Auteur: Direction de l’évaluation des études et de la prospective – BPI
Site de publication: BPI France
Type de publication: Fiche pays
Date de publication: Février 2023
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Environnement macroéconomique et financier
- Vulnérabilité de la croissance : La reprise après la récession en 2020 (-0,9 %) a été portée par le dynamisme du secteur minier (fer et or principalement). Le potentiel de production en minerais et en énergie (gaz et ENR) attirent aussi les investissements publics et privés, portant la croissance à +4 % en 2022. Toutefois, la demande domestique souffre de l’inflation (+9,5 % en 2022). A moyen-terme, la croissance devrait profiter de l’augmentation de la production de l’industrie extractive et du lancement de la production gazière vers fin 2023-début 2024.La croissance resterait très vulnérable aux variations des prix mondiaux de ces matières premières.
- Vulnérabilité des comptes publics : La Mauritanie a enregistré son premier déficit public depuis 2016 en 2022 (-2,1 % du PIB). Les dépenses ont fortement augmenté pour faire face à l’inflation (subventions) et financer les projets miniers et énergétiques. Le pays est classé en risque de surendettement par le FMI. Les perspectives de moyen-terme sont cependant favorables avec un nouveau programme du FMI, des recettes gazières attendues importantes dès 2024. La dette publique (50 % du PIB) est principalement externe, mais largement auprès de créanciers bilatéraux et multilatéraux, dont la part concessionnelle est élevée.
- Vulnérabilité extérieure : Malgré des exportations soutenues en 2022 (or et fer), le déficit courant est resté élevé (-11,6 % du PIB) en raison des prix élevés du pétrole et des importations de biens d’équipement. A moyen terme, les perspectives d’exportations gazières permettraient la réduction d’un déficit courant structurel élevé. Les entrées d’IDE et des réserves confortables limitent les risques de change.
- Vulnérabilité du secteur bancaire : Après la détérioration liée à la pandémie, l’adoption des normes prudentielles de Bâle III a permis de commencer à améliorer la situation. Toutefois, le secteur bancaire fait face à un risque systémique avec certaines banques insuffisamment solides, un taux de NPL encore très élevé (22,7 % fin 2021) et des provisions relativement faibles (58,4 % des NPL).
Situation économique
Un secteur extractif qui porte le dynamisme économique en 2022
Les activités extractives ont porté la reprise post-covid avec une croissance d’environ +4 % en 2022 (+2,4 % en 2021 et -0,9 % en 2020). La production croissante 1 et la forte demande mondiale pour le fer et l’or ont soutenu les exportations. De plus, le secteur de la pêche (environ 30 % des exportations) a repris (+12,9 % de captures en g.a sur les 3 premiers trimestres). L’investissement public pour renforcer les capacités d’exploitation du secteur minier a positivement contribué à la croissance de l’activité tandis que l’investissement privé est resté soutenu dans le secteur de l’énergie (gaz et renouvelables) afin d’accroître les capacités de production.
La croissance devrait profiter de la production de gaz à court-terme
La croissance accélèrerait en 2023, atteignant entre +4,8 % et +6,1 % selon les différents instituts de prévision. La production de gaz démarrerait dès le T3 2023, selon Fitch, avec le projet offshore de Grand Tortue Ahmeyim à la frontière avec le Sénégal. De plus, les investissements publics et étrangers se poursuivraient dans les projets gaziers mais aussi dans le secteur agroalimentaire (demande domestique croissante et potentiel d’exportations). Toutefois, le ralentissement de la demande mondiale, notamment en Europe (20 % des exportations de minerais de fer), et l’incertitude autour de l’ampleur du rebond de la demande chinoise (66 % des exportations de minerais de fer) pourraient affaiblir les perspectives du secteur minier.
La Mauritanie se dirige vers une économie basée sur les hydrocarbures
Le FMI prévoit une croissance moyenne de +8,1 % entre 2024 et 2027 grâce aux retombées croissantes de la production de gaz, d’ENR, mais aussi d’uranium. De plus, les investissements du gouvernement pour augmenter la production minière (modernisation et construction d’installations) devraient porter leurs fruits. Le manque de capital humain reste cependant un problème pour la productivité du pays (faibles dépenses publiques de santé et d’éducation).
Finances publiques
En 2022, malgré un redressement des recettes permis par un secteur extractif en pleine expansion, de fortes pressions sur les dépenses (subventions sur le carburant et les aliments de base notamment pour faire face à l’inflation) ainsi que des investissements dans les projets énergétiques et miniers ont fait chuter le solde budgétaire en déficit (-2,1 % du PIB selon le FMI) pour la première fois depuis 2016.
Les perspectives restent favorables à moyen terme avec les revenus gaziers, améliorant fortement la position budgétaire dès 2024. Toutefois, les recettes publiques resteraient intimement dépendantes de l’évolution des cours mondiaux des minerais de fer (17 % du budget public de 2022 provient du fer), à laquelle s’ajouterait donc une dépendance aux cours du gaz.
Le FMI classe toujours le pays en situation de surendettement. L’endettement public reste relativement élevé (55,5 % du PIB en 2022) et le service de la dette reste également important (6,4 % du PIB en 2021).
Position extérieure
En 2023, le solde courant resterait très déficitaire (-9,1 % du PIB selon le FMI), en raison d’une dynamique soutenue des importations (prix toujours élevés du pétrole, des besoins d’importations d’équipement conséquents) et d’exportations de minerais qui pâtirait probablement d’un tassement des prix. A moyen-terme, avec le début des exportations de gaz attendu fin 2023- début 2024, le déficit devrait converger et se stabiliser autour de -5 % du PIB selon le FMI.
Les réserves sont confortables et les IDE dans les secteurs miniers et gaziers sont importants et financent le déficit courant. De plus, en 2022, des exportations dynamiques de fer et d’or et le soutien des créanciers internationaux ont permis à l’ouguyia de se renforcer face à l’euro (+10 %).
Aspects politiques
Élu Président en 2019, Mohamed Ould Ghazouani reste le principal favori à sa réélection en 2024 face à une opposition divisée et soumise à une forte répression. La pauvreté, le chômage, l’inflation, l’insécurité alimentaire, l’instabilité au Sahel (terrorisme et conflit au Sahara occidental) et la sous-représentation politique des Haratines (descendants d’esclaves, 40 % de la population) représentent des risques d’instabilité sociale. Les manifestations se font croissantes mais restent limitées et durement réprimées. Le climat des affaires est toujours médiocre (152/190 au classement Doing Business en 2020), entaché de la corruption, de l’insécurité juridique et du manque de transparence politique et d’inclusion financière.
Climat et Environnement
La Mauritanie est classée 143ème au classement ND Gain et fait partie des pays les plus exposés au monde aux conséquences du changement climatique, notamment à cause de la désertification. Le pays est déjà en proie à des menaces sur la sécurité alimentaire (800 000 mauritaniens seraient en situation de stress alimentaire) Cette situation est exacerbée par les sécheresses et inondations de plus en plus fréquentes qui menacent les capacités agricoles.