Auteurs : Matthias Khonke et Lulu Olang
Site de publication : Afrobarometer
Type de publication : Document de politique
Date de publication : Avril 2020
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Introduction
L’éducation est un puissant outil de lutte contre la pauvreté, qui permet une mobilité socioéconomique ascensionnelle et habilite les gens à vivre plus sainement. Mais si le taux mondial d’alphabétisation des adultes continue de croitre, allant de 81% en 2000 à 86% en 2018 (Banque Mondiale, 2019), la problématique de l’accès à une éducation de qualité demeure particulièrement préoccupante en Afrique. Même avant la crise du COVID-19, globalement un enfant sur cinq dans la tranche d’âge 6-17 ans n’allaient pas à l’école ; plus de la moitié de ces enfants vivent en Afrique subsaharienne.
De surcroît, de nombreux élèves africains fréquentent des écoles qui ne sont pas suffisamment équipées, ce qui rend l’environnement d’apprentissage difficile. Par exemple, plus de la moitié des écoles en Afrique subsaharienne n’ont pas accès à des infrastructures de base comme l’eau potable, des équipements destinés au lavage des mains, l’Internet, ou des ordinateurs.
De nombreux gouvernements africains ont pris des engagements importants en faveur de l’éducation universelle. Parmi les 34 pays enquêtés par Afrobarometer en 2016/2018, 33 ont rendu la scolarité obligatoire (pour des durées de cinq à 11 ans), et 33 garantissent la gratuité de l’enseignement primaire. (Voir le Tableau A.2 en annexe pour plus de détails.) Nombreux sont les gouvernements qui consacrent également une partie considérable de leur budget annuel à l’amélioration du système éducatif. En Côte d’Ivoire, en Eswatini, au Ghana, au Malawi, au Sénégal, en Tunisie, et au Zimbabwe, par exemple, plus de 25% des dépenses publiques totales sont consacrées au secteur de l’éducation.
Niveau d’instruction
En moyenne, sur les 34 pays enquêtés par Afrobarometer, 20% des répondants ont affirmé ne pas avoir eu de scolarité formelle, 28% ont fréquenté ou achevé l’école primaire, 37% ont fréquenté ou achevé l’école secondaire, et 15% ont fait des études supérieures.
De surcroît, de nombreux élèves africains fréquentent des écoles qui ne sont pas suffisamment équipées, ce qui rend l’environnement d’apprentissage difficile. Par exemple, plus de la moitié des écoles en Afrique subsaharienne n’ont pas accès à des infrastructures de base comme l’eau potable, des équipements destinés au lavage des mains, l’Internet, ou des ordinateurs
Nous observons d’autres signes de progrès dans les niveaux de scolarisation atteints par différents groupes d’âge. Tandis que quatre sur 10 répondants âgés de plus de 65 ans (40%) en 2016/2018 ont déclaré ne pas avoir fait d’études formelles, cette proportion chute à 13% chez les 18-25 ans. À l’inverse, la fréquence des qualifications post-secondaires double et celle des qualifications secondaires triple dans la comparaison entre les plus âgés et les plus jeunes.
Évaluations des performances gouvernementales dans le secteur de l’éducation
Les évaluations ont varié considérablement d’un pays à l’autre (Figure 10). Plus de huit citoyens sur 10 en eSwatini (81%) et au Ghana (80%) ont approuvé le traitement réservé par le gouvernement au secteur de l’éducation, mais moins de deux sur 10 étaient de cet avis au Maroc (18%) et au Gabon (15%). Dix des 12 pays où la moitié ou moins des répondants ont attribué de bonnes notes au gouvernement se situent en Afrique de l’Ouest ou du Nord.
Dans certains cas, les évaluations des performances gouvernementales semblent correspondre au niveau d’instruction des citoyens : Au Niger, en Guinée, et au Sénégal, où une proportion importante de la population n’ont pas eu de scolarité formelle, moins de la moitié des citoyens ont approuvé les efforts du gouvernement en matière d’éducation. Mais au Gabon, où presque la totalité des citoyens sont allés à l’école, le gouvernement a reçu l’appréciation la moins favorable de tous les pays enquêtés (15% d’approbation), tandis qu’au Burkina Faso, où 64% des citoyens n’ont jamais été à l’école, 62% ont approuvé les performances gouvernementales en matière d’éducation.
Disponibilité des infrastructures
En moyenne, à travers 34 pays, 85% des populations vivent à distance de marche d’une école. Les pays les moins bien desservis sont la Gambie (56%), la Namibie (69%), et la Tanzanie (69%). Les zones rurales (82%) sont quelque peu à la traîne derrière les villes (89%), même si à Madagascar, à Maurice, au Cabo Verde, au Lesotho, et en Afrique du Sud, les écoles sont quelque peu plus présentes en zone rurale.
Au Gabon, au Libéria, et en Namibie, on observe des écarts importants (22-28 points de pourcentage) en faveur des zones urbaines pour ce qui est de la présence d’écoles. Dans les zones rurales, la présence d’une école à distance de marche semble ne rien changer à l’évaluation des performances gouvernementales (56% d’approbation lorsqu’il y a une école et 55% lorsqu’il n’y en a pas). Contre toute attente, dans les zones urbaines, les évaluations des performances étaient modérément plus élevées dans les localités où il n’y a pas d’école (56% contre 51%). En tout état de cause, il semble que la seule présence d’installations scolaires soit un piètre indicateur de l’évaluation citoyenne des performances des pouvoirs publics en matière d’éducation.
Accessibilité des services scolaires publics
En moyenne, à travers 34 pays, un peu plus d’un tiers (36%) des répondants à l’enquête ont affirmé avoir été en contact avec une école publique au cours des 12 mois précédents. Par pays, les taux de contact varient de seulement 14% en Tunisie à 53% à São Tomé et Príncipe et 55% au Kenya. Parmi les répondants qui ont été en contact avec une école publique, plus de sept sur 10 (72%) ont affirmé qu’il leur était « facile » ou « très facile » d’obtenir les services éducatifs dont ils avaient besoin, alors que 28% ont éprouvé des difficultés. Environ neuf répondants sur 10 ont affirmé que cela leur avait été facile à Maurice (90%) et au Niger (88%).
Dans certains cas, les évaluations des performances gouvernementales semblent correspondre au niveau d’instruction des citoyens : Au Niger, en Guinée, et au Sénégal, où une proportion importante de la population n’ont pas eu de scolarité formelle, moins de la moitié des citoyens ont approuvé les efforts du gouvernement en matière d’éducation. Mais au Gabon, où presque la totalité des citoyens sont allés à l’école, le gouvernement a reçu l’appréciation la moins favorable de tous les pays enquêtés (15% d’approbation), tandis qu’au Burkina Faso, où 64% des citoyens n’ont jamais été à l’école, 62% ont approuvé les performances gouvernementales en matière d’éducation
Le Gabon est le seul pays où plus de la moitié des répondants ont éprouvé des difficultés (51%). Environ un sur sept (15%) des répondants ayant eu des contacts avec une école publique ont affirmé avoir dû « verser des pots-de-vin, faire un cadeau, ou rendre un service » à un enseignant ou à un responsable scolaire pour obtenir les services dont ils avaient besoin. Au Malawi, une proportion remarquable de 57% ont affirmé avoir dû verser des pots-de-vin, suivie par 40% au Libéria, 33% en Sierra Leone, et 32% au Nigéria.
Le moindre petit pas compte : Impact à long terme de la démocratie
Nous mesurons les effets à long terme de la démocratie sur la base des évaluations de Freedom House (2019), qui remontent au début de la troisième vague de démocratisation en Afrique dans la dernière décennie du 20e siècle. Nous comptons plus précisément le nombre d’années pendant lesquelles un pays a fait partie des démocraties électorales et le comparons au niveau de satisfaction des citoyens quant à la performance gouvernementale en matière d’éducation.
Les résultats, présentés à la Figure 23, sont encourageants pour les citoyens résidant dans les démocraties électorales du continent. Plus un pays a été une démocratie électorale au cours du dernier quart de siècle, plus il est probable que ses citoyens soient satisfaits de la prestation des services de l’enseignement public.