Auteur : Sampson KWARKYE
Site de Publication : Institut d’Etudes de Sécurité
Type de Publication : Article
Date de publication : 26 octobre 2018
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Depuis plus de 25 ans, le Ghana a instauré progressivement des pratiques démocratiques tout en maintenant une paix et une stabilité relatives. Le pays a traversé sept élections successives sans violences à grande échelle, et trois alternances pacifiques entre ses deux principaux partis : le Nouveau parti patriotique (NPP) et le Congrès national démocratique (NDC).
La controverse sur les résultats de l’élection présidentielle de 2012, remportée par le NDC, a été résolue pacifiquement par les tribunaux. Quatre ans plus tôt, le pays avait échappé à des violences politiques étendues malgré une victoire électorale extrêmement étroite du NDC.
Cependant, le NDC et le NPP, qu’ils soient dans l’opposition ou au gouvernement, s’appuient de plus en plus sur les groupes d’autodéfense, essentiellement composés de jeunes chômeurs, pour assurer la sécurité lors de leurs campagnes et garantir leur victoire électorale. Ces groupes mobilisent les partisans et servent d’agents de contrôle lors de l’inscription des électeurs, du vote et de la compilation des résultats. Ils assurent également la sécurité des centres de vote et du matériel électoral.
Avant les élections de 2016, plus de 5 000 circonscriptions électorales ont été déclarées « zones critiques » par le Service de police du Ghana (GPS), parfois, mais pas toujours, en raison des activités des groupes d’autodéfense.
Cependant, le NDC et le NPP, qu’ils soient dans l’opposition ou au gouvernement, s’appuient de plus en plus sur les groupes d’autodéfense, essentiellement composés de jeunes chômeurs, pour assurer la sécurité lors de leurs campagnes et garantir leur victoire électorale
Le GPS mentionnait comme autres facteurs de violence les litiges fonciers, les querelles de chefferie et la prolifération des armes illicites dans le pays. Par ailleurs, les scrutins de 2008 et 2012 ont également mis en évidence un « vigilantisme » violent et le phénomène, selon l’expert en sécurité, Kwesi Aning, a empiré.
Les « Azorka Boys », fidèles au chef Awudu Sofo Azorka, président régional du Nord du NDC, dont ils ont emprunté le nom, et les « Aluta Boys » sont connus pour être affiliés au NDC. Les groupes tels que le « Delta Force » (les « Invincibles Forces ») sont, quant à eux, proches du NPP.
Récemment, Joseph Yamin, ancien vice-ministre de la région d’Ashanti, a créé les « Hawks » pour protéger le NDC à l’approche des élections de 2020. Avec le soutien de personnalités connues du parti, ces groupes menacent, intimident et agressent souvent les responsables des scrutins et vandalisent les centres d’inscription. Les groupes affiliés au parti vainqueur s’emparent fréquemment des biens et des administrations publics et, dans certains cas, s’opposent violemment aux nouvelles nominations gouvernementales qu’ils désapprouvent.
En 2017, la nomination de George Agyei par le président Nana Akufo-Addo au poste de coordonnateur régional de la sécurité pour la région d’Ashanti a provoqué la colère du Delta Force. Les membres du groupe avaient alors fait irruption dans le bureau de l’homme politique pour l’en sortir de force après l’avoir agressé. Le groupe estimait qu’Agyei, qui n’avait pas contribué à la victoire du NPP, ne méritait pas cette position. Lorsque les assaillants ont été arrêtés et traduits en justice, des membres du groupe sont entrés dans la salle d’audience, ont libéré leurs camarades et menacé le juge.
Ces groupes s’en prennent volontiers aux membres de leur propre parti au sein du gouvernement lorsqu’ils considèrent que les promesses qui leur ont été faites ne sont pas respectées. Le 7 octobre, des membres du Delta Force auraient attaqué Anthony Osei Akoto, député du NPP et ministre chargé du suivi et de l’évaluation, lors d’une réunion du parti dans sa circonscription, suite aux promesses non tenues de les recruter dans les services de sécurité.
L’absence apparente d’indépendance de la police est renforcée par le remplacement de certains de ses responsables et ceux d’autres institutions chargées de la sécurité, notamment le Bureau national des enquêtes, qui accompagne habituellement un changement de gouvernement
Un changement de gouvernement est souvent marqué par la saisie de postes de péages, de toilettes publiques, de gares, de sites touristiques et d’installations de santé publiques, entre autres initiatives considérées comme des opportunités commerciales. Tant au sein du NPP que du NDC, le parti perdant s’est souvent plaint du harcèlement et de la mainmise sur leurs biens par ces groupes. Dans certains cas, les personnels des services ou établissements gouvernementaux sont soit agressés soit expulsés de force.
Le secteur privé dépend des contrats publics et des largesses gouvernementales. Le NPP et le NDC se sont souvent mutuellement accusés d’être à l’origine de la faillite des entreprises du parti de l’opposition et de distribuer d’importants contrats à leurs partisans et entreprises alliées. Les politiciens usent de leur influence pour déterminer qui doit bénéficier de permis, de prêts et de postes dans le secteur public.
Le pouvoir exécutif est particulièrement puissant puisque le président peut procéder à plus de 4 000 nominations directes, y compris celles de responsables municipaux et de districts. Une victoire électorale améliore donc instantanément le statut socio-économique de certains.
En outre, les partis de l’opposition ont peu confiance dans les services de police, particulièrement en période électorale. Confier la sécurité de leurs candidats présidentiels et colistiers ainsi que celle de leur équipe de campagne à un service de police sur lequel ils n’ont aucun contrôle représente, à leurs yeux, un trop grand risque.
Dans la course aux élections de 2016, trois anciens officiers de police sud-africains, recrutés pour former les gardes du corps du candidat à la présidence du NPP et de son colistier, ont été arrêtés et expulsés. Sammy Awuku, alors dans le mouvement des jeunes du NPP, avait déclaré que le parti « prenait des mesures pour protéger au maximum leur candidat à la présidentielle et son colistier que les Sud-Africains aient été renvoyés chez eux ou non».
L’absence apparente d’indépendance de la police est renforcée par le remplacement de certains de ses responsables et ceux d’autres institutions chargées de la sécurité, notamment le Bureau national des enquêtes, qui accompagne habituellement un changement de gouvernement.
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