Auteur : UNESCO
Site de publication : UNESCO
Type de publication : Article
Date de publication : 9 décembre 2021
Lien vers le document original
Le gouvernement fédéral s’est engagé en faveur d’une éducation de base obligatoire pour tous les enfants nigérians. Mais l’impact de cet engagement et la possibilité d’offrir la même qualité d’enseignement à tous les jeunes du pays sont plombés par des facteurs socioéconomiques et des problèmes de sécurité dans plusieurs parties du pays.
Suite à la récession de 2016, la reprise est lente au Nigéria, après une chute cumulée de 23 % du revenu national entre 2011 et 2017. La faible fiscalité du pays et l’impact économique de la pandémie de Covid-19 ont également limité les ressources financières pour les services publics.
Ces trois dernières années, le gouvernement fédéral n’a consacré que 1,4 % de son produit intérieur brut au secteur de l’éducation
Ce chiffre est bien inférieur aux 4 à 6 % recommandés dans le Cadre d’action Éducation 2030 de l’UNESCO pour parvenir à une éducation inclusive et équitable et à la généralisation de l’apprentissage tout au long de la vie.
Des ressources limitées dans un contexte d’explosion démographique
La faiblesse de l’investissement public au Nigéria et la forte croissance démographique (croissance plus rapide que la moyenne continentale avec un taux de 2,7 % par an) limite les capacités du pays à fournir un enseignement de qualité. À ce jour, la moitié des plus de 200 millions d’habitants du Nigéria est en âge d’aller à l’école, ce qui réduit le budget disponible pour un nombre considérablement accru d’élèves.
Au cours des dix dernières années, le nombre d’enfants en âge d’être scolarisés a augmenté de 23 millions. Dans ce contexte, le gouvernement a du mal à fournir les ressources nécessaires aux écoles et aux enseignants, et à gérer l’afflux de nouveaux élèves dans le système éducatif.
Les frais scolaires sont un obstacle pour certains ménages
La faiblesse de l’investissement public contraint nombre de parents à payer le coût de la scolarité de leurs enfants, qui augmente avec le niveau d’études. Les dépenses des ménages couvrent les frais de scolarité, le coût des uniformes, des manuels scolaires, des supports pédagogiques et les frais annexes comme le transport et les repas, ce qui représente, en moyenne, plus de la moitié du budget des ménages.
Des calculs de 2018 indiquent que la pauvreté touche 46,4 % de la population nigériane et que 53 % des familles vivent avec moins de 1,90 dollar étasunien par jour. L’éducation est donc loin d’être prioritaire pour certains ménages qui ont déjà du mal à satisfaire leurs besoins fondamentaux.
Par conséquent, même si l’enseignement primaire est censé être gratuit et obligatoire, environ 10,5 millions d’enfants entre 5 et 14 ans sont déscolarisés. Pour au moins 22 % de ce segment de la population, c’est en raison du coût.
Même en comptant les frais payés par les ménages, le total des dépenses pour l’éducation au Nigéria est inférieur à la moyenne régionale ou continentale, ce qui souligne à quel point la hausse de l’investissement public dans l’éducation est fondamentale pour offrir un enseignement de qualité.
Le tableau est encore plus sombre dans le nord, du fait de la crise sécuritaire
La pauvreté touche 80 % de la population du nord du pays. Les familles ayant du mal à payer les frais de scolarité, seule la moitié environ des enfants de cette région vont à l’école primaire. Outre les barrières économiques et les normes socioculturelles qui bloquent l’accès des enfants aux écoles formelles, les parents sont confrontés à une autre menace pour l’éducation de leurs enfants : l’insécurité.
On estime que plus de 1 400 écoles ont été détruites, endommagées ou pillées, principalement au nord-est du pays, et que plus de 600 000 enfants n’ont plus accès à l’éducation
Le Nigéria fait partie des pays où les conflits touchent le plus les enfants avec, notamment, le plus grand nombre d’enfants recrutés par des groupes armés.
Des attaques répétées contre les écoles, les universités, les enseignants et les élèves par Boko Haram ont fragilisé l’ensemble du système éducatif. On estime que plus de 1 400 écoles ont été détruites, endommagées ou pillées, principalement au nord-est du pays, et que plus de 600 000 enfants n’ont plus accès à l’éducation.
Dans ce contexte d’insécurité, près de 300 filles d’un internat de l’État de Zamfara ont été enlevées en février 2021. Elles ont été relâchées saines et sauves mais cet événement souligne la nécessité de garantir la sécurité des écoliers et de leurs enseignants pour que les parents n’aient pas peur d’envoyer leurs enfants à l’école.
Scolariser les enfants lors d’une crise sanitaire mondiale
Le problème de la déscolarisation des enfants ne se limite pas au nord du pays. Des estimations de l’UNESCO montrent que plus de 12 % des enfants déscolarisés d’Afrique subsaharienne vivent au Nigéria. Ce pourcentage pourrait encore augmenter suite aux fermetures d’écoles liées à la pandémie de Covid-19, et à la déscolarisation des enfants partis travailler pour compléter le revenu de leurs familles.
Ayant tiré les leçons des crises précédentes, le ministère fédéral de l’Éducation s’est engagé à garantir soutien et égalité aux élèves les plus vulnérables et à s’assurer que tous les enfants puissent poursuivre leur scolarité.
La pandémie de Covid-19 n’est que la dernière difficulté en date pour le système éducatif nigérian. S’il reste encore beaucoup à faire pour augmenter les investissements publics dans l’éducation et atteindre l’éducation de base universelle, des progrès significatifs ont été réalisés. Citons parmi ces progrès la mise en œuvre de réformes structurelles et politiques visant à renforcer l’éducation de base gratuite et obligatoire, la mise en œuvre de stratégies encourageant une scolarisation massive, l’égalité de genre, des pratiques proactives de formations des enseignants et l’amélioration des financements.
Polycarp Omondi Otieno, analyste et planificateur des politiques éducatives, explique : « L’analyse du secteur de l’éducation au Nigeria, et en particulier l’accent mis sur les États de l’OAK, a révélé d’importantes disparités qui sont souvent masquées par une analyse au niveau national. Le Nigeria peut servir d’étude de cas pour renforcer l’analyse sous-nationale dans d’autres pays où l’IIPE-UNESCO intervient. »