Organisation affiliée : Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés – ONU 

Type de publication : Manuel et guideline 

Date de publication : 28 novembre 2020

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Depuis 2016, la situation socio-économique du Tchad a été fortement marquée par diverses crises financières ainsi que par les grèves à répétition des fonctionnaires sous l’impulsion des centrales syndicales, en réaction aux mesures d’austérités prises par le gouvernement pour faire face à la chute des cours du pétrole, mais aussi par la dégradation de l’environnement sécuritaire dans les pays voisins, la crise Boko Haram au Lac Tchad, la crise alimentaire…

Malgré cette période de récession, le Tchad continu d’être une terre d’asile pour de nombreux réfugiés et autres populations relevant de la compétence du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR), avec  plus de 482 691 réfugiés et demandeurs d’asile (55 % d’enfants) répartis dans plus de 117 526 ménages. 

L’engagement du gouvernement tchadien en faveur de l’éducation des réfugiés au Tchad fait de lui un pionnier et une référence en matière d’éducation des réfugiés. Cela se matérialise par des actions concrètes : l’organisation du séminaire gouvernemental de mai 2014 à Douguia sur la redynamisation du système éducatif suivi de la mise en œuvre de son plan d’action dont le point 55 recommandait l’intégration des réfugiés dans le système éducatif national et dans le Programme Intérimaire de l’Education au Tchad (PIET) 2018-2020; etc. L’élaboration de la stratégie éducation des réfugiés au Tchad 2030, initiée en 2019 a été le fruit d’un travail collectif et participatif de collecte d’informations complémentaires, d’exploitation des informations, d’évaluation de la mise en œuvre de la stratégie de l’éducation pour les réfugiés au Tchad 2013-2016. 

Le système éducatif tchadien : défis et opportunités 

Le Tchad a toujours accordé une importance particulière à l’éducation. Entre 1990 et 2014, il a connu une augmentation impressionnante de ses effectifs du primaire, passant de 0.5 millions d’élèves à 2.4 millions. Cependant, les effectifs du primaire ont commencé à baisser en 2016 en passant de 2.4 à 2.2 millions d’élèves. En effet, la crise économique que subit le pays depuis 2016 a eu un impact important sur les scolarisations en raison de la fermeture des écoles due à la suspension des paiements des subventions des maîtres communautaires. 

La qualité représente un challenge de taille pour le pays. Classé avant dernier sur les 10 pays d’Afrique subsaharienne francophone participant à l’évaluation PASEC 2014, le Tchad présente de très faibles résultats d’évaluation des apprentissages. Ainsi, en fin de scolarité primaire (CM2) 84,3% des élèves sont situés sous le seuil minimal de compétences en lecture et 80,9% en mathématiques.

En dépit de cela, le Tchad a fait des progrès remarquables en matière d’offre d’éducation aux enfants/jeunes réfugiés vivant sur son territoire notamment en intégrant les réfugiés dans son système éducatif ainsi que dans son plan sectoriel de l’éducation. Après l’intégration des établissements scolaires des camps de réfugiés de l’Est dans le système éducatif tchadien en 2014, l’année 2018 a marqué une nouvelle étape majeure avec l’officialisation de 108 établissements scolaires des camps, sites et villages d’accueil des réfugiés au Tchad. 

Situation actuelle de l’éducation des réfugiés au Tchad : grandes réalisations depuis 2012/2013 

• Accès

L’intégralité des réfugiés du Tchad ont aujourd’hui accès au système éducatif tchadien. L’augmentation des effectifs a permis des améliorations des taux de scolarisation au primaire et au secondaire. Le taux brut de scolarisation au primaire (79%) est supérieur à la moyenne internationale des réfugiés (77%) et celui du secondaire (24%) légèrement inférieur (30%).

L’accès aux études universitaires est un challenge pour tous les jeunes du Tchad. Grâce à l’appui de la bourse DAFI, 187 réfugiés ont pu poursuivre leurs études à l’université depuis 2012. Concernant la formation professionnelle, de grands progrès ont été faits récemment pour revitaliser les 09 centres de formations techniques et professionnelles à proximité des camps de réfugiés. 

• Qualité 

L’enseignant occupe une place centrale dans la qualité. L’intégration du système éducatif national a permis l’affectation de 298 enseignants tchadiens dans les établissements scolaires des camps et sites de réfugiés entre 2014 et 2015. Leur maintien reste cependant problématique. Si la formation des enseignants s’est améliorée, l’augmentation des effectifs ne s’est pas accompagnée de celui du nombre des enseignants. Cela impacte directement les ratios enseignants/élèves actuellement de 1 pour 76 au primaire et 1 pour 42 au secondaire, le standard étant de 1 pour 40.

Les réfugiés ont accès aux examens nationaux tchadiens de fin de cycle fondamental (Brevet d’Etude Fondamentale, BEF) et de fin d’études secondaires (Baccalauréat). . Le Gouvernement tchadien a créé quatre centres d’examen de baccalauréat dans les régions du Ouaddaï (2 à Hadjer-Hadid) et du Wadi Fira (Iriba et Guereda) dans des villes proches des camps de réfugiés, pour faciliter l’accès des réfugiés à l’examen du Baccalauréat. Tous ces efforts ont permis à 5 742 collégiens réfugiés (56% de filles) d’obtenir leur BEF et 2 526 lycéens réfugiés leur baccalauréat (50% de filles).

• Protection 

La présence dans chaque école d’une Association Mères Educatrices (AME), la création de clubs de filles et des crèches, ont permis ces dernières années de promouvoir la scolarisation des filles et des jeunes femmes. Dans les camps de l’Est, les filles sont aujourd’hui plus nombreuses en classe que les garçons, en revanche dans le Sud et la zone du Lac des efforts restent à fournir pour faire de même.

• Partenariat et coordination 

La recherche de partenariats efficaces, efficients et novateurs tout comme la coordination des activités éducatives de l’opération sont nécessaires à la réussite de la mission. La collaboration étroite avec les ministères chargés de l’éducation a permis au Tchad de faire des progrès remarquables dans l’éducation des enfants réfugiés vivant sur son territoire. La Banque Mondiale permet le paiement des subsides des maîtres communautaires, Education Cannot Wait couvre, depuis 2017, l’ensemble des besoins en fournitures scolaires, didactiques et quelques constructions dans 10 provinces au Tchad dont tous les camps et sites de réfugiés et a permis en 2020 le renforcement de l’hygiène et prévention du COVID-19 dans les écoles des camps, sites et villages accueillants des réfugiés.

Les partenariats permettent aussi aux élèves de bénéficier d’activités éducatives nouvelles et innovantes. Ainsi des partenariats ont été établis avec la Société Internationale de Linguistique (SIL) permettant l’enseignement de langues nationales et avec Can’t Wait to Learn pour l’introduction d’apprentissage sur tablette. 

Alignement et application de la stratégie éducation des réfugiés 

La stratégie éducation des réfugiés 2030 s’applique à l’ensemble des réfugiés ainsi qu’aux autres populations relevant de la compétence du HCR (apatrides, demandeurs d’asile, déplacés internes et retournés) au Tchad. A travers cette stratégie, le HCR Tchad réitère son engagement d’œuvrer au côté du gouvernement tchadien pour l’accès équitable et inclusif à une éducation de qualité pour tous les enfants et jeunes vivant sur son territoire tel que le prescrivent sa Constitution et la Loi 16 sur l’éducation31.La stratégie s’aligne sur le Plan Intérimaire pour l’Éducation au Tchad 2018-20206 et le Plan National de Développement 2017-2021.

Partant du principe que l’éducation est un droit fondamental qui doit être garanti et respecté pour tous, et à tout moment, la stratégie éducation des réfugiés au Tchad 2030 tire sa pertinence du fait que l’éducation en situation d’urgence ou de crise prolongée n’est pas uniquement un droit fondamental mais également un outil essentiel de protection qui contribue à renforcer la résilience et la cohésion sociale des communautés, jouant un rôle déterminant dans la recherche des solutions durables. Elle s’arrime aux principaux cadres de politique mondiale de développement de l’éducation et de protection de l’enfance, notamment la Convention relative aux droits de l’enfant et l’Objectif de Développement Durable N°413 (Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie).