Auteur : Groupe de travail régional sur l’éducation en situations d’urgence
Site de publication : GCPEA
Type de publication : Rapport de situation
Date de publication : Octobre 2021
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La recrudescence de la violence armée dans la région de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, au Burkina Faso, au Cameroun, en République centrafricaine, au Mali, au Niger et au Nigéria, a un impact dévastateur sur la survie, l’éducation, la protection et le développement des enfants. En plus de l’insécurité générale et de l’augmentation de la violence entraînant des déplacements massifs, les attaques et menaces délibérées contre les écoles, les enseignants et les élèves, à l’école ou sur le chemin de l’école, sont de plus en plus fréquentes, ce qui aggrave encore la situation des enfants et compromet leur avenir.
La Déclaration sur la Sécurité dans les Écoles (SSD), qui a été approuvé par la quasi-totalité des États d’Afrique de l’Ouest et centrale, donne aux pays l’opportunité d’exprimer leur soutien à la protection de l’éducation contre les attaques en période de conflit armé ; à l’importance de la poursuite de l’enseignement ; et à la mise en œuvre de mesures concrètes pour dissuader l’utilisation militaire des écoles.
Des attaques en constante augmentation
L’insécurité croissante dans la région de l’Afrique de l’Ouest et du Centre a entraîné une augmentation du nombre d’attaques contre des écoles par des groupes armés non étatiques (GANE) et des cas inquiétants d’écoles occupées par des forces militaires. Selon les données de la Coalition mondiale pour protéger l’éducation contre les attaques (GCPEA), le nombre d’attaques contre des écoles dans les six pays touchés par des conflits (Burkina Faso, Cameroun, Mali, Niger, Nigéria et République centrafricaine) a presque triplé de 2019 à 2020, passant de 303 à 802.
Dans de nombreuses régions d’Afrique de l’Ouest et du centre qui connaissent une hostilité accrue à l’égard de l’éducation, les écoles sont considérées comme un symbole de l’État que les GANE veulent abattre, ou comme un vecteur de la culture occidentale. Dans les États du Sahel central que sont le Burkina Faso, le Mali et le Niger, en 2019, des groupes armés ont commencé à menacer les enseignants qui utilisaient le programme d’enseignement laïc de l’État.
Un autre impact notable de la recrudescence de la violence armée sur l’accès à l’éducation est l’occupation ou l’utilisation des écoles par les parties au conflit : les écoles et les universités sont saisies pour servir de casernes, de bases ou de positions de tir. Au Burkina Faso, plusieurs rapports ont fait état de l’utilisation présumée de 10 écoles par les forces armées burkinabè, et de l’occupation présumée d’au moins cinq écoles par des GANE dans la région Centre Nord en 2019.
L’utilisation militaire des écoles augmente le risque que les bâtiments et les infrastructures scolaires soient endommagés ou détruits, que les fournitures scolaires et autres soient pillées, et que les élèves et le personnel enseignant aient trop peur de se rendre à l’école, augmentant ainsi la probabilité que l’éducation soit interrompue. A Boali, les environs de l’école ont été parsemés de mines terrestres et d’autres engins explosifs improvisés, ce qui rend impossible le retour des élèves à l’école.
Au-delà de la destruction des écoles
Au début de l’année 2021, près de 5 000 écoles étaient fermées dans les zones touchées au Burkina Faso, au Mali et au Niger, dans l’Extrême-Nord du Cameroun, dans la province du Lac au Tchad et dans les régions du Nord-Est du Nigéria, privant des centaines de milliers d’enfants d’éducation et les exposant à des risques accrus risque d’exploitation et d’abus.
La fermeture des écoles n’est pas la seule raison de la baisse de la fréquentation et de la scolarisation. Lorsque les écoles restent ouvertes, les enseignants, les élèves et leurs familles ont peur, vivent dans la crainte quotidienne d’être attaqués et kidnappés et préfèrent se retirer ou abandonner les écoles. Au Mali par exemple, entre 58% et 100% des écoles18, selon les régions, sont fermées non pas parce qu’elles ont été spécifiquement attaquées, mais plutôt par peur des attaques et des représailles.
Les attaques contre les écoles ont exacerbé les défis structurels existants en matière d’éducation pour tous (pauvreté, manque d’infrastructures scolaires, faible accès, nombre insuffisant d’enseignants formés) et, dans certains cas, ont remis en cause des décennies de progrès.
Recommandations aux gouvernements
Veiller à ce que des organes de décision et des mécanismes de coordination inclusifs et transparents soient mis en place et fonctionnent afin de mettre en œuvre la Déclaration sur la Sécurité dans les Écoles ; veiller à ce que les expériences, les opinions et l’expertise des enseignants et des élèves soient prises en compte. Par exemple, le Mali et le Nigéria, parmi d’autres pays, ont créé des comités nationaux chargés de guider les responsables dans l’application de la déclaration et de protéger les écoles ;
Veiller à ce que les attaques contre l’éducation fassent systématiquement l’objet d’une enquête et que les responsables soient poursuivis ;
Promouvoir et soutenir la protection et le bienêtre des enseignants, en particulier lorsqu’ils sont déployés dans des zones difficiles d’accès et touchées par des conflits, en reconnaissant l’impact des crises sur les enseignants, sur leur vie personnelle et sur leur capacité à faire leur travail, et en leur apportant un soutien complet aux niveaux individuel, scolaire, communautaire et national.