Auteur : Bureau of Democracy, Human Rights and Labor
Site de publication : Ambassade des États-unies en Mauritanie
Type de publication : Rapport
Date de publication : 2020
lien vers le document original
Privation arbitraire de la vie et autres exécutions extrajudiciaires ou à motivations politiques
Un signalement a fait état d’une exécution arbitraire ou extrajudiciaire par des agents publics. Le procureur de la République a le pouvoir d’enquêter sur les exécutions des forces de sécurité pour déterminer si ces exécutions sont justifiables ou s’il convient d’entamer des poursuites. Chaque service de sécurité dispose d’un bureau d’enquête interne qui détermine si les exécutions perpétrées par les forces de sécurité étaient justifiées et s’il convient d’engager une procédure administrative. Le 30 mai, une patrouille militaire a tiré sur Abasse Diallo, un Mauritanien de 34 ans, et l’a tué alors qu’il transportait des biens près de la frontière sud du pays. Le procureur de la République de la région a ouvert une enquête, mais des poursuites judiciaires n’avaient pas encore été engagées à la fin de l’année.
Torture et autres châtiments ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
La Constitution interdit la torture. La loi dispose que la torture, les actes de torture et les châtiments inhumains ou dégradants sont des crimes contre l’humanité imprescriptibles. Elle porte spécifiquement sur les activités dans les prisons, les centres de réadaptation des mineurs en conflit avec la loi, les lieux de garde à vue, les établissements psychiatriques, les centres de détention, les zones de transit et les postes frontaliers.
Selon le portail en ligne Déontologie en missions de terrain, deux Mauritaniens membres des forces du maintien de la paix en mission pour l’ONU ont été accusés d’exploitation et de sévices sexuels au cours de l’année. Il s’agit dans les deux cas d’une affaire de rapports sexuels monnayés avec un adulte. Le Mécanisme national de prévention de la torture (MNP) est un organe gouvernemental indépendant chargé d’enquêter sur les allégations crédibles de torture. Le gouvernement a nommé de nouveaux membres au sein du MNP au mois de septembre. Le MNP n’avait pas ouvert d’enquête depuis sa création en 2016.
Conditions dans les prisons et les centres de détention
Les conditions en prison restaient délétères en raison du manque de nourriture, de la violence, des conditions sanitaires inadéquates, du manque de soins médicaux adéquats et des détentions provisoires indéfinies.
Conditions physiques : La surpopulation carcérale a perduré. En 2018, le Comité des Nations Unies contre la torture a déclaré que les autorités détenaient 2 321 détenus dans des centres conçus pour 2 280 personnes. Les pouvoirs publics incarcération des personnes en détention provisoire avec des prisonniers condamnés qui représentaient un danger pour les autres détenus. Les gardes masculins surveillaient fréquemment les femmes détenues, une pratique critiquée par la CNDH.
Il y avait deux prisons réservées aux femmes, une dans la capitale, Nouakchott, et l’autre dans la deuxième ville du pays, Nouadhibou. Ce sont principalement des gardiens de sexe masculin qui assuraient la sécurité dans les prisons de femmes, cette tâche étant affectée à la Garde nationale, exclusivement composée d’hommes, sur l’ensemble du territoire. Les quelques femmes surveillantes dans les prisons n’étaient pas membres de la Garde nationale mais des équipes de protection civile (pompiers). Les conditions de détention étaient généralement meilleures pour les femmes que pour les hommes. Selon des responsables de l’administration pénitentiaire, la prison pour femmes de Nouakchott était moins surpeuplée que celles des hommes.
Administration : Les autorités autorisaient les détenus à déposer des plaintes pour mauvais traitements auprès de la CNDH et du MNP. La réglementation permettait aussi aux détenus d’élire l’un des leurs pour les représenter auprès de l’administration, ce qu’ils ont fait de temps à autre. Le gouvernement a pris connaissance des allégations de conditions inhumaines, mais a rarement pris des mesures correctives. Les prisonniers étaient régulièrement transférés dans des prisons à l’intérieur du pays pour alléger le flux de prisonniers détenus à Nouakchott, ce qui signifiait souvent que ces prisonniers étaient séparés de leur famille et de leur avocat, ce qui augmentait la durée moyenne de leur détention provisoire.
Liberté d’expression, notamment pour la presse
La Constitution garantit la liberté d’expression, notamment pour la presse, et le gouvernement a généralement respecté ce droit ; il a cependant parfois appliqué de façon arbitraire et sélective des dispositions réglementaires en vue de réprimer des particuliers ou des groupes d’individus opposés aux politiques gouvernementales.
Les particuliers ont en général été libres de critiquer le gouvernement en public, mais ils ont parfois subi des représailles. La Constitution et la loi interdisent la propagande raciale ou ethnique. Le gouvernement s’est servi de ces dispositions pour accuser de « racisme » ou de « promotion de la désunion nationale » des opposants politiques qui dénoncent la sous-représentation extrême des populations défavorisées au sein du gouvernement, comme les Haratines et les Africains subsahariens.
Liberté de la presse et des médias, y compris les médias en ligne : Les médias indépendants étaient actifs et ont exprimé une grande variété d’opinions avec des restrictions limitées. Les cas de représailles du gouvernement contre les médias ont grandement décru par comparaison avec l’année d’avant. Les médias indépendants sont demeurés la principale source d’information pour la plupart des citoyens, suivis par les médias contrôlés par le gouvernement. Ces derniers diffusaient principalement les nouvelles officielles mais ils ont aussi augmenté leur couverture des activités et des points de vue de l’opposition.
Censure ou restrictions sur le contenu : Des ONG, des blogueurs et d’autres observateurs ont indiqué qu’un représentant du gouvernement avait rencontré des journalistes de quatre médias internationaux pour leur dire qu’une couverture médiatique partiale de l’esclavage ou d’autres sujets sensibles pouvait nuire à l’unité nationale ou à la réputation du pays.
Protection des réfugiés
Le gouvernement a coopéré avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l’Organisation internationale pour les migrations, et d’autres organisations humanitaires pour assurer protection et assistance aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, aux réfugiés, aux réfugiés rapatriés, aux demandeurs d’asile, aux apatrides, aux migrants vulnérables et autres personnes en situation préoccupante. Cependant, les ressources fournies par le gouvernement n’ont pas suffi à répondre aux besoins d’assistance de ces groupes. Le 7 juillet, le Parlement a adopté une nouvelle loi sur les migrations et la traite des personnes afin de prévenir, instruire et poursuivre les cas de traite et de protéger les victimes.
Élections et participation politique
Élections récentes : En juin 2019, l’ancien ministre de la Défense Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani a été élu président avec 52 % des voix. Biram Dah Abeid, militant et politique anti-esclavage de premier plan, est arrivé en deuxième position avec 19 % des voix tandis que Mohamed Ould Boubacar, l’ancien premier ministre soutenu par le parti islamiste, est arrivé en troisième position avec 17 % des voix. Les observateurs de l’ONU et de l’Union africaine ont estimé que l’élection s’était déroulée de manière relativement libre et équitable sans preuve de fraude à grande échelle susceptible d’influencer considérablement les résultats du scrutin. Les élections présidentielles ont donné lieu à la première passation de pouvoir entre deux présidents démocratiquement élus depuis l’indépendance du pays en 1960.
Participation des femmes et des membres de minorités : Il n’existe pas de lois limitant la participation des femmes et des membres des minorités au processus politique, et ceux-ci y ont participé. Toutefois, certains facteurs traditionnels et culturels empêchaient les femmes de participer à la vie politique sur un pied d’égalité avec les hommes. Malgré des lois promouvant l’accès des femmes à des postes électifs (dont un quota de 20 % des sièges réservés aux femmes sur les listes des candidats aux élections législatives et locales et un quota de 20 sièges réservés aux femmes à l’Assemblée nationale), le nombre de femmes participant aux élections demeurait faible.
À la suite des élections législatives de 2018, les femmes détenaient 19,6 % dès 157 sièges à l’Assemblée nationale, un chiffre un peu en deçà de celui de 2014, qui était de 22 %. Cinq femmes ont été nommées dans le nouveau cabinet : une appartenait à la communauté ethnique subsaharienne non arabe, une était de l’ethnie haratine et trois venaient de la communauté ethnique beydane (les « Maures blancs »).
Discrimination, abus sociétaux et traite des personnes
Femmes
Viol et violences familiales : Le viol des femmes est illégal. La loi n’aborde pas la question du viol des hommes. Lorsque les violeurs sont des hommes célibataires, les peines comprennent l’emprisonnement, le travail forcé et les coups de fouet ; les violeurs qui sont mariés sont passibles de la peine de mort, bien que cette peine n’ait pas été appliquée depuis 1987. Le gouvernement applique de plus en plus les peines de prison pour les personnes condamnées pour viol, même si les poursuites demeurent provisoires. Néanmoins, comme lors des années précédentes, des suspects de viol riches auraient réussi à se soustraire aux poursuites ou, s’ils étaient poursuivis, à éviter la prison. Il était fréquent que la famille de la victime d’un viol passe un accord avec l’auteur des faits pour obtenir une compensation pécuniaire.
La police et le système judiciaire sont parfois intervenus dans des cas de violences familiales, mais les femmes se sont rarement adressées à la justice, comptant plutôt sur leur famille, les ONG et les dirigeants communautaires pour régler les différends familiaux. Des ONG ont signalé que dans certains cas, elles avaient demandé l’aide de la police pour protéger des victimes de violences familiales, mais que celle-ci avait refusé d’enquêter sur ces affaires.