Auteur (s) : Agbovi Komlan Kwassi
Organisation affiliée : Handicap pour l’Afrique de l’Ouest (DECISIPH)
Type de publication : Rapport de recherche
Date de publication : 2009
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Situation des personnes handicapées au Sénégal
Si on considère les estimations de l’OMS selon lesquelles 10% de la population mondiale sont des PSH, on peut supposer qu’il existe environ 1 300 000 de PSH sur les 13 711 597 habitants que compte le Sénégal en juillet 2009. Leurs conditions socioéconomiques ne sont guère différentes de celles des PSH des autres pays de la sous-région.
Cette situation des PSH est également caractérisée par : les difficultés d’accès aux services sociaux de base (santé, éducation, logement…); une insuffisance des structures spécialisées dans la prise en charge des personnes handicapées; les difficultés d’insertion socio-économique dues à une sous-scolarisation, au manque de formation, à l’insuffisance des moyens d’intervention des structures chargées de leur encadrement, et à la difficulté d’accès aux infrastructures du fait de l’inadéquation de l’architecture des bâtiments.
Quelques actions menées à l’endroit des PH
Selon le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté au Sénégal, les actions envisagées pour les PSH visent à améliorer leur situation économique et sociale et à lutter contre les préjugés dont elles sont victimes. Il s’agit de :
- Améliorer l’état sanitaire et la mobilité des personnes handicapées,
- Promouvoir l’éducation et la formation des personnes handicapées par le développement de l’éducation intégratrice
- Améliorer leur insertion économique et sociale.
Au niveau législatif
Le conseil interministériel du 30 juin 2001 avec 19 directives en faveur des PSH dont:
- le quota de 15% à la fonction publique
- l’octroi de bourses aux étudiants handicapés
- la gratuité des soins la subvention aux associations et fédérations des PSH
- la subvention aux écoles et instituts de personnes handicapées
Cependant, en dehors de ces efforts fournis pour l’amélioration des conditions de vie des PSH, elles se retrouvent confrontées à des difficultés d’intégration et d’insertion sociale : inadaptation des lieux de travail aux différentes situations de handicap (escaliers, absence d’ascenseurs, portes étroites, difficultés d’accès aux moyens de transport, installation sanitaires inadaptées aux utilisations de certaines PH, tant dans le secteur public que privé).
Connaissance du handicap
Pourquoi un enfant naît handicapé?
Les cadres de l’administration publique et les autorités locales du Sénégal expliquent le handicap d’un enfant par trois modèles : le modèle culturaliste/traditionaliste qui s’apparente plus à l’approche actionniste, le modèle divino-religieux et le modèle médical.
Pour vous, qui est handicapé et qui ne l’est pas?
Les réponses données à cette question par les personnes interrogées sont les mêmes aussi bien au niveau des femmes que des hommes, des cadres que des autorités locales: « est handicapé celui à qui il manque quelque chose pour être physiquement et intellectuellement normal comme tout le monde » ; « c’est quelqu’un à qui il manque un membre ou des membres » ; « c’est aussi toute personne qui n’a pas son intégrité physique et mentale» ; « c’est quelqu’un qui n’est pas complet».
Connaissance du handicap par les cadres et les autorités locales
La définition donnée par les cadres de l’administration publique et les autorités locales du Sénégal est essentiellement basée sur les déficiences que portent les PSH. A cet effet, selon eux, est handicapé celui qui a perdu son ou ses membres ; son ou ses sens… ou encore celui qui n’est pas complet ; celui à qui il manque quelque chose sur le plan physique ou intellectuel.
Les Droits économiques, sociaux et culturels
La constitution sénégalaise, en son article 8 stipule que : « La République du Sénégal garantit à tous les citoyens les libertés individuelles fondamentales, les droits économiques et sociaux ainsi que les droits collectifs. Ces libertés et droits sont notamment : les libertés civiles et politiques, liberté de déplacement, les libertés culturelles, les libertés religieuses…, le droit à l’éducation, le droit de savoir lire et écrire, le droit de propriété, le droit au travail, le droit à la santé, le droit à un environnement sain, le droit à l’information plurielle ».
Les Droits civiques et politiques
Après analyse des propos des cadres et des autorités locales, il ressort que la presque totalité accepte voter pour la PSH qui se présenterait aux élections législatives ou municipales : ils sont presqu’unanimes à reconnaître que la personne handicapée est une personne comme tout autre personne et à ce titre doit jouir de tous les droits civiques et politiques.
RECOMMANDATIONS
Aux Personnes Handicapées
Elles doivent:
- arrêter la mendicité qui les humilie
- se positionner pour les élections municipales et législatives
- éviter de développer les sentiments de complexe d’infériorité
- chercher à s’instruire et à se former pour devenir autonomes et indépendantes
A l’endroit des familles et des communautés locales
Elles doivent donc mener des actions concrètes pour favoriser une bonne intégration des PSH. signaler précocement les cas de handicap constatés dans les familles et les communautés:
- scolariser les enfants handicapés si possible dans des milieux ordinaires
- donner plus de considération aux personnes handicapées en les intégrant dans les prises de décisions en famille et les activités communautaires
- créer des fonds de dépôt des dons (aumônes) pour les PSH
Il faut que les autorités nationales ou locales ou coutumières arrivent à corriger les traditions et les mentalités en nommant les PSH comme notables et conseillers pour démystifier le handicap. L’exemple donné par le président sénégalais pour avoir choisi une PSH comme conseiller spécial est édifiant.
A l’endroit des OPH
Elles doivent:
- être exemplaire en matière de gouvernance interne et d’inclusion
- multiplier les sensibilisations des populations sur les maladies invalidantes
- intensifier les sensibilisations des personnes handicapées sur leurs droits et obligations
- financer l’installation des PSH qui ont appris un métier afin de les conduire à une autonomie financière
- faire du plaidoyer auprès des parlementaires et des sénateurs pour la ratification des textes relatifs à la promotion des droits des PH
- éviter de cloisonner les PH dans des organisations qui risquent de devenir des cadres d’exclusion
- former les PSH en décentralisation (gestion de projets, leadership, gouvernance locale…).
A l’endroit de l’Etat et collectivités locales décentralisées
En tant que l’un des détenteurs d’obligation pour la promotion des personnes handicapées, l’État doit jouer son rôle de garant et de protecteur des droits des citoyens. A cet effet, il doit:
- accélérer la ratification de la Convention Internationale relative aux droits des PSH
- voter dans les meilleurs délais la loi d’orientation pour la promotion des PSH
- voter les textes organiques pour faciliter l’application effective des lois votées
- promouvoir les PSH à des postes administratifs par des nominations
- offrir des facilités aux sociétés privées qui acceptent de recruter les PSH : cela consistera à réduire les taxes pour ces entreprises
- faciliter l’accès aux services et locaux pour les PSH en faisant des aménagements prévus dès les phases de construction pour en réduire les coûts d’investissement (construction des rampes, de larges portes, des toilettes adaptées…)
- développer des systèmes de soins gratuits/accessibles aux PSH : la subvention des appareillages par L’État
- élaborer des plans de développement régionaux inclusifs (PDR-I) ou des plans de développement communaux inclusifs (PDC-I)
A l’endroit de Handicap International
En sa qualité de partenaire technique et financier de l’Etat, de la FSAH et des OPH, Handicap International, a le devoir de:
- négocier les possibilités de micro crédits pour les PH auprès des systèmes financiers décentralisés (SFD) pour les aider à avoir une autonomie financière
- organiser et animer, avec la FSAPH, des journées dénommées « Vivons Ensemble » dans les établissements spécialisés pour permettre aux enfants valides de faire l’expérience du vivre-ensemble avec leurs camarades handicapés
- faire des spots publicitaires sur les différents handicaps au Sénégal pour la sensibilisation des populations
Conclusion
A l’issue de l’étude sur la Représentation et la perception du handicap par les cadres de l’administration publique et les autorités locales au Sénégal, quelques observations s’imposent. L’analyse des données aussi bien primaires que secondaires révèle que les droits fondamentaux des personnes en situation de handicap sont majoritairement et théoriquement connus mais ne sont pas pratiquement respectés. Ces droits touchent de multiples secteurs : éducation, formation professionnelle, santé, emploi, culture, participation sociale, etc.
Il ressort des expériences qu’une déficience ne devient handicap que dans le cadre d’une société donnée, qui souvent ne connaît pas les réalités des PSH et ne respecte pas leurs besoins et leurs droits. En effet, les propos tenus par les cadres et autorités locales ont démontré que ceux-ci n’ont pas une connaissance juste du handicap. Leur représentation et conception sur le handicap sont réductrices et négatives.
Un jeune handicapé en quête d’un emploi ne doit plus être orienté vers le ministère de l’Action sociale mais vers le ministère en charge de l’emploi.
Lorsque l’accès aux postes professionnels est basé sur les compétences physiques, sans aucun effort d’adaptation des conditions environnementales, il y a une sorte d’exclusion qui met hors de compétition certains citoyens ayant des compétences intellectuelles avérées pour contribuer au développement du pays.
Les recommandations qu’ils ont faites prouvent clairement cette volonté et pour cela il convient de développer des actions en synergie avec ces autorités et cadres pour susciter leur adhésion à la politique nationale d’inclusion. « Un jeune handicapé en quête d’un emploi ne doit plus être orienté vers le ministère de l’Action sociale mais vers le ministère en charge de l’emploi. La création du cadre institutionnel en faveur d’une politique multisectorielle sur le handicap sera un élément clé de toute stratégie de réduction de la pauvreté des personnes handicapées » martela un directeur pour conclure l’entretien.
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