Auteur : Alain Faujas
Site de publication : Jeune Afrique
Date de publication : 2019
Type de publication : Article
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Le FMI n’a pas tort quand, le 31 juillet 2019, il diagnostique un mieux dans la situation économique du Tchad. Le gouvernement a fait un gros effort pour réduire ses dépenses. Il a notamment rétabli l’équilibre budgétaire en taillant dans la masse salariale de la fonction publique, au prix d’un mécontentement social important. Ses recettes pétrolières ont par ailleurs rebondi grâce à la hausse des cours de l’or noir.
Dans le même temps, la production à l’export a progressé, passant de 36 millions de barils en 2017 à 42,2 millions en 2018, à la suite de la mise en exploitation de nouveaux gisements. Elle pourrait même atteindre 45,2 millions de barils cette année, grâce notamment au démarrage de la production, à la mi-juin, sur le champ Daniela, qu’exploite la China National Petroleum Corporation International Chad (CNPCIC).
Dépendance aux hydrocarbures
Ajoutons à cela que le rééchelonnement de la dette de 1,36 milliard de dollars contractée en 2014 par l’État tchadien auprès du trader Glencore a contribué à alléger le fardeau des remboursements. La dette publique tomberait de 48,2 % du PIB en 2018 à 37 % en 2021. Les réserves publiques, qui étaient à sec en 2017, se reconstituent lentement, de sorte que la menace de faillite qui pesait sur l’État semble désormais écartée.
La menace de faillite qui pesait sur l’État semble désormais écartée
Selon les dernières estimations du FMI, la courbe de la croissance repart à la hausse, passant de – 2,4 % en 2017 à + 2,4 % en 2018 et en 2019, avec + 5,5 % annoncés pour 2020. La Banque mondiale se montre un peu plus optimiste, avec des projections de + 3,4 % en 2019 et de + 5,6 % en 2020. Si ses analyses se montrent conciliantes, le FMI ne manque cependant pas de rappeler que le Tchad est beaucoup trop dépendant du pétrole, qui assure 89 % de ses exportations.
Freins au développement
En octobre 2018, la chambre de commerce, d’industrie, d’agriculture, des mines et de l’artisanat (CCIAMA) a publié un document cadre sur la facilité à faire des affaires au Tchad qui recense les obstacles au développement du secteur privé. La longueur de cette liste explique pourquoi le pays se traîne dans les derniers rangs des classements mondiaux pour son environnement des affaires. Le Tchad n’émarge ainsi qu’au 181e rang sur 190 pays étudiés dans l’édition 2019 du rapport « Doing Business » de la Banque mondiale sur la facilité à réaliser des affaires.
Parmi les freins, citons notamment les insuffisances en matière d’électricité (moins de 10 % de la population y a accès) ainsi que dans les domaines des télécoms et de l’internet ; le recours au gré à gré dans l’attribution des marchés publics – qualifié de « massif » par les rédacteurs du document cadre de la CCIAMA – et le faible respect des règles de concurrence dans l’attribution de ces marchés ; l’absence d’égalité devant la justice ; le non-respect des contrats ; la « généralisation et la banalisation de la corruption » ; l’insuffisance des compétences et l’instabilité dans l’administration ; les contrôles fiscaux, sociaux ou douaniers « brutaux et abusifs » ; le non-règlement de la dette intérieure ; l’existence d’un secteur informel « tentaculaire » et non réglementé ; la grande difficulté à obtenir des financements à un coût abordable ; la faible concertation avec le privé pour l’élaboration des textes régissant l’activité économique…
Austérité payante
En août 2016, alors qu’Idriss Déby Itno entamait son cinquième mandat, le gouvernement a adopté seize « mesures d’urgence » aussi drastiques qu’impopulaires, entrées en vigueur à peine un mois plus tard.
Objectif : redresser les finances publiques en réduisant les dépenses. Deux mesures ont particulièrement déchaîné les passions : la suspension de la bourse annuelle de 360 000 F CFA (environ 550 euros) allouée aux étudiants et la réduction de moitié des indemnités dans la fonction publique pendant dix-huit mois.
En deux ans, la dette intérieure a été réduite, passant d’environ 25 % à 19 % du PIB
Selon la plateforme intersyndicale tchadienne, entre 2016 et 2018, les fonctionnaires civils, soit 92 000 agents, auraient perdu en moyenne un tiers de leurs revenus, soit 100 000 F CFA par mois. Reste que cette politique d’austérité semble avoir porté ses fruits. En deux ans, la dette intérieure a été réduite, passant d’environ 25 % à 19 % du PIB.
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