sur l’éducation et le renforcement des capacités de ces populations.
La gestion participative du Parc National du Banco incombe à l’Office Ivoirien des Parcs et Réserves (OIPR) de manière générale et en particulier à la direction zone sud de l’OIPR. Dans le cadre de cette gestion, il est mis en place un comité de gestion locale comprenant plusieurs acteurs ayant des compétences diverses.
Selon les résultats de nos enquêtes de terrain, 70 personnes, soit 67% de nos enquêtés affirment ne pas être informés de l’existence du comité de gestion. Par contre, 33% des enquêtés soutiennent connaitre son existence.
En effet, K. Yapi, habitant de la zone d’Andokoi relate : « j’ai entendu parler du comité de gestion locale, mais j’ignore son rôle.». Cette position est appuyée par Sanogo, un riverain d’Agban-Attié, qui affirme : « le comité de gestion locale n’a aucune activité visible sur le terrain. D’ailleurs, ce comité ignore la plupart du temps, les réalités que vivent les populations locales concernées ».
Au niveau du Parc National du Banco, on note une dégradation accélérée du patrimoine bien qu’on ait mis en place le comité de Gestion local. Jacques Weber, soutient que la résolution des conflits et des problèmes de dégradation passe par une « vraie participation » qu’il qualifie de « médiation patrimoniale ».
Impact des actions anthropiques sur le parc
L’environnement du parc national du Banco connaît de profondes transformations depuis les décennies 1970. Ces mutations vertigineuses sont liées à plusieurs facteurs dont l’urbanisation rapide du district d’Abidjan, de la croissance démographique et économique et industrielle. Depuis 1955, la forêt dense du parc couvrait une superficie estimée à 5462 ha (33,44 %) tandis que la forêt secondaire occupe une surface de 9220 ha (56,4 %).
En 1960, à l’indépendance de la Côte d’Ivoire, Abidjan en est devenu la capitale politique et connaît une évolution importante de sa population et de ses infrastructures. De 500 000 habitants en 1970, Abidjan comptait près de 5 000 000 d’habitants en 2006.
Cette croissance urbaine rapide a provoqué la destruction des écosystèmes forestiers qui ont été remplacés par des habitations à la périphérie du parc. En outre, la construction des infrastructures et équipements urbains liés à l’aménagement et à l’extension de la ville d’Abidjan ont exacerbé la situation. Ces aménagements ont provoqué un isolement de la forêt du parc national du Banco dans la métropole abidjanaise.
Si à première vue, le parc national du Banco, dans ses limites administratives est quasiment couvert de forêt, les zones urbaines autour de sa périphérie représentent 32 % de la zone. L’extension de la métropole abidjanaise consomme les espaces forestiers périphériques, c’est le cas du PNB sur le front occidental de l’agglomération d’Abidjan.
En 1998, environ les trois quarts (¾) de la forêt sont encerclés par les surfaces bâties de l’agglomération, notamment dans le sud, l’ouest, l’est et le nord du parc national du Banco.
L’exploitation illégale des ressources forestières est liée aux types de localité (villages, quartiers résidentiels et précaires…) à la périphérie du Parc National du Banco. En effet, les observations que nous avons réalisées au cours de notre enquête ont permis de voir l’ampleur de ces exploitations illicites et des pollutions liquides et solides qui menacent le parc.
Les villages sont majoritairement habités par des autochtones qui exploitent quotidiennement le parc et revendiquent une grande partie du territoire du parc national du Banco. Ces revendications foncières influencent donc les rapports de ces populations avec le parc qu’elles considèrent comme leur territoire traditionnel. En effet, les activités agricoles et les pratiques foncières spéculatives sont encore visibles et dominantes chez les autochtones se réclamant propriétaires réels du parc.
À l’opposé de ces villages, le parc est également bordé de quartiers résidentiels, majoritairement habités par des marchands qui tiennent des petits commerces dans les différentes communes d’Abidjan. Les populations de ces quartiers pratiquent des activités de service et s’intéressent peu aux ressources du parc. Le risque d’exploitation directe de la forêt par cette catégorie de la population est donc moindre par rapport aux populations des villages.
Les zones où les revendications foncières sont les plus importantes se situent au nord-est et au sud du parc. Ces zones sont intensément exploitées par les villageois notamment pour y prélever les bois de feu, les plantes traditionnelles et médicinales. Les pressions foncières au nord-est du parc sont les plus intenses. Les autochtones revendiquent ouvertement la portion de forêt qui a été isolée suite au passage des lignes électriques de haute tension à l’intérieur du parc.
Recommandations
Actuellement, les autorités du parc mènent un travail important de communication et de sensibilisation pour stimuler le tourisme local qui avait connu son âge d’or dans les années 1960. Le tourisme au Banco se trouve donc au cœur de la stratégie de valorisation économique rationnelle de la faune et de la flore du Banco.
Les recettes tirés de l’écotourisme pourraient participer, selon les administrateurs du parc, à financer d’une part sa protection, et d’autre part à améliorer les conditions de vie des riverains pour ainsi les détourner des pratiques prédatrices.
Les populations, jeunes comme les femmes participent aux micro-projets à caractère environnemental, notamment par l’attribution aux riverains de concessions liées à l’exploitation du parc, des activités sportives (course de vélos), transport et gestion des déchets, etc.
Face à la menace qui pèse sur le parc national du Banco, il y a une tendance à envisager des stratégies collectives de résistance, mais autour de leurs chefs. Sur des thématiques de sensibilisation comme la lutte contre les feux de brousse (zone prison-civile), la divagation des troupeaux (zone N’dotré), lutte contre le braconnage et l’exploitation des espèces végétales etc., il faut plutôt envisager de susciter plus d’adhésion spontanée collective et individuelle
Conclusion
L’implication des populations à la gestion du parc reste mitigée et les conflits entre gestionnaires et populations sont toujours récurrents. Cette ambigüité a entrainé la perte de nombreuses ressources floristiques et fauniques d’une part et la perte de certaine partie du parc au profit de certains quartiers périphériques d’autre part. Le parc national du banco situé en plein cœur de la ville d’Abidjan est considéré comme son « poumon ».
Avec le réchauffement climatique ce patrimoine doit être sauvegardé en vue d’une réduction de la température qui ces dernières années ne fait que monter. Pour que ce patrimoine demeure le « poumon » de la ville d’Abidjan sa gestion doit incomber à tous. Une vraie gestion participative doit être appliquée dans le sens que souhaite Jacques Weber. Il s’agit de la médiation patrimoniale.
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