Auteur : Isabel Suarez Sanche ;Elia Sanchez Garrido ;Carlos Piñar Celestino
Organisation Affilé : OXFAM
Type de publication : Rapport de recherche
Date de publication: 2015
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La protection sociale joue un rôle fondamental dans les pays rencontrant des problèmes d’insécurité alimentaire. Au Burkina Faso, étant données les difficultés de disponibilité et d’accès aux aliments pour un segment considérable de la population, les mesures de protection sociale assument une fonction importante de sécurité alimentaire. Cette partie présente les politiques publiques de protection sociale et d’éducation au Burkina Faso dont la connaissance est nécessaire à la compréhension du contexte dans lequel évolue le programme de boutiques témoins.
Politiques publiques de protection sociale au Burkina Faso
Les documents politiques de référence dans le domaine de la protection sociale et de la sécurité alimentaire sont la Politique Nationale de Protection Sociale (PNPS) et la Politique Nationale de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (PNSAN).
Elles font toutes deux partie de la Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable (SCADD). Ces cadres politiques et stratégiques sont transposés en mesures spécifiques par le biais de décisions politiques utilisant des outils politiques tels les Décrets ou les annonces ministérielles. Enfin, les activités concrètes destinées aux populations spécifiques sont définies par les Programmes et les Projets.
Parmi les programmes et les projets relatifs à la protection sociale et à la sécurité alimentaire se trouvent le Programme National du Secteur Rural (PNSR) 2011-2015, les Plans Annuels Opérationnels de Soutien aux Populations Vulnérables du Conseil National de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (CNSA), les accords du Conseil des Ministres, le Projet d’Amélioration de la Productivité Agricole et de la Sécurité Alimentaire (PAPSA), mis en place par le Ministère de l’Agriculture et de la Sécurité Alimentaire (MASA), ou le Projet d’Appui à la Sécurité Alimentaire (PASA), mis en place par le MASA par le biais de la SONAGESS.
Le cadre politique de protection sociale au Burkina Faso : la politique nationale de protection sociale
La plupart des définitions de la protection sociale font référence à la gestion des risques et à l’aide aux pauvres ; d’autres quant à elles y ajoutent une dimension de droits de l’homme (CSAHLPE, 2012) « La protection sociale comprend toutes les initiatives qui : 1) transfèrent des recettes (effectives) ou des biens de consommation (aliments) vers les pauvres ; 2) protègent les personnes vulnérables contre les risques pour leurs moyens d’existence ; 3) améliorent le statut social et les droits des exclus et des marginalisés » .
Le Gouvernement du Burkina Faso a créé la PNPS en 2012 pour la période 2013-2022. Il définit la protection sociale comme « un ensemble d’interventions publiques qui aident les ménages et individus à mieux gérer les risques et à réduire leur vulnérabilité et leur pauvreté en leur assurant un meilleur accès aux services sociaux et à l’emploi. La PS est un investissement soutenant le développement du capital humain et la croissance économique et non une forme d’assistance ou de secours. » (PNPS, 2012).
Le Gouvernement du Burkina Faso a créé la PNPS en 2012 pour la période 2013-2022. Il définit la protection sociale comme « un ensemble d’interventions publiques qui aident les ménages et individus à mieux gérer les risques et à réduire leur vulnérabilité et leur pauvreté en leur assurant un meilleur accès aux services sociaux et à l’emploi.
L’objectif général de la PNPS est de contribuer au changement qualitatif des conditions de vie de toutes les classes sociales. Pour cela, elle s’intéresse au développement de mécanismes adaptés et durables de prévention et de gestion des risques et des chocs, à l’universalisation de la sécurité sociale à toutes les catégories de travailleurs et à l’extension de l’éventail des prestations à tous les risques sociaux.
Cet objectif général se concrétise au travers de six objectifs spécifiques : (1) améliorer les systèmes de transfert social pour les plus pauvres et les plus vulnérables ; (2) améliorer l’accès des populations les plus pauvres et des groupes les plus vulnérables aux services sociaux de base ; (3) encourager et garantir la sécurité de l’emploi et l’accès à un revenu minimum ; (4) améliorer et élargir la couverture sociale aux travailleurs des secteurs formel et informel ; (5) améliorer la gouvernance ; et (6) consolider les capacités de tous les acteurs. Six programmes, dont quatre concernant la protection sociale et deux l’accompagnement, seront exécutés durant les cinq premières années de la mise en place de la PNPS afin d’atteindre les objectifs mentionnés. Cette politique forme un cadre d’intentions dans lequel viennent s’insérer les politiques que le Gouvernement met en place au fur et à mesure de ses possibilités et de sa volonté politique.
Les outils de sécurité alimentaire développés par la PNPS peuvent se classifier en quatre catégories selon les droits d’accès aux aliments définis par Sen (1981)22 : production, travail, acquisition sur le marché et transferts. Des quatre programmes spécifiques de protection sociale de la PNPS, le premier, et dans une moindre mesure le deuxième et le troisième, concerne la sécurité alimentaire de la population.
La majorité des actions du programme 1 « Amélioration des transferts sociaux pour les plus pauvres et les plus vulnérables » concerne des aides à la production, à l’acquisition des aliments sur le marché et aux transferts. Par exemple, la distribution de tickets alimentaires et les transferts monétaires facilitent les achats d’aliments.
Le programme 2 « Amélioration de l’accès de tous, notamment des populations pauvres et des groupes vulnérables aux services sociaux de base » considère quelques modalités de transferts, dont les cantines scolaires.
Le programme 3 « Promotion et sécurisation de l’emploi et accès à un revenu minimal pour chaque Burkinabè » contribue à la sécurité alimentaire par le biais d’actions liées au travail. Les aides visant à renforcer l’employabilité ainsi que les conditions de travail contribuent à l’amélioration de la situation économique, et en particulier, alimentaire des foyers.
Les programmes 1 et 2 de la PNPS prévoient des mesures cherchant à améliorer la production, les acquisitions sur le marché et les transferts. Le Ministère de l’Action Sociale et de la Solidarité Nationale (MASSN), le MASA24 et le Ministère de l’Industrie, Commerce et Artisanat
Complémentarité des bt avec d’autres politiques publiques de protection sociale et de sécurité alimentaire
Au Burkina Faso, les mesures de protection sociale prévues par la PNPS sont mises en œuvre par le biais de divers mécanismes cités dans la section 4.1. Parmi ces mécanismes figurent des mesures prises par le Conseil des Ministres, comme des plans et des programmes opérationnels. Ces dernières années, le Conseil des Ministres a ratifié des mesures sociales liées à la sécurité alimentaire, dont les boutiques témoins et autres mesures relatives à la régulation des prix.
Par ailleurs, les Plans Opérationnels et de Résilience émergèrent à partir de 2012 pour soutenir les populations vulnérables à l’insécurité alimentaire et la malnutrition afin de faire face à la crise alimentaire que connaissait le pays. À partir de 2013, quand la crise alimentaire commençait à être surmontée, l’objectif des plans annuels s’orienta vers la construction de la résilience du pays, l’atténuation de l’insécurité alimentaire des populations vulnérables et la protection de leurs moyens d’existence.
Pour ce faire, les plans comprennent des actions dans le domaine de la sécurité alimentaire et de la nutrition. Les actions liées à la sécurité alimentaire sont d’une part les actions d’aide alimentaire comme les ventes de céréales à prix social, nourriture-argent contre travail, tickets alimentaires, etc., et d’autre part, des actions d’aides non alimentaires, comme le soutien à la production agricole et à l’élevage. Dans tous les cas, les populations bénéficiant des actions prévues par ces plans ont été explicitement identifiées/sélectionnées.
Par ailleurs, les Plans Opérationnels et de Résilience émergèrent à partir de 2012 pour soutenir les populations vulnérables à l’insécurité alimentaire et la malnutrition afin de faire face à la crise alimentaire que connaissait le pays. À partir de 2013, quand la crise alimentaire commençait à être surmontée, l’objectif des plans annuels s’orienta vers la construction de la résilience du pays, l’atténuation de l’insécurité alimentaire des populations vulnérables et la protection de leurs moyens d’existence
Le programme de BT émerge du Programme 1 de la PNPS en répondant à l’objectif spécifique « Assurer une sécurité alimentaire aux ménages pauvres et vulnérables ». Cet objectif s’appuie sur l’Action Prioritaire 4 du PNPS « Subvention de certains produits de grande consommation (céréales huile et sucre)au profit des pauvres ». Il s’agit d’un type de subvention servant à améliorer l’accès d’une partie de la population aux aliments, mais aussi à stabiliser leurs prix.
De tous les outils de protection sociale pour la sécurité alimentaire imaginés par le Gouvernement burkinabé, cette analyse se concentre sur l’étude de ceux concernant deux des
catégories de droit d’accès proposées par Sen (1981), les acquisitions sur le marché et les transferts, de manière à garder une relation plus étroite avec l’utilisation des réserves alimentaires.
Les boutiques témoins
Les boutiques témoins correspondent à une mesure de protection sociale mise en place par le Gouvernement du Burkina Faso. Il s’agit d’une vente à prix social des céréales provenant des réserves nationales. C’est une mesure dont les objectifs sont complexes et l’envergure importante. Afin de mesurer la pertinence du programme et d’y proposer des améliorations, il convient d’approfondir son fonctionnement et d’analyser son efficacité.
Objectifs
Le programme de boutiques témoins constitue une mesure orientée vers les consommateurs dont l’objectif est d’améliorer l’accès aux achats de céréales. L’analyse de cet objectif est complexe, car il est abordé sous différents angles en fonction des textes législatifs décrivant la mesure. Les lignes qui suivent procèdent à une révision de ces textes qui reflètent les objectifs économiques et politiques de la mesure ainsi que des mécanismes mis en place pour leur réalisation.
Les boutiques témoins font partie d’une série de mesures adoptées par le Conseil des Ministres en septembre 2013 relatives au« renforcement des mesures sociales, à la création d’emplois et de revenus et à l’amélioration des conditions de vie des populations pour faire face à la conjoncture. » Ces mesures cherchent à « apporter des réponses adéquates aux préoccupations des différentes couches sociales » (CM, 2013).
La plupart d’entre elles s’intègrent dans les Actions Prioritaires de la PNPS. Un budget total de 64 500 millions de F CFA (98,04 millions d’euros) entièrement financer par l’État a été assigné à ces aides.
Parmi ces mesures, certaines concernent les prix des produits basiques : (1) continuer à travailler dans le cadre de concertation tripartite sur les produits de base ; (2) renforcer le contrôle des prix ; et (3) ouvrir 140 BT sur l’ensemble du territoire national pour la vente de céréales à prix social afin de réguler les prix du riz et du maïs (CM, 2013). La mise en place de ces BT s’effectue au sein du Projet d’Appui à la Sécurité Alimentaire (PASA) dont l’objectif consiste à « faciliter l’accès au marché des produits agricoles en réduisant significativement le prix pour les consommateurs.
En janvier 2014 eut lieu un atelier d’évaluation des mesures prises par le Conseil des Ministres en septembre 2013. Cette évaluation des impacts générés par le PASA mentionne trois impacts principaux : la création d’emplois ; l’augmentation du pouvoir d’achat de la population grâce à une baisse des prix de 10 % par rapport à l’année précédente à la même période ; ainsi que la dynamisation de l’économie nationale par le biais de la génération d’opportunité commerciale pour les agents économiques du secteur céréalier, des emballages et du transport. Suite à quoi, le Premier Ministre annonça, de manière non officielle, que le programme de BT se prolongerait de trois mois supplémentaires, jusqu’à mars 2014.
En mars 2014, le Conseil des Ministres approuva la consolidation des mesures sociales adoptées en septembre 2013 pour l’amélioration des conditions de vie de la population. « Le bilan de la mise en œuvre de ces mesures sociales fait ressortir une forte adhésion et un réel engouement des populations qui, de façon unanimes, ont souhaité leur reconduction et leur approfondissement. » (CM, 2014)
En ce qui concerne la consolidation des mesures destinées à faciliter l’accès aux produits de première nécessité, il fut décidé, entre autres, de renforcer le contrôle des prix, « la reconduction des boutiques témoins et l’ajout d’huile alimentaire de production locale à la liste des produits vendus à prix social ». Selon diverses sources, le PASA perdurera durant toute l’année 2014.