Organisation affiliée : Integrated Food Security
Type de Publication : Analyse
Date de publication : Mars 2020
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VUE D’ENSEMBLE
Sévère à quel point ? Combien ? Et quand ?
De la période de juin à octobre, au total 1 région et 19 départements en phase Sérieuse (IPC phase 3) et 2 autres départements en phase Critique (IPC phase 4), correspondant à la période de soudure (pic de la malnutrition). Au total 918 360 enfants de 6 à 59 mois souffriront de la malnutrition aigüe durant l’année 2020 sur la base des résultats de l’enquête SMART nationale de nutrition réalisée entre août et septembre 2019. De la période de novembre 2019 à février 2020, la situation nutritionnelle s’est probablement améliorée avec 1 département en phase Critique, et 3 autres départements et 1 région en phase Sérieuse. A partir de mai 2020, si des dispositions utiles ne sont pas prises, une détérioration assez importante de la situation nutritionnelle sera observée. Ainsi, 2 départements pourrait être en phase Critique, et 1 région et 8 départements en phase Sérieuse.
Où et qui ?
Pour la situation actuelle, 3 régions sur 8 ont été analysées à l’échelle régionale dont une (Tahoua) classée en phase Sérieuse (IPC phase 3) et deux en situation d’Alerte (IPC phase 2) (Niamey et Tillabéri). Au total 34 départements ont été analysés dont 2 en situation Critique (N’Gourti et MaînéSoroa), 19 en situation Sérieuse (N’Guigimi, Boboye, Aguié, Bermo, Dakoro, Gazaoua, GuidanRoumdji, Madarounfa, Mayahi, Tessaoua, Belbedji, DamagaramTakaya, Doungass, Gouré, Kantché, Magaria, Mirriah, Tanout et Tesker) et 13 en situation d’Alerte (Aderbissinat, Bilma, Arlit, Iférouane, N’Gall, Tchirozérine Diffa, Goudoumaria, Dogondoutchi, Dosso, Gaya, Tibiri et Takéta). La situation évoluera avec une amélioration significative probablement entre novembre 2019 et février 2020 avant de connaitre une dégradation à partir de mars 2020.
Pourquoi ?
Les facteurs contributifs majeurs à la malnutrition aigüe varient d’une unité d’analyse à une autre : plus précisément ceux liés à l’apport alimentaire inadéquat, les prévalences élevées des morbidités infantiles, les niveaux d’anémie très élevés, les pratiques d’Alimentation des Nourrissons et des Jeunes Enfants (ANJE) sous optimales, faible accès à l’eau potable et mauvaises conditions d’hygiène et d’assainissement. Les effets négatifs liés à l’insécurité dans les régions de Diffa, Tillabéri, Tahoua et Maradi fondamentalement sont non négligeables et pourraient influer négativement la situation nutritionnelle. L’insécurité alimentaire aigüe des ménages apparait ici comme un facteur contributif mineur dans la plupart des zones analysées.
VUE D’ENSEMBLE DE LA SITUATION ACTUELLE (juin – octobre 2019)
La collecte des données de l’enquête SMART nationale de nutrition a été réalisée entre août et septembre 2019 coïncidant à la période de pic de la malnutrition aigüe. L’analyse de l’IPC AMN effectuée en décembre 2019 correspond ainsi à la période de la diminution des cas de malnutrition aigüe (novembre 2019 à février 2020).
L’analyse IPC AMN au niveau régional a concerné 3 régions dont Tahoua en phase Sérieuse (IPC phase 3), Niamey et Tillabéri en situation d’Alerte (IPC phase 2).
Pour la même période d’analyse, sur les 34 départements des autres régions analysées, 2 sont en situation Critique (IPC phase 4) (N’Gourti et Maïné Soroa), 19 en situation Sérieuse (IPC phase 3) (N’Guigimi, Boboye, Aguié, Bermo, Dakoro, Gazaoua, Guidan-Roumdji, Madarounfa, Mayahi, Tessaoua, Belbedji, DamagaramTakaya, Doungass, Gouré, Kantché, Magaria, Mirriah, Tanout et Tesker) et 13 en situation d’Alerte (IPC phase 2) (Aderbissinat, Bilma, Arlit, Iférouane, N’Gall, Tchirozérine, Diffa, Goudoumaria, Dogondoutchi, Dosso, Gaya, Tibiri et Takéta).
Globalement, les principaux facteurs identifiés causant la malnutrition aigüe au cours de cette l’analyse sont :
- L’apport alimentaire inadéquat avec une diversité alimentaire minimum de 6,3% variant de 4,3%-9,0%. Ce qui montre qu’environ 9 enfants de 6-23 mois sur 10 (93,7%) ne bénéficient pas d’une alimentation diversifiée. Aussi, seulement un enfant de 6-23 mois sur 20 (5,7%) bénéficie d’un régime alimentaire minimum adéquat. Ce résultat prouve qu’environ 9 enfants sur 10 n’ont pas accès à un régime alimentaire adéquat. Néanmoins, la fréquence minimale des repas est fournie à presque 3 enfants de 6-23 mois sur 4 (73,3%). Malgré cette bonne fréquence, l’analyse a montré que l’apport alimentaire inadéquat constitue un facteur majeur de dégradation de la situation nutritionnelle dans l’ensemble des zones analysées due à la mauvaise diversité alimentaire.
- Les prévalences élevées de certaines maladies infantiles notamment le paludisme, la diarrhée et les infections respiratoires aigües (IRA) constituent un facteur aggravant majeur de la malnutrition dans 21 départements pour le paludisme, 20 pour la diarrhée et 18 pour les IRA sur un total de 34 départements analysés. L’anémie constitue également un facteur contributif majeur dans la presque totalité des unités analysées. Cette prévalence est de 61,2% (environ 6 enfants sur 10) chez les enfants de 6 à 59 mois et 49,3% (environ 5 femmes sur 10) chez les femmes au niveau national. A cela il faut ajouter les problèmes liés au faible accès à l’eau potable et aux mauvaises conditions d’hygiène et d’assainissement.
- Les pratiques d’ANJE sous-optimales constituent aussi un facteur aggravant de la malnutrition avec des très faible taux d’allaitement exclusif : 21,1% soit environ 2 enfants sur 10, et la poursuite à 2 ans qui est de 46,2% au niveau national. A cela il faut ajouter l’introduction tardive des aliments de compléments chez 27,3% des enfants à partir de 6 mois.
- L’insécurité alimentaire aiguë selon le Cadre Harmonisé (CH) est un facteur contributif majeur pour la région de Tillabéri et les départements de Bilma, Goudoumaria et N’Guigimi. Elle est facteur mineur pour les 28 autres départements.
- En outre, l’insécurité résiduelle dans les régions de Tillabéri, Diffa, Tahoua et Maradi fondamentalement avec son cortège de mouvements de population, constitue un facteur aggravant de la situation nutritionnelle.
RECOMMANDATIONS POUR L’ACTION
Réponses prioritaires :
Dans les régions et les départements classés selon malnutrition aigüe en situation Sérieuse (IPC phase 3) et plus, des interventions conjointes, urgentes et préventives sont nécessaires pour freiner cette détérioration progressive de la situation nutritionnelle au Niger. Il s’agit entre autres de :
- Utiliser la prévalence MAG cumulée (indice P/T z-scores et/ou PB et/ou Œdème) pour une meilleure estimation du nombre d’enfants malnutris à prendre en charge et garantir le traitement pour tous avec des délais raisonnables ;
- Renforcer le dispositif de détection et prise en charge communautaire des maladies de l’enfant (diarrhée, paludisme et infection respiratoires aigües) ;
- Renforcer les activités visant à améliorer les pratiques d’alimentation des enfants, notamment la diversité alimentaire ;
- Améliorer l’accès des populations vulnérables à l’eau potable et aux services d’hygiène et d’assainissement
- Renforcer les activités visant à réduire le taux d’anémie ;
- Renforcer le plaidoyer pour rendre les actions d’assistance humanitaire et de protection sociale sensible à la nutrition ; et
- Renforcer les mécanismes de coordination des activités de nutrition, santé et de sécurité alimentaire à tous les niveaux pour enrailler la malnutrition aigü
Activités de surveillance et d’actualisation de la situation
Pour garantir une meilleure prise de décision, il est important de considérer :
- Organiser un atelier de restitution des résultats de l’IPC AMN a l’endroit des acteurs de la nutrition, santé et sécurité alimentaire (GTN, SAP/CCA, INS, HCi3N…) ;
- Mettre en place un dispositif pour le suivi des facteurs de risque identifiés par l’analyse IPC AMN ;
- Mettre en place et rendre fonctionnel un comité de pilotage IPC AMN au niveau national ;
- Renforcer la communication entre le secteur de la nutrition et les autres secteurs (sécurité alimentaire, WASH, Santé, Genre, Protection Sociale…) ; et
- Dynamiser le dispositif d’alerte précoce pour la nutrition en organisant des collectes d’information représentative au
niveau administrative 2 (département) en dehors de la période de pic de la malnutrition (juin-septembre) sous le leadership et la coordination de la Direction de la Nutrition.
Facteurs de risques à surveiller :
- Surveillance active des maladies (rougeole, la diarrhée, le paludisme, les infections respiratoires aigue et l’anémie) ;
- Couverture des soins préventifs et curatifs (ANJE, Malnutrition aigüe, Rougeole, Paludisme et IRA) ;
- Evolution de la situation sécuritaire du pays ;
- Déplacement/migrations de la population ; et
- Insécurité alimentaire des ménages
LIMITES DE L’ANALYSE
Les limites majeures de l’analyse IPC AMN demeurent la non disponibilité des données récentes nécessaires à une meilleure appréciation des facteurs contributifs à l’échelle des unités d’analyse. A cela, il faut ajouter le manque de données sur l’eau potable, les conditions d’hygiène et d’assainissement, le genre et les conflits dû à l’omission des structures responsables dans la planification. Par ailleurs, la faible taille de l’échantillon pour la ré-analyse au niveau des 3 régions ainsi que l’insuffisance du temps d’analyse ont aussi constitué une limite.
Résultats de l’insécurité alimentaire du Cadre Harmonise du Cycle de novembre 2019
Les limites majeures de l’analyse IPC AMN demeurent la non disponibilité des données récentes nécessaires à une meilleure appréciation des facteurs contributifs à l’échelle des unités d’analyse
La classification courante des phase d’insécurité alimentaire aigue de l’analyse Cadre Harmonisé (CH) du cycle de novembre 2019 (octobre-décembre 2019) montre que la situation alimentaire est en phase minimale et sous pression pour la majorité des 19 départements classés en situation Sérieuse (IPC phase 3) par l’analyse IPC AMN en situation projetée 1 (novembre-décembre 2019). Parmi les 8 départements classés en situation de Crise alimentaire en courante par le CH à savoir Bankilaré, Ayorou, Ouallam, Banibangou, Abalack, Gouré, Tesker et N’Nguigmi, l’insécurité alimentaire aigue apparait comme facteur contributif major seulement pour Gouré, Nguigmi et Tesker selon l’analyse IPC AMN. Ce qui montre que l’insécurité alimentaire n’est pas la principale cause et confirme le caractère multi-facteur de la malnutrition aigüe au Niger.
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