Marcelin Ouédraogo
S’il y a bien un mot qui a été beaucoup utilisé lors de ces élections présidentielle et législatives, c’est bel et bien le mot « insécurité ». Pour l’ensemble des candidats, faire du Burkina Faso un pays sûr et sécurisé est la proposition sur laquelle ils semblent tous être d’accord. Cette insécurité, tellement indexée dans les discours des candidats, est parvenue à faire occulter les autres secteurs vitaux de notre pays.
Pour le président sortant Kaboré, la difficulté dans la lutte contre le terrorisme est le fait des forces de défense et de sécurité qui n’étaient pas formées pour des guerres non conventionnelles. Aujourd’hui affirme-t-il, les forces de défense et de sécurité accompagnées par les volontaires pour la défense de la patrie sont plus aguerries et obtiennent des résultats probants sur le champ de bataille.
Face à lui, l’ensemble des aspirants à la fonction présidentielle indexent l’incapacité du président sortant à assurer la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire national. Les différents candidats promettent aux Burkinabé la sécurité, avec des délais prédéfinis pour certains, si les électeurs portent en eux leur confiance au soir du 22 novembre prochain.
Qu’en est-il des solutions réelles ?
Les discours des hommes politiques réputés très souvent démagogiques semblent être une réalité à l’écoute de l’ensemble des membres de la classe politique. Le candidat élu au soir du 22 novembre est-il capable de mettre fin au terrorisme ? La réponse à cette question mérite à priori une longue argumentation.
Pour le président sortant Kaboré, la difficulté dans la lutte contre le terrorisme est le fait que les forces de défense et de sécurité n’étaient pas formées pour des guerres non conventionnelles
D’abord, le terrorisme dans notre région est une criminalité transnationale. En ce sens qu’aucun pays ne peut aujourd’hui lutter seul contre ce phénomène. D’où l’importance pour le locataire du palais de Kossyam pour les cinq prochaines années à s’engager en marge du G5 Sahel auprès des pays voisins les plus touchés. En effet, les frontières Nord (Mali) et Est (Niger) du pays sont les plus touchées.
La solution serait de multiplier les opérations conjointes aux frontières avec les pays susmentionnés. Il faut donc fermer les portes d’entrée et de sortie de ces terroristes.
Ensuite, il faudrait mener la lutte contre le terrorisme au niveau local. L’opération Otapuanou menée par l’armée nationale a eu de très bons résultats mais, a manqué de suivi. L’homme apprenant de ses erreurs, doit faire de cette erreur, un point de départ pour une réussite éclatante.
Ainsi donc, il est impératif de lancer des opérations identiques à celles d’Otapuanou. Il s’agit d’abattre une puissance de feu sur l’ennemi par une offensive sur les sites abritant les terroristes. Il faut souligner que les sites abritant ces terroristes sont connus. Il est connu de tous qu’aujourd’hui pour rejoindre la ville de Pama dans l’Est, il faut passer par le Togo ou atteindre Pama en passant l’arme à gauche.
A la différence de la première opération qui était isolée, il faut que les prochaines soient lancées simultanément. Il faudrait que les offensives soient lancées sur les différents sites du Nord, du Centre-nord, du sahel et de l’Est.
Il s’agit d’abattre une puissance de feu sur l’ennemi par une offensive sur les sites abritant les terroristes. Il faut souligner que les sites abritant ces terroristes sont connus
Aussi, la collaboration interne et externe doit permettre de lutter contre cette criminalité transnationale. Au niveau interne, le gouvernement a fait le choix des volontaires pour la défense de la patrie. Ce groupe armé issu des populations permet de pallier au déficit du maillage sécuritaire. Cependant ces groupes armés doivent être encadrés par les forces de défense et de sécurité.
Au niveau externe, la force Barkhane est un partenaire important engagé auprès des pays du sahel dans la lutte contre le terrorisme. Aussi, la Côte d’Ivoire et le Bénin doivent impérativement s’engager à leurs frontières respectives au regard des incursions déjà énumérées.
Combattre ou négocier?
Enfin, il faudrait appliquer la plus grande sagesse de la guerre. Laisser une porte de sortie à l’ennemi. En effet, Sun Tzu dans son livre L’art de la guerre affirmait que lorsque l’ennemi est cerné de toute part, il faudrait lui laisser une issue car à l’image de l’homme qui se retrouverait dos au mur, il n’aura d’autre choix que de se défendre avec plus de fougue.
Au niveau interne, le gouvernement a fait le choix des volontaires pour la défense de la patrie. Ce groupe armé issu des populations permet de pallier au déficit du maillage sécuritaire. Cependant ces groupes armés doivent être encadrés par les forces de défense et de sécurité
Laisser une issue aux terroristes n’est pas de les laisser se reconstituer mais plutôt d’accepter les désertions. Faire de ces déserteurs un espoir pour ceux qui voudraient suivre leurs pas doit être une option. La négociation pourrait donc intervenir dans cette phase-là. Mais force est de reconnaitre que la négociation avec les terroristes est très difficile en ce sens qu’il existe dans la bande sahélienne une multitude de groupes terroristes avec différents objectifs.
Pour répondre à la question précédemment posée, nous disons que la lutte contre le terrorisme est bel et bien possible. Cependant, elle ne peut se faire par coup de bâton magique. Il faudrait donc une stratégie qui s’étendrait sur une période plus moins longue.
Crédit photo : burkina24.com
Marcelin Ouédraogo est un citoyen burkinabé qui s’intéresse aux questions sécuritaires au Sahel.