Auteurs : Allioum Tondandi, Remadji Hoinathy
Organisations affiliées : Institut d’études de sécurité
Type de publication : Article
Date de publication : 8 Avril 2024
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Depuis plus de vingt ans, les kidnappeurs terrorisent les habitants des provinces tchadiennes du Mayo-Kebbi Ouest et du Logone Oriental, situées dans le sud du pays. Entre 2020 et 2023, le nombre de victimes et le montant total des rançons versées par leurs familles ont fortement augmenté, selon une étude de l’Institut d’études de sécurité (ISS).
Les organisations non gouvernementales locales des deux provinces ont déclaré à l’ISS qu’en 2022, 46 personnes ont été enlevées, 12 assassinées et 42 925 000 FCFA ont été versés comme rançon dans le Logone Oriental. En 2023, 41 personnes ont été enlevées, huit ont été tuées, deux sont portées disparues et 52 405 000 FCFA ont été versés dans le Mayo-Kebbi.
La situation sécuritaire générale dans cette zone n’a cessé de se détériorer en raison de décennies de conflits armés sporadiques dans les pays du bassin du lac Tchad et de l’émergence de Boko Haram au début des anées 2000. L’incapacité des pays à juguler la violence et à maintenir la sécurité aux frontières confère à ce problème une dimension transfrontalière.
La situation sécuritaire générale dans cette zone n’a cessé de se détériorer en raison de décennies de conflits armés sporadiques dans les pays du bassin du lac Tchad et de l’émergence de Boko Haram au début des années 2000
Le Tchad est toujours en proie à diverses menaces sécuritaires, notamment la prolifération des armes à feu due aux conflits internes successifs et aux retombées des conflits dans les pays voisins, à savoir la Libye, le Soudan et la République centrafricaine. Les réseaux criminels au Cameroun se sont également renforcés, selon les recherches de l’ISS, avec une augmentation des enlèvements et de la circulation des armes dans les régions du nord du pays limitrophes du Tchad et de la RCA.
Au Tchad, les ravisseurs sont principalement issus des communautés transfrontalières peules, arabes et haoussas. Selon des témoignages recueillis par ISS Today, leurs complices locaux sont des autorités traditionnelles et des jeunes, qui les renseignent sur les personnes à kidnapper. Toute personne considérée comme riche dans le village ou le district peut être ciblée, notamment les commerçants, les éleveurs, les agriculteurs, les fonctionnaires et le personnel des ONG ainsi que leurs enfants et leurs conjoints.
Bien que la plupart des enlèvements soient motivés par un gain financier, les victimes sont parfois assassinées malgré le versement d’une rançon. Toute personne considérée comme une menace pour l’activité de kidnapping est en danger.
La zone frontalière entre le Tchad, le Cameroun et la République centrafricaine est une véritable poudrière criminelle qui nécessite une action rapide des trois gouvernements.
La nature transfrontalière des enlèvements rend la collaboration entre les trois pays indispensable. Celle-ci devrait inclure la mise en place de mécanismes de coopération, de patrouilles conjointes et d’un échange permanent d’informations entre les différentes forces.