Auteur : Assistance Publique des Hôpitaux de Paris
Site de publication: Entraide santé
Type de publication: Rapport
Date de publication: 2023
Introduction
Cette mission est la deuxième mission d’un projet soumis à la DGOS pour 2 ans s’intitulant : « Aide à l’organisation du parcours de soins du patient vulnérable au CTA de Nouakchott et renforcement des capacités des soignants pour le suivi des populations particulières ». Ce projet porte sur la promotion de la santé sexuelle, le dépistage et le traitement des IST, la prévention et le dépistage des lésions à papillomavirus et du cancer du col de l’utérus, la prévention de la transmission des infections de la mère à l’enfant, et de façon plus générale sur la promotion de la santé des femmes, des enfants, et des populations vulnérables.
La Mauritanie : rappels du contexte
La couverture sanitaire globale est faible, avec par exemple 60% des femmes accouchant dans une structure de soins, 50% des tuberculoses traitées, et une couverture vaccinale d’environ 60%. Aucune organisation des soins en santé sexuelle n’est disponible, en dehors des services de santé maternelle et infantile et des maternités. La prévalence du VIH en Mauritanie est faible, estimée autour de 0,29% (0,1% à 0,3%), avec une dynamique de stabilité depuis ces dix dernières années, excepté à Chami (240 km au Nord de Nouakchott), ville où la découverte d’or a triplé la population en 5 ans.
Gynécologie/obstétrique
Il y a au total 50 lits d’hospitalisation (gynécologie et maternité), 3800 accouchements par an.
En Mauritanie, l’âge légal du mariage est de 18 ans, mais l’âge religieux 15 ans. Il y a en moyenne 6 enfants par femme. Le taux de mortalité maternelle est de 500 pour 100 000. Le taux de césarienne est de 37 % au CHNN (versus 8% dans toute la Mauritanie), et est en augmentation constante.
L’excision est interdite par la loi depuis 1989 (ce qui est appuyé par les autorités religieuses), mais encore fréquemment observée. L’IVG et l’IMG sont interdites, sauf IMG pour motif maternel.
Suivi des femmes enceintes
Normalement, une consultation mensuelle est recommandée, rarement suivie. Il est prévu une échographie de croissance à chaque consultation. L’échographie morphologique obstétricale n’est quasiment pas pratiquée.
Le dépistage du VIH est réalisé en début de grossesse. Mais si la patiente n’est pas suivie ou n’a pas eu de dépistage à l’entrée en travail, il est juste réalisé un test VHB. Le test VIH n’est réalisé que si l’état général est altéré. Les patientes VIH+ sont mises au fond de la salle.
Accouchement
Les patientes restent en salle d’accouchement dès le travail engagé, avec perfusion, et sonde urinaire à demeure. Il y a peu de prise en charge de la douleur. L’utilisation de l’anesthésie péridurale a débuté en 2022 (11 accouchements sous péridurale), limitée par le coût et la disponibilité de l’anesthésiste, mais le projet du chef de service est d’en augmenter l’usage. Les pertes sanguines ne sont évaluées que visuellement. En cas d’hémorragie du post partum, les moyens de recours sont l’acide Tranexamique, le packing endo-utérin, et l’utilisation d’un préservatif rempli d’eau placé dans la cavité utérine.
L’hémorragie de la délivrance : un sac de recueil des saignements actuellement inexistant doit être mis en place systématiquement pour toutes les patientes (bassin gradué/adaptation d’une poche de recueil urinaire graduée déjà existante dans le service).
La douleur : 2 ateliers de compagnonnage sur la prise en charge de la douleur lors de l’accouchement (2 ballons de grossesse amenés et laissés au service) ont été réalisés en ce sens, avec une excellente adhésion des sage-femmes mais aussi d’un anesthésiste, d’un infirmier et de résidents…
La confidentialité : il a déjà été demandé d’installer 2 rideaux entre les 2 tables d’accouchement des 2 premiers box en salle de naissance. Actuellement les femmes sont côte à côte dans ces 2 premiers box.
Possibilité de faire le toucher vaginal aux urgences car la patiente peut y être seule avec le soignant. Également de recevoir une à une les femmes dans le cabinet de consultation car actuellement elles rentrent souvent deux par deux avec leur accompagnant et il n’y a aucun secret médical possible, ce qui fait que certaines refusent parfois de venir se faire suivre.
Identitovigilance : des bracelets sont maintenant mis au bébé dès la naissance. Il n’y a pas de bracelet pour les mères, sachant que très souvent, elles ne connaissent pas leur date de naissance et que les noms de famille sont souvent similaires et les prénoms souvent avec diminutif.
La traçabilité des dossiers : aucun monitoring n’est fait durant le travail. Il a été proposé et déjà demandé aux résidents lors des staffs du matin, d’imprimer les monitorings ou de les photographier avec leurs téléphones portables. Le cœur du bébé est actuellement écouté ponctuellement quelques minutes et non enregistré ni noté dans le dossier. L’amélioration du dépistage des IST et des cancers (sein et col).
Il n’y a pas d’examen des seins ni de dépistage systématique alors qu’il s’agit du premier cancer chez la femme en Mauritanie. Au niveau social, il existe 3 situations : les patientes ayant une assurance (fonctionnaire…) qui avancent les frais et sont remboursés complètement, les autres sans assurance à qui l’on demande de payer 40 % des soins et qui peuvent payer et ceux appelés les “indigents” qui ne peuvent pas payer du tout et sont quand même pris en charge pour l’accouchement. Il n’existe pas de campagne de dépistage gratuit des populations.
Une sensibilisation aux excisions et à la violence : un atelier a été réalisé avec des planches anatomiques qui ont été laissées à la maternité avec les sage-femmes et étudiantes, présentes ce jour-là. Des violent mètres en français et en arabe ont été distribués aux sage-femmes, ainsi qu’un guide de santé sexuelle en arabe. Une discussion concernant l’excision, interdite par la loi mauritanienne, mais encore pratiquée et présente dans les mentalités de certaines ethnies mauritaniennes très représentées (Soninkés et peuls) a été réalisée.
Une sensibilisation au diabète gestationnel : une sensibilisation sur le dépistage systématique après 35 ans, les antécédents, et l’IMC de la patiente a été réalisé en salle de naissance. Des conseils alimentaires concernant la période du ramadan ont également été abordés avec les sage-femmes et étudiantes, dans le but de limiter les complications obstétricales fréquentes (macrosomie, hydramnios, dystocie des épaules, césariennes, retards de résorption et malformations des nouveau-nés).
Recommandations et perspectives
- Dépistage des IST
- Renforcement des capacités pour le diagnostic bactériologique au CHN
- Amélioration de la prise en charge du VIH et des Infections opportunistes
- Optimisation des procédures de suivi et du circuit des femmes enceintes à la Maternité