Auteur : Inna Guenda Séguèda / Burkina Ntic
Type de document : article
Site de l’organisation : burkina-ntic.net
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L’Agence nationale de valorisation des résultats de la recherche (ANVAR) œuvre depuis une dizaine d’années au Burkina Faso pour que les résultats de la recherche ne dorment plus dans les tiroirs mais plutôt qu’ils servent directement au développement. Elle constitue de ce fait une mine d’informations pour chercheurs et utilisateurs.
Au Burkina Faso, les chercheurs trouvent. C’est n’est pas qu’un slogan. Si tous les producteurs agricoles utilisaient des semences améliorées dont les rendements sont de loin supérieurs à ceux des variétés traditionnelles nous atteindrions l’autosuffisance alimentaire. Si les femmes se servaient de technologies comme les égreneuses de maïs ou les presses à karité, elles réduiraient leur temps de travail et augmenteraient leur rendement. C’est dire que des résultats de la recherche scientifique et technologique dans ces domaines existent. Seulement, pour que ces découvertes aient un impact sur le développement économique et social du Burkina elles doivent être connues et exploitées.
Depuis 1965, le Centre National de la Recherche Scientifique et technologique (CNRST ex Centre Voltaïque de la Recherche Scientifique), en charge de la coordination et du contrôle de toutes les activités et des structures nationales ou étrangères sur le territoire national en matière de recherche scientifique et technologique génère des résultats à travers ses quatre instituts. Il s’agit de l’Institut de l’Environnement et de Recherche Agricoles (INERA), de l’ Instituts de Recherche en Sciences de la Santé (IRSS) de l’Institut de Recherche en Sciences Appliquées et Technologies (IRSAT) et de l’Institut des Sciences des Sociétés (INSS).
L’Agence nationale de valorisation des résultats de la recherche (ANVAR) créée en 1996 essaie de pallier l’insuffisance de vulgarisation des découvertes. Organe de la délégation générale du CNRST, elle est chargée de valoriser les résultats de la recherche, de l’invention et de l’innovation technologique produits par les structures de recherche publiques et privées, les inventeurs et innovateurs et centraliser par le CNRST. L’ANVAR les met également à la disposition des utilisateurs potentiels.
Des tiroirs bien pleins !
« Au Burkina Faso beaucoup pensent que les résultats qui viennent d’ailleurs sont les plus intéressantes. Pourtant sur le plan national il y a des résultats surprenants qui sont élaborés par des chercheurs, inventeurs, innovateurs ; de plus ces résultats sont à portée de main des populations » explique Dr Roger Zangré, Directeur de l’Anvar. Il faut donc briser le mythe de ce qui vient d’ailleurs en commençant par la mise à disposition d’informations sur les résultats locaux.
De ce fait, la banque de données en construction de l’Anvar renseigne décideurs, chercheurs, inventeurs, innovateurs, promoteurs, partenaires au développement, utilisateurs et public sur les évolutions dans les différents domaines de la recherche. La banque est constituée à partir de résultats exposés pendant le FRSIT (Forum nationale de la recherche Scientifique et Technologique) qui se tient tous les deux ans depuis 1994, de rapports d’activités des différents instituts de recherche du CNRST, de fiches techniques des chercheurs et des fiches d’enquêtes terrain auprès des inventeurs.
C’est le secteur de l’agriculture qui dispose du plus grand nombre de résultats du fait de son importance pour le pays. Il fournit 30.6% du Produit Intérieur Brut. Par exemple, des chercheurs ont mis au point 14 variétés améliorées de maïs dont le cycle de reproduction est compris entre 74 et 97 jours pour un rendement de 3,5 à 6,5 tonnes à l’hectare. Les variétés de maïs incluent du maïs hybride à haut rendement et la variété Espoir à haut potentiel riche en protéines et bcarotène. Il y a 12 variétés de Niébé dont le cycle de reproduction est compris entre 65 et 70 jours pour un rendement de 0,5 à 1,5 tonnes à l’hectare.
Des données existent également dans les domaines de l’environnement, de la médecine et pharmacopée traditionnelles, des technologies appliquées, des inventions et des innovations technologiques, des sciences sociales et humaines.
Dans leur local situé au quartier Dassasgo secteur 28 de Ouagadougou, on trouve de nombreuses publications scientifiques qui contribuent à la valorisation des résultats dans tous les domaines.
Pour valoriser des résultats innovants, l’agence appuie les chercheurs dans l’élaboration de fiches techniques adaptées. Ce sont des supports confectionnés avec l’appui technique des chercheurs de la structure et qui donnent plus d’informations sur les découvertes.
L’agriculture : la peur de la nouveauté ?
Moumini Zongo est l’un des plus grands producteurs de la province du Namentenga. Sur ses 7 hectares, il produit du petit mil, du sorgho, du niébé et du sésame. Depuis quelques années il utilise des variétés améliorées issues des recherches de l’Institut de l’Environnement et de Recherches Agricole (INREA) et valorisées par l’ANVAR. « Nous nous sommes rendus compte que le cycle de reproduction de nos semences traditionnelles était long et leur production insuffisante. Avant, j’utilisais des semences dont le cycle était de 90 jours maintenant j’utilise des semences de 50 à 60 jours, ainsi j’arrive à vendre et à nourrir ma famille ». Ce producteur a augmenté grandement son rendement grâce aussi à l’utilisation de fertilisants. En outre, à partir de semences de base, M. Zongo produit des semences améliorées certifiées (par les chercheurs) qu’il revend à d’autres producteurs.
Selon les données du ministère en charge de l’agriculture, il serait seulement 6% les producteurs comme M. Zongo qui utilisent les résultats de la recherche pour améliorer leur rendement. Ousmane Ouédraogo, chargé de la production et de la commercialisation des céréales à la Fédération des professionnels agricoles du Burkina (FEPAB) pense pourtant que la production agricole ne peut pas se passer des résultats de la recherche et des innovations technologiques. Seulement notera-t-il : « il y a un sérieux blocage dans l’adoption des nouvelles méthodes parce que les producteurs ruraux sont trop attachés à leur tradition. Pour ce qui concerne les semences par exemple ils ne conçoivent pas pourquoi ils doivent chaque année utiliser des nouvelles ». M. Zongo quant à lui, explique cette réticence par la cherté des semences et la non disponibilité des intrants dans certaines zones. « De toutes les manières ce qui importe le plus pour nous producteurs c’est la pluie ! » conclut-il.
Financer la recherche par ses résultats
Même s’il existe une volonté politique affichée de soutenir la recherche, il n’en demeure pas moins que le plus grand frein à la valorisation c’est le manque de moyens financiers. « Si les résultats ne sont pas valorisés cela n’incite pas les chercheurs à poursuivre leur recherche et sans recherche on ne peut pas développer un pays. Pour que les résultats contribuent au développement il faut valoriser ses résultats sinon il est inutile d’y investir » affirme Dr Zangré pour qui rien ne sert de financer la recherche si l’on ne finance pas la valorisation de ses découvertes.
Ainsi, la mise en place dans les mois à venir d’un fonds de l’Anvar financé par le CRDI (Centre de Recherche et de Développement International) permettra de soutenir la promotion de certains résultats. Ce fond servira à créer et à appuyer la création d’unités de production de technologie et à la valorisation de résultats de recherche. Pour être éligible les chercheurs soumettent un projet à un comité directeur composé de chercheurs, opérateurs économiques et utilisateurs. Le comité choisit les projets les plus porteurs. Avant d’être financés, ces derniers bénéficieront d’une étude de marché.
L’Anvar veut à travers ce fonds de financement investir dans la valorisation pour qu’elle génère en retour des ressources financières qui reviendraient à la recherche.
Les opérateurs économiques peuvent également aider à la valorisation des résultats de la recherche en injectant des découvertes dans leur entreprise. Aussi, les institutions financières peuvent octroyer des fonds aux chercheurs avec l’aval de l’Anvar.
Les résultats de la recherche doivent être accessibles aux utilisateurs par des subventions ou des facilitations dans l’accès des crédits par exemple. Selon Ousmane Ouédraogo tout comme Moumini Zongo, pour valoriser les découvertes, il faut que l’État, au-delà du renforcement des capacités, investisse dans le monde rural.
En somme une meilleure collaboration entre chercheurs, décideurs, opérateurs économiques et utilisateurs permettrait peut être à la recherche scientifique et technologique de combler les espoirs qu’elle a suscités dans nos pays.
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