Auteur : Morgane Le Cam
Site de Publication : Le Monde Afrique
Type de Publication : Article
Date de publication : 05 octobre 2020
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Hama Amadou n’a pas l’intention de voir l’élection présidentielle nigérienne se dérouler sans lui, le 27 décembre. Le chef de file de l’opposition a annoncé sa candidature le 19 septembre. Mais la Cour constitutionnelle pourrait l’invalider en raison de sa condamnation, en 2017, à un an de prison ferme dans une affaire sordide et controversée.
Selon la justice nigérienne, le chef du parti Moden Fa Lumana aurait participé à un vaste trafic de bébés, achetés au Nigeria voisin et vendus à des familles au Niger.
« Une candidature doit-elle se faire dans le respect des textes qui régissent le Niger ou à la tête du client, en fonction des risques qu’elle représente pour le PNDS ? », fait mine de s’interroger M. Amadou. Avant d’assurer : « Tout ce qu’ils racontent sur moi est faux ! Cette fois, il est hors de question que mes partisans et moi les laissions utiliser des artifices juridiques pour m’écarter de la course. »
Selon l’article 8 du Code électoral que brandissent ses adversaires, les citoyens condamnés à une peine de prison ferme d’un an ou plus ne peuvent être candidat.
Le chef de file de l’opposition, lui, préfère mettre en avant la Constitution de son pays, selon laquelle les Nigériens « de nationalité d’origine », « jouissant de leurs droits civils et politiques » sont éligibles à la présidence.
Depuis son siège de campagne, Mohamed Bazoum affirme qu’il prend toutes ces accusations avec sérénité : « Il sous-entend que je ne suis pas nigérien… Ça ne me fait rien, il me fait juste pitié, lui rétorque-t-il. Hama est un homme qui essaie de souffler en vain sur les braises. Il réduit la politique à sa personne. Nous, on l’a affaibli politiquement. On l’a mis hors d’état de nuire. »
- Amadou, ancien premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale, est la bête noire du pouvoir depuis des décennies. Au sein de l’opposition, il conserve sa capacité de mobilisation, dans la rue comme dans les urnes. En 2016, malgré une campagne menée depuis sa cellule, M. Amadou se qualifia pour le second tour, avant de finir écrasé par M. Issoufou : 92,5 % des votes pour l’actuel président, à peine 6 % pour lui. « Faux second tour », avaient alors fustigé ses proches, dénonçant, à l’instar d’observateurs tels que l’ONG américaine Freedom House, des irrégularités comme l’achat de votes, le vote de mineurs ou encore le trucage des résultats.
Quatre ans plus tard, l’opposition craint que l’histoire ne se répète.
Pour tenter de barrer la route à la majorité, elle a donc choisi la voie du rassemblement : 18 partis se sont réunis au sein d’une nouvelle alliance électorale baptisée Cap 21.
Tous s’engagent à soutenir le candidat de la coalition arrivé en meilleure position au premier tour en vue du second.
« Ils sont en train de préparer un hold-up électoral, dénonce Ibrahim Yacouba, lui aussi candidat et membre de Cap 21. Tout le processus a été construit unilatéralement par la majorité dans un seul but : maintenir le PNDS au pouvoir. »
« Jusqu’à présent, ils ont pensé qu’on allait continuer à jouer la poire molle. Mais c’est fini. Nous attendons de voir s’ils vont commettre l’erreur de refuser ma candidature. Moi, je n’ai plus rien à perdre », affirme M. Amadou
A Niamey, certains observateurs s’inquiètent de potentiels troubles alimentés par une opposition qui ne semble plus prête au dialogue.
« Jusqu’à présent, ils ont pensé qu’on allait continuer à jouer la poire molle. Mais c’est fini. Nous attendons de voir s’ils vont commettre l’erreur de refuser ma candidature. Moi, je n’ai plus rien à perdre », affirme M. Amadou.
Mais l’opposition est-elle réellement capable de mobiliser un peuple nigérien qui semble davantage préoccupé par sa survie économique que par les tractations politiciennes ? D’aucuns en doutent. M. Amadou, lui, pense au contraire pouvoir compter sur une opinion publique indignée par la multiplication des scandales de corruption présumée.
Le dernier en date, un supposé détournement de fonds de 76 milliards de francs CFA (116 millions d’euros) dans l’achat de matériel militaire au sein du ministère de la défense, avait suscité l’indignation de la rue. Mais la manifestation organisée par la société civile en mars avait été violemment réprimée. « Nos lois sont claires, les citoyens ont le droit de sortir sans demander l’autorisation pour protester », insiste le chef de file de l’opposition, qui avertit : « Ce qui arrivera sera de notre responsabilité, mais largement de leur faute. »
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