Auteur : Destinity Tchéhouali
Revue : Communication, technologies et développement
Site de publication : journals.openedition.org
Type de publication : Article de revue
Date de publication : 2 janvier 2018
L’expansion rapide des technologies numériques au cours de ces dernières décennies ne doit pas faire occulter que, dans la plupart des pays en voie de développement, notamment africains, il existe encore de nombreuses inégalités et fractures en matière d’accès et d’utilisation de ces technologies.
Les rapports sur le développement dans le monde constituent un véritable aveu de l’échec des politiques internationales de solidarité numérique et de lutte contre la fracture numérique, qui n’ont pas été à la hauteur des attentes.
Dans ce contexte, les organisations internationales, et en particulier les agences et institutions spécialisées de l’ONU, ont été les premières à véritablement promouvoir la possibilité d’un rattrapage technologique, en préconisant notamment aux pays en voie de développement d’utiliser les TIC pour brûler les étapes du développement et d’accomplir ainsi un saut technologique (ou leapfrog) pour rattraper leur retard économique.
La vulnérabilité institutionnelle de la solidarité numérique internationale
Du point de vue de la gestion, la situation d’impasse financière décrite dans le rapport de situation présentée par le président du Fonds de solidarité numérique (FSN), Alain Madelin, le 27 janvier 2009 à Bamako, illustrait bien les importants dysfonctionnements du Fonds. Sur une période de trois ans, le Fonds a passé plus de temps à dépenser de l’argent en voyages pour tenter de « vendre » le 1 % de solidarité numérique qu’à récolter de l’argent grâce à ce principe.
Il importe ainsi que le porteur de projet ait une bonne connaissance socioculturelle du territoire du projet, afin de fournir des solutions technologiques (technologies, équipements, logiciels) ou de transférer des compétences adaptées aux besoins réels de la population
La dissolution du FSN a mis au grand jour la vulnérabilité de l’ensemble du système institutionnel de gouvernance de la solidarité numérique, un système qui pour certains ne cadrait pas avec « les schémas traditionnels du développement extra-déterminés » et pour d’autres, constituait « un alibi » destiné à reporter une décennie plus tard le constat que le fossé numérique était quasi infranchissable pour une partie de l’humanité.
Un autre indicateur de la vulnérabilité institutionnelle de la solidarité numérique internationale était le manque de ressources humaines compétentes au niveau de l’Agence de la solidarité numérique (ASN) et du FSN. En effet, compte tenu de la vocation « mondiale » du positionnement de leurs activités, l’ASN et le FSN étaient sous-dimensionnés : cinq salariés pour l’ASN et huit pour le FSN.
Pour mieux s’adapter à leur environnement et acquérir la légitimité nécessaire, elles auraient dû concentrer leurs efforts et leurs stratégies sur le passage de l’internationalisation à la transnationalisation de leurs activités.
Les initiatives locales de développement numérique par le biais de la coopération décentralisée : quels motifs de satisfecit ?
À l’échelle locale, nous pouvons définir la solidarité numérique comme l’ensemble des politiques et des formes d’action collective visant à optimiser la diffusion et l’appropriation des TIC par et pour les citoyens.
Les partenariats de coopération décentralisée en matière de solidarité numérique s’appuient sur des stratégies ambitieuses de développement numérique qui mobilisent l’implication de différents partenaires et acteurs du développement territorial. Cette forme de solidarité numérique se veut participative, car elle établit une relation de confiance horizontale et une collaboration directe entre plusieurs types d’acteurs.
Les principales modalités de mise en œuvre à l’échelon local des actions de solidarité numérique sont l’assistance technique, le transfert de compétences et d’expertise, le financement de projets, la formation et le renforcement des capacités, le lobbying, le plaidoyer et la sensibilisation.
Dans le domaine de l’administration électronique, la plupart des projets visent l’informatisation de l’état civil, des cadastres ou des actes domaniaux, la mise en réseau et l’interconnexion des services municipaux.
À l’échelle locale, nous pouvons définir la solidarité numérique comme l’ensemble des politiques et des formes d’action collective visant à optimiser la diffusion et l’appropriation des TIC par et pour les citoyens
La coopération décentralisée offre un cadre privilégié pour passer des discours globaux sur la société de l’information à la mise en œuvre d’actions concrètes et opérationnelles de solidarité numérique selon une approche territorialisée.
Elle offre aussi tant pour les villes du Nord que pour celles du Sud une perspective d’apprentissage de fonctionnement réticulaire et de développement de liens, de partenariats ou de solidarité en réseaux.
Le poids politique de l’engagement des collectivités dans des actions de solidarité numérique
La plupart des collectivités françaises interrogées affirment que la lutte contre la fracture numérique Nord-Sud est désormais un axe important de leur action internationale. Au-delà de l’opportunité d’exporter à l’international un savoir-faire local en matière de développement numérique, s’engager dans une action de solidarité numérique constitue donc, pour une collectivité française, le témoignage d’une véritable volonté politique de participation à l’édification d’une société de l’information plus inclusive.
La qualité du partenariat Nord-Sud : quelles relations entre les porteurs et les bénéficiaires de projets de solidarité numérique ?
L’un des premiers éléments qui détermine la qualité d’un partenariat de solidarité numérique Nord- Sud est le choix du partenaire et les conditions dans lesquelles ce choix s’est effectué. La grande majorité des partenariats sont noués sur la base d’anciennes relations de coopération ou de jumelages. La forte présence d’une population immigrée sur un territoire constitue un facteur pouvant inciter la collectivité en question à nouer des relations institutionnelles avec la collectivité du pays d’origine de ces immigrés.
Il importe ainsi que le porteur de projet ait une bonne connaissance socioculturelle du territoire du projet, afin de fournir des solutions technologiques (technologies, équipements, logiciels) ou de transférer des compétences adaptées aux besoins réels de la population.
Quelle efficacité et quels impacts des actions menées ?
Parmi les difficultés les plus fréquemment évoquées par les porteurs de projets, on retrouve, par ordre d’importance : l’insuffisance des infrastructures de base (réseau électrique fiable, réseaux de télécommunication et de transports, etc.) ; le manque de formation des agents d’exécution et des référents techniques du projet au Sud ; l’absence de volonté politique ou le manque de sensibilisation des élus locaux à la problématique de la fracture numérique ; la maîtrise insuffisante du cycle de projet (non-respect du planning et du suivi technique du partenariat) ; le manque de sensibilisation et de formation des populations bénéficiaires, qui ne comprennent pas l’intérêt et n’utilisent pas les équipements et services TIC proposés.
La coopération décentralisée offre un cadre privilégié pour passer des discours globaux sur la société de l’information à la mise en œuvre d’actions concrètes et opérationnelles de solidarité numérique selon une approche territorialisée
Quant aux facteurs clés de réussite, les différentes expériences ont démontré la nécessité de prendre en compte : l’identification et l’implication en amont du projet des personnes ressources (acteurs locaux) susceptibles d’apporter une expertise locale ; la continuité du suivi technique du partenariat au sein de chacune des deux collectivités partenaires, favorisant la capacité d’appropriation puis d’adoption des méthodes et des outils par les partenaires selon les besoins futurs du projet ; le choix des solutions techniques les plus simples et efficaces dans le design du projet (plateforme technologique, logiciels libres, logiciels propriétaires, applications, supports…) ; l’étude de faisabilité (diagnostic territorial) et la répartition des responsabilités de chaque partenaire dès la phase initiale du projet ; (v) l’investissement dans la formation pour développer au Nord et au Sud des compétences locales en matière d’ingénierie de projet numérique territorial.
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